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EAN : 9782752901156
304 pages
Phébus (14/10/2005)
4.03/5   16 notes
Résumé :
Rien de particulier ne signale le village de Someperce, si ce n'est peut-être la forêt alentour : bonheur des gamins qui s'y perdent à plaisir, mais s'y retrouvent toujours. D'où vient alors que cet été-là plusieurs jeunes gens de l'endroit y disparaisse sans laisser de traces - et parmi eux l'aimable Casimir ? Son ami Maximin le comptable va tenter d'éclairer le mystère, qui au fur et à mesure de sa recherche ne cessera bizarrement de s'embrouiller. Il est question... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
S'annonçant par une citation de son voisin charlevillois Arthur Rimbaud ("Nous dormirons sur les pavés des villes inconnues"), "Les Disparus"... apparut en 1975 (l'auteur étant âgé de 75 ans). Il est aujourd'hui le 38ème chaînon des 49 "romans et récits" d'André DHÔTEL.

Notons que son auteur reçut cette même année le "Grand prix national des Lettres" pour ce roman aujourd'hui bien oublié... et auquel l'auteur était visiblement très attaché.

Dhôtel est donc cet auteur-conteur prolixe, qui avait le seul inconvénient de se vouloir et croire "écrivain mineur"...

Pourtant nous avons bien affaire ici à un authentique chef d'oeuvre, au sens où la Littérature s'y invente à chaque phrase. D'imprévisibles enchantements s'y surprennent au fil des pages.

Et bien sûr, avant celle-ci, "zéro + zéro critique" sur Babelio... Mais voilà, "Pôs d' panique : pôs plus intimidés qu' ça... ", eh ben nous garderons la tête froide et la longue belle habitude de pareils isolements.

"Anciennetés" qui sont autant de trésors enfouis au pied de l'Arc-en-ciel, à découvrir perpétuellement, quand tant d'entre nous se ruent sur leurs prévisibles et interchangeables "Nouveautés" [?].

C'est que cet homme – Dhôtel, "l'Ardennais [en son art d'aimer] universel" – re-créait "son" monde à chaque roman. L'histoire, la sacro-sainte "trame" de son histoire était secondaire : les LIEUX étaient l'élément dominant. L'enchantement ne surgissait que du plus plat quotidien des personnages et des saisons qu'ils traversaient.

"Les Disparus" : au-delà de "l'homme au semelle de vent", c'est Casimir Fontan – ce héros supposé – dont le personnage disparaît du récit à la page 38 de l'édition Phébus qui en compte 304. Reste son souvenir, son sillage, ses rêves, ses lubies et son ami Maximin Brégant (faisant fonction d'expert comptable mais aussi de gérant du camping municipal). Maximin a une soeur, Jeanne, qui en pinçait pour le disparu. Maximin s'agace de Véronique Leverdier, l'amie de sa soeur, évidemment "une petite bigote qui fait des mystères". Et puis Repanlin, le gardien du camping qui raconte "les anciennes histoires" de Someperce... tout en s'efforçant de faire taire son âne... (ça dérange les campeurs). L'essentiel, au fond, est ce qui se trame certains soirs d'été : une lumière à l'orée du bois, celle que surprend Maximin le contemplatif - depuis le jardin de sa logeuse, la vieille Alida Dardaille. Là où certains ont vu pour la dernière fois "le disparu"... Un suspense magnifique à propos de paroles tues et de lumières du soir. Qui oserait ça, aujourd'hui ? Dhôtel a le temps et ose. Cela fourmille d'humour et déborde de merveilles cachées. Une extraordinaire densité. Ce long entretien "en plein air" entre Maximin et Repanlin [pages 60-64 de la réédition Phébus], s'amorçant par les abeilles des ruches du vieux, avec ses bonnes ouvrières qui ont besoin de l'eau des bassins et qu'il faut laisser prendre leurs aises sur la surface – fort heureusement couverte tapis de genêts de de millepertuis – du camping municipal, et tant pis pour ces râleurs d'estivants qui se font piquer ! Ou cette séance ordinaire de la Société d'Archéologie de Someperce avec tous ces brillants intellectuels – le quincaillier, le coiffeur du centre-ville, l'instituteur célibataire, le directeur de son Ecole – venant d'être évincés du Conseil municipal... On tomberait presque ici à genoux devant l'incroyable richesse de la langue dhôtelienne et l'extrême densité de l'intrigue labyrinthique (à l'instar de ces trouées hasardeuses dans cette épaisse sylve "maudite" cernant ce village si faussement apaisé qu'est Someperce).

Allons, encore un "chef d'oeuvre inconnu de plus" ? :-D Euh, plutôt oui ! ... et repensant là aux beautés cachées de ce fabuleux roman, "Le Commis" de Robert WALSER [1908], que sans doute 3 ou 4 Babéliotes ont lu...

