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EAN : 9782823620795
256 pages
Editions de l'Olivier (15/03/2024)
3.68/5   171 notes
Résumé :
Paul a commis l’irréparable : il a tué son père. Seulement voilà : quand il s’est décidé à passer à l’acte, Thomas Lanski était déjà mort… de mort naturelle. Il ne faudra rien de moins qu’une obligation de soins pendant un an pour démêler les circonstances qui ont conduit Paul à ce parricide dont il n’est pas vraiment l’auteur.

L’Origine des larmes est le récit que Paul confie à son psychiatre : l’histoire d’un homme blessé, qui voue une haine obsessi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (45) Voir plus Ajouter une critique
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Passer entre les gouttes.
Sortez les bottes et les parapluies, il n'est question que de flotte dans le dernier roman de Jean-Paul Dubois. Risque de submersion.
En 2031, il pleut sans discontinuer sur Toulouse depuis plusieurs mois. La Garonne est en crue qui l'eut cru ?
Paul Sorensen vient de faire un aller-retour au Canada, non pas à cause de la météo, ni parce qu'il y a toujours une escale à l'érable pour Caribous mal lunés dans les romans du Goncourisé, mais pour rendre un dernier hommage à son défunt père, en… lui tirant deux balles dans la tête. Est-ce un crime de flinguer un cadavre ? Avis aux passionnés de la jurisprudence des prétoires de la pétoire.
« Tu ne tueras point ton prochain ». Au Sinaï aïe, pas de trace après ce commandement d'un post scriptum du genre « … surtout s'il est déjà mort ». La justice est bien ennuyée pour qualifier l'acte et Paul Sorensen, fabricant de housses mortuaires de son état, est condamné à suivre une thérapie pendant un an auprès d'un psy qui a toujours la larme à l'oeil.
Le roman décrit le contenu des séances mensuelles chez ce garagiste de l'inconscient et le récit fait l'étalage des névroses et traumatismes qui permettent de comprendre ce geste insensé. le père, ordure non recyclable, escroc, manipulateur, égoïste a tout pour déplaire. Mauvais père, mauvais mari, mauvais associé, bon à rien, mauvais en tout.
L'humour de Dubois permet d'éviter la noyade dans cet océan lacrymal bien sombre et je n'ai pas eu besoin de sortir ma bouée Canard, anneau de natation que je porte pourtant avec beaucoup d'élégance.
Ce roman pluvieux, qui ravirait Evelyne Dhélia, toujours en dépression en l'absence de dépressions, draine en arrière-plan un thème cher à cet auteur, celui de la solitude qui m'a particulièrement ému. A travers son personnage en carence d'affectation, prêt à se bercer d'illusions en Scandinavie sur les traces d'un grand-père (ancien secrétaire général des Nations Unies), ou son attachement à un chien mystérieux sur les plages de la Côte Basque, le récit souligne que les racines infantiles du sentiment de solitude sont incolores mais qu'elles ne disparaissent pas avec les cheveux blancs. La solitude s'apprivoise mais le solitaire ne se laisse pas apprivoiser.
Comme souvent avec cet écrivain fataliste, j'ai vu que les avis étaient partagés sur ce roman qui n'a rien de pleurnichard. Pour ma part, je n'ai pas eu besoin de sortir les rames et j'apprécie toujours autant la forme de connivence que le style de Jean-Paul Dubois instaure avec le lecteur que je suis. Ses histoires, légères ou sombres, me parlent, ses personnages renfermés me sont familiers. Et puis étant Toulousain, je suis aussi forcément un peu chauvin.
Livre offert par un rayon de soleil qui n'a pas la larme facile.
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Du Réel.

Jean-Paul Dubois fait partie de ces auteurs dont j'ai lu tous les ouvrages et dont j'ai tout aimé. Ou presque. Il y a « Hommes entre eux », par exemple, qui rentre dans ce que j'appelle pompeusement les périodes « off ».
L'Origines des larmes en fait indéniablement partie.
Je tiens à présenter par avance mes excuses pour le ton pompeux, légèrement ampoulé de ce petit billet sur lequel le nouveau style de mon cher auteur a déteint.
Je ne m'y attendais pas, il m'a pris par surprise. Il faut parfois un peu de temps pour rentrer dans un Dubois. Mais tout de même, là il a fallu de je retrouve mon Dictionnaire des mots rares et précieux !! Jugez vous-même:
Chancissure, cryptogamique, controuvé, ergastule, érubescence, aristarque, épiphora, conjonctivochalasis, baltique, péricaryon, tronies, empyreume, enbata, galerne, acide ursodésoxycholique etc.
