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Inspecteur Andreas Auer tome 2 sur 3
EAN : 9782889440337
445 pages
Slatkine et Cie (07/09/2017)
3.86/5   221 notes
Résumé :
Voyage au plus noir de l’âme humaine...

Qu’a-t-il bien pu arriver à l’inspecteur Auer ?
Un tueur à gages abat un politicien à l’opéra de Berlin, en plein milieu d’une représentation. Sa prochaine destination : Genève. Et puis, Gryon.
Gryon où Andreas Auer, qui vient d’être suspendu par le commandant de la police, décide d’aider un ami paysan à la ferme pour sortir de sa déprime. Gryon, ce petit village si paisible. Paisible ? Pas si sûr…... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (81) Voir plus Ajouter une critique
3,86

sur 221 notes
Après Les protégés de Sainte Kinga et le Dragon du Muveran, me voici à nouveau plongé dans un polar du romancier suisse, Marc Voltenauer.
Qui a tué Heidi ? En fait, ce polar est le second paru après le Dragon du Muveran. Ma découverte de l'auteur s'était faite avec son quatrième livre : Les protégés de Sainte Kinga et ses talents d'écrivain de thrillers m'avaient conquis.
Je retrouve donc l'inspecteur Andreas Auer, toujours dans le canton de Vaud, district d'Aigle, à Gryon où il habite avec Mikaël qui est journaliste. Leur chien, Minus, sera bientôt rejoint par un chat, Lillan, mais avant d'exposer l'intrigue de cette histoire aux multiples rebondissements, il faut que je lève l'ambiguïté du titre : Qui a tué Heidi ?
En effet, ce fameux prénom popularisé depuis longtemps par la télévision, personnage créé par l'autrice suisse Johanna Spyri, adapté au aussi au cinéma, en dessin animé, en bande dessinée, ce fameux prénom a été donné à une vache par Antoine Paget qui est fermier à Gryon. Passionné par son travail, il rêve de remporter le fameux concours d'Aigle. Pour cela, il prépare une autre vache, sa meilleure bête, une Simmental nommée Yodeleuse, diminutif, Yodi.
Andreas Aueur, notre policier est en congé. Il se prend de passion pour ces vaches de montagne et vient aider Antoine. Mieux, ce sera lui qui mènera Yodi pour passer devant le jury ! J'ai beaucoup aimé cette partie consacrée l'élevage dans une des rares fermes encore actives à Gryon.
Dans ce polar divisé en cent quarante chapitres, le rythme est soutenu, nerveux. Les intrigues se mêlent après avoir paru n'avoir aucun rapport. C'est le cas dès le chapitre 2 se déroulant à Berlin, le samedi 23 février 2013 où un Russe, ex-agent très spécial de renseignements à l'étranger, monnaie ses services dans le privé. Il dit s'appeler Artomonov et exécute un contrat à l'opéra de Berlin en plein concert de la Walkyrie. Cet homme méticuleux, très organisé, qui ne fait aucun sentiment, est surnommé Litso Ice, visage de glace, à cause de son regard capable de figer sur place celui qui le croise.
À Gryon, quatre jeunes se retrouvent régulièrement dans un bar pour jouer aux cartes. Vincent, le fils d'Antoine, Romain, Jérôme et Cédric. Chacun a ses problèmes et ses projets mais ne se confie pas aux autres.
J'évacue la Pasteure du village, Erica, dont le cas relie au précédent roman, le Dragon du Muveran, pour dire que le noeud du problème se trouve dans un vaste projet immobilier visant à acquérir les plus beaux alpages au-dessus du village pour y construire un grand ensemble touristique. Les imbrications financières sont complexes, diverses sociétés sont impliquées mais tout cela doit appartenir à un Russe richissime…
Des vaches, un éleveur jaloux, un tueur russe, un projet immobilier d'envergure, un jeune homme très mal dans sa peau, « L'homme qui s'enivrait du parfum de sa mère », des femmes qui disparaissent et un inspecteur Auer suspendu par sa hiérarchie, cela fait beaucoup mais Marc Voltenauer maîtrise tout cela parfaitement.
Qui a tué Heidi ? donne un récit passionnant, addictif, instructif aussi sur certaines traditions suisses, la vie d'un village, car tous les lieux décrits existent réellement. Seuls, histoire et personnages sont fictifs.
La pauvre Heidi est morte mais bien d'autres victimes, humaines cette fois, jalonnent cette histoire qu'il m'a emmené au coeur des Alpes vaudoises mais aussi à Moscou, Berlin, Genève, Lausanne. le dépaysement est garanti. Chaque chapitre indique précisément où il se passe, avec la date. L'histoire débute le samedi 23 février 2013 et se termine le vendredi 5 avril de la même année. Je vous laisse la découvrir

