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Rosewater tome 3 sur 3
EAN : 9782290174241
416 pages
J'ai lu (11/03/2020)
4.16/5   22 notes
Résumé :
La vie dans la cité-État nouvellement indépendante de Rosewater n’est pas exactement celle que les citoyens attendaient. Les dettes contractées durant l’insurrection reviennent hanter le maire, Jack Jacques, et le Nigéria n’entend pas renoncer à la manne que représente la ville sans se battre. Mais une menace bien plus grave se profile, car les extraterrestres ne cachent plus leurs visées expansionnistes sur notre planète. Seuls Karoo, Bicycle Girl, Femi et quelques... >Voir plus
Que lire après Rosewater, tome 3 : RédemptionVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Une conclusion satisfaisante à cette trilogie afrofuturiste qui mêle avec brio beaucoup d'éléments disparates, mais qui n'évite pas de se prendre les pieds dans le tapis par moments.

Le tome 1 nous présentait un mystérieux dôme extraterrestre guérisseur, apparu au beau milieu du Nigeria, ainsi que la ville qui s'est constituée tout autour : Rosewater. Cette ville cherchait à proclamer son indépendance dans le tome 2, Insurrection, alors que le dôme menaçait de succomber d'une infection inconnue. Ici, le semblant d'équilibre trouvé à l'issue du tome 2 ne tarde pas à être rompu dans ce troisième tome, Rédemption. Faut-il sauver la ville de Rosewater ou sauver l'humanité tout entière?

Le principal problème de Rédemption, c'est qu'il ressemble beaucoup à Insurrection, tant dans sa construction en roman choral que dans les événements qu'il met en scène : le chaos qui survient dans la ville, les multiples personnages qui nouent des alliances inattendues pour s'en sortir, etc. On en vient à se dire que l'histoire aurait gagné à être élaguée pour se condenser en deux volumes au lieu de s'étirer en trilogie, d'autant plus que ce tome est aussi dense que les précédents. On avait déjà des pouvoirs psi, des extraterrestres, un réseau matriciel à base de champignons, des transferts de conscience et un robot qui passe le test de Turing, ajoutons à cela un peu de voyage dans le temps… ou pas, d'ailleurs. J'ai beaucoup aimé la manière dont tout est relié, mais la quantité totale d'informations était peut-être un peu au-delà de mon point de saturation.

J'ai toutefois l'impression d'avoir préféré ce troisième tome au deuxième. Peut-être parce qu'il parvient à boucler ses arcs narratifs et à offrir une conclusion tout à fait en accord avec les thèmes traités par l'auteur, et qui soulève un certain nombre de questions philosophiques et morales. le parallèle entre l'invasion extraterrestre et la colonisation de l'Afrique apparaît plus clairement, de même que la défense des personnes LGBTQ+ esquissée dans les deux premiers tomes.

Au vu de mon expérience avec cette trilogie, je suis assez curieuse d'aller lire cet auteur dans une forme plus courte et je m'attaquerai sans doute un jour aux Meurtres de Molly Southborne.
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Parvenant à une superbe intrication de sources et de motifs disjoints, un rusé sommet de l'afrofuturisme contemporain, et de la grande littérature spéculative endiablée.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2022/07/28/note-de-lecture-la-trilogie-rosewater-tade-thompson/

Dans ce Nigéria du futur plus ou moins proche, bouillonnant d'inventivité technologique et de corruption, de manoeuvres politiciennes et de polices publiques comme privées, de capitalisme débridé et de misère mal dissimulée, une ville-champignon s'est créée ex nihilo en quelques années : Rosewater. Pourquoi cette prolifération humaine d'abord anarchique, avant de devenir une véritable municipalité, à cet endroit ? C'est que sur le site d'apparence anodine, au bord d'une rivière, une gigantesque entité extra-terrestre d'abord repérée à Londres, d'où elle a été plus ou moins chassée à grandes dépenses d'explosifs pré-nucléaires, sans être le moins du monde entamée, est venue s'installer ici, en voyageant sous la croûte terrestre, déclenchant au passage quelques séismes. Et cette entité, désormais protégée par un dôme infranchissable, tout en poursuivant ses propres visées (longtemps résolument impénétrables aux esprits humains), dispense une fois par an une sorte d'aura soignant toutes les maladies, difformités ou blessures, provoquant ainsi un afflux de patients, riches ou pauvres, bien décidés à camper là toute l'année en attendant le miracle de ce roi thaumaturge incongru : Rosewater est née. Et les services secrets nigérians, entre autres, sont bien décidés à ne pas laisser cela hors de tout contrôle, malgré les difficultés apparemment insurmontables de la tâche.

