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EAN : 9782882508218
352 pages
Noir sur blanc (02/02/2023)
3.45/5   22 notes
Résumé :
Visionnaire lors de sa parution en 2001, ce recueil de nouvelles d'Olga Tokarczuk n'a rien perdu de son mordant, ni de sa pertinente actualité. Avec une espièglerie qui rappelle Nabokov, la romancière polonaise nous dévoile un quotidien truffé de portes secrètes, de miroirs traversés et d'autres distorsions de l'espace et du temps. Une année à Berlin, un séjour au Mont-Noir, un mois de résidence en Ecosse, sont le point de départ de plusieurs de ces nouvelles, et l'... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Plus de vingt ans après leur parution, les deux premiers recueils de nouvelles d'Olga Tokarckuz sont enfin disponibles en français, réunis en un seul volume : «L'Armoire et autres nouvelles», son tout premier recueil, publié en 1997, et celui qui donnerait le titre à cette édition, «Jeu sur tambours et tambourins», datant de 2001.

L'entrée en matière de la grande papesse des lettres polonaises contemporaines ne pouvait être, bien évidemment, autre qu'une entrée directement «dans» la matière même, fondamentalement impénétrable, qui compose le monde qui nous entoure.

«Dans nos têtes les rhizomes de la réalité se mobilisaient déjà, prêts à pousser... » - constate l'un des personnages de la nouvelle «La Glycine», annonçant d'entrée de jeu ce que l'oeuvre fictionnelle d'Olga Tokarczuk ne cesserait par la suite de mettre en avant concernant nos représentations du monde et notre rapport à la réalité extérieure. Si, en effet, d'après Flaubert, il suffit de regarder quelque chose longtemps pour qu'elle soit intéressante, alors pour Tokarczuk, il suffirait quelquefois de l'imaginer longtemps pour qu'elle devienne réalité!

Dans la plupart de ses romans et de ses nouvelles, et y compris dans ces tout premiers récits courts révélant une jeune auteure dotée d'une imagination et d'une profondeur spéculative déjà tout à fait remarquables, la narration aime à camper au croisement de dimensions réelles et fictives, tangibles ou ineffables qui, se rejoignant tout naturellement et se nourrissant réciproquement, s'ouvrent sur des pistes nouvelles et inusitées, instaurent des translations surprenantes d'un domaine vers l'autre et conduisent à des «insights» subtils autour de la constitution de ces rhizomes aux réseuax infiniment complexes.

Grâce à une sorte de «gnose rationnelle», - mystique personnelle inspirée entre autres de la poésie visionnaire de William Blake et de l'oeuvre du psychanalyste suisse Carl Gustav Jung-, Olga Tokarczuk s'inscrit de plein droit dans cette lignée d'auteurs de génie, toqués d'absolu qui nous proposent systématiquement de bifurquer sur les sentiers battus du jardin de nos certitudes partagées, et de nous initier, en même temps que leurs personnages, à de nouveaux codes de déchiffrage du réel.

À sa manière propre, à une sauce qu'elle peaufinerait au fur et à mesure en se frottant à différents registres littéraires -de la nouvelle fantastique ou allégorique au grand roman historique, en passant par le (faux) polar ou par des réflexions personnelles sur le nomadisme- Olga Tokarczuk concocte des recettes qui invitent le lecteur irrésistiblement à la contemplation et à réflexion philosophique. Prose dont la simplicité apparente, pour ce qui est du contenu, du langage et de sa construction, se met entièrement au service d'une ambition «prométhéenne», aspirant en définitive à un porter un regard intemporel et non-diachronique sur l'univers, et qui, tel celui, «sub specie æternitatis» , que l'auteure déploierait magistralement par la suite dans « Les Livres de Jakob », se transforme par instants en un véritable «zoom cosmique», allant et venant et reliant entre eux des phénomènes survenant à des niveaux considérés d'ordinaire comme trop éloignés ou incompatibles, matériels et l'immatériels, infiniment petits ou infiniment grands, passés et futurs.