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Après le dragon du Muveran, premier polar de l'auteur suisse Marc Voltenauer, j'ai été à nouveau scotchée par Qui a tué Heidi ?, cette nouvelle enquête de l'inspecteur Andreas Auer. L'auteur confirme son talent, nous faisant subir un suspense insoutenable avec des émotions fortes et variées, en nous plongeant dans une intrigue si bien ficelée qu'elle ne nous laisse pas une minute de répit.
Nous revoici donc, cinq mois plus tard au Chalet L'Étoile d'argent à Gryon avec Andreas Auer, un peu mélancolique, souffrant du crime blues selon Michaêl son compagnon.
Suite à une altercation avec un collègue raciste qui a fini le nez cassé, à l'hôpital, Andreas s'est retrouvé en congé forcé, congé qu'il a prolongé, en désaccord avec cette décision.
Ayant toujours voulu assisté à un vêlage, lorsqu'Antoine Paget le prévient que « Yodi vient de perdre les eaux », il se rend à la ferme et va aider Yodeleuse à mettre bas deux veaux! Antoine va lui proposer alors, d'apprendre à mener les vaches dans un concours régional à Aigle.
Et voilà qu'à Aigle, Yodeleuse est sacrée Grande championne, un grand moment pour Andreas et Antoine, mais de courte durée puisqu'une semaine plus tard, une autre vache d'Antoine, Heidi est retrouvée gisant dans une mare de sang, la gorge tranchée. C'est ensuite Serge Hugon, un éleveur jaloux du succès d'Antoine, sa vache ayant été empoisonnée pendant le concours, qui est retrouvé mort, la tête fracassée. Antoine est l'assassin tout désigné.
De plus, deux jours après la mort de Serge Hugon, sa tante est contactée par l'agence immobilière qui souhaite acquérir le terrain et la ferme d'alpage qu'elle va hériter de son neveu. Il s'avère qu'un projet d'hôtel de grand luxe refait surface.
Tout va petit à petit s'entremêler, une opération financière plus que floue, un tueur à gages en mission à Gryon, le sans-pitié Litso Ice, un mystérieux psychopathe « l'homme qui s'enivrait du parfum de sa mère » qui se met à enlever des jeune femmes…
Dans ce cadre enchanteur, au coeur des Alpes vaudoises, dans ce petit village de montagne qui avait fait alors la une de la presse, « des affaires pas très nettes s'y tramaient à nouveau. » Vont donc évoluer un certain nombre de personnages inquiétants et dangereux et malgré sa mise sur la touche, Andreas Auer ne pourra rester inactif, bien secondé par Mickaël. D'ailleurs devant la complexité de l'affaire et l'enquête piétinant sur place, Andreas Auer sera réintégré : on a besoin de son talent !
Un deuxième polar dans lequel l'inspecteur Auer, tout en étant écarté de son équipe un certain temps prend encore plus d'épaisseur et à mon sens d'encore plus d'humanité. J'ai été très émue par l'amitié qu'il porte à Antoine et par l'amour qu'il témoigne à sa soeur, son neveu et sa nièce sans parler de celui qu'il réserve à son compagnon !
La vie quotidienne des villageois avec encore des secrets bien enfouis est à nouveau bien décrite. Bien que j'aie pu être étonnée de voir Andreas Auer s'occuper des vaches, j'ai apprécié de découvrir la vie de ces éleveurs de bovins et leur attachement à leurs bêtes. Preuve en est, le nom qu'ils leur donnent à chacune. D'ailleurs, en lisant le titre de ce polar, j'étais persuadée qu'Heidi était une femme ! Quant à la préparation de Yodeleuse pour le concours, un beau moment empreint de sensualité et aussi d'humour quand référence est faite aux Miss ! N'est pas oubliée non plus la difficulté pour les jeunes de rester à la ferme.
Comme dans le précédent, Marc Voltenauer, dont on ne peut que saluer la belle écriture, réussit à nous mettre l'eau à la bouche avec de succulentes préparations culinaires soit typiquement suisses soit suédoises, arrosées de bons crus comme ce prestigieux Chasse-Spleen 2005, en profitant pour évoquer Baudelaire.
Il fait preuve d'un immense talent, d'une imagination débridée et de beaucoup de psychologie pour nous offrir ce superbe thriller, où araignées et pythons ont aussi leur mot à dire, réussissant à se glisser dans l'âme de personnages noirs et torturés, avec un inspecteur fasciné par leur zone d'ombre.
J'attribue également une mention spéciale pour les surnoms donnés à certains personnages comme Mangiafuoco, le marionnettiste de Pinocchio, qualificatif donné à celui qui tire les ficelles dans le roman ou Litso Ice donné au tueur russe, un mélange de russe et d'anglais qui signifie visage de glace.
Qui a tué Heidi ? est un polar froid et glaçant pourtant empreint de beaucoup de tendresse !
La dernière phrase nous laisse espérer une suite, heureuse nous l'espérons pour nos héros !
Encore un grand plaisir de lecture offert par Marc Voltenauer et les éditions Stalkine !