Voilà par exemple pour les mots. Mais il faut aussi compter sur l'érudition des références :
Samuel Taylor Coleridge, Thomas a Kempis (connu pour un livre surprenant intitulé L'Imitation de Jésus-Christ) , Arnaud d'Amaury, Salomon van Ruysdael (peintre flamand du fameux Après la pluie) , Dag Hammarskjöld, Bo Besko, Kim Tschang-Yeul (l'homme qui peint des gouttes d'eau et dont le musée est sur l'île de Jeju, au sud de la Corée du Sud, où j'ai eu la chance d'aller) et tout est à l'avenant.

Et si c'est pour le moins déconcertant, il faut dire qu'on s'y fait rapidement en épousant la personnalité de notre anti-héros, Paul Sorensen.
Vous le savez peut-être, il y a des récurrences dans l'oeuvre de Dubois : les personnages principaux se nomment Paul ou Jean-Paul, on y rencontre des chiens et des avions et même assez souvent des tondeuses à gazon…

Paul est né en 1980. Sa mère et son jumeau n'ont pas survécu à sa naissance. Il a été élevé à…Toulouse (évidemment!) par le pervers, l'odieux, l'abominable Lanski, son géniteur. Mais aussi par l'aimable Rebecca, sa mère adoptive. Marta, la mère biologique, lui lègue ...son patronyme.
L'action se déroule en 2031. Après une longue période de sécheresse, il pleut continuellement depuis deux ans. Paul a repris l'entreprise de Rebecca à la mort de celle-ci et vend des housses mortuaires très haut de gamme. L'entreprise, Stamentum, se porte à merveille en ces périodes troubles.
Mais voilà, Paul est jugé pour avoir tiré deux balles dans la tête de son père déjà mort et gisant à la morgue.
Il sera condamné à une obligation de soins : pendant un an, il devra être suivi par un psychiatre pour cet étrange parricide.
L'action (si l'on peut dire, il ne se passe pas grand chose…) peut se dérouler tranquillement .
Au fil des quatorze séances, Paul va se confier plus ou moins aimablement au Dr Frédéric Guzman qui souffre, lui, d'un sévère épiphora : son oeil droit pleure, pleure sans arrêt.

Ce livre est une réflexion puissante et, comme toujours chez l'auteur, drôle et désabusée, sur…l'origine des larmes.
Il y aura beaucoup d'eau, on y parlera beaucoup de la mort mais le vrai sujet est ailleurs, bien sûr. Ce livre est une aimable dissertation sur le réel. Mine de rien. Aux détours de toutes ces histoires d'intelligence artificielle, de maladies à prions, de photos de jouets et de l'incroyable chien Watson. L'épisode le concernant est un petit morceau d'anthologie, extrêmement drôle, sans doute le meilleur moment du livre.
Il y sera beaucoup question de Nom du Père à partir de l'abominable Thomas Lanski à la fois omniprésent et forclos, doublement forclos, on le comprendra lors de ces fameuses séances. La relation qui va s'installer entre Guzman et Paul aura de quoi surprendre !
Je disais donc le réel ou le Réel, comme vous voudrez, qui fait dire à Paul, retournant l'aphorisme : « Pourquoi y-a t'il Rien plutôt que quelque chose ? »

Je ressors songeur de ce livre mélancolique, vous laissant mes impressions à chaud. S'il n'a rien à voir avec « Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon » qui lui a valu le Goncourt 2019, ce n'est pas pour autan un livre d'intello. Un peu quand même. Disons d'intello semi-dépressif alors. Mais parfaitement abordable, dès lors qu'on aura compris qu'il s'agit de second degré !

Mais bon, ne boudons pas notre plaisir!
Dubois tisse une oeuvre aussi déroutante que passionnante, en dehors des chemins battus, et bientôt en alerte submersion permanente…

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Le plus américain des auteurs français nous livre une sorte d'anti-Portnoy sous la forme de confessions à un psy d'un homme pas vraiment obsédé sexuel comme le personnage de Roth, mais plutôt un homme futuriste et anesthésié du désir, un anonyme du sexe qui bavarde de préférence avec une intelligence artificielle dénommée U.No. C'est la justice qui l'oblige à ouvrir la porte à l'interaction thérapeutique – en l'occurrence un psychiatre malade de son oeil qui pleure sans cesse, car Paul avait essayé sa propre voie de guérison : tuer le père, deux fois plutôt qu'une, lui mettre deux balles dans la tête. Un meurtre qui n'en est pas tout à fait un, une sorte de nouveau crime parfait, sûrement pour se libérer et sans le savoir désamorcer la peine ferme, étant donné qu'aux yeux de la justice Paul avait connaissance de l'état préalable de cadavre du père à la morgue, avant de l'occire à nouveau.
