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EAN : 9782070447091
96 pages
Gallimard (31/05/2012)
3.85/5   153 notes
Résumé :
En Sibérie, dans le Dorset anglais ou au coeur des montagnes de Géorgie, les lois du destins et les forces de la nature sont plus puissantes que les désirs et les espérances : les héros de ces nouvelles ne devraient jamais l'oublier.


Cinq nouvelles, cinq gifles étourdissantes et toniques, cinq invitations à méditer sur l'homme et la nature.


Ces nouvelles sont extraites d'Une vie à coucher dehors (Folio n°5142).
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Critiques, Analyses et Avis (32) Voir plus Ajouter une critique
3,85

sur 153 notes
Cinq nouvelles puissantes, étonnantes, bien écrites qui m'ont réconciliée avec l'auteur. Avec un talent remarquable Sylvain Tesson illustre dans L'asphalte, Les porcs et le lac, la nocivité des désirs et des espérances des hommes quand ils s'éloignent de la nature. Surprenante la chute de ses nouvelles, sorte de pied de nez du destin, remet l'homme présomptueux et téméraire à sa place. Ainsi l'éleveur intensif de porcs est-il hanté par le regard de ses bêtes... « J'ai réussi un exploit : en quarante ans, ne jamais regarder un porc dans les yeux. J'aurais risqué de croiser un regard. Ne jamais laisser s'immiscer dans l'esprit l'idée que chacune de ces bêtes est un individu. Ne raisonner qu'en masse. Ne penser qu'à la filière. Lorsque je me suis aperçu que je haïssais mes bêtes, je compris que Herbert avait raison. Nous avions inventé un élevage où l'animal est l'ennemi. Aujourd'hui, l'éleveur abaisse. Nous avons rompu l'équilibre, le lien charnel. le sang qui coule dans nos veines ne sourd plus de la terre du Dorset. Il y a une dalle de béton sous le sabot des bêtes. Je ne peux plus dormir. Les cris me réveillent. Il semble que l'odeur ne veut pas disparaître de mes mains. » ...et prend la décision qui s'impose à lui.

Challenge MULTI-DÉFIS 2018
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Pas de nouvelles, bonnes nouvelles !
Dans cet ouvrage donc : Cinq nouvelles sont égales à cinq mauvaises nouvelles. Logique !
Pourtant, à la lecture ces nouvelles sont toutes très bonnes mais très mauvaises.
Raymond Devos sort de mon corps mais laisse-moi ton talent… Tant pis, dommage !

- L'asphalte : La Géorgie post-communiste pour paysage. Vingt pages qui en valent deux cents tant le drame est condensé. Zéro digression mais grosse émotion. Et c'est double peine pour le pauvre Edolfius. Tout ça pour une route. Quand on croit bien faire !
Éternel retour de bâton.

- Les porcs : Dans le Dorset, les outrances de l'élevage intensif. Catastrophe humaine et écologique. Scotché par dix pages de cruauté qui engendrent le désespoir.
Herbert l'a-t-il souhaité, mérité ?
Éternel retour à la terre.

- le lac : En Sibérie. Vivre durant quarante ans à cinq jours de marche de tout individu.
« Dans sa vie, il avait davantage causé avec sa barque qu'avec ses semblables. »
Piotr m'a fait de la peine. L'ours aussi. Quatre cent quatre-vingt mois ans à remouiller la meule de son existence et quinze pages de larmes à me vider par les yeux.
Éternel retour sur le lieu du crime.

- L'ile : Solitude extrême, ile inhospitalière, ennui infini. Où il y a une trilogie lacrymogène, il n'y a pas de plaisir. Excepté lorsque qu'un rescapé sait des histoires qui font du bien, racontées au coin d'un feu de noix de coco aux cinq autres du fin fond de l'Atlantique. du rêve à la tromperie, de la manipulation à la déception. Pas de bol pour Iannos Lothka. Ni pour les autres. Douze pages pour ne rien voir venir.
Éternel retour de manivelle.

- le phare : Deux phares, deux gardiens, « La vodka ne fait jamais mal quand on la boit à deux. ». Dix pages battues par la tempête, je suis trempé et saoul mais surtout émerveillé.
Éternel retour tout court.

De ces cinq nouvelles, de cette densité, de cette compacité émotionnelle : Peut-être Nietzsche, mais moi, je n'en suis pas revenu.




