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EAN : 9782757812266
160 pages
Points (05/02/2009)
3.82/5   92 notes
Résumé :
L'avocat Charles Benesteau décide brusquement de rompre avec la bourgeoisie à laquelle il appartient pour s'installer dans un quartier populaire de Paris. Il quitte famille, amis, situation et richesse pour chercher la liberté dans la solitude et l'exil intérieur. Il rejette un monde cruel et incapable d'un geste désintéressé. Mais changer de vie ne paraît extraordinaire que pour les autres, et le dévouement désintéressé de Charles va provoquer la suspicion. Il est ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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Un livre étrange choisi à la sauvette. Emmanuel Bove est un auteur du début du XXè siècle en qui Marie Darieussecq voit un précurseur de Modiano, comme elle l'écrit dans la préface.

Ne supportant plus l'hypocrisie du monde qui l'entoure, Charles perd goût à la vie, s'isole, n' exerce plus son métier d'avocat. Puis sa femme renonce à vouloir le comprendre et c'est le divorce. Il prend un appartement dans un quartier modeste, vit simplement, et distribue ses avoirs. Tout laisse à penser qu'il prépare son suicide, mais que quelque chose le retient, qu'il hésite encore. Il en est là de ses réflexions lorsqu'un homme vient lui demander conseil en tant qu'avocat. le lendemain, il découvre que l'homme avait surtout besoin de son argent. Pas rancunier, il lui donne. Plus tard, il découvre que celui-ci a tenté de tuer sa femme. Juliette leur fille est seule sans surveillance. C'est à Charles qu'on demande de se dévouer afin de la garder temporairement. Il accepte. Au début du livre, on avait une idée plus ou moins précise des intentions de Charles, pourtant au moment où l'escroc fait irruption dans sa vie, il semble que celui-ci réveille en lui un goût pour la vie, surtout par l'entremise de la petite Juliette.

Ce n'est pas un livre des plus joyeux, mais il sort de l'ordinaire. le côté austere de l'ensemble m'a fait penser à du Simenon. Ce sens du mystère, Ce sens du drame et cette atmosphère si noire. On ne s'ennuye pas une seconde, l'écriture est d'une linéarité agréable. A lire.
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C'est l'histoire d'un ancien type bien qui en a marre de sa vie de vitrine et qui se dit, tiens, si je coupais les ponts avec tous les saligauds qui entretiennent l'apparence ? A partir de là, il vit seul et programme cette vie qui lui reviendra lorsqu'il qu'il se sera débarrassé de sa richesse. Mais il doute de lui : « Il était parti parce que son entourage lui était devenu insupportable. Il avait cru montrer ainsi qu'il était un homme différent. L'était-il vraiment ? N'était-il pas tout simplement un égoïste ? »


