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Critiques de Pier Paolo Pasolini (115)
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Nouvelles romaines / Racconti Romani (édition..

Souvent, le réalisme littéraire est lié à la représentation du peuple dans le roman ou la nouvelle, au point que réalisme et sujet populaire sont devenus presque synonymes. La France a eu son Naturalisme, l'Italie son Vérisme, à peu près à la même époque, et dans la lignée des grands auteurs véristes, Pasolini a composé ses Nouvelles Romaines, textes brefs, peu narratifs, destinés le plus souvent à la presse romaine des années cinquante. Les nouvelles du recueil proposées ici en édition bilingue prennent place dans le quartier pauvre du Trastevere, et parfois dans quelques cités populaires au bord de la mer comme Terracina. L'auteur raconte peu, mais excelle à retracer une atmosphère, une silhouette, une relation humaine, et le destin de ce sous-prolétariat romain, dont les membres naissent déjà marqués et dont les vies sont soumises à d'implacables déterminismes économiques et sociaux : la rareté des événements et des surprises narratives s'explique par là.

*

L'édition bilingue aidera le lecteur à mesurer à quel point l'italien littéraire est une langue difficile, d'autant plus ardue que l'auteur y insère de nombreux passages en dialecte romain (romanesco), dialogués ou non. C'est un élément qui différencie le réalisme italien de son parallèle français : l'Italie a toujours eu deux niveaux de langue (diglossie), la langue officielle écrite et établie depuis Dante et Pétrarque, et les multiples dialectes locaux auxquels le cinéma de Pasolini a habitué nos oreilles. Il y a toujours eu une riche littérature dialectale en Italie, à l'opposé de la France. Cette dimension double de la langue ne passe bien évidemment pas en français, où la séparation entre langue officielle et langues locales était doublée d'une barrière de classes infrangible, tandis que la situation littéraire et linguistique en Italie a toujours été plus souple. Pasolini nous échappe donc, à nous Français, par les jeux subtils de sa prose à travers tous les étages de la langue.

*

Enfin, qui dit réalisme pensera, à l'école de Zola ou mieux, de certains auteurs du Nouveau Roman, objectivité et distance du sujet par rapport à son objet. Rien n'irait plus mal à Pasolini, nouvelliste réaliste et lyrique, dont les récits vibrent d'un amour profond et secret pour les gens et les lieux qu'il décrit. Ce lyrisme discret mais prenant, joint à la brièveté des textes et au cadre urbain, m'ont fait penser plus d'une fois à certains petits poèmes en prose du Spleen de Paris de Baudelaire, à quelques pages de prose poétique de Huysmans ou de Jacques Réda.
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Lettres luthériennes : Petit traité pédagogique

J'ai eu l'impression de lire les aveux en forme de testament d'un homme orgueilleux sur ses pensées et sur ce qu'il croit avoir compris du monde. Le ton, plutôt pédant, n'aide pas à accorder beaucoup de foi à toutes ces paroles puisque je dirais, à l'instar des gardiens qui tapent le carton dans la bibliothèque dans le film "Seven" et à qui l'inspecteur reproche de ne pas profiter de tout ce que leur offre cet univers préférant le jeu de cartes: "On sait ce qu'il faut savoir, nous : "Je sais que je ne sais rien".
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L'odeur de l'Inde

J'ai lu le livre de Pasolini après une immersion de deux mois en Inde et j'y ai retrouvé une foule de sensations et experiences vécues.



Ce livre est un voyage à lui tout seul et ouvrir ses pages nous donne effectivemment une bouffée de l'Odeur de l'Inde.



Excellente lecture courte



Axel Roques




Lien : http://axel-roques.iggybook...
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Poésie en forme de rose

Toujours très difficile, l'art de Pasolini, que ce soit sa littérature, ou son cinéma. Difficile de l'apprécier sans connaitre un tant soit peu son attachement au marxisme dans le contexte de l'Italie des années 50 et 60. Beaucoup de violence en Italie à cette époque, prise en étau entre l'URSS et la CIA.