Un Paul. Un de plus pourrait-on croire. Mais à l'allure peut-être plus allégorique cette fois. On est en 2031 du côté de Toulouse, les crues bouillonnantes de la Garonne ont succédé à la sècheresse, et Paul Le narrateur connaît l'origine de ses larmes dans la pluie qui tombe à verse, à moins que ça soit plus simplement l'humanité qui pleure. Une hypermnésie inexpliquée de sa naissance lui fait savoir depuis toujours qu'il est né avec un trou en lui en ce 20 février 1980 (30 ans après l'auteur), en ayant perdu par la même occasion son frère jumeau et sa mère. Une vie en échange de deux autres. Pas vraiment étonnant qu'il ait eu besoin 51 ans plus tard de faire des trous dans la tête de son géniteur pervers, celui-là même qui lui offrit pour son sixième anniversaire un canari dont il avait arraché la tête avec ses dents. En plus de la pluie, c'est bien la mort qui trainera ainsi ses guêtres au fil de cette légère dystopie toulousaine, elle s'inscrit en lignée funeste dans la vie de Paul : « Dans notre famille, et dans l'entreprise Stramentum qu'elle dirige, il faut bien convenir que la mort est sans conteste notre égérie, notre actionnaire principale, que je suis le fade héritier de cette firme macabre et très certainement, aussi, le continuateur de la sombre génétique qui l'inspire. »

Jean-Paul Dubois est connu pour ses habitudes – notamment ses personnages de Paul, les tondeuses, les chiens ou les voitures, le fait d'écrire ses romans en un mois – il se reconnaît entre mille dans son art de planter un décor saugrenu pour dérouler le fil d'une prose savoureuse, désenchantée, ironique. Les habitués pourront être surpris ici avec cet écart à peine futuriste qui flaire notre société pour visiter la solitude, la névrose, la perversion ou la crise écologique, mais ils retrouveront leur Paul, pas tout à fait comme les autres, qui semble mêler ses larmes à la pluie incessante d'un dérèglement généralisé. Tout cela rythmé par les sessions mensuelles avec le psy, et l'occasion pour l'auteur de greffer à la vie de Paul nombre de sujets et de réflexions parfois érudites, comme un état de sa mémoire activée par son travail ramassé sur un mois.
Voilà en tout les cas le nième roman d'un auteur toujours en forme qui continue de se renouveler en se réécrivant, un roman profond, noir et beau, à la drôlerie sous-jacente. Un de plus...
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La souffrance étant inévitable, mieux vaut souffrir avec JP Dubois que sans lui.
C'est sensiblement mon ressenti à la sortie de ce roman. Pourtant, avec cet auteur, je suis souvent très bon client, dithyrambique même. Mais là, crotte de bique, je n'y parviens pas.
Dans ma phrase de préambule, remplacez « JP Dubois » par « Jésus » et vous obtiendrez un des propos du livre le plus imprimé au monde après la Bible. Il a été écrit par Thomas a Kempis et sert à l'une des nombreuses et intéressantes digressions qui font le charme des ouvrages de M. Dubois.
Vous prendrez aussi connaissance, à moins que vous soyez plus érudit que moi, de l'existence d'un homme fascinant : Dag Hammarskjöld, secrétaire général des Nations Unies de 1953 à 1961 et qui plus est prix Nobel de la paix, et… grand-père de Paul, le personnage principal du roman. Seul souci, Dag, n'a jamais eu d'enfant…
Vous rencontrerez également le peintre coréen Kim Tschang-Yeul, un Dieu vivant, connu pour ses multiples et merveilleuses représentations de gouttes d'eau.
Éventuellement et poétiquement, l'origine des fameuses larmes.
Mais les larmes chez M. Dubois ont de multiples origines. La plus flagrante, la plus lumineuse est la Mort. La mort de sa mère, la mort de son frère jumeau. Cependant, dans ce roman, rien n'est lumineux, tout est obscur, noir, plombant.