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Cinq nouvelles extraites de " Une vie à coucher dehors". Cinq nouvelles cinglantes, grinçantes et hyper-réalistes sur la puissance de la nature, sur la dérision de la vie humaine, sur les méfaits de la modernisation à outrance...

Géorgie, Dorset, Sibérie, Pacifique: des régions du monde très différentes, mais ayant comme point commun la petitesse humaine , malgré son désir de vaincre , de dominer son environnement. Et la nature qui se venge, d'une manière ou d'une autre.

L'auteur porte, comme à son habitude, un regard lucide, ironique, sur notre société actuelle, et ces histoires nous font réfléchir : rendements industriels où l'animal n'est plus qu'un objet en série, dangers de la mystification, conséquences désastreuses de la construction d'une route goudronnée...

Certes, cela donne une image pessimiste et angoissante du monde contemporain...mais ô combien véridique!
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Sous les rafales maritimes, dans la neige sibérienne, sur un îlot du Pacifique, dans la fange des élevages intensifs du Dorset ou au coeur d'un village de la montagne de Géorgie, Sylvain Tesson nous plonge dans des tranches de vie plus ou moins dramatiques. Les certitudes y côtoient le doute.

Assez d'avaler la poussière ! Celle-ci est soulevée par la route non goudronnée qu'Édolfius emprunte chaque soir, à pied, pour rentrer des champs. Pourquoi son village de Tsalka, perché sur les hauteurs de Géorgie, n'a-t-il pas le droit à une belle route asphaltée, comme partout ailleurs ? Ironiquement ce n'est pas le tabac, ni l'alcool, qui altèrent le corps quinquagénaire d'Édolfius mais bien la poussière montant de cette piste d'un autre temps. Et pour sortir d'un monde arriéré, il faut asphalter !
Ensuite, dans la lettre d'un éleveur du Dorset, l'exergue d'Isaac B. Singer oriente implacablement sur le thème à venir en écrivant que, pour les animaux, c'est un éternel Treblinka que l'humain a mis en place. À quelles extrémités faut-il consentir pour produire des protéines ? Faut-il occulter la vie elle-même ?
Suit le décompte des derniers jours d'ermitage de Piotr dans la taïga avant de pourvoir rejoindre la civilisation. L'hiver sibérien, la neige fraîchement tombée attestant le passage de la faune environnante. Ici, à une centaine de kilomètres de toute civilisation, qui est maître des lieux et de son destin ?
Plus loin, quand des naufragés ont réussi à organiser leur survie, ne manquant ni de nourriture ni d'abri, il leur reste à trouver une étincelle romanesque pour animer leurs soirées et occuper leurs pensées.
Pour clôturer ce petit fragment de recueil sur une note plus festive, l'auteur nous convie dans un lieu bâti pour résister à la furie de la houle, un soir de Noël, pour y subir, ou y savourer, un choc thermique. Ouest et Est, un Russe et un Breton, les fins de terre se rencontrent dans la mer bretonne. Et c'est le baromètre qui décidera d'une mémorable veillée de Noël.

Sylvain Tesson abat ses couperets sur la modernisation humaine. Dans les deux premiers textes, il rend compte de la marche du monde, avec l'aménagement du territoire et la course au rendement dans l'alimentation. Il abordera la bêtise humaine, le déni de la nature. Il laisse une porte de sortie en vantant les bienfaits de la spontanéité et de la vodka !
Regard cinglant et réaliste sur la course de l'Homme vers un prétendu mieux-être, sur sa vision unilatérale d'un avenir meilleur. L'homme est persuadé que progrès et confort riment avec bonheur. Les conséquences de ses actes le rattrapent pourtant.