La poésie de Pasolini est donc très politique. Il ne cesse de revenir à son ideal marxiste. Il nous rattache sans arrêt a la réalite de l'individu manipulé par une société qui le deshumanise. C'est un message auquel j'adhere complètement et qui se révèle d'une actualité brûlante. Pour autant, la description des jeunes désoeuvrés qui emaille son oeuvre, littéraire et cinématographique finit par m'agacer : On ressent a chaque ligne son attirance homosexuelle pesante. En tant que lecteur, cela m'intéresse peu.

Par ailleurs, il se pose bien souvent en victime, en incompris, notamment au cours de ses interviews qu'il relate un peu trop longuement à mon goût.

D'ailleurs, comment aurait-il pu être compris ? Il ne le serait pas plus aujourd'hui. Je ne peux m'empêcher de revenir à son cinéma et plus précisemment à son dernier film " Salo ou les 120 jours de sodome" ou sa re-interprêtation de Sade n'est qu'une immense et profonde critique du capitalisme qui transforme les individus en objets, pour le plaisir d'un petit nombre. Pasolini, c'est avant tout cela : mettre l'individu au premier plan pour ce qu'il est, avec amour et respect. C'est ce qui ressort de ce recueil "poesies en forme de rose".

Donc une poésie assez hermétique mais absolument nécessaire.

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La Longue route de sable

Un petit livre bref, nerveux, un regard à la fois ébloui par la beauté et lucide, un style non moins nerveux et concis, tel est ce récit de voyage le long des plages d'Italie, depuis la frontière française jusqu'à la frontière yougoslave, en passant par le point le plus méridional de la Sicile. On n'y voit que des plages, certes, puisqu'il s'agit d'un tour de l'Italie par ses côtes, mais l'extrême sensualité du voyageur, son parti-pris de s'en tenir aux choses et aux surfaces, épargne au lecteur toute longueur et toute répétition. Le voyageur repousse toute érudition et toute connaissance extérieure, il se veut presque totalement dépourvu de profondeur temporelle : il se concentre sur l'été, le soleil, les plages, les paysages qu'on y voit et les gens que l'on y rencontre. Une lecture heureuse, qui rappellerait, sans les effets de style, les "Noces" ou "L'été" d'Albert Camus.
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Théorème

Effectivement ce livre est inclassable... On y retrouve un thème fondamental dans la critique pasolinienne du monde moderne: la bourgeoisie, le petit peuple et leur rapport au divin. A lire tranquillement pour s'imprégner de la poésie de Pasolini qui nous immerge dans une ambiance unique.
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Dialogues en public

Pier Pasolini tint la rubrique des lecteurs de l'hebdomadaire communiste Vie Nuove de 1960 à 1965.

Il y répondit à des lettres écrites par des mineurs, des mécaniciens, des intellectuels, des jeunes catholiques, des communistes, des jeunes filles et des mères de famille, des jeunes hommes préoccupés par la politique, le cinéma, la tentative de suicide de Brigitte Bardot ou d'autres encore ne trouvant pas de fiancée. Certains lui font une demande concrète d'envoi d'un peu d'argent ou d'un magnétophone pour consigner leurs idées.



C'est dire si le prisme est large.



Pourquoi me représentai-je Pasolini comme un intellectuel aride, un militant communiste paradoxalement empreint de religiosité, un être austère et peu abordable ?



Le dépouillement de ses films sans doute... leur violence souvent...



J’aurais été influencée par sa réputation de penseur sans concession…



La gentillesse et la simplicité avec laquelle Pier Pasolini répond à ses interlocuteurs quelqu'ils soient forcent l'admiration : aucun des sujets qui intéressent autrui ne le laisse indifférent, aucune question n'est trop minuscule pour lui dès lors qu'elle se pose à autrui.



Il ne profite pas de sa renommée d'écrivain ou de cinéaste pour prendre l'avantage, il n'est ni un gourou ni un sachant ; il ne donne pas de conseils surplombants mais entame de vrais dialogues en prolongeant des pistes de réflexion respectueuses de la personnalité de chacun.