Sur ces prémisses science-fictives d'emblée placées sous le signe de l'énorme, puissamment ramifié dès les premières pages dans un quotidien économique, social et politico-militaire foisonnant, Tade Thompson, Nigérian d'origine britannique revenu s'installer au pays à sept ans, en 1976, a construit en trois ans une trilogie de 1 400 pages, devenue presque instantanément l'un des grands emblèmes de l'afrofuturisme contemporain, et pas uniquement de cela.

Maniant avec adresse et inventivité le mélange de premier contact avec les extra-terrestres (en en secouant sans ménagement certaines des mythologies les mieux ancrées, comme ont su aussi le faire, différemment, par exemple Peter Watts ou Steven Erikson) et de grands desseins élaborés sur le temps long (voire très long) qui caractérisait déjà au premier chef les oeuvres science-fictives les plus marquantes d'Octavia Butler et de Doris Lessing, élaborant une fusion intime des motifs et des codes du cyberpunk et du techno-thriller d'espionnage, avec toute leur violence et leur éventuelle cruauté (sans la complaisance qui caractérisait trop souvent certains des précédents hybrides dans ce domaine, à l'image du « Carbone modifié » (2002) de Richard K. Morgan, par exemple), Tade Thompson a su concevoir un grand roman spéculatif, capable de plonger aussi bien dans les réalités africaines contemporaines superbement extrapolées, les mégalopoles, les relations tribales ou les structures symboliques de l'imaginaire étant ici tout sauf de simples éléments de décor (plusieurs critiques d'Afrique anglophone ont noté à quel point la culture yoruba irriguait discrètement l'ouvrage, notamment dans son onomastique), que dans les traumatismes toujours plus profonds que soupçonnés laissés par la guerre sécessionniste du Biafra, notamment (comme on l'évoquait récemment sur ce même blog à propos de la poésie de Christopher Okigbo – dont on trouvera parfois de curieux échos au long de « Rosewater » : il se joue souterrainement quelque chose de fort du côté de la danse des esprits, des ancêtres et de la transmission, jusque dans la trame multi-chronologique fiévreuse et rusée adoptée par l'auteur).

Capable de mobiliser sans effort apparent des univers virtuels de poche dignes du George Alec Effinger de « Gravité à la manque » et de ses suites, des virtuosités en matière de création de créatures qui n'ont rien à envier à celles du grand China Miéville de « Perdido Street Station » ou des « Scarifiés », une malice pour vivifier le traditionnel nigerian scam qui réjouirait la Lauren Beukes de « Zoo City », ou un sens de la mythologie du slum et de la zone qui rend honneur à ceux d'Andreï Tarkovski et de son « Stalker » comme de Neill Bloomkamp et de son « District 9 », Tade Thompson transforme le corpus mythologique issu d'Orphée et d'Eurydice pour en extraire un jeu global de stratégie dans lequel le Diplomacy débridé viendrait perturber la rationalité des échecs, où une pensée mycélium en pleine diffraction vient habiter successivement les points de vue adoptés pour la narration dans les trois volumes, permettant à d'ex-personnages secondaires ou fugitivement entrevus de venir prendre pleinement la lumière à leur tour.

Comme le dit joliment alors Abigail Nussbaum dans The Guardian : « Rosewater augmente notre compréhension de ce que peut faire la science-fiction », et cette puissance de feu intérieur est bien celle de la grande littérature.