Il peut être étrange de se reconnaît comme égoïste lorsque, d'un point de vue extérieur, les autres ont l'impression que la réussite est sacrifiée au profit d'un motif plus noble qui contraint à se reclure loin du monde. Tout se passe comme si Charles avait compris qu'il abritait le germe d'une maladie mortelle et qu'il devait vite transformer sa manière de vivre pour se retrouver en adéquation avec ce qui prenait de lui de l'ampleur - sous la forme du pressentiment, dirons-nous après coup, quand tout apparaîtra dans l'évidence. En quelque sorte, il passe le flambeau, la torche vive, cette illusion du faux bonheur, pour se garder le secret du vrai bonheur à lui tout seul. Il se donne l'impression d'être égoïste à cause de ça. Il laisse les autres seuls dans leur cambouis, sans leur dire ce que lui a compris. « Pour eux, ce qu'il avait fait était extraordinaire, alors que pour lui, c'était si simple ».
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Il y a une certaine condescendance à prétendre que la pauvreté est une vertu. Et une incroyable naïveté, si ce n'est de l'ignorance, à croire que les classes défavorisées sont plus solidaires que les autres strates de la société. C'est ce que Charles Benesteau va apprendre à ses dépens, alors qu'il vient d'atteindre la cinquantaine. Lui, issu d'un milieu bourgeois, étriqué et conventionnel, il va envoyer paître son travail (il est avocat), sa famille et ses amis (plutôt des connaissances). Et pour ce faire, il quitte tout pour s'installer seul, ailleurs, pour écrire ses mémoires et lire. Mais la vie va le confronter à la misère d'un couple dont il recueille, pour quelques temps, la fille. Subitement, lui qui se voulait discret, devient le centre des commérages malveillants du quartier. Il découvre que la bêtise et la méchanceté sont une question de nature humaine, et non de classe sociale. Oui, une concierge peut être médisante, jalouse et injuste. Mais une professeure de français, éduquée et aisée, peut l'être tout autant. Cette expérience l'usera et il se laissera mourir, déterminé à quitter ce monde si décevant en laissant (peut-être) un souvenir à quelqu'un. Il est troublant de lire la description de cette agonie quand on sait qu'Emmanuel Bove était lui-même de santé fragile et mourut d'une maladie infectieuse.
La description de milieux sociaux à travers des archétypes féminins est une idée très intéressante. Ainsi la femme la plus sincère avec Benesteau est la femme adultère, celle qui trompe un mari alcoolique et violent. Alors que celles qui se disent « convenables » sont soit des harpies, soit des harengères. Tous les hommes sont plutôt mous de caractère. Tout ce petit monde mesquin évolue dans un décor souvent décrit en quelques phrases explicites, au coeur d'un Paris à jamais disparu (l'action se déroule dans les années 1930). Il y a dans ce style épuré les prémices des romans de Georges Simenon, à la même époque, genre « les Fiançailles de M. Hire ». En effet, Emmanuel Bove nous propose, en réalité, une intrigue plutôt simple, mais avec un décor et des personnages forts. Une intrigue dont le héros est attachant d'humanité, obligé d'aller au bout de lui-même, de sa logique en dépit des autres protagonistes.
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Emmanuel Bove, de son vrai nom Emmanuel Bobovnikoff par son père russe, est un écrivain français (1898-1945) qui ne rechercha jamais les honneurs malgré les encouragements de Colette et le succès de son premier roman Mes amis paru en 1924. Ecrivain tombé dans l'oubli, son oeuvre retrouve un regain de faveur depuis quelques années et ce roman le pressentiment a été adapté pour le cinéma en 2006 par Jean-Pierre Darroussin.
Ce bouquin n'est pas le plus connu de l'auteur mais c'est un merveilleux petit livre qui mérite d'être lu. le héros, Charles Benesteau, la cinquantaine, avocat parisien marié et père de famille est un représentant typique de la bourgeoisie dont la vie semble établie et l'avenir tout écrit. Pourtant son humeur va changer, il devient sombre et coléreux ce qui alarme sa famille « On l'interrogea, on se fit si persuasif qu'il consentit finalement à parler. Il trouvait le monde méchant. » Devant ce constat, il ne trouve qu'une seule parade, la fuite. Il quitte sa femme, son travail, son appartement douillet dans un quartier rupin et s'exile dans un tout petit logement d'une rue misérable derrière la gare Montparnasse du Paris des années 1930. Locataire discret et cherchant à faire le bien autour de lui, il est amené à héberger temporairement une gamine dont la mère est hospitalisée et le père disparu. A partir de là, il va découvrir que le monde dans lequel il a choisi de vivre ne vaut pas mieux que celui qu'il a quitté. Au début considéré par les gens du quartier comme un « monsieur », il va devenir la proie de la cupidité de certains (car il est facilement prêt à donner son argent pour aider) et des commérages et ragots des autres (car il est facile de jaser sur un célibataire logeant une petite fille). L'histoire finira mal mais depuis le début nous en avions le pressentiment.
Un livre écrit avec des mots simples, des tournures de phrases sans fioritures mais le tout fait un style. Emmanuel Bove ne joue pas sur le pathos, son héros est déterminé mais sans coups de gueule ou violence, un homme ordinaire en quelque sorte qui comme beaucoup d'entre nous un jour à penser tout plaquer pour refaire sa vie ailleurs, sauf que lui Charles Benesteau, il l'a fait. Il y laissera la vie, mais maigre consolation, en prouvant qu'il avait raison, le monde est vraiment méchant. Un très grand – par le talent - petit livre – pour le nombre de pages, d'un écrivain qui mérite d'être lu.
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Nous sommes en 1931, à Paris. Voilà un an, Charles Benesteau, avocat, a tout quitté, sa femme, ses enfants, ses amis, son grand appartement du boulevard de Clichy, son travail. Pourquoi ? « Il trouvait le monde méchant. Personne n'était capable d'un mouvement de générosité. Il ne voyait autour de lui que des gens agissant comme s'ils devaient vivre éternellement, injustes, avares, flattant ceux qui pouvaient les servir, ignorant les autres. Il se demandait si vraiment, dans ces conditions, la vie valait la peine d'être vécue et si le bonheur n'était pas plutôt la solitude que ces misérables efforts qu'il lui fallait faire pour tromper son entourage ». Il vit désormais seul dans un trois-pièces rue de Vanves, dans un quartier populaire et sinistre près de la gare Montparnasse. Il consacre son temps à lire, se balader et écrire ses mémoires.

