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EAN : 9782378803834
228 pages
L' Iconoclaste (05/10/2023)
4.06/5   25 notes
Résumé :
Cadillac, la ville qui doit vivre avec les fous.
On l'appelle la ville des fous. Pourtant, les touristes pourraient flâner dans Cadillac, une bastide en bord de Garonne à trente kilomètres de Bordeaux, sans soupçonner qu'elle abrite, en son centre, un hôpital psychiatrique, depuis le XVIIe siècle.
Les malades s'attardent aux terrasses des cafés. Certains logent en ville, après des années d'enfermement. Un marchandage permanent, aux règles invisibles, ... >Voir plus
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Juste un mot pour dire que je ne connaissais pas cette journaliste, et je n'ai jamais travaillé en psychiatrie, mais j'ai trouvé son reportage d'une grande intelligence, écrit avec beaucoup de sensibilité et d'empathie, et au fond probablement beaucoup de justesse....en immersion dans l'hôpital psychiatrique de Cadillac en Gironde...Que cherchait-elle réellement à travers cette démarche ? Nous informer sans déformer, certes, mais également chercher des réponses à des questions d'ordre personnel, inconsciemment ou non.

J'ai souri quand elle sentait qu'elle n'était pas toujours la bienvenue près des soignants....peur d'être jugés, de mal faire leur boulot, d'avoir à justifier les pauses très (trop) nombreuses??? Pas la conscience tranquille d'être observés ? Ou alors peur, dans leurs conditions de travail déjà fort difficiles et dégradées, et en sous-effectifs, que cette présence occasionne justement un déséquilibre dans ce fragile équilibre ? Enfin, au cours de ces longs mois, elle a rencontré des soignants aussi très compétents et très concernés, mais elle a surtout rencontré des patients auxquels elle s'est attachée...

Ne pas juger ceux et celles qui un jour, ou toujours, ont eu à passer par ces services, car nul n'est à l'abri finalement de basculer aussi dans la maladie mentale...et dire qu'avant, on enfermait des femmes à les en rendre folles...sous de piètres prétextes ...mais ce n'est pas le sujet du documentaire !
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Journaliste et documentariste, Ixchel Delaporte écrit des ouvrages à partir d'observations sur le terrain, en immersion durant plusieurs semaines. Elle a notamment étudié les conditions de travail des plus précaires dans le vignoble bordelais (Les Raisins de la misère), celles des auxiliaires de vie (Dames de compagnie), et le fonctionnement d'un internat/foyer catholique intégriste pour jeunes (Les enfants martyrs de Riaumont).
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Ici, l'auteure s'intéresse aux 'fous' - je déteste ce mot - de Cadillac, petite commune de Gironde où se trouve un hôpital psychiatrique depuis la fin du 18e siècle. Les patients y sont internés, certains ont des autorisations de sortie, et il existe des petits logements pour ceux qui semblent pouvoir redevenir autonomes à l'issue d'un séjour plus ou moins long. Ils font donc partie du paysage, de la population locale.
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Ixchel Delaporte est allée des « deux côtés » : elle a rencontré beaucoup de patients, la plupart se sont sentis en confiance et se sont livrés à elle ; elle a également échangé avec des soignants (infirmiers, psychologues, psychiatres) plus ou moins réceptifs, certains franchement hostiles. Elle a pu visiter différents 'pavillons' mais n'a pas été autorisée à tout voir en UMD (Unité pour Malades Difficiles, un service très fermé/sécurisé pour les personnes violentes, dangereuses pour elles-mêmes et/ou l'entourage).
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Ce documentaire est aussi passionnant que douloureux. Il me semble que l'auteur n'oublie rien : manque de moyens (pour la santé en général, et le domaine psy en particulier), dépression, psychose, la drogue & l'alcool qui les accompagnent souvent, honte, camisole chimique, hébétude, rémissions, rechutes, maltraitance et humiliation, peur de la folie, enfance difficile & hérédité, enfermement, solitude, ergothérapie apaisante ou infantilisante... et tant de questionnements du patient sur lui-même : POURQUOI ?
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Elle n'oublie pas sa propre position (la nôtre, à tous) par rapport à la maladie mentale :
« [Elle] est si près de chacun de nous, quand elle n'est pas en nous. Elle fait si peur qu'elle est indicible. »
Et cet aveu, cette sensibilité rendent cet ouvrage d'autant plus émouvant.
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Ce texte m'a fait penser à la BD de Lisa Mandel 'HP, Tome 1 : L'asile d'aliénés : de 1968 à 1973 souvenirs d'infirmiers'... entre autres souvenirs plus intimes, donc plus douloureux : « On ne parle pas de sa grand-mère morte internée dans un asile. On ne parle pas du fils qui s'est suicidé par mélancolie, bipolarité ou dépression. On ne parle pas du cousin interné à l'hôpital psychiatrique pour violences. On ne parle pas. »
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Fille du philosophe-épistémologue François Delaporte, l'auteure enrichit ses observations de réflexions issues de ses lectures, parfois conseillées par son père (ici, notamment, 'Le Normal et le Pathologique', de Georges Canguilhem).
J'ai aimé les termes choisis pour présenter la maladie mentale comme un parasite, un corps étranger indésirable dont on ne sait comment se débarrasser : on est 'habité' ; le corps 'abrite', 'héberge'...
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Bravo et merci, Madame Delaporte, pour cet ouvrage à mettre entre toutes les mains.
J'ai également apprécié d'y faire la connaissance du poète Thierry Metz (qui fut interné à Cadillac), et du groupe de rock bordelais Strychnine.
► Taper sur YT : Strychnine Alcool - ou Strychnine Lache - ou Strychnine Animal
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Ixchel Delaporte est journaliste et documentariste, “un fouilleur de bas-fonds” (comme le furent avant elle les philosophe Nietzsche et Michel Foucault)