(Elle fera d'ailleurs rappeler, quelques années plus tard aussi, par l'un de ses personnages les plus extravagants et réprésentatifs de sa démarche spéculative (Janina, dans «Sur les ossements des morts ») qu' « il faut se souvenir toujours que le monde est une toile gigantesque, qu'il forme un tout et qu'il n'existe rien, absolument rien, qui ne soit à part ».)

Dans ces nouvelles-ci, fluides et captivantes, portées par une poésie et une inventivité qui investiront pleinement les romans et contes magnifiques pour grands enfants qui s'en suivront, le lecteur trouvera également déjà en action cette herméneutique du merveilleux qui deviendra la marque registrée de la Polonaise, démarche n'excluant ni la raison pratique, ni aucune des fonctions cognitives supérieures propre à l'esprit humain (et surtout, pourrait-on rajouter, celle de l'«intuition», fonction longtemps négligée par la pensée et par la psychologie occidentales, avant que les travaux de Jung ne viennent lui redonner une place et de vraies lettres de noblesse parmi ses semblables).

Moins soucieuses d'être étiquetées «réalistes» ou «magiques», que de respecter un principe majeur qui voudrait que rien ne soit à priori, ni sûr à cent pour cent, ni au contraire complètement invraisemblable, ces histoires, certaines d'inspiration autobiographique (la touchante et remarquablement bien construite «Che Guevara», l'une de mes préférées, ou bien la très « pessoenne» dans l'âme, «Jeux sur tambour et tambourins») auraient visiblement en commun le fait de se tenir toutes à l'affût des signes multiples indiquant une correspondance possible entre éléments ou evènements en apparence distincts, que ce soit entre "sujet et objet", comme dans «Ouvre les yeux, tu n'es plus en vie» ou «Le double fictionnel de l'auteur» ; entre "le tout et les parties", un univers, «pars pro toto», étant susceptible de se nicher dans l'une de ses composantes, telle cette crèche de Noël sous une cloche de verre, dans «Bardo. La Crèche», ou bien dans des maquettes construites à échelle modestement humaine («La Conquête de Jérusalem»), voire dans un simple meuble garde-robe («L'Armoire») ! ; ou enfin, entre temporalités qui, convergeant subitement, laisseraient un vif sentiment, au moment même où certaines choses se produisent, et ainsi que l'exprimerait un personnage de la nouvelle «Ariane à Naxos», que celles-ci «devaient forcément avoir lieu, ou bien qu'elles ont déjà existé avant»...

En parcourant les récits qui ouvrent ce recueil, et notamment «Ouvre les yeux, tu n'es plus en vie», dans lequel une lectrice intervient directement sur le cours des évènements du roman policier qu'elle est en train de lire, ou bien le facétieux «Double fictionnel de l'auteur», qui ferait en quelque sorte pendant au premier, je n'ai pas pu m'empêcher de songer que la jeune apprentie-démiurge au nom imprononçable (Tok...Tok.. ? : le temps passe, et j'ai pourtant toujours la sensation de l'écorcher !) serait en train d'y rendre un hommage sensible à l'un des grands maîtres incontestés en cette matière ô combien insaisissable et chimérique, et l'ayant inspirée. Serait-ce par hasard Olga ToCortázarczuk.. ? (Filiation littéraire qui sera d'ailleurs, pour mon plus grand plaisir de lecteur, confirmée par la suite, lorsque, dans la nouvelle «Che Guevara», une Olga jeune étudiante en Psychologie, avouera que, pour faire passer le temps durant le long siège de son université organisé par les étudiants en grève - juste avant la proclamation de l'état de guerre du 13 décembre 1981 par le gouvernement polonais -, elle lisait en boucle un exemplaire de... «Marelle»!)

Bien que l'on puisse estimer que dans l'ensemble ces récits courts seraient somme toute moins spectaculaires, et peut-être aussi globalement moins finement ouvragés que les précieux bijoux que l'auteure nous livrerait par la suite (dans « Histoires bizarroïdes», par exemple, en 2018), et que d'autre part, on y décèlerait par moment cette application de circonstance (que l'on retrouve en même temps, très souvent, dans les écrits de jeunesse des plus grands écrivains ), les "olgarithmes" de l'incomparable logiciel "Thot-karczuk", d'une efficacité littéraire divinement redoutable, y prennent bien place, y sont en tout cas déjà parfaitement reconnaissables.

