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EAN : 9782246813804
336 pages
Grasset (16/08/2017)
  Existe en édition audio
4.26/5   1675 notes
Résumé :
« Venge-nous de la mine », avait écrit mon père. Ses derniers mots. Et je le lui ai promis, poings levés au ciel après sa disparition brutale. J’allais venger mon frère, mort en ouvrier. Venger mon père, parti en paysan. Venger ma mère, esseulée à jamais. J’allais punir les Houillères, et tous ces salauds qui n’avaient jamais payé pour leurs crimes.
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Critiques, Analyses et Avis (435) Voir plus Ajouter une critique
4,26

sur 1675 notes
"C'est comme ça la vie."

Les Houillères, 1974. Un coup de grisou vient de tuer des dizaines de personnes et de laisser des familles entières dans le besoin et l'injustice.
Comme Michel Flavent, dont le frère est mort. "Venger son frère" deviendra son obsession, car "le coup de grisou avait des complices" : "les patrons appellent ça le profit".

D'une plume sensible et ciselée, une plongée dans le milieu des mineurs du Nord de la France, mais aussi dans celui de l'âme humaine.
Social, psychologique, parfaitement maîtrisé, le récit de Sorj Chalandon est un coup de maître ! Un incontournable de cette rentrée littéraire de septembre 2017.

Une histoire de fraternité, d'identité, de mémoire sociale et politique. Le tout, servi par une langue charnelle, dans laquelle l'émotion affleure à chaque page. Un grand livre !

Lu en juin 2017.

Mon article sur Fnac.com/Le conseil de libraires :
Lien : https://www.fnac.com/Le-Jour..
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Jusqu'où peut-on s'arranger avec la vérité ?
Jusqu'où peut-on vivre dans la culpabilité ? Ce sont les deux interrogations qu'il me reste après la lecture de ce foudroyant roman de Sorj Chalandon qui démontre, une fois encore, comment mêler réalité et fiction pour asseoir son humanité et sa sensibilité. C'est tellement plus qu'un coup de coeur !

Jojo Flavent et son petit frère Michel s'entendent comme larrons en foire. Jojo rêve de devenir pilote de course comme son idole Steve McQueen dans le film « le Mans ». Il sera mineur. Métier éprouvant, dangereux, où l'on ne retrouve jamais vraiment la couleur de sa peau tant la poussière de charbon s'incruste dans les pores, dans les yeux, sous les ongles. La mort rôde souvent, la silicose toujours.

Le 27 décembre 1974, à la fosse Saint-Amé de Liévin-Lens (Nord-Pas-de-Calais) un coup de grisou tue 42 mineurs et laisse des familles dévastées par le chagrin et la colère. Les veuves doivent rembourser au patron le prix des vêtements et des godillots détruits par l'incendie ! « Un jour un madrier s'écroule. le lendemain un bloc se détache. Une galerie s'affaisse. Un wagonnet s'emballe. Un câble cède. Une lampe explose. Ce ne sont pas des catastrophes, seulement des accidents dont on ne parle pas. C'est lorsque la mine les tue qu'on se souvient qu'il y avait des mineurs ».

40 ans plus tard, Michel Flavent n'a pas oublié. Il tente de combattre le mépris des autres, jusqu'à l'obsession. Depuis la catastrophe, il achète sur les brocantes ou sur Internet des habits de mineur, un casque en cuir bouilli, une lampe, garde le savon et le miroir de Jojo, découpe tous les articles de presse, les photos, les documents de commémoration. Tout et ses pensées sont contenus dans des carnets qu'il stocke dans un garage qui devient le mausolée de son frère, un lieu de secret et de respect. La perte du frère, le suicide de désespoir du père, le chagrin mortel de la mère.