En 2023 elle a reçu le Prix du meilleur ouvrage sur le monde du travail pour « Dame de compagnie en immersion au pays de la vieillesse ».
Son enquête sur la face cachée des châteaux bordelais, « Les raisins de la misère », a été adaptée en documentaire diffusé sur France 3.

Écoute les murs parler s'intéresse à l'hôpital psychiatrique de Cadillac (au sud-est de Bordeaux), ou plutôt à ses patients. Ixchel Delaporte n'a pas choisi ce nouveau champ d'investigation par hasard. Son histoire personnelle a guidé ses pas…

La journaliste est confrontée à la défiance de certains soignants. Sa présence, son regard extérieur perturbent.
Les malades, eux l'ont adoptée. Car Ixchel a su se placer en position d'écoute. Elle s'assoit ; les patients viennent vers elle. Ils ont besoin de se parler, de se confier.

L'autrice ne jette pas la pierre aux soignants, dont elle comprend aussi la fatigue, le découragement. Mais les mots sont là. Abus de pouvoir. Maladresses. Paroles blessantes. La prise en charge est loin d'être parfaite. Si la chimie a fait des progrès, l'écoute recule. Faute de temps, de moyens, d'engagement.

Un témoignage empreint d'humanité. À lire.
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Déjà auteur de plusieurs excellents ouvrages de journalisme d'investigation dans la filiation d'Albert Londres et de George Orwell, et où s'est illustré plus récemment dans notre payas Florence Aubenas, et d'ailleurs beaucoup de journalistes anglo-saxons, Ixbel Delaporte se penche aujourd'hui sur la psychiatrie française, à travers asile psychiatrique de Cadillac où elle a séjourne plusieurs mois, se mélant aux patients et aux soignants. le CHS de Cadillac est un hôpital ancien et important, comportant notamment une UMD (unité pour malades dangereux) où sont internés certains patients qu'on a qualifié de "fous les plus dangereux de France."
Mais l'auteur s'est principalement intéressé aux patients ordinaires, dont certains sont à la limite de la normalité; ceux-là sont plus ou mois intégrés à la vie de la ville, ils peuvent sortir, et certains ont même un logement en ville; on a évalué le nombre de ces derniers à plusieurs centaines, sur une population de 2800 habitants. Ils sont locataires de logements souvent misérables, et c'est d'ailleurs un logement de c genre que l'auteur a loué, dans la rue même qui donne accès à l'hôpital, et où longent nombre de malades "consolidés"
La vie de l'hôpital et celle de la ville sont donc étroitement mêlées, d'autant que le CHS est en fait la principale activité économique et le premier employeur de cette dernière,
Ixbel Delaporte a donc eu de nombreux entretiens avec les patients, et elle s'est attaché à certains d'entre eux, qui sont d'ailleurs vraiment attachants et dont elle montre à quel point leur maladie est le résultat d'une vie brisée et de graves traumatismes remontant souvent à l'enfance. Tout n'est pas rose à l'hôpital de Cadillac, qui partage la grande misère du système hospitalier français et l'incohérence des politiques publiques en la matière.
Mais ce n'est sans doute pas le pire établissement de France. J'ai cependant été surpris par la persistance de pratiques dont j'aurais cru qu'elles avaient été abandonnées depuis longtemps:
-la contention, traduire la camisole de force et le fait d'attacher le malade sur son lit pour l'apaiser; s'il est bien évident que cette pratique soit indispensable en cas de crise, le livre donne l'impression que son usage dépasse parfois la nécessité
-et l'électrochoc; même si l'on nous dit que cette pratique barbare est désormais pratiquée sous anesthésie, il n'en reste pas moins que quelques neurones sont détruits à chaque fois, ce qui contribue évidemment à "calmer " le patient; d'après ce que j'ai lu ailleurs, après avoir été quasi-abandonnée, elle aurait été réintroduite récemment.