Pour autant il ne se laisse pas "casser les pieds" par les agressifs, les pontifiants, les raisonneurs fumeux ou arrogants : il sait alors se montrer ferme, précis et apporter une réponse appropriée aux ricanants et autres embrouilleurs.



Pier Pasolini est un communiste athée. Mais il est respectueux des textes anciens et de leur message, à condition qu'ils soient considérés dans leur historicité. C'est pourquoi il adhère pleinement à l'idéal d'amour évangélique dont le communisme n'est pour lui que la forme actualisée. Et s'il hait la bourgeoisie et le fascisme en tant qu'exploiteurs des hommes et aliénateurs de leur liberté, il ne hait pas les hommes eux-mêmes, leurs croyances et leurs espoirs.



Ces lettres de lecteurs et leurs réponses sont de haute teneur philosophique et morale, et de haute tenue aussi.



Elles ont été publiés en janvier 2023 par les éditions Corti.
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Écrits corsaires

Pasolini développe ici sa pensée concernant la société de consommation qu'il considère comme l'idéologie totalitaire par excellence. Il aborde le fascisme et l'anti-fascisme modernes démontrant que ces luttes, qui opposent des personnes appartenant au même monde, créent des oppositions stériles dont la seule fonction est de neutraliser notre pensée critique. Les intellectuels modernes ne sont pas épargnés... Il développe également une analyse de l'évolution de l'Eglise en tant que structure de pouvoir, de la religion catholique en tant qu'idéologie du peuple, de l'histoire de l'Italie pendant les années de plomb, et des critiques, certes provocatrices mais construites, concernant l'avortement, le divorce, l'homosexualité. Cocktail explosif! J'ai apprécié cet essai, bien que je n'adhère pas à tout son contenu, Pasolini est un intellectuel qui me semble "libre" de tout dogme et bien au dessus des clivages bien définis de notre époque.
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L'odeur de l'Inde

* Pier Paolo Pasolini est un auteur, philosophie, poète et journaliste italien, né en 1922, et considéré comme l’un des plus grands intellectuels de son époque. Décadent, homosexuel, outrageux et révolté, sa vie est un amas de scandales et de provocations, aussi fous que l’est son génie. En 1975, il est froidement assassiné sur une plage par un jeune roumain, et encore aujourd’hui, les raisons de sa mort restent un mystère.



* Ici, Pasolini raconte son voyage en Inde avec ses camarades Alberto Moravia et Elsa Morante. Plus que tout, c’est l’odeur de l’Inde qui le marque et qui constitue ce récit : une odeur de rue, de corps qui dorment à même le sol, l’odeur du Gange noyé de ses morts et dans lesquels se lavent les vivants, symbole suprême de l’ambivalence du pays, alors sous l’influence des Britanniques.



* Mais l’Inde ce sont aussi des jeunes hommes, leur peau brune et leurs sourires éblouissants, une sorte de foi inaltérable, une joie indéfectible. Le sourire comme étendard de l’optimisme, du changement possible. L’Inde est multiple, complexe, les religions s’y mêlent, les castes aussi ; ancrés au plus profond de ce qui la définit, saura-t-elle surpasser cette essence dans laquelle elle est engluée ? Il semblerait que non.



* L’un des passages qui m’a le plus marquée est celui sur la manière indienne de dire « oui », décrite par l’auteur. Pas un hochement horizontal, ni même vertical ; un dodelinement, qui pourrait dire oui comme il pourrait dire non, une sorte de résilience intrinsèque. La métaphore d’un peuple aux mille visages, aux mille richesses, englouti par sa misère.
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Qui je suis

"Qui je suis" est un texte inachevé composé en vers libres et écrit en 1966. Il a été traduit, préfacé et annoté par Jean-Pierre Milelli.



Pasolini y évoque son enfance, la mort de son frère Guido engagé dans le parti "Action", ses rapports avec son père, combattant fasciste, sa vocation de poète communiste, bientôt supplantée par l'expression cinématographique. Il brosse le scénario de ses futurs films, dont "Théorème" qui fit un scandale à sa sortie en 1968.