4 étoiles, juste parce que, étant amateur invétéré d'Olga Tokarczuk [ tɔˈkart͡ʂuk] , je savais déjà qu'elle irait encore plus loin, toujours plus loin, et de mieux en mieux...
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Il s'agit d'un volumineux recueil de 19 nouvelles de plus de 400 pages, paru pour la première fois en 2001. Il n'a pour l'instant pas été traduit en français, les nouvelles attirant en général moins les éditeurs que les romans.

Évidemment, comme dans tout recueil de nouvelle, le lecteur va en apprécier plus certaines que d'autres. Mais je tiens à souligner à quel point à mon sens, Olga Tokarczuk maîtrise l'art de la nouvelle. C'est vraiment un art à part, quelque peu différent de celui du romancier. Il faut aller à l'essentiel, enfermer énormément en peu de pages, donc choisir les faits, les mots, présenter le personnage sous le bon profil en quelque sorte, pour que le lecteur puisse être saisi, comprendre en quelque pages, être remué, touché, très vite. Et bien sûr, il faut réussir la fin, pour que nous ayons la sensation que l'essentiel a été dit. Olga Tokarczuk fait tout cela à la perfection, or il est assez rare qu'un écrivain maîtrise à la fois des constructions romanesques complexes, élaborées, le sens du développement, et l'art de la miniature, du ramassé, qu'est la nouvelle.

Je ne vais pas résumer 19 textes, d'autant plus que davantage encore que pour un roman, raconter risque de gâcher le plaisir d'un futur lecteur. Les personnages sont des gens ordinaires, mais souvent confrontés à quelque chose qui sort de l'ordinaire, mais d'une manière subtile, inattendue, incertaine. Ainsi, la femme de la première nouvelle, passionnée par la lectures de romans policiers. Nous la suivons dans le train train d'une vie très banale, voire ennuyeuse, et nous suivons la lecture qu'elle fait d'un roman de son genre favori. Mais petit à petit, la lectrice quitte en quelque sorte le quotidien pour pénétrer dans le monde de papier, jusqu'à la chute finale. En passant nous avons eu un aperçu de sa vie, une analyse de cette vie qui ressemble à tant d'autres, le rapport à la lecture, tout ce qu'il peut signifier, tout ce à quoi il ouvre des portes. La nouvelle peut être lue comme un texte amusant et léger, mais on peut aussi l'interpréter comme une vision fine et très noire des frustrations et de ce l'imaginaire permet et révèle, il n'est pas forcément juste une distraction sans conséquence.

Le fantastique qui surgit dans certains de ces textes, si on peut l'appeler ainsi, faute d'autres appellation, est plutôt une possibilité de faire un pas de côté, et révéler ce qui se trouve derrière les façades familières, rassurantes et policées. Les peurs, les souffrances, la violence en puissance. Mais que le monde puisse ne pas être uniquement tel qu'il nous paraît, peut aussi être source d'espoir, il peut être possible, en se plaçant sous un autre angle d'échapper à l'horreur quotidienne, qui de part sa banalité devient presque invisible.

J'ai beaucoup aimé certains de ces textes, et j'espère que le lecteur francophone pourra avoir l'occasion de les découvrir grâce à des prochaines traductions.
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Pour Olga Tokarczuk, les hommes sont comme des tambours. Ils ont un vide à l'intérieur. Mais c'est un vide qui permet de faire résonner une musique. Il autorise à créer, à danser, à s'élancer, à devenir n'importe qui, comme la danseuse d'une des nouvelles. Tel un miroir, le vide se transforme en masques via la fiction, en une multitude de visages possibles.

