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EAN : 9782020331364
174 pages
Seuil (06/05/1998)
3.84/5   43 notes
Résumé :
Mai 68 : j'avais quatorze ans.
Mai 98 : j'en ai quarante-quatre. Imparable. Trente ans et quelques cheveux blancs plus tard, la tentation était forte de jeter un petit coup d'œil dans le rétroviseur. Les banderoles, les slogans, les drapeaux rouges, les manifs. Et ce qui a suivi. Le militantisme. Pour ce qui me concerne, dans les rangs trotskistes. A la ligue communiste. Mai 68 : elle avait quatorze ans. Mai 98 : elle en a quarante-quatre.
Imparable ; ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Un récit de l'engagement social de Thierry Jonquet et de sa future épouse au début des années 70. Lui dans des mouvements de gauche, elle dans des mouvements sionistes-socialistes. Un témoignage intéressant et fort plaisant à lire. J'ai été particulièrement frappé par la rigidité de l'organisation hiérarchique des mouvements de gauche de cette époque.

Les héros de ce récit s'appellent Victor et Léa, mais on comprend qu'il s'agit de Thierry Jonquet et de sa femme. L'auteur construit une historiette pour expliquer combien leur rencontre était improbable, en faisant intervenir Monsieur Hasard et son équipe. Amusant.

Amusant pour emballer un contenu plus sérieux et fort intéressant. En 1968, Victor avait quatorze ans. Ce n'est pas tant de 1968 dont il sera question ici, mais plutôt des années qui ont suivi. Victor rejoint d'abord Lutte ouvrière, après avoir patiemment démêlé l'écheveau des groupuscules de gauche. Deux points m'ont frappé dans ce qu'il relate. le premier point, c'est l'organisation hiérarchique rigide du mouvement. On commence au bas de l'échelle et il faut réellement avoir fait ses preuves pour être autorisé à monter d'un petit cran. L'organisation est également entourée d'un secret presque paranoïaque. le second point qui m'a frappé dans le parcours de Victor, c'est l'importance de la lecture. Son mentor de Lutte ouvrière lui fait lire les classiques, encore et encore, jusqu'à ce qu'il maîtrise l'histoire et la philosophie du mouvement. Pas question de se faire un vernis de culture en trois clics sur Google (qui n'existait pas encore). Il faut apprendre à la dure si l'on veut se faire sa place dans le mouvement. Enfin, j'ai souri en lisant la raison pour laquelle Victor a quitté Lutte ouvrière pour rejoindre la Ligue communiste: il a été profondément déçu d'apprendre, par hasard, que son mentor qui, le soir dans les bistrots, le préparait si activement à la lutte, était, à la ville, tout craintif d'afficher ses convictions !

En parallèle du parcours de Victor, nous suivons celui de Léa, dans le mouvement sioniste-socialiste Dror. L'ambiance du mouvement est différente de celle que connaît Victor. L'esprit de communauté y est davantage présent. Léa séjourne plusieurs fois dans un kibboutz.

« Rouge c'est la vie » est particulier dans la bibliographie de Thierry Jonquet. Je le cite: « [Victor] écrit des romans. Des romans noirs. Ses personnages, tourmentés par le mal, n'en finissent pas de patauger dans la haine, la déraison. le seule histoire d'amour qu'il se sentait prêt à coucher sur papier, avec maladresse, c'était la sienne. Celle dont Léa a écrit toutes les pages, patiemment, en vingt années de vie commune. Victor aime Léa. Léa aime Victor. Tout est dit en six mots. Six. Pas un de plus. »

Pour l'instant, j'ai peu lu Thierry Jonquet, mais j'ai déjà été séduit par son mélange de suspense et de tableaux sociaux, tout cela dans un style plaisant; je le laisse en bonne place sur ma pile. Parmi mes maigres lectures, je mettrai en avant « La Bête et la Belle », dont la fin est surprenante !