Son imagerie mentale est un mélange de révolte contre ses origines bourgeoises, de symbolique religieuse puissamment charnelle et d'érotisation des relations père/fils : la figure du père est évoquée comme ennemie du fils, envoyé par son géniteur dans les charniers des guerres ; le fils, dans sa volonté de vivre et de préparer un monde nouveau plus juste, doit arracher à son père le pouvoir, et il le fait au moyen de son charisme sexuel.



Que les générations des pères sacrifient celles des fils, voilà une idée familière résultant de l'observation du déroulement des guerres : mais celle de la destruction érotique du père par le fils est une symbolique plus insolite. Pourtant si le Père représente bien l'ancien monde mortifère et ses valeurs bourgeoises, on conçoit que les forces nécessaires pour détruire sa nuisance criminelle soient qualifiées d'"érotiques". Car le mécanisme de renversement des aînés repose sur l'action de la "libido", prise comme synonyme d'érotisme. L'érotisme n'est autre que la force vitale d'affirmation de la vie face à la vieille idéologie "fasciste" qui fait des jeunes hommes et femmes des morts vivants et même des morts tout court.



L'écroulement des valeurs du père est bien représentée dans le film "Théorème", dont Pasolini ébauche le scénario à la fin de son poème : la visite d'un ange à la fois pur et démoniaque, mais atrocement séduisant, y vient à bout de tout l'édifice bourgeois et conservateur.





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Une amitié poétique

« Qu'est-ce qui rassemble ces deux hommes ? Une passion pour les langues rares ou oubliées ravivant des particularités linguistiques orales. Ces dialectes sont attachés aux paysages et à l'innocence des paroles populaires. Avant de devenir cet immense cinéaste du tragique et de la beauté provocante, Pasolini prit d'abord un chemin littéraire dans lequel la poésie dialectale fut, comme pour Biagio Marin, une expérience primitive ancrée dans le présent absolu. C'est à Casarsa, le village natal de sa mère, entre Udine et Venise, qu'il découvrit le dialecte frioulan en entendant, un matin ensoleillé, le mot « rosada » (« rugiada » en italien, « rosée ») prononcé par un jeune paysan. Bouleversé par « la pointe expressive de sa vivacité orale », Pasolini coucha immédiatement ce mot sur le papier, certain que « pendant tous les siècles de son utilisation au Frioul (…), il avait été toujours et seulement un son » Amaury da Cuhna
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Les Ragazzi

Les Ragazzi se déroule dans les années suivant la dernière guerre, à Rome. Oubliez la carte postale, le Colisée, le Forum Romain, la Place Navone, la Place d'Espagne et tant d'autres monuments ; ils sont mentionnés mais comme pour contraster avec le décor de l'histoire. Les "gamins" donc, ont pour cadre les confins de la ville éternelle, et sont les personnages du récit. Ces lieux sont comme les excréments d'un organisme vivant. Usines polluantes, friches industrielles, montagnes de détritus, terrains vagues envahis d'herbes folles, enchevêtrement de métaux rouillés, maisons inachevées, logement de fortunes, taudis, routes défoncées. Les gosses sont les rejetons du sous prolétariat, complètement laissés à eux-mêmes, haves, pouilleux, morveux, vêtus de haillons. Leurs mères, accablées de tâches ménagères, gardent les plus jeunes à la maison, servent de défouloir aux maris chômeurs et alcooliques. Rien n'incline les petits vagabonds à rejoindre "le foyer", ils n'y trouvent en guise d'attention, que les récriminations de leur génitrice et les paires de baffes du père. Ainsi nos ragazzi, vieillis avant l'âge, se débrouillent pour survivre et errent en bande. Larcins, combines, déprédations, menus travaux, entraide, tout est bon pour faire taire leur ventre qui crie famine. Même s'ils jouent, se roulent dans la poussière, s'ébattent dans la boue, se talochent, se baigne dans le Tibre qui ressemble plus à un cloaque qu'à un fleuve, ils sont à l'affut de la moindre opportunité, quitte à jouer les chiffonniers ou trainer sur plusieurs kilomètres des métaux pour gratter quelques pièces.