Un livre à la hauteur artistique de "Nulle part" [1943], "Les premiers temps" [1953], "Ma chère âme" (1962], "Pays natal" [1966], "La maison du bout du monde" [1970] et de "L'honorable Monsieur Jacques" [1972] - entre autres chefs d'oeuvre méconnus ou inconnus d'à peu près nous tous, aujourd'hui...

Et n'oubliez pas de visiter - en y apportant bien sûr VOTRE propre pierre en matière de nouvelles critiques et commentaires - "notre" beau site fraternel & sororal "La Tribu Dhôtel" dont on retrouvera facilement le sentier par le lien suivant :

http://www.latribudhotel.canalblog.com/
Lien : http://fleuvlitterature.cana..
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Un petit bijou !
J'ai lu cet auteur il y a bien longtemps "Le pays où l'on n'arrive jamais", et j'en avais un souvenir plutôt chouette.

Là ? On est dans la campagne profonde, et les habitants sont plus que des taiseux. le village a un passé dont personne ne veut parler, et une forêt avec une clairière enchantée ? ou maudite, personne ne veut en parler non plus ! Les gens disparaissent, tout de même...Mais chut...

Maximin, qui n'est pas de Someperce, se lie avec Casimir qui lui en est originaire. Et l'auteur nous emmène, nous promène, nous prend littéralement dans sa toile, avec cette intrigue touffue, comme la forêt interdite, mais également d'une poésie sans égal. Et de non-dits en élucubrations de villageois, on découvre peu à peu l'histoire réelle de ce village.

Lecture délicieuse, merci au challenge solidaire de nous avoir proposé cet auteur !
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Il se passe toujours mille choses dans une page d'André Dhôtel !
Dans mon cheminement de la lecture de son oeuvre, je découvre (je prends conscience) d'un aspect qui m'apparaît désormais évident : l'incongruité ou l'humour ! comme un anti-romantisme exacerbé.
Deux petits exemples :
- à propos de routes : "l'embranchement se perdait dans les betteraves..."
(page 18, édition Phébus /Libretto)
- "Sans doute il leur (à Casimir et Maximin) arrivait parfois d'aller au cinéma avec des jeunes filles lorsque l'occasion se présentait. La plupart de leurs soirées et de leurs week-ends étaient le plus souvent livrés à des passe-temps difficiles à définir et peut-être inadmissibles."
(page 13, même édition)
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
En cette fin de mai tout était désert et Maximin se demanda bien ce qu'il y aurait tellement à faire pour administrer ce camping, d'autant plus qu'il y avait un préposé pour s'occuper des questions matérielles.
Ce préposé, un nommé Repanlin, habitait une masure sur la pente de la butte à la tour et il logeait même son bois dans la tour en le couvrant de quelques tôles. Maximin lui rendit visite le samedi.
Repanlin se trouvait devant sa porte, sur un banc. Il était en train de raccommoder la petite cabane d'un rucher. Après un bonjour :
– Où sont-elles vos ruches, demanda Maximin.
– Par là-bas, en allant vers le ruisseau. il leur faut de l'eau dans le voisinage.
– Et où vont-elles butiner ?
En effet vers le ruisseau c'étaient plutôt des marécages, et ici, derrière la tour commençaient de maigres taillis qui rejoignaient la forêt de Someperce.
– Il y aura bientôt les acacias dans ces fouillis. En tout cas elles ont des ressources en plaine et dans les environs du camping.
– Ne me dites pas qu'elles vont sur le camping.
– Est-ce que je peux les empêcher ? Elles trouvent par là des genêts, des millepertuis quand les campeurs n'ont pas tout saboulé, mais toujours du trèfle blanc. Bien sûr ces imbéciles marchent pieds nus sur le trèfle et ils se plaignent d'être piqués.
– Ce n'est quand même pas indiqué de provoquer une gêne pour les campeurs.
Repanlin eut pour Maximin un regard en dessous. Il ne répondit pas, car on entendit aussitôt le braiment d'un âne.
– C'est Philippe, dit Repanlin.
– Pourquoi vous l'appelez Philippe ?
Repanlin n'eut pas le temps d'expliquer, car de l'autre côté de la maison s'élevèrent de furieux aboiements qui répondaient à l'âne et engageaient avec lui une sorte de querelle.
– Je n'en ai que quatre, dit Repanlin.
– Voyons, voyons, dit Maximin, ce voisinage n'est pas excellent pour des touristes qui viennent ici chercher le repos.
– Je me fous des touristes, dit Repanlin.

