Mary Boleyn, à peine mariée et encore adolescente, est poussée par sa famille à devenir la maîtresse d'Henry VIII Tudor. Les Boleyn et, surtout, l'oncle Howard de Mary, souhaitent obtenir les faveurs du Roi et n'ont pas trouvé de meilleure solution que de lui offrir la jeune fille qu'Henry convoite depuis quelque temps.
Mais Anne, la soeur de Mary, est revenue à la cour anglaise après un long séjour en France. La rivalité qui a toujours opposé les deux soeurs renaît de plus belle : Anne est jalouse de Mary, sa cadette, qui a donné deux enfants à Henry VIII. L'aînée des Boleyn tente alors de capter l'attention du Roi.
Quand elle y parvient, la famille Boleyn et l'oncle Howard décide de la pousser sur le trône à la place de Catherine d'
Aragon, l'épouse d'Henry, qui n'a pas pu lui donner d'héritier mâle. Mary Boleyn doit donc céder la place à Anne, cette soeur qu'elle déteste autant qu'elle l'aime...
Ceux qui me connaissent bien (ou qui suivent mes critiques depuis un petit temps) le savent : j'adore l'histoire et la culture britanniques. Et j'ai un faible pour la monarchie Tudor qui, malgré la cruauté dont elle a parfois fait preuve (Henry VIII n'hésitait pas à faire décapiter tous ceux qui le gênait) est tout de même une grande dynastie.
Ma soeur a donc et la bonne idée de m'offrir ce roman, que j'ai adoré.
Raconté du point de vue de Mary Boleyn, il apporte un regard extérieur assez effrayant sur la personnalité d'Henry VIII et d'Anne Boleyn.
Bien entendu, il s'agit d'une fiction historique. L'histoire y est donc romancé et, d'ailleurs, j'ai un peu de mal à croire qu'Anne Boleyn ait été aussi cruelle. Mais en ce qui concerne la tyrannie dont Henry VIII a souvent fait preuve,
Philippa Gregory respecte assez bien l'histoire réelle...
Ce qui attire d'abord l'attention dans ce roman, c'est l'opposition qui existe entre les deux soeurs Boleyn. Mary est douce et gentille, elle a un physique typiquement anglais, avec ses cheveux blonds et son teint pâle. Anne, est plus "exotique", elle est brune et ténébreuse, dure et froide, et possède une séduction presque diabolique (ce qui lui vaudra quelques soucis à la fin de sa courte existence...). Anne elle-même perçoit cette différence entre elle et sa soeur et décide d'en jouer quand elle lui dit :
“I shall be dark and French and fashionable and difficult. And you shall be sweet and open and English and fair. What a pair we shall be! What man can resist us?”
Cette opposition se retrouve également dans leur caractère : Mary est un peu naïve, presque idiote diront certains. Elle n'a pas un grand sens de la repartie et a du mal à servir des réponses spirituelles à Henry VIII lorsque celui-ci commence à lui faire la cour. Anne, en revanche est vive et spirituelle et possède un grand sens de la repartie : elle n'a aucun mal à discuter sur un pied d'égalité avec le Roi, même sur des sujets aussi sérieux que la théologie ou la poilitique.
Au début du roman, c'est Anne qui semble la plus sensée et la plus intéressante des soeurs Boleyn. Mary, elle, est reléguée au second plan malgré son rôle de narratrice.
Mais au fil du récit, Anne s'endurcit de plus en plus ; tandis que Mary devient de plus en plus sensée. On éprouve alors plus de sympathie pour cette "autre Boleyn" (Mary) auquel le titre du roman fait référence.
Philippa Gregory s'amuse également à opposer les cours successives de Catherine d'
Aragon et d'Anne Boleyn. Au début du roman, l'ambiance de la Cour est plutôt bon enfant. Les messieurs accompagnent le Roi dans les appartements de Catherine et y font une gentille cour aux dames de compagnie de la Reine. Tout se passe de façon très courtoise.
Quand Anne montera sur le trône, cette même Cour va se transformer. On ressent, grâce aux descriptions que nous en fait Mary Boleyn, une ambiance de débauche et d'orgie qui n'existait pas du temps de Catherine. La "première Reine" d'Henry VIII était pieuse et vertueuse, mais Anne ne vit que pour son plaisir et pour séduire le Roi. Ses appartements accueillent constamment des musiciens, des poètes, des hommes qui font une cour moins subtiles à ses dames...
Les conditions de vie à la Cour se durcissent. Henry VIII est de plus en plus entouré par des gens qui souhaitent obtenir ses faveurs et sont prêts à tout pour y arriver.
Les conditions de vie des femmes de l'époque sont également bien expliquées par
Philippa Gregory, toujours par le biais de Mary. Cette dernière, une fois qu'elle n'est plus la favorite d'Henry, est littéralement oubliée et ignorée par sa famille. Elle ne sert plus qu'à seconder Anne, à la conseiller afin que celle-ci conserve l'affection du Roi. Mary, devenue veuve, ne peut même pas se choisir elle-même un nouvel époux. On la prive de ses enfants, qu'elle ne voit qu'une fois par an alors qu'elle souhaiterait les élever elle-même. Elle est rejetée le jour où elle se marie sans l'autorisation d'Anne et de leur oncle Howard (qui est le chef de famille).
Dure époque que celle du XVIe siècle anglais. Et pourtant, on ne peut se retenir d'éprouver une certaine admiration pour Henry VIII et ses deux premières épouses. Malgré son caractère épouvantable, Henry VIII est un grand monarque et le prouve plus d'une fois dans le roman de
Philippa Gregory. Au début de son règne, il sait s'entourer d'hommes intelligents, qui dirigent le Royaume à sa place et de main de maître (le cardinal Wolsey,
Thomas More, Cromwell et bien d'autres). Catherine d'Argaon, fille des Rois catholiques (Isabelle et Ferdinand) a été élevée pour régner. Elle a toutes ces qualités qui font les grandes Reines et le peuple anglais y est très attaché. Anne Boleyn, si elle ne dispose ni de l'éducation nécessaire à sa fonction, ni de l'affection du peuple, est néanmoins prête à tout pour régner. Sa pugnacité, son entêtement se révèlent payant. Et puis, surtout, on ne peut s'empêcher de la plaindre, puisqu'elle est poussée dans le lit du Roi par sa famille, qui souhaite s'élever grâce à elle.
Ce sont donc de grands personnages qui animent les 600 et quelques pages de ce roman. Evidemment, cela donne un récit fabuleux, qui nous plonge directement dans cette époque moouvementée. Une fois encore,
Philippa Gregory parvient à rendre l'histoire passionnante. Effrayante aussi, étant donné la fin prématurée et cruelle infligée à certains grands personnages de l'époque.