Traduite en français en 2018, 2019 et 2020 par Henry-Luc Planchat chez J'ai Lu / Nouveaux Millénaires, la trilogie « Rosewater » offre ainsi une magnifique démonstration de ce que peut atteindre l'afro-futurisme en tant que déplacement du centre de gravité du point de vue littéraire des dominants vers les dominés, à l'échelle d'un monde, et en en tirant habilement les conséquences narratives et humaines. Il n'est donc pas surprenant que Michael Roch ait attiré avec force notre attention sur cet ensemble déjà presque monumental lors de son passage comme libraire d'un soir chez Charybde en 2019, et qu'il lui rende un hommage implicite dans son extraordinaire « Tè Mawon », qui s'attelle aussi, entre autre missions réussies, à aller plus loin dans la direction du renversement de l'attention et de la créolisation du Tout-Monde.
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Où et quand se situe Rosewater ? L'action se déroule principalement au Nigéria entre la capitale, Lagos, et la ville qui donne son nom aux romans : Rosewater. Notons quelques incursions en Europe, en Afrique du Sud ou dans l'espace plus ou moins proches, mais elles resteront assez légères. Tout se déroule essentiellement dans la seconde moitié du 21e siècle dans un univers assez proche du nôtre. Sauf que dans celui-ci, en 2012, un astéroïde, Wormwood, s'est écrasé dans Londres puis s'est enfoncé dans la croûte terrestre jusqu'à ressortir au Nigéria. En effet, il ne s'agit pas d'un amas de roches et de glace comme les autres, mais d'un écosystème extra-terrestre bien vivant. Son arrivée dans l'atmosphère de notre planète va entraîner de nombreux bouleversements. Parmi eux ? Citons la fermeture totale des frontières des États-Unis, la fondation de la ville de Rosewater, la création d'une xénosphère, sorte d'Internet biologique géant qui relie tous les êtres vivants de la Terre (hors USA donc) et qui donne des pouvoirs spéciaux à certains d'entre eux. Les plus courants sont les « sensitifs », en gros des télépathes capables de lire les pensées et les émotions d'autrui, de les manipuler ou d'agir dans le plan astral. À Rosewater, autour du dôme constitué autour de l'extra-terrestre, les malades et blessés sont mystérieusement guéris, les morts peuvent ressusciter. La faune et la flore se sont adaptées et mêlées aux essences extra-terrestres. Dans le premier roman, Rosewater, nous sommes en 2066. Une étrange maladie décime les « sensitifs » les uns après les autres. C'est Kaaro, ancien voleur et lâche autoproclamé devenu espion malgré lui d'une agence gouvernementale nigériane qui devra enquêter sur leurs disparitions et en apprendre plus sur cette drôle d'invasion extra-terrestre. le suivant, The Rosewater Insurrection racontera la guerre d'indépendance entre la ville et le pays qui l'entoure tout en essayant de sauver l'extra-terrestre malade. Et enfin, The Rosewater Redemption résout le mystère de sa présence sur Terre et détermine la survie — ou non — de l'espèce humaine.

Attention, les livres de Tade Thompson contrairement à ses novellas lues auparavant n'ont pas une écriture linéaire. Si Rosewater n'a qu'un narrateur principal, l'intrigue change d'époque au fur et à mesure des chapitres alternant entre le présent et différentes périodes du passé de Kaaro. Quant à The Rosewater Insurrection et The Rosewater Redemption, les deux livres abandonnent l'idée d'avoir un narrateur unique pour raconter l'histoire du point de vue d'un personnage différent d'un chapitre à l'autre que celui-ci soit humain ou non. le résultat final est qu'il vous faudra faire un effort d'adaptation pour entrer dans chaque volume en ayant à chaque fois l'impression d'être lâchée dans le grand bain sans bouée. La récompense sera largement à la hauteur de vos efforts. Disons-le de suite, j'ai rarement lu une histoire aussi bien construite et dépaysante depuis très longtemps (et oui, j'inclus les deux livres déjà parus de la tétralogie Terra Incognita dans le lot). Tade Thompson mêle dans un même élan ce qui pourrait s'apparenter à une invasion extra-terrestre à une réflexion cyberpunk modernisée avec entre autres l'utilisation d'animaux drones, de puces d'identifications , le tout saupoudrés de superpouvoirs et d'altérations physiques. Chaque élément sera plus ou moins présent dans chaque partie, avec notamment l'informatique et les hackers comme Bicycle Girl ou Bad Fish qui prendront de plus en plus d'importance au fur et à mesure que l'histoire avance. Et un final à la Independence Day, mais étrangement nettement plus logique de Jeff Goldblum piratant avec un Mac les vaisseaux extra-terrestres. Malgré la multiplicité des personnages, Tade Thompson arrive à tous les rendre vivants et particulièrement attachants malgré leurs défauts, ou en raison de ceci. L'univers de Rosewater ne manque pas d'inventivité, côté extra-terrestre comme côté Terriens. Et les retournements de situation sont tels que vous allez changer d'avis plusieurs fois sur l'ensemble des personnages et que vous devinerez difficilement là où l'auteur veut vous emmener. Laissez-vous porter et embarquez dans cette aventure !
Lien : https://www.outrelivres.fr/r..
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Un des points les plus forts de ce tome, comme ça avait commencé à être le cas dans le précédent, est la question de l'humanité, de la dignité, des personnes gravement handicapées (voire des cadavres...). Il est beaucoup question des réanimés et de l'évolution de leur état physique/psychologique dans le temps, de procès pour interdire aux Originiens de s'accaparer des corps de personnes encore vivantes, pour finir par tenter d'arrêter les Originiens d'éradiquer l'humanité pour s'installer sur Terre.