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Je viens de tourner la dernière page de ce roman et , sans entrer dans trop de détails , je dirai que cette découverte fut rapide , débutée hier seulement .Cela me semble constituer un premier élément à porter au crédit de l'auteur , non ? Pour ma part c'est certain , voilà un ouvrage qui se dévore.
La seconde remarque est que je n'avais pas lu le premier volume de cet auteur , " le dragon du Murevan" et je le regrette un peu . D'abord parce qu'il est sûrement très agréable à lire , s'il présente les mêmes qualités et , d'autre part , certaines allusions , certaines actions , sans faire interférence , ne peuvent pas être saisies ...Pas indispensable , certes , mais quand même...
Je disais que le " rythme " était soutenu...oui . Et pourtant , ceux qui vont commencer leur lecture vont se demander si mon âge avancé ne me joue pas certains tours .Je m'explique : les 100 premières pages sont ....lentes , lentes ...Certes , on assiste à Berlin , à l'assassinat de 4 personnes dans un théâtre, par un agent secret russe , mais , aussitôt après , nous voici transportés dans les Alpes vaudoises, dans le charmant ( pour l'instant ...) petit village de Gryon . Pour vous représenter ce cadre édénique , imaginez le bel emballage mauve du chocolat Milka ou Suchard , je ne sais plus et ce n'est pas important , j'aime les deux ......Et bien la vache de l'emballage, imaginez - la , souriante ( mais si...) paissant tranquillement dans les alpages fleuris , au son des clarines...Image de carte postale , fierté des éleveurs du coin , un soupçon de jalousie aussi lorsqu'il faut désigner la " vache victorieuse " du concours...Rien de bien méchant , croit - on, c'est un sentiment bien légitime qui se réglera gentiment devant un " petit canon " . C'est ici , à Gryon que réside temporairement Andréas, un jeune policier , venu expier une trop grande nervosité....Cure de repos au pays de " la vache qui rit.." Oui , certes ,mais le problème , c'est que la fameuse" vache qui rit" , elle ne va pas rire bien longtemps et , nous , lecteurs , il va falloir nous sortir de la délicieuse torpeur dans laquelle nous nous " vautrons " avec délice. Fini le farniente , place aux " gladiateurs " , entrée des artistes , ces braves ruraux à qui on donnerait le Bon Dieu sans confession si , si , c'est même marqué sur certains chalets " Béni soit le Seigneur chaque jour..."...La jalousie , oui , et le reste...
Ajoutez à " toutes ces rancoeurs " cachées l'arrivée du russe .Mais si , voyons , Berlin , le théâtre , les 4 cadavres . le voilà , à Gryon .Pour une vache ? Qui sait ?
Les chapitres sont courts , vifs , il se passe plein de choses , parfaitement bien écrites et orchestrées, on ne s'ennuie pas une seule seconde même si certaines scènes sont prévisibles ou parfois exagérées. Ce serait pour moi un mélange de polar rural et de roman noir , une histoire assez palpitante et bien menée .Si nous ne savons pas toujours où nous allons , il faut se " laisser faire" , se laisser mener par le bout du nez par un auteur qui sait d'où il vient et surtout où il va , suffisamment habile , de surcroît, pour laisser " une fin ouverte " pour un troisième volume.
Allez , un petit carreau de chocolat ? Si , regardez , là , la tablette avec une vache dessus.....Du bon chocolat ...suisse . Pour un livre " vachement " sympa.
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En préambule, je souhaitais tout d'abord vous présenter Hans Rosenfeldt, un scénariste suédois que Marc Voltenauer n'a jamais cité comme référence lorsqu'il parle des auteurs nordiques qui l'ont inspiré. En parcourant l'impressionnante revue de presse, que notre roi du polar suisse affiche fièrement sur son site, Camilla Läckberg, Stieg Larsson et Jo Nesbø trônent en bonne place, mais nulle trace de ce concepteur qui n'est autre que le créateur de Broen (Le Pont), la célèbre série suédo-danoise qui a été adaptée en France et aux Etats-Unis. Mais outre ses activités de scénariste, Hans Rosenfeldt écrit également des thrillers en collaboration avec Michael Hjorth, un autre écrivain suédois. Publié en 2010, leur premier volume, intitulé Dark Secrets (éditions Prisma 2013 pour la version française), relate les aventures d'un profileur qui travaille pour la police suédoise en traquant un serial killer que l'on désigne comme « l'homme qui n'était pas un meurtrier » une phrase plutôt atypique que l'on retrouve, au mot près, dans le Dragon du Muveran (Plaisir de lire 2015) et qui avait charmé de nombreux critiques louant la créativité et l'originalité de Marc Voltenauer. La coïncidence est d'autant plus troublante que cette expression originale est utilisée, dans les deux ouvrages, comme formule d'introduction pour tous les chapitres relatifs au point de vue du meurtrier. Peut-on parler de plagiat, d'un hommage trop discret ou tout simplement d'une succession de coïncidences malencontreuses ? Chacun se fera une opinion, mais en tout état de cause on décèle avec Qui A Tué Heidi ? nouvel épisode des aventures de l'inspecteur Auer, le manque de créativité d'un auteur qui peine également à se renouveler.