Devenu chauffeur routier, il sillonne l'Europe aux commandes d'un poids lourd bâché d'une immense photo de Steve McQueen. A la mort de son épouse, il décide de quitter Paris et de retourner dans les corons. Il veut se venger, comme son père le lui a demandé. Mais comment retrouver le responsable du drame ? Les houillères sont fermées depuis longtemps, beaucoup d'anciens sont morts. Reste un café où, peut-être…

Le talent de Sorj Chalandon, toujours inspiré par du vécu, passe par la sidération tant les soubresauts sont inattendus, palpitants, dignes d'un excellent scénario de film dont le Steve McQueen d'emprunt tient la vedette. Ne manquez pas de découvrir le réquisitoire terrible de l'avocat général et la plaidoirie sobre et poignante de la défense. Car, un nouveau drame se joue tout aussi humain et bouleversant.

La catastrophe de Liévin-Lens de 1974 m'a immanquablement fait penser au drame du Bois du Cazier à Marcinelle (Belgique) en août 1956. 262 morts de douze nationalités dont une grande majorité d'Italiens. Je me souviens que des collectes étaient faites dans nos écoles et que nos institutrices nous avaient invitées à faire des élocutions sur la mine. Souvenir ravivé de ce désastre humain.

Ce livre est un magnifique hommage à cette région du bassin minier, désormais désaffecté depuis la fin du XXe siècle, mais dont l'intérêt patrimonial et historique a été reconnu par l'Unesco au début de ce XXIe siècle.
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5 ⋆ ce n'est pas assez, je voudrais en mettre une ligne entière ! Un vrai coup de ♡ !

En 1974, Michel Flavent est adolescent, son père Jean est cultivateur, son frère Joseph abandonne son métier de mécanicien pour celui de mineur. Joseph va travailler à la fosse Saint-Amé à Liévin, mine qui fera la Une le 27 décembre 1974 lorsque 42 mineurs périront à cause d'un coup de grisou. Michel Flavent se donnera aussi le nom de Michel Delanet, nom francisé par son frère Joseph, de Michael Delaney, pilote automobile qui a tenu le rôle de Steve McQueen dans le film Le Mans. Plus tard, Michel, devenu chauffeur routier, fera peindre Steve McQueen sur la bâche de son gros cube.
Sorj Chalandon rend hommage aux mineurs et, avec son humanité coutumière dépeint les sentiments de revanche et le remords de Michel toujours ressentis quarante ans après le mort de Joseph.
Le Jour d'avant, une oeuvre magistrale de Sorj Chalandon, une histoire qui emmène le lecteur de surprises en surprises.
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Si je devais imaginer une anthologie des livres qu'il faut avoir lus, "Le jour d'avant" y figurerait en bonne place, c'est une certitude.
Rarement un livre m'aura autant bousculé et surpris, ou encore captivé et sidéré, d'un point de vue scénaristique c'est assez bluffant, je me souviendrai longtemps de cette page 222 (format numérique) qui m'a littéralement coupé le souffle.
Après sept lectures, j'associais Sorj Chalandon à des thèmes axés sur la mélancolie, le drame, la colère ou la tristesse, le tout avec une profondeur de réflexion très au-dessus de la moyenne, j'avais souhaité faire un break avec l'auteur. Après plus d'un an et une série de lectures légères, le temps était venu de se retrouver à nouveau.
Parler de ce livre sans rien dévoiler est délicat et difficile, et pourtant j'ai vraiment envie de vous convaincre que cette lecture est à faire absolument pour une foule de raisons.
Pour l'Histoire d'abord, la mine et le quotidien des mineurs, leur monde, entre fierté et résignation mais toujours dans la dignité. Comme pour la duologie de "l'ami irlandais", Sorj Chalandon va nous instruire de choses que l'on ne peut pas appréhender de prime abord, la mine est un monde résolument à part.
Pour l'histoire de Michel Flavent ensuite qui raconte son frère mineur "tué par la mine", événement qui mettra sa vie entre parenthèses, une plongée dans la psyché d'un être dévoré par le chagrin et l'amertume, Michel qui, en perdant sa femme, sa dernière raison de vivre, va prendre une décision définitive, de celles qui sont écrites de longue date et qu'on ne met en oeuvre que lorsque que plus rien ne s'y oppose.
Et puis il y a cette page 222 et ce basculement dans l'irrationnel...
Il y a aussi ces deux plaidoiries tellement brillantes, contradictoires et pourtant toutes deux parfaites de cohérence et de justesse, c'est fascinant et perturbant que d'être convaincu tour à tour par deux opinions contraires...
Cette histoire c'est aussi une descente, non pas dans la mine cette fois, mais dans les méandres d'une réflexion ardue qui est celle du jugement de l'homme par l'homme, c'est troublant et instructif.
Pour toutes ces raisons croyez moi, ce livre vous apportera forcément quelque chose à différents niveaux, et rien que pour cette raison, il vaut d'être lu.
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Ils font partie de l'armée des simples gens, celle des mineurs et des agriculteurs : Michel et Joseph, deux frères qui s'aiment à la vie à la mort, rêvent de pilotes et de courses automobiles.

