L'idée n'est pas ici de trouver une réflexion unilatérale, mais des déclinaisons en nouvelles et en non-fiction autour de l'errance et du rire dans la littérature, et les sociétés antillaises. Si l'importance de ces deux concepts trouve sa source dans
L Histoire et la Géographie,
l'errance et le rire ont contribué à créer une identité évolutive, un appel d'air à la liberté dans un terreau qui lui semblait infertile.
Attirée en premier lieu par les noms hautement chéris de
Louis-Philippe Dalembert et surtout, surtout,
Lyonel Trouillot (oui encore lui et tant sa nouvelle que la partie essai sont magistrales !), je me suis empressée de cocher ce titre lors de la dernière masse critique de Babelio.
Une belle découverte, délicieusement protéiforme qui m'a faite passer par plusieurs émotions à l'image du rire, contenu ou éclatant, souvent bouclier au malheur, masque de la douleur, parade à la mélancolie. Un rire errant, lui aussi, qui nous convie à voyager avec lui au gré de ses mutations.
J'ai adoré la diversité de tons. Découvrir les aventures de Compère Lapin grâce aux talents de conteur de Frankito, assister à la rencontre fortuite des âmes de
Josephine Baker et
Aimé Césaire sous la plume de
Mérine Céco (dont j'ai également dévoré le texte sur les femmes et l'errance d'ailleurs) , suivre les sinueux chemins-chiens de Gloria grâce à
Gisèle Pineau, et que dire de l'empowerment offert gracieusement par
Gaël Octavia dans son rire-ladja (si seulement j'avais connu le "Gwopwel" plus tôt !),... Je ne les cite pas tous mais il y a tant d'auteurs et d'autrices que j'ai envie désormais de connaître en format plus longs!
Si, par mon incapacité à les comprendre, j'ai fait l'impasse sur les versions créoles proposées pour la nouvelle d'
Hector Poullet et les deux textes de Mélissa Béralus, j'en salue tellement l'initiative ! Les quelques phrases survolées, la musicalité particulière qui s'en dégage, me font toucher du bout des yeux ce qu'elles peuvent apporter au lectorat qui en détient les clés.
Comme une réponse à l'errance, cette langue créole se fait point d'ancrage à de multiples trajectoires issues de déracinement divers, choisis ou, plus souvent, contraints, et créé de ce lointain bigarré, un pont vers un ici commun.
La partie "essais" est des plus enrichissante elle questionne les fonctions, pointe du doigt les inégalités avec clarté et intelligence.
Merci pour ce voyage sans avion, cette errance de l'esprit qui se poursuit même après lecture.