La langue a signalé sans malentendu possible que la mémoire n’est pas tant l’instrument de l’exploration du passé que son théâtre….. Qui cherche à s’approcher de son propre passé enseveli doit se comporter comme un homme qui creuse….. Car des états de fait ne sont que des gisements, des stratifications, qui, au prix seulement de l’exploration la plus méticuleuse, révèlent ce qui fait les vraies valeurs cachées à l’intérieur de la terre : les images arrachées à leur ancien contexte se présentent comme des joyaux dans les salles austères de notre discernement tardif….. le souvenir ne doit pas procéder par récit et encore bien moins par compte-rendu mais tenter de manière épique et rhapsodique, au sens le plus strict, de porter toujours ailleurs ses coups de bêche, en prospectant, là où il est déjà passé, des couches de plus en plus profondes
Car des états de fait ne sont que des gisements, des stratifications, qui, au prix seulement de l’exploration la plus méticuleuse, révèlent ce qui fait les vraies valeurs cachées à l’intérieur de la terre : les images arrachées à leur ancien contexte se présentent comme des joyaux dans les salles austères de notre discernement tardif….. le souvenir ne doit pas procéder par récit et encore bien moins par compte-rendu mais tenter de manière épique et rhapsodique, au sens le plus strict, de porter toujours ailleurs ses coups de bêche, en prospectant, là où il est déjà passé, des couches de plus en plus profondes
Hier, une longue conversation dans la chambre de malade de Brecht à Svendborg tourna autour de mon essai "L'Auteur comme Producteur". J'y développe la théorie selon laquelle le niveau des progrès techniques qui aboutissent à un changement de la fonction des formes artistiques et par là des moyens intellectuels de production, serait un critère déterminant pour une fonction révolutionnaire de la littérature. Selon Brecht cette théorie ne vaudrait que pour un seul type d'auteur : les écrivains grands-bourgeois, au nombre desquels il se compte lui-même. "L'écrivain grand-bourgeois, dit-il, est en effet solidaire des intérêts du prolétariat sur un point : la poursuite du développement de ses moyens de production. Mais tandis qu'il l'est sur un point, il se trouve, comme producteur, prolétarisé sur ce même point, et cela totalement. Cette prolétarisation totale sur un point le rend cependant solidaire du prolétariat sur toute la ligne."
Ce qui me tourmente, c’est la confusion et le flou des dissensions qui existent parmi le petit nombre de ceux qui me sont proches, ce qui porte atteinte à ma paix intérieure, qui est aussi une disposition pacifique, c’est la disproportion entre l’âpreté avec laquelle sous mes yeux on règle de tels différends – même si depuis longtemps ils ne sont plus toujours en eux-mêmes un enjeu – et l’importance objective souvent très minime de ces différences. Ce sont précisément les caractères permanents de la situation des écrivains qui sont en effet désolants, mais, pour des raisons touchant à l’honneur de la profession, ils ne sont presque jamais exposés au grand jour.
Oui devant ce paysage cultivé au plus haut sens du terme, le citadin profane en la matière est comme un Européen devant une page d’un manuscrit chinois. Et quand on pense qu’une telle ignorance est la seule base commune de la plupart des descriptions. Plus ces fermes provençales sont éloignées les unes des autres, plus leur construction dans la plupart des cas est admirable, mais plus on remarque aussi avec quelle précision et quelle souplesse elles se sont intégrées dans le paysage et combien leurs formes s’accordent naturellement avec celles, inexorablement régulières, des plantations d’arbres, des parterres et des champs.
Par Delphine Minoui, grand reporter, lauréate du Prix Albert Londres 2006
Tout public, à partir de 10 ans
« Lumières pour enfants », c'était le titre donné par Walter Benjamin aux émissions de radio destinées à la jeunesse qu'il assura avant la montée du nazisme. Ce titre, Gilberte Tsaï l'a repris pour les Petites conférences qu'elle programme depuis 2001 dans différents établissements culturels.
Elles reposent sur le pari que ni les grandes questions, ni les espaces du savoir, ne sont étrangères au monde des enfants et qu'au contraire elles font partie de leur souci, formant un monde d'interrogations restant trop souvent sans réponses.
La règle du jeu en est la suivante : un spécialiste d'une matière ou d'un domaine accepte de s'adresser à un public composé d'enfants mais aussi d'adultes, et de répondre à leurs questions. À chaque fois, il n'est question que d'éclairer, d'éveiller : en prenant les sujets au sérieux et en les traitant de façon vivante, hors des sentiers battus.
Programme de la Petite conférence #2 – « Raconter la guerre, dessiner la paix, 25 ans de reportages au Moyen-Orient » par Delphine Minoui :
Rien ne prédestinait l'enfant timide, née à Paris d'une mère française et d'un père iranien, à devenir reporter de guerre. Quand elle s'envole pour Téhéran, en 1997, c'est avec l'envie d'y raconter le quotidien des jeunes de son âge, épris d'ouverture. Mais l'après 11-septembre 2001 chamboule tout. Elle se retrouve en Afghanistan, puis en Irak, pour suivre l'invasion américaine et ses conséquences sur la région. Depuis, les soubresauts s'enchaînent : révolutions du printemps arabe, attentats de Daech, crise des réfugiés syriens, putsch raté en Turquie, retour des Taliban à Kaboul. Mais Delphine ne perd jamais espoir. Sensible à l'humain au milieu du chaos, elle navigue entre ses articles et ses livres pour faire parler la paix, encore et toujours, en racontant le combat des héros anonymes croisés sur son chemin.
Entre anecdotes et confidences, la conférence donnera à voir les coulisses du reportage, où le journaliste n'est ni un super héros ni un agent du « fake news » au service d'un grand complot, mais un témoin d'exception, porteur de lumière, même au coeur de l'obscurité.
Le terrain est la colonne vertébrale de son écriture. Correspondante au Moyen-Orient pour France Inter et France Info dès 1999 puis pour Le Figaro depuis 2002, Delphine Minoui a consacré la moitié de sa vie à cette partie du monde synonyme de révolutions, coups d'État et conflits.
À lire – « Les petites conférences » sont devenues une collection aux éditions Bayard.
Delphine Minoui, L'alphabet du silence, l'Iconoclaste, 2023
Les Passeurs de livres de Daraya, Seuil, 2017
Je vous écris de Téhéran, Seuil, 2015
Conception et programmation : Gilberte Tsaï – Production : l'Équipée.
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