L'abbé Sieyès est surtout connu pour son pamphlet " Qu'est ce que le tiers Etat ?" publié en 1789 à l'occasion de la réunion des états généraux et pour son rôle dans le coup d'état du 18 Brumaire qui donna le pouvoir à
Bonaparte.
Sur cet homme très secret qui refusa d'écrire ses mémoires, on ne sait pratiquement rien de sa vie privée, s'il a aimé, été aimé, on ne sait même pas le nom des différentes adresses où il vécut et même simplement à quoi il ressemble, les différents portraits que l'on a de lui, ne montrant jamais le même visage. La seule chose dont on est sûr, c'est que cet abbé ne croyait pas en Dieu comme 80% du clergé à cette époque selon l'auteur.
Son père lui " acheta " un protecteur comme cela était d'usage à l'époque, afin que ce dernier lui procure très vite différentes "charges" telle que la prêtrise ainsi que les émoluments qui vont avec. Devenu abbé, Sieyès s'aperçut très vite que tous les postes importants étaient toujours réservés aux seuls privilégiés, cette aristocratie qu'il se mit à haïr et contre laquelle il lutta toute sa vie.
La Révolution fut sa chance. Grace à son libellé - le pamphlet cité plus haut -, il fut élu député du tiers état et non pas du clergé puis devint très influent à l'égal d'un Mirabeau. Après avoir écrit la plupart des grandes réformes et participé aux actes importants du début de la Révolution, il se fit beaucoup plus discret.
Simple député plus ou moins caché dans ce que l'on appelait le marais, il mit parfois sa grande influence au service de
Robespierre pour contrer les royalistes mais se garda bien de s'engager totalement ce qui lui permit de survivre à la période de la Terreur.
Après le 9 thermidor, Sieyès réapparut et s'imposa comme oracle jusqu'au 18 Brumaire où il aida
Bonaparte à prendre le pouvoir. Ce dernier qui craignait encore son influence, préféra s'en faire un ami en le couvrant d'honneurs et d'argent pour mieux le discréditer. Avec le retour de la royauté, il connut l'exil en Belgique et revint en France en 1830, suite à une amnistie et mourut en 1836, à l'âge de 88 ans.
En suivant l'abbé Sieyès au fil des jours, c'est aussi l'occasion de revivre la Révolution Française et le règne de Napoléon de façon très minutieuse et surtout d'un point de vue politique à travers toutes les assemblées successives auxquelles participa le tribun.
Il ressort de ce portrait très détaillé et complet que Sieyès, qui a participé à l'écriture de trois constitutions différentes, était un homme très intelligent mais aussi pouvait se montrer prétentieux, vaniteux, lâche, fourbe, geignard (surtout sur sa santé), refusant dans un premier temps tous les titres et honneurs pour mieux être supplié mais peut être fallait-il être tout cela pour survivre à cette période plus que mouvementée.
Un livre fascinant donc, qui retrace, sans parti pris, la vie d'un homme avec beaucoup de défaut, loin d'être exemplaire mais qui compta pour beaucoup dans tous les évènements de cette période si riche de notre Histoire.