La question de l'humanité s'étend un peu plus loin que ça, avec la traçage des gens, les guerres très sanglantes, les robots-presque-humains, mais surtout... avec le nouveau discours du maire, qui s'inscrit assez peu dans la trilogie mais qui fait toujours plaisir : « Son intention est de soutenir les droits de chacun, quels que soient son sexe ou ses préférences sexuelles, déclarées ou non. En particulier, nous allons abolir l'interdiction du mariage et de l'adoption pour les couples du même sexe, ainsi que les lois réprimant l'homosexualité, le travestisme, le traitement de la fertilité et d'autres comportements ou situations que je ne vais pas détailler maintenant. Un fichier d'information concernant la nouvelle législation sera transmis sur vos implants d'ici une minute. Permettez-moi de dire que l'homophobie n'est pas une conception africaine. Dans notre panthéon, le sexe des dieux est ambigu et cela n'a jamais posé de problème. Retrouvons notre tradition de tolérance. » Et je rajoute encore, sous ce thème, la question de l'esprit des personnes coincé dans la xénosphère, si celle-ci devait être détruite, ainsi que la création d'un cerveau artificiel (pourrait-il développer une conscience ?).

J'aimerais en dire plus sans trop spoiler, mais ça devient compliqué. Il y a encore quelques retours dans le temps (et l'espace), avec l'arrivée d'Armoise, et même avant ça : les Originiens, et puis la naissance du Lijad, et même un tout petit aperçu du futur de Rosewater. Personnellement, je trouve que la trilogie va au-delà de la simple rencontre humains-extraterrestres, outre les enjeux politiques déjà présents, on retrouve clairement une forme de domination déjà présente à l'intérieur de l'humanité (et Tade Thompson y fait souvent référence au long des trois livres). Il s'agit d'extraterrestres comme il aurait pu s'agir de colons blancs, qui utilisent les indigènes, les rabaissent, les exploitent, les contrôlent. Parlant de contrôle, la question du flicage par les nouvelles technologies, et même la dépendance à celles-ci, est un autre des points centraux du livre. J'ai beaucoup apprécié la notion de xénosphère, qui apporte une réelle dimension en plus à l'histoire. de même que j'ai aimé voir autant de personnages féminins principaux, qui s'affirment de plus en plus, et encore plus dans ce troisième tome.

