Pièces noires est un recueil de pièces qui traitent du prix de l'amour aux dépends de l'oubli de son identité, comme celle qu'est l'expérience de la mort ou du meurtre d'autrui. A l'exception du Voyageur Sans bagages, Anouilh met au défi l'amour entre deux êtres à travers trois pièces de théatre magistralement aux tenants psychologiques complexes, pourtant traitant de sujets si simplement humains. L'amour entre deux êtres peut-il être plus fort que tout? Pourra-t-il être assez fort pour braver, contre vents et marrées, toutes les composantes du monde et de sa société qui s'y oppposent? L'amant fou prêt à tout sera t-il suivi par sa bien-aimée, et dans le cas échéant, aura-t-il assez de sang froid pour se perdre lui même au nom de leurs sentiments?
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FRANTZ : Oh mon Dieu, je suis un monstre. Les autres amoureux croient à l'éternité, à la chaumière et à l'eau fraîche. Pourquoi m'avez-vous donné cet amour puisque vous ne m'avez pas donné avec lui toutes les crédulités nécessaires ?
L'Hermine
Le salon d'une maison de province très cossue, avec une large vue sur un jardin à la française. Au lever du rideau la scène est vide, puis le maître d'hôtel introduit la duchesse Dupont-Dufort, Me Huspar et Gaston.
Le maître d'hôtel
- Qui dois-je annoncer, madame ?
La duchesse
- La duchesse Dupont-Dufort, Me Huspar, avoué, et monsieur...
Elle hésite
- Monsieur Gaston.....
(lever de rideau de "Le voyageur sans bagages" - 1936 - morceau du recueil "Pièces noires" paru chez "Calmann-Lévy" en 1947)
On ne s'aime jamais comme dans les histoires, tout nus et pour toujours. S'aimer, c'est lutter constammenr contre des milliers de forces cachées, qui viennent de vous et du monde.
L'HERMINE
Le buffet d'une gare de province. Style pompeux, usé et sali. Tables de marbre, glaces, banquettes de velours rouge, râpé. Sur sa caisse trop haute, comme un bouddha sur un autel, la caissière, au gros chignon, aux seins énormes. De vieux garçons chauves et dignes, des boules de métal brillant où dorment des torchons puants.
Avant le lever de rideau on a entendu un violon. C'est Orphée qui joue doucement dans un coin près de son père, absorbé dans des comptes sordides devant deux verres vides. Au fond, un seul client, un jeune homme, chapeau rabattu sur les yeux, en imperméable, l'air absent. Musique un instant, puis le père s'arrête de compter, regarde Orphèe.
(lever de rideau de "Eurydice" - 1941 - morceau du recueil "Pièces noires" pau chez "Calmann-Lévy" en 1947)
Acte I
Le hall d'une maison de campagne, largement ouvert sur un jardin. Il fait nuit. En scène, Mr Bentz et Frantz debout l'un en face de l'autre.
Bentz avec un geste
- Je suis bien heureux d'avoir eu votre visite. Vos amis sont charmants.
Frantz
- Monsieur Bentz, vous ne pouvez pas me laisser partir comme ça !....
(lever de rideau de "L'hermine" - 1931 - morceau du recueil "pièces noires" paru chez "Calmann-Lévy" en 1947)
Le voici, le deuxième épisode de notre série Dans Les Pages avec le grand romancier et journaliste Sorj Chalandon.
Merci à lui d'être venu nous parler de ses livres préférés, de G. Simenon, de F. Aubenas, De W.B. Yeats, d'Anouilh et de J. Vallès.
Tous les livres sont disponibles à la librairie et "l'enragé", le dernier roman de Sorj Chalandon est édité @editionsgrasset7893!
Bon épisode !
Arthur Scanu à la réalisation au montage et à la prise de son et Antoine Daviaud au mastering