- Pourquoi penses-tu que pour toi, certaines choses soient tellement plus claires ?
- Je voudrais arrêter de parler de moi, peut-être en ai-je déjà trop dit. Tout le monde sait que mes expériences, je les paie personnellement. Mais il y a aussi mes livres et mes films. Peut-être est-ce moi qui me trompe. Mais je continue à dire que nous sommes tous en danger.
- Pasolini, si tu vois la vie de cette manière - je ne sais pas si tu accepteras de répondre à cette question - comment penses-tu éviter le danger et le risque ?
Il s'est fait tard, Pasolini n'a pas allumé la lumière et il devient difficile de prendre des notes. Nous revoyons ensemble mes notes. Puis il me demande de lui laisser les questions.
- Certains points me semblent un peu trop absolus. Laisse-moi y penser, les revoir. Et puis laisse-moi le temps de trouver une conclusion. J'ai quelque chose en tête pour répondre à ta question. Il est plus facile pour moi d'écrire que de parler. Je te laisse les notes supplémentaires pour demain matin.
Le lendemain, un dimanche, le corps sans vie de Pier Paolo Pasolini était à la morgue de la police de Rome.
Le petit nombre d'hommes qui ont fait l'Histoire sont ceux qui ont dit non, jamais les courtisans et les valets des cardinaux. Pour être efficace, le refus doit être grand, et non petit, total et non pas porter sur tel ou tel point, "absurde", contraire au bon sens
L'éducation reçue se décline en ces termes : avoir, posséder, détruire.
PIER PAOLO PASOLINI / UNE VIE VIOLENTE / LA P'TITE LIBRAIRIE