La pauvreté n'est pas une honte. On peut garder sa dignité, n'avoir qu'un pantalon, qu'une chemise, qu'une paire de chaussures mêmes usés et les maintenir propres. Que sépare ces âmes des pourceaux ? le langage articulé certes, mais même l'innocence de leur âge ils l'ont perdu. C'est tellement répugnant qu'on a du mal à éprouver de l'empathie, une réaction de rejet naturelle prend le dessus, pourtant ce ne sont que des victimes. Comme un clochard rentrant dans votre bus, vous pouvez éprouver de la pitié pour lui mais c'est le remugle qui vous frappe tout d'abord, Bien des livres abordent la pauvreté de l'Inde et de l'Afrique. Mais cette misère à quelques kilomètres des splendeurs de Rome c'est inconcevable. L'usage de l'argot rend l'expérience plus réaliste, mais vu que la traduction date de 1958, le recours au dictionnaire s'impose. C'est très certainement une des oeuvres les plus dérangeantes et atroces que j'ai lu. Non Passolini n'était pas qu'un réalisateur de premier plan, c'était aussi un grand écrivain.
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Qui je suis

Qui je suis est à la fois une autobiographie et de la poésie tant les phrases de Pasolini brillent de leur beauté. Pasolini nous décrit ses parents, sa région, son engagement poétique, politique, son amour de la vie, ses désirs, ses luttes. Il se définit comme un petit bourgeois, et nous raconte comment il est devenu communiste. Il nous parle également des prémices de son expérience cinématographique. Ce texte inédit a été écrit en 1966 à New York. La fin est magnifique sur ses désirs les plus profonds.
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Pétrole

Cercles capitalistes, progressistes, de l’Enfer, ample réflexion, dont il ne reste que des notes, sur les récits, la façon dont les construire à partir de citations et de pastiches, d’emprunts et de collages ; récit renseigné aussi sur les magouilles mafieuses, étatiques, d’une compagnie pétrolière italienne, récit simultané des mythes et des scissions, des interdits et tabous prétendument levés par une émancipation dont Pasolini ne cesse d’interroger le progrès. Ultime œuvre de Pasolini, Pétrole est un de ses romans inépuisable, résistant toujours à toute interprétation unitaire, où l’auteur développe sa conception de l’art du roman, de la politique, du fascisme comme de l’intellectuel de gauche. Un roman total dont la fragmentation, l’incertitude sur son achèvement, reste l’horizon le moins imparfait.
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Pier Paolo Pasolini,écrits sur cinéma

Pasolini c'est un cas unique dans l'histoire du cinéma . Trublion subversif , il à laissé une oeuvre extraordinaire . Cet ouvrage est plus que pertinent pour comprendre d'ou il vient . Des critiques il y en a beaucoup , peu présentent un intéret véritable , c'est pourquoi découvrir le regard de Pasolini est important . Et on compléte aussi la découverte de l'oeuvre remaquable de cet homme inclassable .
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Théorème

Pendant plusieurs jours, une riche famille milanaise accueille dans sa demeure un mystérieux visiteur. Ange ou démon, le jeune homme disparaitra comme il est apparu, laissant derrière lui le père, la mère, le fils, la fille et la domestique, troublés dans leur chair et en proie à une désolation intérieure.



Pasolini a écrit ce livre inclassable parallèlement à la création de son film du même nom. Il ne s'agit pas d'un scénario (le texte ne comprend pas de dialogues), mais les courts chapitres se lisent comme on regarde les séquences d'un film. Dès le début, l'auteur interpelle le lecteur en posant le décor et les personnages, de manière presque télégraphique. Puis, les descriptions très visuelles et sensorielles s'enchaînent au coeur de l'intrigue, entremêlant malaise et beauté. Pour n'en citer qu'une, la découverte du père de son jardin au lever du jour est sublime.



