"
Occident" de
Simon Liberati est un roman qui explore le thème, une fois n'est pas coutume chez l'auteur, de la figure de l'Artiste, vieux, fatigué et désabusé sur son art qui est incapable d'aimer ni d'être aimé. À travers une écriture ciselée, l'auteur plonge le lecteur dans un tourbillon de fêtes, d'excès grandiose et de lendemain glauque « très petit », tout en offrant un regard profond sur la petitesse de ce héros moderne – L'ARTISTE : son égoïsme, ses fragilités latentes, ses frustrations et autres désirs inassouvis.
L'histoire est narrée par Alain, un peintre dédié à la peinture figurative à l'huile – qui est assez connu pour vivre de sa peinture et qui va atteindre l'apogée de son succès à un âge relativement avancée – toute ressemblance avec l'auteur ne semble pas fortuite.
L'un des points forts du roman est sans aucun doute la prose captivante de l'auteur. Liberati utilise une langue riche et poétique qui crée une atmosphère enivrante et immersive. Sa capacité à décrire les lieux, les personnages et les émotions permet au lecteur de ressentir la déchéance morale de son héros – qui parvient quand même à être aimé, plus parce qu'il se dérobe à tout sentiment, plutôt qu'être réellement « aimable » comme tout bon « être masculin toxique » et qui bénéficie grandement de son « statut ».
L'un des aspects les plus intéressants du livre est la façon dont l'auteur dépeint les conséquences de la recherche du bonheur facile au sein d'une société en apparence libérée, mais en réalité, enfermée dans ses propres conventions et faux-semblants.
Liberati aborde des thèmes profonds tels que l'identité, la quête de sens, la vanité et la superficialité.
Toujours la quête de la pureté.
Toujours les mains sales des parvenus du cool qui salissent tout ce qu'elles touchent.
Les lecteurs de Liberati ne seront pas dépaysés.
Cependant, malgré les qualités indéniables de "
Occident", certains lecteurs pourraient trouver que le récit est parfois un peu décousu, en raison des nombreux sauts temporels et des changements de perspective ; et certaines scènes de débauche et de dépravation dérangeantes. Autant la première partie du roman m'a fait penser aux pérégrinations du héros, peintre également, de
la Carte et le Territoire de
Houellebecq – en version « glamour » dans le Paris des marchands d'art sans scrupule et m'a convaincu.
Autant la deuxième partie du roman est plus « hallucinée » qu'hallucinante , et je me suis un peu perdue dans les délires mystico-érotique du personnage féminin (forcément très jeune pour coller à l'esthétique décadente, Balthusienne, néo-gothique cher à l'auteur) – c'est volontairement « dur » à saisir, volontairement hermétique, car très auto-référencées, gorgées de citations, et d'une sous-culture très « Lucifer c'est cool » des années Rosemary's baby, et de mise en abime stylistique labyrinthique – n'est pas
Lautréamont qui veut – sans qu'on y croit vraiment.
Le rythme est mal géré, mais c'est la signature de l'auteur – qui personnellement, me plaît.
En conclusion, "
Occident" est un roman beau formellement, dérangeant dans son entreprise de démystification de la figure de l'artiste – LE tropisme de l'auteur. Avec sa prose lyrique et ses personnages intrigants, manquant parfois de profondeur,
Simon Liberati offre un portrait au vitriol d'une certaine intelligentsia intellectuello-mondaine française, de son mauvais goût, et de son opportunisme latent.
Toujours courageux, l'auteur assume sa réaction – et démontre sa thèse en alignant les belles phrases, même si comme toujours chez lui, l'intrigue a de la peine à passionner – mais comme c'est délibéré, ça reste une oeuvre collage, clash, très « Burrough rencontre le Parnasse ».