A l'Opéra de Berlin, alors qu'il assiste à une représentation de la Walkirie, un couple est froidement exécuté par un mystérieux tueur à gage déterminé. Une fois son forfait accompli, l'assassin apprend qu'il doit se rendre en Suisse afin de poursuivre sa mission. Tout d'abord Genève, puis un petit village vaudois dont il n'a jamais entendu parler : Gryon où l'inspecteur Auer à fort à faire suite à un règlement de compte rural qui vire au drame. Et puis il y a cet individu étrange, l'homme qui s'enivrait du parfum de sa mère, qui doit accomplir des actes terribles pour assouvir ses phantasmes. Des femmes qui disparaissent, des cadavres qui s'amoncellent et le temps qui presse pour démêler ce terrible imbroglio d'événements sanguinolents. Tourmenté et acculé dans ses derniers retranchements, Andreas Auer devra compter sur son compagnon Mickaël et sur son équipe d'enquêteurs chevronnés qui l'aideront à surmonter les terribles épreuves qui l'attendent. Mais au coeur du mal et de la folie rien ne lui sera épargné.

Avec ce second roman, Marc Voltenauer a donc tenté de se renouveler en opérant une révolution puisque de l'homme qui n'était pas un meurtrier du Dragon du Muveran, nous passons à l'homme qui s'enivrait du parfum de sa mère. Une variation « audacieuse » que les auteurs suédois de la série Dark Secrets n'ont pas osé commettre, sachant que ce type d'artifice ne fait que souligner la faible capacité d'un auteur à se réinventer. Ainsi, sur fond de magouilles immobilières et de rivalités entre éleveurs, Marc Voltenauer déroule, avec toute la maladresse dont il est capable, un récit cousu de fil blanc qui reprend les principes éculés de la traque d'un serial killer, qui a la particularité de porter un superbe prénom, conjuguée à celle d'un tueur à gage qui cumule tous les poncifs du genre.

