Dans ce délectable livre ,
Kaouther Adimi ravive le souvenir d'Edmond Charlot un libraire, un éditeur à Alger, non sans affirmer l'amour à la littérature.
reflète l'histoire d'une petite librairie située dans le centre d'Alger, fermée et revendue pour accueillir un magasin de beignets, après avoir été récupérée par le ministère de la Culture et désertée par les lecteurs.
L'auteure replonge les lecteurs dans la vie d'Edmond Charlot qui a, en 1936, ouvert avec ses amis une libraire abritant également une bibliothèque de prêt et une maison d'édition.
Celle-ci est créée pour abriter les rencontres régulières d'auteurs comme
Albert Camus,
Emmanuel Roblès,
Jules Roy,
Mouloud Feraoun et le poète et homme de théâtre
Himoud Brahimi.
Le journal de l'éditeur Edmond Charlot relate également plusieurs événements majeurs de l'histoire d'Algérie, notamment les massacres du 8 mai 1945, le déclenchement de la guerre de libération nationale, les attentats de l'Organisation de l'armée secrète (OAS) – qui a plastiqué à deux reprises l'une de ses librairies – ou encore son séjour en prison à cause de ses liens avec
Albert Camus.
Kaouther Adimi livre Les vraies richesses en reconstituant ce journal. Son travail d'éditeur est restitué avec minutie, sur fond de censure, de rareté du papier et du monopole des grandes maisons d'édition poussant à la faillite les petites d'entre elles.
Il évoque, entre autres, le supplice vécu par
Kateb Yacine en mai 1945, l'action du Front de libération national auprès des Nations Unies, les « terribles actes de tortures » de l'armée coloniale, « l'épouvantable guerre masquée sous le nom d'événements ». le lecteur fera plusieurs bonds dans le temps entre la vie de l'éditeur et le quotidien de Ryad, un étudiant en architecture vivant en France.
Ce dernier se heurte à la solidarité des commerçants du quartier, déterminés à sauver la librairie ou du moins les livres qu'elle contient, en essayant de convaincre l'architecte stagiaire de la valeur de ceux-ci.
Son stage de fin d'études consiste justement à vider les lieux, se débarrasser des livres et du mobilier pour réaménager le lieu. En découvrant la valeur du livre et de la librairie, Ryad se familiarise, peu à peu, avec les moeurs des Algérois et le quotidien de la jeune génération dans cette ville.
ans
Nos richesses, l'auteure confronte la place de la littérature et du livre dans la société algérienne actuelle et le travail colossal de l'édition dans les années 1930, relatant le destin d'un libraire et propriétaire d'une maison d'édition, fermée après plus de 70 ans d'existence.
Edmond Charlot (1915-2004) est le premier éditeur d'
Albert Camus, de
Jules Roy, d'
Albert Cossery et d'
Emmanuel Roblès. Sur la vitrine de la librairie des Vraies Richesses, il a inscrit une devise : « Un homme qui lit en vaut deux ». En réinventant son journal, l'écrivaine a voulu extirper cet espace de l'oubli tout en faisant un trait d'union entre les époques.