(voir la critique intégrale sur le blog)
Lien : https://lecombatoculaire.blo..
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Le ton est donné dès la couverture : le blanc a remplacé le noir et le rouge et les fleurs ont succédé aux champignons bizarres.
Car les graines ont germé : Armoise montre son véritable visage et son réel objectif.
Reste à savoir comment les pions mis en place par Tade Thompson vont avancer sur l'échiquier pour renverser le cours des choses.
« Rosewater Rédemption » frise la philosophie à de nombreuses reprises, car après la biologie et la politique, viennent les questions éthiques : jusqu'où peut-on aller pour sauver sa vie et celle de l'humanité ?
Vaste questionnement que l'auteur rend plus complexe par son traitement, tordant au besoin les trames de l'espace et du temps.
En épilogue, la trilogie Rosewater fait pour moi partie de la crème de la SF, aussi bien par sa thématique (non... ce n'est pas « simplement » une rencontre extraterrestre) que par sa forme, exigeante.
Je n'aurai pas la prétention de dire ni de penser avoir tout compris, mais l'expérimentation de Tade Thompson m'a fortement impressionnée.
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Voici Kaaro, le meilleur élément d’une population – quasiment éteinte – d’êtres humains capables d’utiliser le réseau planétaire extraterrestre constitué de micro-organismes, que certains appellent la xénosphère. Vous le connaissez. C’est l’un des derniers réceptifs.
Il a récemment souffert de saignements de nez ; pour sa compagne Aminat, les draps donnaient l’impression, au réveil, qu’il avait été assassiné durant la nuit. Peut-être a-t-elle pensé à un meurtre parce qu’elle est une des meilleures flics de Rosewater. Il l’a rassurée en saisissant sa raideur matinale et en lui disant que, lorsqu’il serait mort, elle s’en rendrait compte parce qu’il ne banderait plus. Il ignore que les cadavres peuvent également avoir des érections, et ce n’est pas le seul sujet sur lequel il se trompe.
Kaaro est à la retraite. Il croyait ne plus avoir à se lever avant onze heures du matin, mais il n’arrive pas à dormir plus de quatre heures, dans le meilleur des cas. Certaines nuits, depuis qu’il a absorbé les souvenirs superficiels de son ancienne patronne, Femi Alaagomeji, il ne peut pas trouver le sommeil. Il se demande comment elle parvient à dormir, mais sait pourquoi elle fait les choses qui le font bander.
Il prend une boîte de croquettes presque vide et donne à manger à son chien Yaro, puis gratte distraitement le dos du corniaud.
Pour les extraterrestres, la xénosphère représente l’infrastructure la plus importante. Les Originiens ont conçu des organismes comparables à des champignons microscopiques – Ascomycetes xenosphericus, ou xénoformes – et les ont diffusés dans l’atmosphère pendant des milliers d’années pour créer un réseau. Les xénoformes se connectent entre eux, ainsi qu’aux terminaisons nerveuses des humains, ce qui leur permet d’atteindre le cerveau, d’en extraire des informations et de partager celles-ci avec toutes les autres xénoformes ; ils peuvent ainsi recueillir des souvenirs ou des informations en temps réel. Les données sont transmises dans les deux sens : qui contrôle la xénosphère contrôle également les pensées, et celles-ci créent la réalité. Grâce à une curiosité génétique, certains humains sont capables d’accéder à ce champ mental, et même de le manipuler. Finalement, cela produit un univers constitué partiellement d’informations sensorielles, de souvenirs et d’imagination.
La cuisine s’efface et Kaaro glisse dans la xénosphère. Son gardien personnel, le géant Bolo, portant les cicatrices des blessures reçues durant l’insurrection, arpente lourdement les vastes prairies mentales de Kaaro. Il devrait soigner Bolo. Ces cicatrices représentent-elles certains aspects de son propre esprit, marqué par le conflit ? Bon sang, il était jadis un jeune voleur insouciant, ayant un fort penchant pour la boisson et le sexe. Maintenant, il porte les cicatrices d’une crise de conscience.
Il n’a pas dit à Aminat ce qu’il vient faire ici. D’ailleurs, il n’est pas tout à fait certain de pouvoir le faire ni de le vouloir. Il est seulement convaincu qu’il doit essayer.
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Je ne suis pas la mieux placée pour raconter cette histoire, mais personne d’autre ne s’est porté volontaire. Les rares individus qui connaissent tous les faits, ou en connaissent davantage que moi, n’ont aucun désir de les revivre. Moi non plus, mais je tiens à relater les événements, et je vais donc le faire. On prétend que l’information, comme l’énergie, est indestructible. Je ne peux pas l’affirmer car je ne suis pas omnisciente. Mais je sais que l’horizon de ma réalité s’estompe, alors je vais me dépêcher d’entamer ce récit.