Joseph devient mécanicien puis mineur - contre l'avis de son père qui l'aurait voulu agriculteur comme lui - et meurt dans un accident. Nous sommes le 27 décembre 1974, le jour où après un coup de grisou quarante-deux mineurs vont aussi perdre la vie dans la fosse de Saint-Amé à Liévin.

Inconsolable et intraitable, Michel vengera son frère des hommes sans scrupules pour qui seul le rendement compte au détriment de la sécurité. Michel qui a trouvé le mot écrit par son père avant de se pendre : " Michel venge-nous de la mine ". Mais sentiment de culpabilité, déni pur, besoin d'être confondu, Michel finira par vouloir être jugé pour la mort de Joseph.

Militant (Chalandon est un ancien maoïste), Le jour d'avant prend le parti des plus faibles. Récit d'un drame national presque ignoré, récit d'un naufrage familial et personnel, il nous raconte la faiblesse de la justice des hommes face à l'indicible. C'est triste et pudique, éprouvant, et fort.
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critiques presse (6)
Actualitte
26 octobre 2018
L’histoire de Michel Flament s’accroche aux marges de ce drame pour le faire remonter à la mémoire collective et tenter de refaire le procès escamoté par la justice d’alors, en recréant les conditions d’un nouveau procès pour juger une vengeance criminelle.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Culturebox
15 décembre 2017
"Le jour d'avant", de l'écrivain et journaliste Sorj Chalandon, est enraciné dans la noirceur des mines et des terrils du Nord, avec comme point de départ la catastrophe du 27 décembre 1974 qui tua 42 mineurs dans la fosse 3bis de Lievin. Un hommage aux "gueules noires".
Lire la critique sur le site : Culturebox
LaCroix
11 septembre 2017
Dans le nord de la France, un homme est mort à la mine un jour de décembre 1974. Son frère revient quarante ans après pour le venger.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LeMonde
01 septembre 2017
En 1974, l’écrivain, alors journaliste à « Libé », a été marqué par la catastrophe de Liévin et ses 42 mineurs morts. Longtemps différé, « Le Jour d’avant » leur rend hommage.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LePoint
28 août 2017
La trahison et la culpabilité, les deux mamelles du journaliste romancier, rôdent à chaque page de ce livre intrigant et bouleversant.
Lire la critique sur le site : LePoint
LaLibreBelgique
22 août 2017
Sorj Chalandon avait déjà un public fidèle. Il va en acquérir un nouveau avec ce superbe roman, le plus réussi de son auteur, coup de cœur de cette rentrée littéraire.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Citations et extraits (287) Voir plus Ajouter une citation
Je n’avais pas honte. Moi aussi, j’étais un ouvrier. Pour toujours. Paris ne changerait rien, je le savais. Mais il fallait que je quitte le bassin. Je ne voulais pas d’un horizon de terrils. De l’air âcre des cheminées. Je ne pouvais plus passer devant les grilles de la mine, croiser les gars sur leurs mobylettes. Baisser les yeux face aux survivants. Entendre le souffle des chevalements que seul mon Jojo avait le droit d’imiter. J’étais épuisé des hommes à gueules de charbon. Je ne supportais plus de voir leurs mains balafrées, entaillées, leurs peaux criblées à vie d’échardes noires. Les regards harassés me faisaient de la peine. Même le dimanche, même nettoyés dix fois, les cous, les fronts, les oreilles racontaient la poussière de la fosse.
Et mon frère disparu.