Quand il est bien maîtrisé, un page-turner peut se révéler efficace. Mais à force de vouloir surprendre le lecteur à tout prix avec des artifices narratifs qu'il ne maîtrise pas, Marc Voltenauer se perd dans une intrigue bancale en passant complètement à côté des thèmes abordés. On regrettera par exemple le côté idyllique du milieu rural alors que l'actualité ne cesse d'évoquer une profession en crise, avec des fermetures d'exploitations et des paysans à bout de force mettant fin à leurs jours. Pareil pour les scandales immobiliers que l'auteur développe dans de longues explications laborieuses qui donnent l'impression de lire les notes du conseiller technique qu'il a sollicité. L'ensemble se décline sur un décor helvétique aux allures de carte postale ultra kitsch et sur une somme de clichés qui, même s'ils sont très sympathiques, nous éloignent de la véritable identité d'un pays qui ne saurait se résumer à une série de "name dropping" et quelques expressions typiques.

Au niveau du style, on oscille entre le guide de voyage et la plaquette publicitaire avec cette propension à s'égarer dans une foule d'explications répétitives et de longues digressions ennuyeuses qui cassent le rythme du récit. Ne reculant devant aucun sacrifice pour étayer mes propos, je vous livre un exemple parmi d'autres, extrait du chapitre 67 :

« Andreas prit dans sa cave à cigares un modèle nommé the five.sixty – 5.60 – de la marque El Sueno, que son marchand habituel lui avait conseillé. Bien qu'il se fut mis en tête de ne fumer que des havanes, il s'était laissé persuader qu'il serait déçu en bien, comme on dit dans le canton de Vaud. Il lui avait expliqué que les feuilles de tabac provenaient des endroits les plus reculés de Saint Domingue et du Nicaragua, là où – sous entendu, contrairement à Cuba – les traditions étaient restées fidèles aux méthodes issues d'une culture ancestrale. le 5.60 était un modèle trapu. le cinq indiquant sa taille, 12,7 cm et le soixante son cepo, son diamètre, 60/64 de pouces, soit 2,4 cm. Il était donc plus épais que le module Robusto qu'il affectionnait particulièrement. Une grosse cylindrée …
Andréas laissa de côté ces considérations techniques et observa la vitole tout en coupant la tête. Ce qui frappait en premier lieu était sa bague inhabituellement large qui présentait, sous la partie avec le logo et le nom, un damier en noir et blanc. Décidément ce cigare détonnait. Il sortit sur la terrasse. Malgré la fraîcheur de l'air, les quelques rayons de soleil avait déjà réchauffé les dalles. Il s'installa confortablement dans son fauteuil. Il observa à nouveau la vitole. La cape du cigare était Colorado, foncée, dans les tons bruns moyens à rouge. Au toucher, elle était bien grasse, comme il l'aimait. Il l'alluma en espérant que cela soit un rêve – comme son nom l'indiquait -, et pas une chimère …
Son démarrage facile et sa fumée généreuse n'étaient pas pour déplaire. Peu à peu, les arômes s'immiscèrent subtilement. Des fruits secs et une touche de boisé. du cèdre. le cigare évoluait doucement, mais dès le deuxième tiers, la palette gustative devint plus complexe. Des saveurs fongiques de sous-bois ainsi que des notes animales se développèrent sans une once de brutalité malgré la puissance finale. Il était conquis. »

Et tout y passe : rhum, opéra, cuisine suédoise et autres interludes culinaires ; Marc Voltenauer est capable de vous imposer ses digressions sur les deux tiers d'un chapitre au détriment de l'élément important de l'intrigue qu'il doit développer, ce qui provoque une sensation de déséquilibre plutôt désagréable. Et il en va de même pour l'ensemble de personnages stéréotypés, plutôt superficiels, qui font l'objet de descriptifs sans intérêt, tantôt mièvres, tantôt grotesques, comme on peut le constater avec cet extrait du chapitre 81 qui a la particularité de concentrer bon nombre des défauts que j'ai évoqués et qui débute ainsi :