Thierry Jonquet est décédé en 2009, à l'âge de 55 ans, des suites d'une maladie soudaine. Comme disait le Chat de Geluck, « Alors comme ça... c'est Dieu qui nous donne la vie... et c'est Dieu qui nous la reprend ?! Moi je dis : Donner c'est donner, reprendre c'est voler ! ».
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1968/1973 : cinq années de luttes syndicales, de combats étudiants, d'assemblées générales (les fameuses agés) en manifs de toutes sortes ayant un objectif en commun : refuser cette société déjà trop formatée; tout chambouler; rêver d'un autre monde.
En prenant le prétexte d'une rencontre amoureuse due au hasard - et en ajoutant un zeste de surréalisme à l'américaine, mettant en scène d'hypothétiques employés du Destin, ce qui alourdit un peu le propos - Thierry Jonquet, maitre ès polars, nous raconte sa propre jeunesse.
On sent bien que ce court récit fut une récréation dans l'oeuvre du romancier noir. Ici, pas de tueur, pas d'ambiance glauque, pas d'enquête… juste deux tranches de vie. Deux adolescences qui vont aboutir à se rencontrer. Deux luttes contre ce monde d'adultes hérité de la nouvelle donne d'après guerre : un Gaullisme omnipotent en France, deux blocs antagonistes pour équilibrer un monde boiteux, des volontés de liberté très vite cadenassées par des juntes au pouvoir, des anciennes colonies qui essayent de s'émanciper, une Chine qui s'éveille…
Victor et Léa ont quatorze ans en 1968. Lui va s'engager dans un mouvement trotskiste, elle tentera l'aventure des kibboutz en Israël. Lui militant, bon petit soldat, qui ne voit pas tout de suite la vacuité de son combat : les gauchistes dépensant davantage d'énergie pour lutter contre des organisations parallèles plutôt que s'unir face au capitalisme qui ne portait pas encore le nom de libéralisme. Frères ennemis, Lutte Ouvrière et la Ligue Communiste ergotaient sans cesse sur le mode opératoire et tergiversaient sur des points de détails. Les maoïstes et d'autres courants trotskistes ajoutaient à la confusion. Pendant ce temps Pompidou et son ministre Marcellin « tenaient » la France bien pensante.
Elle sentit vibrer la corde sioniste et regarder vers la terre promise comme les passagers du Mayflower rêvaient d'Amérique ou, dorénavant, les migrants envient l'Europe. Elle adhéra au Dror, une des nombreuses organisations sionistes de gauche. Un séjour dans un Kibboutz et son âpreté aura raison de ses convictions.

Plus qu'une simple rencontre (qui n'a lieu que dans les ultimes pages, du reste), c'est une époque joyeuse et révolue dans laquelle Jonquet nous plonge. Pour ceux et celles qui n'ont pas connu ce vent de liberté où tout devenait possible pour peu qu'on y croit suffisamment, cette période ressemble un peu au paradis perdu.
La contraception, enfin accessible, permettant une libération sexuelle jamais connue dans nos pays sclérosés de catholicisme castrateur. Les chaos d'un monde en pleine mutation permettant de s'insurger contre les atteintes à la liberté : guerre du Vietnam en tête, mais aussi les luttes raciales aux Etats-Unis, les tortures et les emprisonnements arbitraires dans les dictatures d'Amérique du Sud, le franquisme plus proche de nous, les interventions des blindés russes dans les démocraties populaires, le régime des colonels en Grèce… L' ennemi, pour ne pas emprunter un terme trop empreint de religiosité en parlant du diable, était bien visible, tangible. Un manichéisme bien tranché permettait tous les excès, les excusait. Les idées nées en mai 1968 ou plus exactement écloses lors du printemps magique, portaient une nouvelle vision de la vie. de nouveaux rêves. Hippies, baba-cools, révolutionnaires, Che Guevara, Martin Luther King, le Petit Livre Rouge, les Oeillets…
Cependant, la réalité était tout autre.
Les revendications ouvrières portaient plus souvent sur une augmentation des salaires que sur une volonté de changer le monde (l'autogestion de Lip faisant figure d'exception). Les élections confortaient toujours les mêmes têtes aux mêmes postes. La France silencieuse, majoritaire, continuait de se passionner pour le football, l'acquisition d'un petit pavillon en banlieue (à l'époque des « villes nouvelles », ce mot n'était pas encore synonyme de bidon-ville, de ville-poubelle), le dernier modèle de la Renault 16 ou la télévision en couleurs où Léon Zitrone et Guy Lux régnaient en maitres, entrecoupés de la rediffusion (déjà) des films de Louis de Funès.
Oui, car cette France révolutionnaire avec laquelle on fait connaissance dans « Rouge » ne représentait qu'à peine un pour cent de la population. Parfois l'effet loupe donne des illusions d'optique.
Qui sait, peut-être que dans cinquante ans, on regardera ces jeunes années 2000 comme un vivier d'écologistes visionnaires, de nouveaux paysans bio, d'alter mondialistes luttant contre la haute finance, de bénévoles épaulant les migrants rêvant d'une vie meilleure, de reconquêtes de l'espace public et de relations simples, de proximité, de circuits courts, débarrassés de tout superflu ostentatoire. Une société idéale.
Toujours ces un pour cent.
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Thierry Jonquet - «Rouge, c'est la vie», Seuil, 1998 (ISBN 978-2-02-037445-3)

Jonquet décrit au plus près, sans emphase ni verbiage, son propre engagement militant trotskiste ainsi que les pérégrinations militantes sionistes de sa future compagne, dans les années 1968-1975. Pour ce faire, il adopte le ton d'un roman léger, dont le fil narratif est entrecoupé d'interventions fantaisistes attribuées aux ateliers célestes de Monsieur Hasard, puisque la rencontre de Victor et de Léa n'avait décidément pas été programmée avant qu'elle ne se produise.
C'est bien connu, les militants du marxisme sont des athées convaincus, mais il faut croire (oups ! quel verbe !) que même Jonquet capitula devant ce merveilleux hasard que fut la rencontre avec celle qui partagea ensuite toute sa vie.