« En rompant avec le passé, il s'était imaginé qu'aucun de ses gestes aurait de conséquences, qu'il serait libre, qu'il n'avait plus jamais de comptes à rendre. Or, il s'apercevait à présent qu'il lui était impossible de ne pas se singulariser, où qu'il se trouvât. » Loin de trouver l'effacement auquel il aspire, Charles Benesteau devient bientôt le « Monsieur » du quartier, objet de toutes les attentions. Un jour, un jeune ouvrier vient lui demander un conseil car il veut divorcer de sa femme qui le trompe. En l'aidant, Charles Benesteau met le doigt dans l'engrenage : sa vie ne sera plus désormais que demandes, intrusions, soupçons et calomnie.

C'est que le monde des « petites gens » n'est pas plus reluisant que celui des bourgeois que Charles cherche tant à fuir. On y est aussi envieux, avide, calculateur, hypocrite et ingrat. « Il n'y a rien de plus trompeur que la bonne intention, car elle donne l'illusion d'être le bien lui-même. » Charles pensait qu'il aurait une nouvelle vie, qu'il se fondrait dans le décor, « qu'il serait une fourmi dans une fourmilière », alors la réalité est bien cruelle. Celle-ci se rappelle à lui également sous la forme de ses frères et soeur, ou de son ex-femme, qui ne cessent de le solliciter pour le ramener à son existence antérieure et qui ne lui pardonnent pas, plus que de les avoir fuis, d'être venu s'installer dans ce quartier misérable.

Charles Benesteau se demande d'ailleurs s'il en fait assez pour rompre avec son passé. « le pressentiment » est le récit sensible et émouvant d'un homme ordinaire à qui toute quiétude est refusée. le style est sans fioriture, simple, descriptif et linéaire, monocorde presque, mais n'en fait que mieux ressortir la violence des rapports humains cachée derrière les mots. Un style qui n'est pas sans rappeler celui de Simenon. Emmanuel Bove a aussi l'art, comme Simenon, de révéler les bassesses de la nature humaine. On a le pressentiment, grandissant au fil des pages, que le malheur va frapper, que les espérances de Charles Benesteau sont vouées à l'échec. Et la certitude, une fois le livre refermé, d'avoir lu un grand texte au réalisme noir.

Lien : http://plaisirsacultiver.unb..
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Tu as voulu rompre avec le passé, recommencer une autre vie. Tout cela est, je ne dirai pas normal, mais compréhensible. Malheureusement, il y a autre chose. Tu nous provoques. Oui, tu nous provoques. Car vraiment, si tu n’avais voulu que t’isoler, que te séparer de nous, tu pouvais le faire d’une toute autre façon. Rien ne t’empêchait de louer une petite maison, un petit appartement, une chambre même, à Passy, à Neuilly, à Auteuil, n’importe où, mais dans un endroit où il au-rait été normal que tu habites. Au lieu de cela, tu choisis, car c’est un choix, ce n’est pas le hasard, un des plus sinistres quartiers de Paris. Je n’ai vu que des boucheries chevalines dans cette rue de Vanves. Tu ne me feras pas croire que tu aimes ce quartier. Si tu t’y es installé, c’est parce que tu t’es dit : "cela les embêtera !"
Eh ! bien oui, cela nous embête.
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[Charles] avait pour l’habitude, quand il faisait beau, d’aller s’asseoir au Luxembourg. Il y restait jusque vers onze heures. Puis il allait faire ses achats pour le déjeuner qu’il préparait lui-même. Cette vie n’avait rien de bien gai, mais elle lui plaisait. Personne ne pouvait en rompre l’ordonnance. Les petits travaux matériels qui la coupaient le distrayaient.
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En rompant avec le passé, il s’était imaginé qu’aucun de ses gestes n’aurait de conséquences, qu’il serait libre, qu’il n’aurait plus jamais de comptes à rendre. Or, il s’apercevait à présent qu’il lui était impossible de ne pas se singulariser, où qu’il se trouvât. Chacun de ses actes continuait d’être l’objet d’un examen.
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Comme il le faisait chaque soir, il se dirige avers la gare Montparnasse. Il songeait aux dernières années qu’il avait passées boulevard de Clichy. Comment avait-il pu abandonner sa famille, ses amis, tout, jusqu’à ses lettres, jusqu’à ses poèmes de jeunesse ?
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Il trouvait le monde méchant. Personne n’était capable d’un mouvement de générosité. Il ne voyait autour de lui que des gens agissant comme s’ils devaient vivre éternellement, injustes, avares, flattant ceux qui pouvaient les servir, ignorant les autres.
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Videos de Emmanuel Bove (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Emmanuel Bove
Courte vidéo autour de l'auteur de Mes amis, Emmanuel Bove, un pilier de L'Arbre vengeur.
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