J'ai beaucoup aimé ce roman-parabole qui critique la bourgeoisie, sur fond de sexe et de religion. Il faut maintenant que je vois le film.
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Une vie violente

Si proche de la Rome des monuments antiques et du Tibre, le quartier de Pietralata, autour de la rivière de l'Aniene, est l'image d'une Italie populaire et pouilleuse encore marquée par l'immédiat après-guerre. Prenant pour personnage central Tommaso Puzzilli, Pier Paolo Pasolini décrit, dans une langue qu'il a voulue la plus proche de la réalité possible, la vie et la mort d'un jeune homme marquées par la pauvreté, la violence et l'irrépressible passion de vivre. Moderne par la langue, par le choix des personnages, le roman de Pasolini est aussi puissamment moral, se rapprochant en cela du roman du dix-neuvième siècle. Tommaso, l'enfant pauvre, devient par sa seule rage un vitellono dont les mérites égalent ceux des autres. Mais la prison puis la maladie lui donneront une profondeur que ses proches amis n'approchent même pas. Son destin, ainsi, colle à celui d'une Italie orgueilleuse, belle et terrible à la fois qui, au carrefour du souvenir du fascisme et de la tentation du communisme, caresse l'espoir d'une vie meilleure.



Tommaso est d'abord un enfant qui passe ses journées dehors, à courir après des copains qui se montrent tantôt conciliants, tantôt rudes. Le diminutif - Tommasino - prouve le caractère enfantin du personnage. Sans cesse derrière Lello, qui le repousse souvent, son personnage est déjà marqué par une rage certaine : manière de montrer qu'il peut jurer et se conduire, lui aussi, comme un homme, manière aussi d'exécrer ce que les autres semblent penser de lui, à savoir qu'il est comme un boulet à leurs pieds, qu'ils aiment bien mais qu'ils traînent. Rapidement, les bêtises deviennent des délits, voire des crimes, si l'imagination nous autorise à penser cela. Car, si le vol par la ruse ou à l'arraché est décrit - lors de la virée nocturne, à bord d'une Fiat 1100, volée elle aussi, dans les stations services de la banlieue romaine -, on ne sait si le passage à tabac d'un pompiste conduit à sa mort. Pasolini le laisse là, au bord du chemin de son roman, et nous lecteurs suivons la jeunesse délinquante, embarqués dans sa quête d'argent facile. La contrainte, la confrontation physique, la menace font partie de la vie de Tommaso et de ses amis. Régulièrement, cela est justifié par la quête d'argent. Car il est indispensable pour flâner, se montrer, payer le café aux compères, sortir, impressionner une fille ou l'emmener au cinéma. Pourtant, ces actes demeurent impunis. Si Tommaso va en prison, c'est parce que la violence s'est imposée à lui, tandis qu'il désirait seulement que l'un de ses amis allât chanter la sérénade à Irène, une jeune fille dont Tommaso s'est entiché. De la prison, Pasolini ne parle presque pas. Elle est une parenthèse obligatoire dans le parcours de Tommaso, mais elle ne le change pas. D'ailleurs, lorsque Tommaso se présente à ses amis de son retour de prison, ceux-ci ne le célèbrent que très modérément : l'événement n'est pas si important, car rien n'a vraiment changé dans leurs vies quotidiennes.



La violence du titre n'est pas seulement exprimée en actes. Elle est une part intime de ces jeunes hommes, en même temps qu'elle est omniprésente dans leur environnement. L'amour lui-même est violent, comme si rien ne pouvait échapper à cette emprise. Dénué de tout confort matériel et spirituel, Tommaso a pour lui une rage de vivre, qui lui fait vouloir tout avoir, tout de suite. Cette rage s'exprime y compris dans les rapports que l'on supposerait plus apaisés. Ainsi avec Irène, sur laquelle Tommaso jette son dévolu car il pense que, dotée d'un physique ordinaire, elle ne le rejettera pas. Lorsqu'il l'invite au cinéma, il en profite pour lui imposer des caresses qu'elle se résigne à accepter. L'amour et le sexe sont contaminés. D'une certaine manière, la jouissance de l'un et de l'autre fait partie de l'attirail de tout bon vitellono. N'est pas un homme celui qui n'impose pas son désir aux autres. Il faut dire aussi que le sexe est une autre manière d'obtenir de l'argent, notamment auprès d'hommes plus âgés, homosexuels, tels l'instituteur, les hommes que l'on croise aux pissotières ou au cinéma.