« C'est ainsi que je rêve de moi, toujours dans le miroir, toujours avec un autre visage. »

Les masques de Tokarczuk sont des individus en apparence banals (les introductions insistent souvent là-dessus) mais qui se placent résolument à la marge du réel. Ils sont souvent en transit, étrangers, voire naufragés. Donc toujours sujets à l'impermanence. Dans leur exil, ces marginaux malgré eux reconstruisent des modèles réduits du réel, pour mieux le comprendre, pour fusionner avec lui. Avec ces robinsonades d'un nouveau genre, on explore donc les îles et les hôtels comme on explore des corps à la dérive, capables de nourrir de nouvelles formes de vie. Ces mini-mondes organiques sont parfois voués à s'étendre et/ou à acquérir une forme d'autonomie qui brouille les limites entre leur espace-temps et celui de l'univers macroscopique. Une veine très borgésienne, qui s'observe en particulier dans les textes les plus anciens datés de 1985, notamment « Deus ex », nouvelle visionnaire qui anticipe Sim City, voire… Deus ex (le jeu) en mettant en scène un logiciel de simulation vidéoludique pour modéliser des mondes alternatifs. Et l'on observe en parallèle la façon dont ceux-ci prennent possession de la conscience, donc du monde que celle-ci perçoit. Ainsi Tokarczuk affirme-t-elle son ADN de conteuse ludique, adepte des jeux dans le jeu de la fiction.

L'auteur n'est jamais meilleure que dans les textes où s'affirme son goût des singularités au sens astrophysique du terme, les impulsions d'une infinité d'espace-temps alternatifs (comme dans son roman Dieu, le temps, les hommes et les anges) qui aident à regarder notre réel autrement, comme des « tambours dont le son monotone nous maintient en alerte »

C'est donc tout naturellement que la nouvelle éponyme fait converger ces thèmes dans ce qui constitue le texte le plus philosophique du recueil, très marqué par la spiritualité orientale, avec un zeste de Bruno Schulz, puisque c'est une ville entière qui s'anime, s'ébruite et se transforme à coups de tambours, chaque son étant le présage d'histoires et d'habitants nouveaux, pas encore nés.

« Les écrivains sèment l'anarchie dans les universaux, ils sont des relativistes de naissance, des expérimentateurs de la vérité, des découvreurs d'alternative ».

Mais le cheminement vers ce feu d'artifice n'est pas linéaire, loin de là. On joue même aux montagnes russes (polonaises, pardon !), car au fil de ce très long recueil, Tokarczuk égare parfois son inspiration. Ses ratés prennent des formes diverses : de maigres intrigues saturées par le bavardage poussif de couples dysfonctionnels (« le cavalier », « La répétition générale »), la fainéantise dans le traitement d'un thème déjà bien éculé (« le double fictionnel de l'auteur »), voire même le vide que l'on aurait oublié de recouvrir d'un tambour (quelques tranches de vie dont il ne me reste déjà plus rien en mémoire, pas même les titres).

Et puis il y a des entre-deux, des textes corrects mais où le tam-tam accuse quelques problèmes de rythme, les tambours de la narration se faisant alors ronron lénifiant. « Che Guevara » est une nouvelle sur les fous qui manque un peu de folie à mon goût. Et si la première nouvelle (« Ferme les yeux, tu n'es plus en vie ») ironise à bon escient sur son début interminable (via un jeu de métalepse qui rend certainement hommage à « La continuité des parcs » de Cortazar), le récit n'en présente pas moins une fin aussi abrupte que décevante, d'une grande platitude.

Dans l'ensemble, la prose demeure fluide et gracieuse, mais elle accuse aussi quelques irrégularités, notamment des abus de phrases non verbales ou de personnifications gnangnans (le soleil montant « avec courage », la neige tombant « par compassion »). C'est d'autant plus étrange que certaines nouvelles en sont particulièrement affectées tandis que d'autres pas du tout.