La mort y est d'ailleurs traitée comme une vraie délivrance de l'âme torturée, martyrisée, suppliciée de Paul, au point qu'il aille tuer Thomas Lanski son géniteur de 2 balles dans la tête 15 jours après sa mort. Cet homme abject le mérite amplement, je l'ai mesuré au fil des chapitres lors des rencontres mensuelles de Paul et de son psychiatre M. Guzman.
Cette obligation est le fruit pourri de la condamnation de Paul pour avoir ôter la vie à un cadavre.
Cet échange mensuel constitue « le corps » du roman : « Rouvrir les livres de peine, les almanachs de chagrin, les albums d'humiliation, entendre à nouveau jaillir cette voix de carnassier, voir ses mâchoires mastiquer les jours de nos vies. »

Évidemment, par instant, j'ai été happé par les phrases magiques qui déferlent et m'aspergent en pleine face comme le ressac de la vie. Bien sûr, j'ai apprécié les habiles digressions de cet auteur, notamment sur l'intelligence artificielle et sur le dérèglement climatique mais, noyé d'ambivalence, j'ai ressenti un plaisir certain à tourner la dernière page, comme pour repousser la mort trop présente, trop palpable.
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Dans son dernier roman, Jean-Paul Dubois réussit une mise en abyme étonnante de la morale et de la justice.
La morale, sous toutes ses formes, peut juger sévèrement la plupart de nos actes, en se référant au religieux, au sacré, à la liberté d'autrui. La justice elle, agit selon des critères différents.
Paul Sorensen, le personnage principal, est au coeur de cette problématique. Il a commis un acte (je ne vous dis pas lequel) réprouvé par la morale, pas la sienne toutefois. La justice, au regard du droit et de la jurisprudence, considère cet acte, pour surprenant qu'il soit, comme un délit mineur, puni par une « année de prison assortie du sursis, d'un contrôle judiciaire et d'une prise en charge médico-psychologique obligatoire pendant une année. »
Au début du roman, Paul Sorensen accepte de se conformer aux procédures policières et judiciaires. Il est pleinement conscient de son geste, mais pour autant ne souhaite pas en donner la motivation. Il se joue de l'inspecteur qui lui notifie sa garde à vue et l'interroge, « Cet homme est peut-être trop jeune pour entendre ce genre de choses. (…) je vois bien qu'il ne sait plus quoi penser à mon sujet. ». Avec le procureur Mingasson, les choses sont différentes, l'homme est « tout à fait singulier, magnanime, il possède l'art de la digression et la faculté de mettre ses interlocuteurs à l'aise. » Paul s'en méfie, « Cet homme est un procureur. Ne jamais perdre cela de vue. » Après sa condamnation, il se retrouve face au docteur Frédéric Guzman. Il devra se soumettre à 12 séances mensuelles et raconter à Guzman le parcours de vie qui l'a conduit à commettre l'acte pour lequel il a été jugé et condamné. La liberté est à ce prix.
Pour Paul, Guzman est « (…) un suricate, ce petit animal du désert surnommé le « guetteur des sables »
Le corps du roman est composé du récit de ses 12 séances. Guzman et Paul se jaugent, s'apprécient se joue des tours, adoptent des postures ou la jouent franc-jeu.
Dubois excelle dans le rôle du conteur. Chacune des séances est l'objet de boucles sur l'histoire de Paul, de retours-arrière, de confrontations entre les deux hommes. Ils jouent à cache-cache. « Cette friandise d'hypocrisie fait partie des codes de maintien de cette étrange valse que nous nous efforçons lui et moi de danser », pense Paul. « (…) je pourrai sans mal vous prendre pour un mythomane et un affabulateur » lui rétorque Guzman.
Ce que l'on retient de l'histoire de Paul, c'est le traumatisme subi à la naissance – la mort de sa mère et de son frère jumeau - la détestation de son père, l'amour de sa belle-mère et sa capacité une fois adulte à faire preuve de la plus grande résilience en se créant un univers d'où le mal est absent.
Ce père dont il pense, « Il ne connaissait rien à la gestion des machines et des hommes, mais appartenait à cette école de pensée libérale convaincue que faire et dire n'importe quoi était toujours préférable à un immobilisme raisonné. » (Suivez mon regard…)
Les thèmes chers à Dubois sont présents dans ce roman. Les relations père fils, la mort et le souvenir des disparus, la punition, l'amour des femmes, ici la mère biologique décédée et la mère nourricière, le frère jumeau disparu, les identités alternatives.