Page 33, Grasset, 2017.
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Mourir pour le profit de la Compagnie nationale des Houillères? C’est ça que tu veux Jojo? Crever comme ton oncle à vingt et un ans, les lunettes coulées sur le visage et les doigts soudés par la chaleur? Suer dans les entrailles de la terre pour engraisser les planqués du carreau? Passer tes jours à percer la nuit? C’est ça ton rêve, mon fils? Et si tu tombes à la fosse, tu auras gagné quoi? Qui te tiendra hommage? Deux écharpes tricolores venues d’une autre ville, un sous-ministre arrivé de Paris, un discours honteux sur le mauvais sort, trois fleurs payées par le syndicat et une garde d’honneur de copains qui n’oseront même pas regarder votre pauvre mère en face?

Pages 18-19, Grasset, 2017.
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— Lorsqu’il remonte au jour, le mineur n’est qu’un survivant. Même s’il est décrassé, il rapporte le charbon en surface. Il lui en reste dans les cheveux, dans le nez, au coin des yeux, entre les dents. La mine a pris la place de l’air dans ses poumons. Le mineur n’est pas mort, non. Mais il sait que la mort l’attend

Page 287, Grasset, 2017.
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Les mines de France avaient fermé les unes après les autres. En 1978, quatre ans après la catastrophe de Liévin, la fosse Saint-Amé a cadenassé ses grilles, et le puits 3bis a été comblé. Cinq ans plus tard, le chevaleret du 3 a été abattu comme un vieux chêne. Un éclat de son béton m’a servi de presse-papier. Mais le gibet métallique 3bis a été conservé. Pour le tourisme, pour la mémoire, pour ajouter aux larmes des crocodiles parisiens.

Page 43, Grasset, 2017.
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"Venge-nous de la mine", avait écrit mon père. Ses derniers mots. Et je le lui avais promis. À sa mort, mes poings menaçant le ciel. Je n'ai jamais cessé de lui promettre. J'allais venger mon frère, mort en ouvrier. Venger mon père, mort en paysan. Venger ma mère, morte en esseulée. J'allais tous nous venger de la mine. Nous laver des Houillères, des crapules qui n'avaient jamais payé leurs crimes. J'allais rendre leur dignité aux sacrifiés de la fosse 3bis. Faire honneur aux martyrs de Courrières, aux assassinés de Blanzy, aux calcinés de Forbach, aux lacérés de Merlebach, aux déchiquetés d'Avion, aux gazés de Saint-Florent, aux brûlés de Roche-la-Molière. Aux huit de La Mûre, qu'une galerie du puits du Villeret avait ensevelis. J'allais rendre vérité aux grévistes de 1948, aux familles expulsées des corons, aux blessés, aux silicosés, à tous les hommes morts du charbon sans blessures apparentes. Rendre justice aux veuves humiliées, condamées à rembourser les habits de travail que leurs maris avaient abîmés en mourant.

Page 130, Grasset, 2017.
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Videos de Sorj Chalandon (116) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Sorj Chalandon
Rencontre avec Sorj Chalandon autour de son roman l'enragé paru aux éditions Grasset.


Sorj Chalandon, après 34 ans à Libération, est aujourd'hui journaliste au Canard enchaîné. Ancien grand reporter, prix Albert-Londres (1988), il est l'auteur de 10 romans, tous parus chez Grasset. le Petit Bonzi (2005), Une promesse (2006, prix Médicis), Mon traître (2008), La Légende de nos pères (2009), Retour à Killybegs (2011), le Quatrième Mur (2013), Profession du père (2015), le Jour d'avant (2017), Une joie féroce (2019) et Enfant de salaud (2021).
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13/01/2024 - Réalisation et mise en ondes Radio Radio, RR+, Radio TER
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