La démarche littéraire de Tokarczuk m'intéresse, mais la qualité inégale des résultats me pousse à me demander si elle n'écrit pas un peu trop, et surtout avec un manque de recul critique sur certaines de ses créations. À confirmer ou à infirmer avec d'autres de ses oeuvres, par exemple les Histoires bizarroïdes
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Mince, pour la première fois je n'ai pas retrouvé d'emblée ma chère Olga dans ce recueil de nouvelles moins typées, moins singulières que ce qui m'a toujours éblouie dans son oeuvre, mais heureusement quelques unes ont fait mouche.
La première, dans laquelle une lectrice décide d'entrer dans le roman policier trop plat qu'elle est en train de lire pour faire le job est sympa, mais quelqu'un d'autre aurait pu l'écrire.
Suivent quelques morceaux qui font plus penser à Alice Munro qu'à Olga, où je me suis un peu perdue.
Et puis arrivent les deux pièces qui pour moi sauvent tout le reste, deux histoires habitées d'étrange et de sensibilité pure: La glycine et surtout La danseuse, qui seule, âgée et gracile, danse pour la reconnaissance d'un père qu'elle n'a pas reçue.
Il fallait donc persévérer, d'autant qu'à la fin figure également un court recueil de trois nouvelles géniales des années 80 dont Les numéros dans laquelle on suit une femme de chambre dans les chambres d'hôtel qu'elle nettoie, révélant les traces que leurs occupants y ont laissé.
Olga Tokarcuk est une auteure vraiment à part que je continuerai quoiqu'il arrive à lire au fil de la parution de nouvelles traductions.
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Que cette lecture m'a fait souffrir ! Bien que ça ne soit que des nouvelles, j'ai mis plus d'un mois à les lire ! le moment n'était pas propice à des lectures qui demandaient un peu de concentration mais j'ai eu beaucoup de mal à finir ce livre qui a rarement capté mon attention !

Certaines nouvelles ont attiré mon attention mais elles alternaient trop souvent avec d'autres que je n'ai pas appréciées ou pas comprises même !

Je vais faire une pause dans ma lecture des oeuvres d'Olga Tokarczuk en espérant retrouver l'engouement que j'ai eu pour les premières !

Challenge Gourmand 2023/2024
Pioche dans ma PAL mai 2023 : Mylena
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critiques presse (4)
LeMonde
21 mars 2023
Dans son discours de réception du prix Nobel (2018), l’écrivaine polonaise Olga Tokarczuk se félicitait du fait que la littérature avait « magnifiquement conservé son droit aux bizarreries, aux fantasmagories, aux provocations, au grotesque et à la folie » (Le Tendre Narrateur, Noir sur Blanc, 2020). Ce droit, et l’étourdissante liberté qu’il autorise, on les retrouve dans Jeu sur tambours et tambourins, recueil de nouvelles écrites en 2001, enfin traduites par la talentueuse Maryla Laurent.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeFigaro
20 mars 2023
Un recueil de nouvelles de la Polonaise, prix Nobel 2018, où dominent l’étrange, l’insolite et le grotesque.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeMonde
13 mars 2023
Dans ce décor chaotique, les contours ne sont pas stables, qu’il s’agisse des frontières géographiques ou des lignes séparant le passé du présent et même d’un futur vaguement dysto­pique.
Lire la critique sur le site : LeMonde
LeSoir
10 février 2023
Un recueil déjà ancien, enfin traduit, livre quelques-uns des secrets de fabrication du Nobel 2018.
Lire la critique sur le site : LeSoir
Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
(sur les Polonais)

Oui, c’est exact, (…) nous poussons telles des plantes nocturnes, nous ne fleurissons qu’une nuit, celle de la Saint-Jean. Nos graines s’en vont par les fleuves dans le vaste monde. Nous n’apparaissons que de temps à autre, à l’occasion des guerres, des insurrections ou des catastrophes historiques. Chaque matin, nous changeons de langue comme de mouchoirs. Nous sommes des hybrides, nous avons des maisons montées sur roues, nos passeports sont illisibles de fait. Oh, nous n’avons aucune difficulté à lire le cyrillique ! Jusqu’à notre pape qui se transporte sans cesse, il voyage dans un sens et dans l’autre, un type en blanc qui ne reste pas en place. Nous n’arrivons jamais à l’âge adulte, nous voulons le dessert avant le plat principal. Nous sommes réellement une nation mystérieuse, nous apparaissons et disparaissons. Peut-être est-ce la faute du climat ou des plaines incommensurables. Notre petite civilisation végétale laisse derrière elle des traces infantiles qui donneront du fil à retordre à tous les archéologues du futur : des petits tambours, des soldats de plomb cassés, divers mots trop difficiles pour être prononcés.
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La philosophie première d'Anna était que le rêve sauvait le monde. Que tandis qu'elle dormait, le monde déjà corrompu, abîmé, usé, se régénérait. En rêvant, elle sauvait toute chose de la mort. Personne ne savait cela évidemment, les gens sont si pitoyablement bidimensionnels ("comme une feuille de papier", disait-elle) ; il n'y avait qu'elle, son médecin et moi qui connaissions la vérité.