Autre thème cher à Dubois, les détails techniques et la précision de certaines descriptions :
« A la maison, dans une partie basse d'un garage en sous-sol, j'ai installé une pompe à relevage autoamorçante qui préserve des accumulations »
« Une petite voiture. Simca Versailles bicolore des années 60 de la vieille marque Dinky Toys. Avec ses pneus démontables en caoutchouc et son indestructible carrosserie moulée en Zamak, alliage de zinc, d'aluminium, de magnésium et de cuivre.
On en redemande ! »
Personnellement je n'ai pas trouvé ce roman plus sombre ni moins sombre que les autres romans de Dubois. Il exprime, comme le fait toujours l'auteur, la capacité de son personnage principal à subir les épreuves de la vie en faisant preuve de la plus grande résilience et à trouver des solutions de substitution.
Jean-Paul Dubois en profite pour nous faire connaître des personnages réels qui résonnent avec les siens. C'est le cas de Dag Hammarskjöld le secrétaire des Nations Unies et de Kim Tschang-Yeul le peintre coréen des gouttes d'eau qui ne déparent pas le roman, et dont on pourrait penser que l'histoire est trop belle pour être vrai. Comme dans chacun de ses ouvrages, les sources de Jean-Paul Dubois sont vérifiées et vérifiables. Il partage avec ses lecteurs une réalité qu'ils ne connaissent pas forcément. Il nous fait découvrir des événements, des lieux, des pays, des personnages dont nous ignorons l'existence et qui pour autant existent même si nous ne le savions pas…
L'autre point fort de ce roman est de mettre en scène des événements dont nous n'ignorons rien mais face auxquels nos sociétés sont impuissantes par choix ou par négligence. « A l'époque nous sortions à peine du Covid, ce petit frère du Sers-22 puis du Codim-12. » ; « (…) la fonte accélérée des glaciers de l'Antarctique rendrait les eaux de ce continent moins denses et moins salées, ce qui aurait pour conséquence (…) de modifier sensiblement le climat. » ; dans la Toulouse de 2031 où se déroule le roman, « Tantôt ce sont de brusques et violents tempêtes (…) tantôt de longues et patientes averses (qui) épuisent les arbres et font enfler les fleuves. » ; « (…) il est question d'installer, sur les trottoirs, des passerelles improvisées avec des bastaings posées sur des briques. »…Tout cela a un air de déjà vu !
Paul Sorensen a une conscience aigüe de son environnement de ses limites, de ses perspectives d'évolution il ne peut pas être un personnage serein et rieur mais seulement un homme lucide avec tout ce que cela implique dans ses relations aux autres. Il ne peut se résoudre à « sourire en pensant à autre chose »
Le seul bémol que je formulerai, est l'histoire du grand-père qui est un peu trop téléphoné…
Pour l'essentiel j'ai adoré ce roman, comme tous les autres de Jean-Paul Dubois !
J'adore Dubois pour, des phrases comme celle-ci avec cette expression « garder son moi pour soi »…
« Qu'est-ce que je suis allé raconter ! Il ne faudrait jamais rien dire, garder son moi pour soi, s'accommoder de ses nuisances intimes, les laisser décanter dans le bac à compost, attendre que ces épluchures de l'âme atteignent une granulométrie acceptable pour les évacuer à travers un tamis peu regardant. Au lieu de quoi me voilà sommé de mettre à nu un corps et des sentiments depuis bien longtemps serrés dans une remise. »
…mais aussi pour ses idées loufoques :
« En traversant le jardin qui longe l'édifice, j'entends les sons des grandes orgues jaillir des voutes et des vitraux. Pour jouer ainsi « Angie » des Rolling Stones à tue-tête, se débattre avec quarante-sept jeux, soixante rangs, quatre claviers, trente touches au pédalier, à une heure pareille, j'imagine que le titulaire des orgues doit être seul dans son domaine. »…On entend d'ici…
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critiques presse (8)
LeMonde
08 avril 2024
Pourquoi tuer son père, surtout s'il est déjà mort ? Bluffant nouveau Dubois.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeFigaro
29 mars 2024
Lit-on un roman tragique ou, au contraire, furieusement comique ? On se le demande devant l'histoire d'un pauvre pantin sous l'averse.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LaLibreBelgique
26 mars 2024
Dans son nouveau roman, “L’origine des larmes”, le Goncourt 2019 emmène son lecteur dans un futur proche, où le monde part à vau-l’eau et où on peut tuer son père… mort deux semaines plus tôt.