Mais si Tommaso est un délinquant détestable en bien des points, il est aussi le fruit d'une société qui, dix ans après la fin de la guerre, suscite toujours des espoirs qu'elle ne satisfait pas. Pietralata est, moins qu'un quartier, un assemblement informe de baraques de bois et de tôles où s'entassent de pauvres familles venues des environs de Rome et des provinces du sud. Le café, où s'entasse la marmaille turbulente, est la seule animation du quartier. Les routes sont des chemins de terre que la pluie transforme en torrents de boue. Dans de telles conditions, les deux petits frères de Tommaso décèdent de maladie et d'accident. Sans doute ne sont-ils pas les seuls à être victimes de leur environnement. A sa sortie de prison, Tommaso a la bonne surprise de découvrir que ses parents ont déménagé dans les nouveaux immeubles construits une organisation gouvernementale. La reconstruction est une œuvre lente et inégale ; c'est d'ailleurs dans le bidonville de Pietralata qu'aura lieu la tragédie finale. En liant la misère sociale à la délinquance d'une jeunesse désœuvrée, Pasolini dessine le portrait inquiétant d'une Italie en plein chantier urbain, social et politique. L'ère fasciste n'est finalement pas si lointaine, et pour plusieurs personnages, la figure de Mussolini représente toujours la fierté nationale et, malgré la défaite, une époque dorée. La guerre a laissé des cicatrices : ce sont les ruines, ce sont aussi les souvenirs de proches assassinés par des factions politiques rivales. Ainsi Lello qui hurle, en pleine nuit, sa colère quant à son père assassiné par les communistes. Le communisme, justement, est une force qui compte dans le nouveau paysage politique italien. Tommaso, après son expérience au sanatorium durant laquelle il participe activement à une grève et à la résistance contre les forces de police, adhère justement au parti. Cet engagement participe aussi de la rédemption de Tommaso.



Le livre de Pasolini, à l'instar des grandes œuvres littéraires naturalistes, possède ainsi une puissante dimension morale. Enfant perdu sur le chemin de la violence, enfant perdu par son obsession de reconnaissance sociale, Tommaso se place, de par ses actes, en dehors des lois et de la morale sociale. Mais, plus que la prison, plus que l'emploi que Tommaso trouve au marché, plus encore que le projet de fiançailles avec Irène, c'est la maladie qui met à l'épreuve le corps et l'âme de Tommaso. Tuberculeux, le jeune homme fait preuve de courage lors de la grève du sanatorium, pendant laquelle il cache des hommes recherchés par la police. Le déluge final revêt l'aspect d'une épreuve biblique. Les éléments déchaînés, le danger pour les habitants démunis ainsi que pour Tommaso lui-même, l'incapacité des pompiers à porter secours démontrent que la rédemption de Tommaso est totale. Égaré, l'enfant qui représente une certaine Italie prouve que le pays peut se reconstruire, y compris moralement.



La force du roman de Pasolini tient enfin, évidemment, de la langue utilisée. Les dialogues se veulent le plus proche possible du parler populaire romain, avec des constructions grammaticales et syntaxicales à la fois très incorrectes et très vivantes. Ce souci de restitution de l'oralité contribue naturellement au réalisme de l'œuvre, rapprochant en cela le roman de Pasolini des œuvres cinématographiques de l'immédiat après-guerre italien. Si la lecture des passages argotiques peut se révéler ardue, elles donnent, par la violence même des mots usités, une dimension très moderne aux personnages, une profondeur vitale rare dans la littérature. Les dialogues sont empreints de la rage de ces jeunes hommes que la vie maltraite, et ils usent du seul langage dont ils ont l'absolue maîtrise : celui de la violence. Dans une société en ruine, l'homme retourne à son état de nature, cher aux philosophes des Lumières. Ce qui distingue alors l'homme de l'animal a pour nom la morale. Tommaso, figure quasi christique, en meurt pour le prouver.
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Médée