Je n'accordais pas foi à ses paroles, mais j'abandonnai l'idée de la ramener sur terre. Pourquoi devions-nous avoir les pieds sur terre, me disais-je. Il n'y a aucun mal à penser que l'on est celui qui maintient l'existence du monde, qu'on le porte sur les épaules, tel Atlas. Qu'on le sauve, qu'on meurt pour lui. En un sens, c'est exact. Quand on y regarde d'une certaine façon, c'est une vérité majeure.
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La lecture de romans policiers était, somme toute, agréable. C'était un peu comme faire le ménage ou ranger les tiroirs. Petit à petit, le chaos se transformait en ordre. Seulement, l'ordre devient parfois lassant.
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Parfois pourtant, il nous arrive des choses qui s’inscrivent dans des abîmes psychiques et ne cadrent pas avec les schémas généralement établis. […] Les gens n’apprécient guère pareilles singularités.
Je pense néanmoins que ces « singularités » sont également nécessaires à ceux qui les repoussent avec le plus de véhémence. Elles signalent les limites de la réalité, elles sont des événements à la charnière de « ce qui est » et de « ce qui pourrait être ». En ce sens, elles nous mettent en alerte, elles sont les tambours dont le son monotone nous maintient dans un état de vigilance. Savez-vous, Madame, ce que je redoute le plus ? C’est que le monde soit réellement ce qu’il semble être.

L’île
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Tout comme on ne peut pas se blottir contre sa propre poitrine, songeait-elle, on ne peut pas entendre sa propre voix de l'extérieur. Et de même, il n'est donné à personne de se voir avec les yeux du monde, de s'entendre avec les oreilles du monde, de se toucher avec les mains du monde, ne serait-ce qu'une fois.
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Videos de Olga Tokarczuk (9) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Olga Tokarczuk
Avec Catherine Cusset, Lydie Salvayre, Grégory le Floch & Jakuta Alikavazovic Animé par Olivia Gesbert, rédactrice en chef de la NRF
Quatre critiques de la Nouvelle Revue Française, la prestigieuse revue littéraire de Gallimard, discutent ensemble de livres récemment parus. Libres de les avoir aimés ou pas aimés, ces écrivains, que vous connaissez à travers leurs livres, se retrouvent sur la scène de la Maison de la Poésie pour partager avec vous une expérience de lecteurs, leurs enthousiasmes ou leurs réserves, mais aussi un point de vue sur la littérature d'aujourd'hui. Comment un livre rencontre-t-il son époque ? Dans quelle histoire littéraire s'inscrit-il ? Cette lecture les a-t-elle transformés ? Ont-ils été touchés, convaincus par le style et les partis pris esthétiques de l'auteur ? Et vous ?
Au cours de cette soirée il devrait être question de Triste tigre de Neige Sinno (P.O.L.) ; American Mother de Colum McCann (Belfond), le murmure de Christian Bobin (Gallimard) ; le banquet des Empouses de Olga Tokarczuk (Noir sur Blanc).
À lire – Catherine Cusset, La définition du bonheur, Gallimard, 2021. Lydie Salvayre, Depuis toujours nous aimons les dimanches, le Seuil, 2024. Grégory le Floch, Éloge de la plage, Payot et Rivages, 2023. Jakuta Alikavazovic, Comme un ciel en nous, Coll. « Ma nuit au musée », Stock 2021.
Lumière par Valérie Allouche Son par Adrien Vicherat Direction technique par Guillaume Parra Captation par Claire Jarlan
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