"Les yeux cernés de fatigue, Karine se concentrait tant bien que mal sur les virages en épingles qui s'enchaînaient. Son portable avait sonné alors qu'elle faisait l'amour, pour la troisième fois de la nuit, avec son amant, chez lui.
Depuis sa rupture, elle ne sortait jamais et consacrait tout son temps à son travail et à son art martial, le jiu-jitsu. Elle s'était donc résolue à s'inscrire sur un site de rencontres. Elle s'était vite rendue compte qu'elle avait l'embarras du choix. Elle préféra éviter swissinfidelity et adultery. Elle avait eu son lot de déceptions par le passé, et avait plutôt opté pour parship.ch. Un site qui affichait des photos de personnes aux sourires bienveillants et faisait miroiter des promesses avec son slogan : Pour vivre votre vie à deux. Une vie à deux ? Elle ne voulait rien précipiter, mais après plusieurs mois de rencontres d'un soir, elle avait à nouveau envie de séduction et de romantisme. Elle avait reçu de nombreux messages, mais le bilan avait été plutôt négatif. Un premier rendez-vous avait avorté avant même d'avoir lieu. Elle avait aperçu l'individu à travers la vitre, l'avait reconnu grâce au signe qu'ils avaient convenu, le dernier polar de Camilla Läckberg, repérable de loin à sa couverture rouge et noire. Immédiatement rebutée par le physique de son propriétaire, elle avait fait demi-tour sans demander son reste. Un deuxième rendez-vous, avec un beau ténébreux, avait tourné court quand il s'était avéré être d'un machisme d'un autre âge. Cet échec sonna le glas de son expérience en ligne. Au bout du compte la bonne vieille méthode avait fonctionné. Son amant était le sosie aux yeux de braise du docteur Mamour, celui qui l'avait troublée à l'hôpital. Elle avait pris le semi-prétexte de chercher à avoir des nouvelles de la santé de Séverine Pellet pour le recontacter. Ils s'étaient retrouvés à la fin de sa journée de travail et ils avaient passé la soirée à discuter, sans que cela ne se soit terminé au lit. Elle avait été un peu frustrée sur le moment, mais elle avait passé une agréable soirée et la deuxième, le lendemain avait été encore plus extraordinaire. Une invitation chez lui. Un repas succulent. du vin. Et pour finir, du sexe. Ce ne fut pas la partie de jambe en l'air la plus excitante qu'elle ait connue, mais, au moment de s'endormir dans ses bras, elle s'était sentie bien. Elle n'avait pas l'habitude des hommes plus jeunes qu'elle, mais il était intelligent, charmant et terriblement séduisant. Si de cette aventure naissait une histoire, elle ne manquerait pas de lui donner des conseils avisés pour combler son manque d'expérience qu'elle mettait sur le compte d'un travail très prenant. Elle espérait néanmoins, pour le bien de ses patients, qu'il était meilleur médecin qu'amant.
Au moment où elle avait entendu son téléphone, elle n'avait pas eu d'autre choix que de répondre et laisser Luca sur sa faim.
Un corps avait été retrouvé à Gryon.
Une femme
.… »

Ce n'est qu'au dernier tiers du chapitre que l'auteur daigne enfin évoquer la scène de crime. Mais il paraît que ces parenthèses superflues plaisent aux lecteurs et il faut admettre que Marc Voltenauer ne ménage pas sa peine pour ratisser le plus large possible. Pour ce qui est des dialogues, on passe de la morne inconsistance d'échanges convenus à l'éclat de rire avec quelques répliques déconcertantes à l'instar de ce tueur à gage pointant une arme à feu sur sa victime tout en tentant de la rassurer en lui demandant : Détends-toi cher ami. Tu veux que je te mette la chaîne des films pornos ? Et si les réparties pertinentes viennent à manquer, cela n'a pas d'importance car Marc Voltenauer, en génie inspiré, dupliquera une réplique d'un film, comme L'inspecteur Harry, pour pimenter un échange entre son héros et un collègue raciste. C'est d'ailleurs l'une des marques de fabrique de l'auteur qui, sous forme d'hommages déguisés, utilise le travail des autres pour l'adapter à son récit. Ainsi nous aurons droit à de multiples références du Silence des Agneaux qui permettront à l'inspecteur Auer de progresser dans son enquête tout en comblant le déficit d'imagination de l'écrivain. Au moins a-t-il la correction de citer ses sources pour éviter toute ambiguïté. Mais n'est pas Thomas Harris ou Jonathan Demme qui veut et malgré l'appui de ces illustres modèles, les incohérences qui jalonnent le récit restent nombreuses à l'exemple de ce tueur professionnel russe qui prend le risque insensé de voyager en avion en transportant armes et munitions dissimulées dans sa valise ou qui estime, lorsqu'il parvient à s'enfuir de l'aéroport de Genève, qu'il est plus judicieux de revenir à Gryon pour prendre une voiture plutôt que de franchir la frontière pourtant si proche ce qui permet à Marc Voltenauer de mettre en place une confrontation finale qui se déroule au terme d'une succession de hasards circonstanciés plutôt douteux. Il faut dire que l'intrigue fourmille de ces coïncidences salutaires, comme ces conversations surprises au bon moment dans les cafés en permettant de relancer l'enquête ou de mettre en oeuvre de machiavéliques projets. Difficile donc d'extraire un élément positif de ce texte fade et boiteux qui donne l'impression d'avoir été rédigé par une personne atteinte de schyzophrénie au vu des variations du style en fonction de l'intervention des nombreux contributeurs qui ont tenté de sauver ce roman du naufrage. Un défi de taille, il faut bien l'admettre, qui était voué à l'échec.