Si je ne suis pas la mieux placée pour raconter cette histoire, c’est parce qu’elle me concerne et que je ne suis pas du tout objective. Je risque même d’altérer certains faits par souci de crédibilité. Si vous êtes prêts à accepter cet avertissement, écoutez-moi : je m’appelle Oyin Da et je vais tout vous dire, du début à la fin.
On m’a pourchassée durant la majeure partie de mon adolescence et toute ma vie d’adulte. Le gouvernement prétend que je suis dangereuse et c’est vrai, si vous croyez que les idées sont dangereuses. Une balle de fusil est une idée.
De même qu’un fusil de chasse. Il m’arrive de porter une djellaba pour que les gens ne sachent pas de quelle époque je viens.
Il y a eu un problème avec mon système de voyage temporel. Ce n’est pas qu’il soit en panne ; non, il fonctionne. C’est plutôt la manière qui a des ratés. Le gars qui a construit la machine, Conrad, était… intelligent, mais aussi, d’après ce que j’ai pu lire de ses écrits, complètement psychotique. Par exemple, qu’est-ce que « hucfarlobe » peut bien vouloir dire ? Tous les textes de Conrad sont pleins d’expressions farfelues comme celle-ci, de néologismes et de métonymies. Ni moi, ni mon père, ni le professeur ne pouvions rien y changer dans le Lijad. Sans parler du type de miniaturisation nécessaire à mes parties cybernétiques.
Nous devrions commencer. Il n’y a pas de temps à perdre. Et pourtant, j’en perds en ce moment, parce que j’ignore par où débuter. Il s’est passé tant de choses ; il s’en passe encore beaucoup et il s’en produira bien d’autres. Le monde entier observe Rosewater et les membres de l’Union africaine s’interrogent sur ce qu’ils doivent en faire. Cela ne sera pas une décision compliquée – ils ont déjà annexé récemment les Caraïbes. Rosewater sera facilement absorbée. Sauf que rien de ce qui concerne Rosewater n’est facile ou prévisible. C’est vrai, la cerise sur le gâteau est gratuite, mais il faut quand même payer pour le gâteau. C’est inévitable.
Je suis Oyin Da, l’improbable, ou Bicycle Girl. Je suis une artiste ; la glaise que je pétris, c’est l’histoire. Suivez-moi bien. Il y aura des virages brusques, de rapides changements de perspective, des tempêtes soudaines.
Je suis Oyin Da, l’improbable, et Rosewater vit ses derniers jours.
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« Son intention est de soutenir les droits de chacun, quels que soient son sexe ou ses préférences sexuelles, déclarées ou non. En particulier, nous allons abolir l'interdiction du mariage et de l'adoption pour les couples du même sexe, ainsi que les lois réprimant l'homosexualité, le travestisme, le traitement de la fertilité et d'autres comportements ou situations que je ne vais pas détailler maintenant. Un fichier d'information concernant la nouvelle législation sera transmis sur vos implants d'ici une minute. Permettez-moi de dire que l'homophobie n'est pas une conception africaine. Dans notre panthéon, le sexe des dieux est ambigu et cela n'a jamais posé de problème. Retrouvons notre tradition de tolérance. »
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Quand j'active la machine... Mille cent soixante-quinze. 1 175. La population du village d'Arodan. En un instant, tous les habitants sont convertis en lumière. Et moi aussi. Nous sommes dans le bunker et regardons au-dehors quelque chose que je ne peux pas décrire. Je peux seulement dire que je me vois, je vois des versions de moi, fantomatiques, se détacher de mon corps et flotter vers des futurs parallèles. Cela continue jusqu'à ce que l'original, épuisé, commence à se dissoudre, consumé par toutes ces divisions. Quand on ne regarde pas les lumières qui passent, les couleurs, les formes, on peut presque oublier qu'on se déplace dans l'espace et le temps. Presque.
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Le premier effort du gouvernement nigérian pour ficher tous les citoyens grâce à des implants d'identification entraîna un véritable désastre : les membres du groupe pilote furent empoisonnés par des puces toxiques, contenant des métaux lourds, qui les rendirent fous avant de les tuer. Pas tous, bien sûr, mais environ soixante-dix pour cent (...). Maintenant, le [programme d'identification] est bien rodé ; dès sa naissance, chaque citoyen reçoit un implant. À l'âge de dix ans et de dix-neuf ans, la puce est repositionnée.
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