Loin de tout verbiage ou de théories fumeuses d'auto-justification a posteriori, Jonquet se borne à décrire les activités du bon petit jeune militant de base, c'est ce qui fait l'intérêt de ce témoignage. Pour parfaire le tout, il commence donc… par le début, qui le vit s'engager auprès de Lutte Ouvrière : pour celles et ceux qui eurent la sagesse d'en sortir, c'est à pleurer de rire (mais pour celles et ceux qui restèrent prisonniers de cette secte, ça doit être nettement moins drôle, même si le bon peuple trouvait Arlette rafraîchissante ou distrayante). Toujours est-il que Jonquet eut le sursaut indispensable (la scène de rupture avec LO vaut le détour) pour glisser vers la Ligue kriviniste, bien plus rigolote voire iconoclaste lorsqu'elle acceptait de sortir des radotages trotskistes.

Plus intéressant encore tout au moins à mes yeux d'ignorant en la matière), Jonquet relate également, en parallèle chronologique, le parcours de sa compagne, au sein des mouvements militants sionistes socialistes (le «Dror», devenu depuis, par fusion avec un autre mouvement en 1982, le «Habonim Dror») promouvant le mouvement des kibboutzim que les jeunes recrues devaient rejoindre lors de leur «alya». Là aussi, la déception fut au rendez-vous…

Personnellement, je détestais à cette époque ces trotskistes binoclards, intellos, fumeux, cultureux, bien souvent très bcbg-négligés (l'allure et l'élocution si distinguées d'Alain Krivine !!!). Quelques décennies plus tard, je reconnais bien volontiers l'importance et la sincérité du témoignage laissé par Jonquet, dans lequel bien des lycéens (blanchis depuis sous le faix des ans) se reconnaîtront.

Nostalgie, nostalgie ???
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Comme le résumé le présage, Thierry Jonquet propose une autre vision de son écriture, plus enjouée et ludique très loin de l'univers noir et sans pitié de ses polars. Toujours sur fond d'engagment politique, social et religieux, voici une très belle histoire d'amour autobiographique où le parcours de deux êtres totalement différents finit par les réunir. Une histoire à la fois encré dans la réalité mais aussi dans la fantaisie.
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Thierry Joncquet prend prétexte d'une rencontre amoureuse entre un jeune trotskiste et une jeune sioniste militant chacun dans leur coin dans des mouvements de jeunesse socialiste pour nous raconter son engagement de mai 68 jusqu'à mai 81.

Récit court à la vision lucide qui se lit agréablement mais qui vaut plus pour le témoignage et la frise chronologique qu'il représente que par l'intrigue même si une petite astuce de narration veille à la rendre plus intéressante.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Toute la jeunesse scolarisée descendit dans la rue. Debré fut la cible favorite des manifestants. Les caricaturistes de Charlie-Hebdo l'immortalisèrent en le représentant comme un fou sanglé dans une camisole de force et coiffé d'un entonnoir, aussi les fabricants de cet ustensile connurent-ils une soudaine embellie de leurs chiffres d'affaires, puisque les lycéens s'en affublaient en guise de couvre-chef.
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Inutile de tergiverser, Victor ne serait ni anarchiste ni maoïste. Restait la nébuleuse trotskiste. Alors là, tout se compliquait. Il fallait démêler l'écheveau avec patience, une provision de cachets d'aspirine à portée de main.
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Mais voici qu'arriva le mois de mai. A u Quartier latin, les étudiants se battaient contre les flics. Libérez nos camarades, c'était le mot d'ordre.
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Vidéo de Thierry Jonquet
Chronique consacrée aux grands noms de la littérature policière, et animée, depuis octobre 2018, par Patrick Vast, dans le cadre de l'émission La Vie des Livres (Radio Plus - Douvrin). Pour la 29ème chronique, le 12 juin 2019, Patrick présente l'auteur Thierry Jonquet. Patrick Vast est aussi auteur, notamment de polars. N'hésitez pas à vous rendre sur son site : http://patricksvast.hautetfort.com/ Il a également une activité d'éditeur. À voir ici : https://lechatmoireeditions.wordpress.com/ La page Facebook de l'émission La Vie des Livres : https://www.facebook.com/laviedeslivres62/
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