Mais finalement peu importe la qualité du texte. Ce qui compte c'est la vente. Et dans ce domaine il n'y a rien à redire car Marc Voltenauer possède des capacités exceptionnelles dans le domaine, ce qui lui a permis de mettre en place un plan marketing d'une redoutable efficacité. Ainsi, pour la promotion de Qui A Tué Heidi ? tout le petit monde du livre a répondu présent et l'on a rarement vu un tel battage médiatique avec une presse unanime louant le talent de Marc Voltenauer tout comme les animateurs radio et chroniqueurs pour la télévision. Comme quoi la diversité des médias romands, en matière de critiques littéraires, est un concept un peu surfait. Reste à déterminer si les journalistes ont salué les bonnes dispositions du vendeur ou le talent de l'écrivain car, comme pour l'ouvrage précédent, la plupart des articles ne font que mentionner les particularités helvétiques du roman, le parcours de l'écrivain et ce fameux chiffre de vente vertigineux que l'on dit un peu surfait. Tout juste si l'on relève, dans ce beau concert de louanges, quelques petites notes discordantes avec Isabelle Falconnier qui parle d'une légère déception au niveau du style (Bon pour la tête 19.08.2017) tandis que Mireille Descombes signale quelques pêchés de jeunesse (Le Temps 19.08.2017). Mais rien de bien méchant. Et qu'à cela ne tienne, Marc Voltenauer pourra toujours compter sur son réseau de blogueurs passionnés qu'il a patiemment constitué et qui est désormais totalement acquis à sa cause à grand coup de SP dédicacés et autres opérations visant à séduire son lectorat.

On le voit, le concept promotionnel de ce manager avisé est parfaitement rôdé et les écrivains aigris par leurs faibles chiffres de vente devraient s'inspirer du modèle. Bien sûr il ne faudra pas être trop rebuté par les aspects narcissiques et égocentriques de cette démarche plutôt simple qui consiste à utiliser les réseaux sociaux à outrance en nous abreuvant, au quotidien, de messages évoquant le classement du livre, les dates de dédicaces, les articles des médias et autres photos et concours ainsi que le sacro-saint et opaque chiffre de vente. Et pas d'inquiétude pour un éventuel effet de lassitude, au contraire les fans adorent ça. Marc Voltenauer l'a bien compris, la littérature c'est avant tout un business, une affaire de communication et un réseau qu'il convient d'exploiter à fond afin, par exemple, de pouvoir être sélectionné pour la première édition du prix du polar romand à l'occasion du festival Lausan'noir, ceci deux mois avant la sortie officielle de son chef-d'oeuvre. On dit que l'encre n'était pas encore sèche quand les jurés ont reçu l'ouvrage.


Tragique événement littéraire de la rentrée romande, Qui A Tué Heidi ? peut devenir une agréable lecture si l'on a envie de se payer une bonne tranche de rigolade entre copains en lisant à voix haute quelques extraits de cette tartufferie du polar helvétique qui fera l'objet d'une suite puisque notre manager avisé a pris soin de laisser quelques éléments de l'intrigue en suspens afin de pouvoir écouler un troisième roman en cours d'élaboration (au secours !). Peut-être y décélera-t-on une once d'amélioration lorsque Marc Voltenauer daignera enfin prendre la peine de nous raconter une histoire originale plutôt que de concevoir un produit destiné à être vendu au plus grand nombre (Les deux concepts n'étant pas forcément incompatibles). On peut toujours rêver.


Marc Voltenauer : Qui A Tué Heidi. Editions Slatkine 2016.