[André DHÔTEL, "Les Disparus", chapitre III, Gallimard, 1976 – réédition Phébus, collection "libretto", 2005, pages 59-61]
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" Elle riait comme la cascade du barrage de Verziers, ma soeur. Elle avait un égoïsme très charmant. Elle vous aurait piétiné si vous aviez discuté son rouge à lèvres. Il faut avouer que ses études, malgré qu'elle ait réussi, elle n'en tirait pas d'orgueil. Elle avait des moments excellents où elle se montrait pleine de coeur pour les chats, les oiseaux, les vieilles dames, tout le monde si vous voulez, sauf les amoureux. Il est vrai que sur ce dernier point on a droit de choisir. "

[André DHÔTEL, "Les Disparus", chapitre I, Gallimard, 1976 - réédition Phébus, collection "libretto", 2005, page 20]
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– Tu sais, ma soeur ce n'est qu'une petite bourgeoise.
Il n'aurait pas dû reparler de Jeanne. Casimir le regarda non sans mélancolie. Il dit enfin :
– Bourgeoise, j'en sais rien. Je n'ai jamais pensé à ça. Ce qui m'avait anéanti c'étaient ses yeux et ses cheveux. Dans les yeux il y avait les maisons, les jardins, la forêt... la route... Surtout la route. Une route sans fin, si tu veux. Mon vieux, c'est pas facile à dire.

[André DHÔTEL, "Les Disparus", chapitre II, Gallimard, 1976 – réédition Phébus, collection "libretto", 2005, page 35]
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– On ne va pas du côté des bois quand on n'a pas de rendez-vous.
– Je n'ai pas besoin de rendez-vous pour cela.
– Peut-être il y a des filles qui ont besoin de rendez-vous ?

[André DHÔTEL, "Les Disparus", chapitre VIII, Gallimard, 1976 – réédition Phébus, collection "libretto", 2005, page 156]
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Finalement les étoiles à l'horizon laissèrent deviner comme une nouvelle forêt dans l'invisible.
– Une nouvelle forêt, murmura Maximin.
Le lendemain, étant revenu s'asseoir derrière la maison, bien avant que le jour baisse, il fut repris par cette hantise forestière et il se dit qu'en effet ce qu'il y avait d'incroyable, c'est qu'à chaque instant tout semblait nouveau en raison même d'une immobilité presque intolérable. Enfin cessons de faire des phrases. Peut-être tout simplement cette campagne était belle, ni harmonieuse ni désordonnée, mais absolument étrangère à toute idée et à toutes proportions connues. On aurait dit désaxée. Alors le souvenir de Casimir lui revint plus poignant que jamais. Pourquoi Casimir avait-il passé certaine nuit dans la forêt ?

[André DHÔTEL, "Les Disparus", chapitre IV, Gallimard, 1976 – réédition Phébus, collection "libretto", 2005, page 81]
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Videos de André Dhôtel (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de André Dhôtel
« […] J'ai reçu de François Dhôtel (1900-1991), sous la forme d'un « tapuscrit » photocopié […], la merveilleuse suite de poèmes que voici. Je me suis dit qu'André Dhôtel, à la mort de qui je n'ai jamais cru, se dévoilait soudain plus vivant que jamais, avec la lumière pailletée de son regard et son sourire en coin. […] Maintenant ces poèmes sont là, qui n'ont rien de testamentaire, même si l'on devine que leur auteur peu à peu s'absente - mais c'est pour mieux affirmer une présence imprescriptible. Voici ces poèmes, dans l'ordre où je les ai reçus. […] Les poèmes naissent de la couleur du ciel, du temps qu'il faut, d'un écho des jours ordinaires et miraculeux, comme les impromptus qu'aimait tant Dhôtel, ou les petites pièces de Satie. […] Au rythme séculaire des premières lectures éblouies,
« Voici donc le chant de la jeunesse oubliée et des souvenirs perdus » […] » (Jean-Claude Pirotte)
«  […] Des paroles dans le vent en espérant que le vent est poète à ses heures et nous prêtant sa voix harmonise nos artifices.
Nos strophes seraient bien des branches avec mille feuilles que l'air du large fera parler peut-être un jour où personne n'écoutera.
Car l'essentiel serait qu'on n'écoute jamais et qu'on ne sache pas qui parle et qui se tait. […] » (Espoir, André Dhôtel)
0:00 - Abandon 2:00 - Attente 3:30 - En passant (II) 4:50 - La preuve 5:30 - L'inconnu 6:15 - Splendeur (II) 6:46 - Générique
Référence bibliographique : André Dhôtel, Poèmes comme ça, éditions le temps qu'il fait, 2000.
Image d'illustration : https://clesbibliofeel.blog/2020/04/08/andre-dhotel-idylles/
Bande sonore originale : Scott Buckley - Adrift Among Infinite Stars Adrift Among Infinite Stars by Scott Buckley is licensed under a Creative Commons Attribution 4.0 International License.
Site : https://www.scottbuckley.com.au/library/adrift-among-infinite-stars/
#AndréDHôtel #PoèmesCommeÇa #PoésieFrançaise
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