Une excellente enquête, donc, où l'on apprend une foule de choses, et qui conduit à reconsidérer sa vision de la psychiatrie et la folie elle-même.
Je me permettrai de faire un petit reproche à l'auteur; elle accorde beaucoup trop de crédit à Foucault et à ses thèses, alors que l'on sait, ou que l'on devrait savoir, qu'elles n'ont pratiquement pas de valeur scientifique, étant le résultat d'un travail de cabinet, à partit d'a priori, et non de recherches sur le terrain ou de consultations d'archives pour son Histoire de la Folie à l'âge classique, dont les conclusions sont à l'opposé de celles des historiens qui ont effectué un tel travail;
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L'auteure s'installe dans une petite commune rurale du vignoble bordelais où est installé un hôpital psychiatrique. La direction de l'établissement répond favorablement à sa demande d'autorisation d'accéder à ce lieu et à ses résidents. La plupart des malades - du moins ceux qu'on l'autorise à approcher - sont d'abord intrigués par sa présence puis contents de partager une partie de leur histoire. Les soignants sont plus méfiants, faute de temps disponible mais aussi par souci du secret (pas uniquement médical).
Son récit dresse des portraits émouvants de "malades", et confirme que la psychiatrie est un parent pauvre de notre système médical. Les conditions de travail du personnel et les conditions de vie des patients sont souvent maltraitants. Ceci ne s'explique pas seulement par l'insuffisance des connaissances médicales sur les pathologies psychiatriques, mais aussi et surtout par un manque de volonté politique. Les cas les plus graves, ceux considérés comme dangereux pour la société (la formule consacrée ajoute "et pour eux-mêmes", mais je crains que ce ne soit seulement pour la forme !) sont enfermés (en pavillon, en chambre, parfois dans une camisole, et en permanence par la pharmacopée), et la société renonce à les soigner.

Le sujet est grave et intéressant, il est traité de manière sensible, sans volonté de sensationnalisme. Je n'apprécie généralement pas les textes construits avec des phrases très brèves, comme ici, car elles hachurent trop la lecture. J'ai cependant apprécié cet ouvrage, n'ayant pas eu à me faire violence pour prendre le temps de m'y installer.
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
D’une rive à l’autre, de moi à eux, au-delà de nos effrois, il était une fois, à Cadillac, la folie en face, en plein cœur, révélatrice des profondeurs de notre humanité, de notre fragile et insondable condition.
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Les patients doivent respecter les horaires fixés et suivre à la lettre les autorisations de sortie, sinon la confiance se perd et les permissions aussi. Cadillac vit au rythme de ces contraintes. Elle n’est pas une ville comme les autres. Les patients, sans le savoir, y déposent leur empreinte.
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L’hôpital fait fonction de filer, in extremis. Il réceptionne tout ce qui n’est pas supportable dehors. Ici, à l’intérieur, atterrit un concentré de l’inacceptable. Mêler une folie à une autre, mêler des dizaines de folies singulières échouées dans ces pavillons. Est-ce bien raisonnable ?
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Je ne sais plus, m’avait dit une jeune patiente schizophrène, si c’est la maladie ou l’enfermement qui sont en train de me rendre dingue.
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Les patients aiment bien l’idée de ce filet ultime de sécurité. La poésie du « si besoin ».
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