Ces textes sont très agréables à lire, saupoudrés de poésie, piquetés d'aphorismes. Nul besoin de longues histoires pour dévoiler certaines facettes de l'homme, de la nature et du destin. J'en retiens l'éloge de la littérature qui nourrit l'esprit de l'homme, le pousse à se questionner, le maintient en haleine sur une île déserte. Et cette phrase de l'auteur : « Si le paradis est réservé à ceux qui ont contemplé la beauté du monde, il était sûr de sa place. »
Dans le même temps, si l'on a tendance, comme moi, à ne pas croire en l'intelligence et la bonté de l'Homme, lire ces nouvelles n'inversera pas ce penchant !
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Lu dans le cadre du challenge Solidaire 2023

J'ai pris L'éternel retour à la bibliothèque communale parce que c'était le seul ouvrage de Sylvain Tesson disponible. J'étais contente que ce soit un petit recueil de nouvelles (89 pages), car je n'avais pas apprécié Dans les forêts de Sibérie proposé par mon club de lecture il y a quelques années. Il est difficile d'aller à contre-courant de l'opinion générale sur un livre ou un auteur, que ce soit dans mon cercle de lecture que sur Babelio et je préfère m'abstenir donner mon avis sur les livres que j'ai peu apprécié.

L'éternel retour (277 lecteurs sur Babelio) se compose de cinq nouvelles extraites du recueil Une vie à coucher dehors (Goncourt de la nouvelle en 2009) : L'asphalte, Les porcs, le lac, L'île et le phare.
« Cinq nouvelles, cinq gifles étourdissantes et toniques, cinq invitations à méditer sur l'homme et la nature. » (dixit la 4ème couverture).

Je crois que mon rejet pour cet auteur vient d'abord de mes habitudes de lecture : j'aime lire dans mon lit ou dans les transports en commun, surtout que le format de la nouvelle s'y prête bien. Dans les oeuvres de Tesson, je dois dire que j'ai du mal à lire trois phrases sans avoir besoin de relire (mais que cela veut dire ? « le camp des ouvriers était établi au piémont du massif, juste au commencement de la serpentine ») ou sans le recours à un dictionnaire (ou plusieurs) français-français (voir exemple ci-dessous) et à mon cours d'« expression orale et écrite de la pensée » de première candidature en commerce où le professeur nous abreuvait d'exemples d'erreurs syntaxiques telles que zeugme et anacoluthe et autre oxymore. Je crois que dans L'éternel retour, il y aurait de quoi les compiler toutes ou presque.

Par exemple (page 23) : « L'asphalte possède des propriétés darwiniennes Son épandage modifie les comportements des groupes humains. Les villageois raccordés au reste du monde par le goudron rattrapent en quelques mois leur arriération . Tsalka connut cette accélération. Après deux semaines, les rues étaient méconnaissables.
Edolphius avait comparé l'asphalte à un cordon ombilical, mais c'était plus que cela : une aorte qui pulsait les moeurs d'en bas jusqu'à la lisière des alpages.»