Hans Rosenfeldt & Michael Hjorth : Dark Secrets (Det Fördolda). Editions Prisma 2013. Traduit du suédois par Max Stadler.

A lire en écoutant : Crime of Century de Supertramp. Album : Crime of Century. A&M 1974.
Lien : http://monromannoiretbienser..
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Les avis sont assez partagés sur les livres de cet auteur suisse, qui semble très médiatisé. Ayant acquis ce roman d'occasion, je me suis dit que j'aurais moins de regret s'il ne me plaisait pas...

C'est le deuxième d'une série consacrée aux enquêtes de l'inspecteur Andreas Auer. Et il est un peu gênant de ne pas suivre l'ordre, car des éléments du premier tome sont ici repris et analysés, tant pis.

le début m'a plu. J'ai aimé découvrir les Alpes vaudoises et les coutumes locales ( peut-être clichés, je ne sais pas) des villages montagnards. Et Heidi me rappelait mes lectures d'enfance. Cependant, ce n'est pas la petite fille courant dans les alpages qui est une cible, non, Heidi est...une vache!

Un polar rural, direz-vous. Oui, mais il est question aussi de fraudes immobilières. Et d'un psychopathe qui recherche la femme parfaite.

Et c'est là que je commence à décrocher. Trop d'éléments, ça part dans tous les sens! de plus, entre les descriptions certes alléchantes des repas et boissons et les digressions multiples, j'ai trouvé le temps assez long!

Surtout, ce qui m'a manqué, c'est une épaisseur psychologique des personnages. Je n'ai pas su m'attacher à eux, ni leur trouver une véritable personnalité.

La fin multiplie les événements de façon assez peu vraisemblable. Déçue, vraiment! L'ensemble manque de consistance, l'écriture aussi. Je ne renouvellerai pas l'expérience.
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Citations et extraits (38) Voir plus Ajouter une citation
Mais il avait aussi prévu de préparer différents plats. Le plus simple et le plus typique : les köttbullar, boulettes de viande avec confiture d’airelles. Ensuite le Janssons frestelse, gratin de pommes de terre, d’oignons et d’anchois.Puis des Aladåb, sortes de terrine en gelée, l’une avec de la viande et des légumes, et l’autre avec du poisson. Pour le dessert, il avait choisi le Saffranspankaka, la spécialité de l’île de Gotland : une galette de riz au safran qui se déguste avec de la crème fouettée et de la confiture de salmbär, une variété de mûres de l’île.
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Litso Ice avait ouvert la grille et aperçu une grange, dont la façade était couverte d’une grande croix en bois sur laquelle figurait l’inscription « La parole est la vérité ». Il avait alors songé à la Pravda, la publication officielle du parti communiste qui se targuait elle aussi de ne dire que la vérité. Litso Ice avait tendance à fuir ceux qui se prévalaient de la détenir. Pour sa part, il considérait plutôt la parole comme un outil de manipulation, et pas comme garante d’une vérité, qui avait tendance à changer de visage selon la personne qui la brandissait en étendard.
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Il se tenait devant le miroir. Son teint cadavérique lui plaisait. C’était lui, mais en différent. Il se sentait mieux dans la peau de quelqu’un d’autre. Il avait essayé d’être sa mère. Maintenant, il devenait un être livide et satanique. En se déguisant, il avait senti que la transformation opérait, que des énergies tourbillonnaient dans son corps. Il était gonflé à bloc. Plus rien ne pouvait l’atteindre.
(page 390)
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Contrairement à un parfumeur, un œnologue ou un fleuriste qui emploient un lexique précis pour décrire les senteurs et les arômes, les médecins légistes sont confrontés à des émanations singulières, mais qui n’ont pas de nom. Elles sont définies comme caractéristiques, particulières ou encore pénétrantes. On en fait l’expérience, on les identifie. Mais on ne les nomme pas. Doc résumait ces fragrances : « C’est l’odeur de la mort. »
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En sortant du parking, il vit sur sa gauche un des symboles de la ville (Genève), l’horloge fleurie, composée de plus de sept mille fleurs. L’heure était réglée via satellite et l’aiguille des secondes trottait avec une exactitude toute helvétique. Litso Ice appréciait, certes, le chocolat et la fondue, mais ce qu’il aimait de la Suisse, c’était sa légendaire précision, la méticulosité comme mode de vie.
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