J'aime beaucoup Pier Paolo Pasolini mais j'avoue que sa « Médée » ne m'a pas entièrement séduite même si elle est interprétée au cinéma par Maria Callas. D'ailleurs, c'est peut-être pour cette raison car la cantatrice est célèbre et Pasolini l'a entourée d'inconnus, souvent non professionnels, comme il en a l'habitude (ce que je trouve bien et donne un côté authentique). Il a été influencé par Rossellini, le producteur, pour la faire jouer. Je trouve qu'elle n'est pas à sa place, elle rayonne beaucoup trop par rapport à Jason et on se demande comment elle peut sacrifier sa patrie sans hésiter en volant la Toison d'Or pour lui.

Cette toison est le symbole de l'absolu et de la pérennité du règne de l'homme d'après le scénario et Jason doit la conquérir et la rapporter à Pélias, son oncle, pour qu'il se résigne à lui céder le royaume usurpé.

Même si l'on retrouve chez Pasolini la trame de la tragédie d'Euripide il y a une partie assez longue sur les rites de purifications et sacrifices humains en Colchide où vit Médée. J'ai cru que c'était la reine mais c'est la fille du roi car elle est un peu âgée pour le rôle même si Maria Callas est extrêmement belle.

Il faut dire aussi qu'il y a beaucoup de plans fixes sans dialogue dans le film alors cela n'aide pas à comprendre les subtilités souhaitées par Pasolini. Je pense donc avoir fait une erreur en regardant le film avant de lire le livre.

Je me suis donc procuré ce livre pour mieux comprendre les intentions de l'auteur car je pensais qu'il s'agissait du scénario. En fait, c'est un recueil en quatre parties. La première est très intéressante puisqu'il s'agit d'un entretien avec Maria Callas qui n'a rien d'une diva et qui semble d'une grande simplicité dans son rapport aux autres (sauf avec les paparazzis et c'est normal). Il y a ensuite, non pas le scénario mais une trame intitulée Visions de la Médée de Pasolini. le problème est que cette partie est beaucoup plus détaillée que ce que j'ai vu dans le film. Il y a ensuite les dialogues en français que j'ai bien retrouvés mais cette fois-ci sans explications du contexte. La dernière partie concerne les poèmes que Pasolini a écrits durant le tournage mais je dois dire que je n'ai pas vu le rapport avec Médée, femme qui se sacrifie par vengeance.

Je ne peux pas dire que ce livre n'est pas bien mais j'aurai aimé être plus touchée.





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Poésies, 1953-1964

Pier Paolo Pasolini (1921-1975) est resté très célèbre en raison de son activité d'auteur de films inoubliables. Mais il a été aussi un romancier, un journaliste, un poète. Encore jeune, il a commencé par écrire des poésies - vite remarquées - en dialecte frioulan. Le présent recueil, correspondant à la période 1953-1964, utilise la langue italienne. Ce livre comporte trois parties distinctes: "Les cendres de Gramsci", "La religion de notre temps" et "Poésie en forme de rose".



Pasolini était un être très complexe: créateur génial, esthète et en même temps fasciné par le prolétariat, situé à gauche sur l'échiquier politique mais jamais aligné sur les idéologies figées, homosexuel et parfois mis au ban de la société. Ses poésies sont à son image: audacieuses, sincères et remplies de contradictions, libres dans la forme et dans le fond. Je me suis concentré sur la première partie, mais j'ai parcouru aussi le reste du recueil; j'ai noté que certains des poésies "en forme de rose" peuvent évoquer "Calligrammes" de G. Apollinaire. Cette lecture est pour moi une vraie découverte.

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Théorème

Un court et beau roman de Pasolini mettant en scène un Tartuffe moderne venant troubler la paisible vie d'une famille bourgeoise de Milan.
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Céleste ma planète

De quelle forme sont les tâches qu'à Céleste sur le corps ?

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