Sans hésitation, je place L'éternel retour dans la catégorie « Torture » du challenge Solidarité 2023, au bout d'un long chemin noir.
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Citations et extraits (40) Voir plus Ajouter une citation
Piotr avait un chien pour ne pas être seul, un fusil pour ne pas avoir faim, une hache pour ne pas avoir froid. Ce jour-là, il caressa le premier, graissa le second, aiguisa le troisième. La vie n’est pas compliquée quand on a tiré le rideau de la forêt sur toute ambition.
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De la moufle, il caressa l'aluminium cabossé de la coque. Avec le fusil, le couteau, les livres et ses jumelles, la barque était un objet ami. Elle lui prodiguait loyalement ses services depuis quarante ans. Il se sentait bien dans ses flancs et s'entretenait doucement avec elle. La réclusion dans les bois lui avait donné une étrange conception du monde. Il croyait les objets animés de forces incorporelles, les éléments chargés de signes, le monde matériel fondé sur un ordre mystérieux, les animaux et les plantes dépositaires de secrets immémoriaux. Dans la partition de son univers, le moindre évènement - le vol d'un oiseau, le froissement d'un serpent ou le rythme des vagues - était un signal que le cosmos envoyait à la surface de la Nature, à destination des âmes initiées. Les Hommes, eux, et même ce sacré Pavel, n'étaient que des automates, tristes esclaves de leurs passions, abrutis de désirs et prisonniers de leurs codes. Des machines avec lesquelles il fallait bien converser de temps en temps pour que ne s'atrophient pas les maxillaires. Dans sa vie, il avait davantage causé avec sa barque qu'avec ses semblables. Il souqua vers la cabane. Il reviendrait le soir remonter le filet.
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Le poêle ronflait. L'eau chauffait dessus. Le chien dormait à ses côtés. La hache était plantée dans le billot de fendage. Le couteau sur le chambranle de la porte. Le fusil posé sur le montant. Piotr était allongé sur sa couche. Il fixait des yeux les rondins du plafond. En ce moment précis, le filet de pêche flottait dans l'eau glacée et les poissons venaient y mourir. Leur chair lui donnerait l'énergie de continuer à vivre. Tout était en équilibre. La vie en cabane est une réduction de l'univers. Mais d'un univers qui ne connaîtrait ni expansion ni chaos. Seulement l'ordre.
Il se leva pour jeter une bûche dans le poêle. A chaque fois qu'il en enfournait une, Piotr prenait soin de l'inspecter. Il ne voulait pas risquer de griller des insectes. Il cognait le bois pour déloger les xylophages avant de l'envoyer en enfer. Dehors, lorsqu'il écrasait un capricorne en coupant des rondins ou butait par hasard dans une fourmilière, il se sentait mortifié. Tuer un élan, dépecer un ours ou piéger une martre l'émouvait moins. Mais les insectes... Ces petits bijoux articulés, dans leur livrée vernie, avec leurs dentelles, étaient d'une telle délicatesse. Parfois, il les emprisonnait sous un verre et les observait pendant des heures avant de les relâcher sans leur faire aucun mal. C'est pour cela qu'il les épargnait : en remerciement de leur beauté.
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Ils étaient venus à bout du premier litre. La vodka ne fait jamais mal lorsqu'on la boit à deux. Le principe du toast a été inventé par les Russes pour se passer de la psychanalyse. Au premier verre, on se met en train ; au second, on parle sincèrement ; au troisième, on vide son sac et, ensuite, on montre l'envers de son âme, on ouvre la bonde de son cœur, et tout — rancœurs enfouies, secrets fossilisés et grandeurs contenues — finit par se dissoudre ou se révéler dans le bain éthylique.
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Dans les cœurs naquit l'ennui. Ils étaient englués dans le pot au noir des heures. Les minutes passaient comme des coques vides sur une onde silencieuse. Le naufrage les avait exclus de la marche du monde, la survie les extrayait de la marche du temps. Lorsque la nuit tombait enfin sur le Pacifique, la journée leur paraissait avoir duré un mois.
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Vidéo de Sylvain Tesson
Deuxième épisode de notre podcast avec Sylvain Tesson.
L'écrivain-voyageur, de passage à la librairie pour nous présenter son récit, Avec les fées, nous parle, au fil d'un entretien, des joies de l'écriture et des peines de la vie, mais aussi l'inverse, et de la façon dont elles se nourrissent l'une l'autre. Une conversation émaillée de conseils de lecture, de passages lus à haute voix et d'extraits de la rencontre qui a eu lieu à la librairie.
Voici les livres évoqués dans ce second épisode :
Avec les fées, de Sylvain Tesson (éd. des Équateurs) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/23127390-avec-les-fees-sylvain-tesson-equateurs ;
Blanc, de Sylvain Tesson (éd. Gallimard) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/21310016-blanc-une-traversee-des-alpes-a-ski-sylvain-tesson-gallimard ;
Une vie à coucher dehors, de Sylvain Tesson (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/14774064-une-vie-a-coucher-dehors-sylvain-tesson-folio ;
Sur les chemins noirs, de Sylvain Tesson (éd. Folio) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/14774075-sur-les-chemins-noirs-sylvain-tesson-folio ;
Le Lys dans la vallée, d'Honoré de Balzac (éd. le Livre de poche) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/769377-le-lys-dans-la-vallee-honore-de-balzac-le-livre-de-poche.
Invité : Sylvain Tesson
Conseil de lecture de : Pauline le Meur, libraire à la librairie Dialogues, à Brest
Enregistrement, interview et montage : Laurence Bellon
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Les Éclaireurs de Dialogues, c'est le podcast de la librairie Dialogues, à Brest. Chaque mois, nous vous proposons deux nouveaux épisodes : une plongée dans le parcours d'un auteur ou d'une autrice au fil d'un entretien, de lectures et de plusieurs conseils de livres, et la présentation des derniers coups de coeur de nos libraires, dans tous les rayons : romans, polar, science-fiction, fantasy, BD, livres pour enfants et adolescents, essais de sciences humaines, récits de voyage…
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