Lire la critique sur le site : LaLibreBelgique
Culturebox
22 mars 2024
L'auteur de 74 ans nous présente un homme solitaire, qui préfère la compagnie de l'intelligence artificielle et des chiens à celle des hommes, et dont l'existence a été en grande partie fracassée et gâchée par un père abject.
Lire la critique sur le site : Culturebox
LesEchos
19 mars 2024
L'écrivain diabolique signe un drôle de drame où les pleurs d'un homme brisé se mêlent à la pluie sans fin d'une France au climat déréglé. L'histoire mi-tragique, mi-comique d'un vrai faux parricide, de la folie des hommes incarnée par un père destructeur.
Lire la critique sur le site : LesEchos
LeSoir
18 mars 2024
Le nouveau roman de Jean-Paul Dubois tente d'expliquer un geste insensé : « L'origine des larmes ».
Lire la critique sur le site : LeSoir
OuestFrance
18 mars 2024
« L'Origine des larmes » paraît ce vendredi 15 mars en librairie. Le Prix Goncourt 2019 interroge la possibilité d'une vie épanouie face au manque d'amour avec un récit poignant.
Lire la critique sur le site : OuestFrance
Bibliobs
15 mars 2024
Dans son dernier roman l'ami Dubois autopsie la névrose d?un homme. C'est au final aussi beau que triste, aussi profond que désespéré.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
Rebecca était catholique. Je dirais qu'elle appartenait au club mais sans le moindre fanatisme. Elle pratiquait discrètement, un peu comme on va à la salle de sport, une fois par semaine pour s'entretenir. Peut-être quelques génuflexions, des signes de croix par-ci par-là, une confession de temps en temps, tel était le secret de sa forme religieuse.
(pages 75-76)
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En revanche, la démence météorologique que nous subissons, une Europe sous les eaux, l'incapacité des spécialistes à comprendre réellement le phénomène et à envisager la suite ne semblent pas le tracasser, à l'exception de l'installation, sur son trottoir, de madriers posés sur briques, qu'il doit emprunter pour se rendre chez lui. Le monde coule, le Gulf Stream lâche peu à peu l'affaire, et Guzman accepte de se noyer, soit, mais devant chez lui, et les pieds au sec.
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Pour répondre à la question de Guzman - "était-il un fervent catholique?" - je serai tenté de m'aligner sur les propos d'Arnaud Amaury, ce bienveillant légat du pape auquel on demandait comment, dans la ville de Béziers, distinguer les gens de Dieu des hérétiques, et qui s'en remit à sa merveilleuse foi : "Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens".
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Dans le noir, ruisselante, la cathédrale ressemble à un gros corbeau mort. Je plains les pauvres humains qui ont tué leurs vies à bâtir ces palaces du christianisme. Des granges en bois auraient fait l'affaire. Et je me dis qu'il ne faut vraiment croire en rien pour faire monter des hommes au sommet des clochers.
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Je n'osais rien dire à Rebecca, laquelle, en bonne catholique, croyait toujours au miracle. Elle continuait de fréquenter son église le dimanche et s'achetait parfois un brin d'illusion en faisant brûler un cierge pour le saint de son choix.
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Videos de Jean-Paul Dubois (35) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jean-Paul Dubois
Dans son dernier ouvrage intitulé "L'Origine des Larmes", Jean-Paul Dubois plonge ses lecteurs dans une histoire aussi sombre que captivante. Ce roman dépeint le destin tragique de Paul, un homme d'âge mûr, en proie à un passé familial tumultueux. le titre même du livre évoque la douleur et la souffrance qui parsèment le récit.
Paul, le protagoniste, est tourmenté par les sévices infligés par son père, un individu toxique et sadique nommé Thomas Lanski. Pour se venger des années de souffrance endurées, Paul commet l'impensable : il tente d'assassiner son père. Cependant, le destin en décide autrement, car au moment où Paul déclenche son arme, son père est déjà décédé.
Déterminé à accomplir sa vengeance, Paul transporte le corps de son père jusqu'à une morgue en banlieue de Toulouse. Là, dans un acte de défiance ultime contre son géniteur maléfique, il commet l'impensable : il tire deux balles dans la tête du cadavre, mettant ainsi fin à la vie de son père une seconde fois.
Dubois décrit avec une précision déconcertante la noirceur de l'âme humaine à travers les actions de Paul. le lecteur est plongé dans un tourbillon d'émotions, confronté à la cruauté et à la complexité des relations familiales. "L'Origine des Larmes" offre une exploration profonde de la psyché humaine et des conséquences dévastatrices de la vengeance.
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