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Dorian Astor (Traducteur)Pierre Pellegrin (Éditeur scientifique)
EAN : 9782081234918
218 pages
Flammarion (20/01/2010)
3.84/5   81 notes
Résumé :
Dans cet ouvrage écrit durant l'été 1929, Freud aborde au fil de la plume des thèmes aussi variés que la religion, le bonheur, la morale, l'agressivité, la société... Mais derrière ce propos d'apparence légère et presque décousue, on découvre une ligne de pensée très nette : il ne peut pas exister de société heureuse ; toute culture humaine se fonde sur le renoncement et e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (10) Voir plus Ajouter une critique
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Le Malaise dans la Civilisation est un des rares ouvrages de Freud où il déplace ses concepts du champ analytique au champ social. Ainsi, même ses plus fervents contradicteurs peuvent éventuellement y puiser quelques réflexions intéressantes. Par ailleurs, comparé à d'autres de ses oeuvres, sa lecture est relativement aisé.

Petite parenthèse, on traduit parfois le titre du livre par le Malaise dans la Culture (en allemand Das Unbehagen in der Kultur), mais c'est bien de la civilisation (à la limite au sens de société) que Freud souhaite nous parler.
La culture, notion qu'il aborde dans son essai, y est vue comme un outil dont la société use pour assurer sa propre cohérence. Elle a deux finalités : protéger l'homme de la nature et réguler ses relations inter-personnelles. Pour Freud elle est avant tout un carcan nécessaire. Carcan car elle est basée sur du renoncement pulsionnel (on gros pour vivre ensemble on doit renoncer à pouvoir faire ce qui nous chante). C'est pourquoi certains individus manifestent de l'hostilité à son encontre, car ils éprouvent des difficultés à renoncer. En effet, dans le développement d'une personne son but ultime est le plaisir, l'insertion dans un groupe n'étant qu'un moyen. Au contraire, dans le processus culturel la finalité est la création et le maintient de la communauté, le plaisir des individus devenant secondaire. Cette cohésion est transmise par tout un discours, que l'on peut qualifier de morale et qui prend place, dans l'organisation psychique proposée par Freud, dans le Surmoi, symbolisé par le père (en tant que fonction) et qui se transmet de génération en génération. le Surmoi est donc un puissant héritage culturel qui, au même titre que le savoir et la connaissance, évite à l'humanité d'avoir à tout recommencer du début à chaque fois.

Mais la simple coercition par la morale, les interdits, ne suffit pas pour assurer la survie de la civilisation. La société doit être en mesure de proposer des satisfactions substitutives aux pulsions : par le travail qui, lorsqu'il est librement consenti, est un moyen très efficace ou encore en permettant l'investissement dans des activités artistiques, scientifiques, dans lesquelles l'homme peut se réaliser. Cependant le moyen définitif de maintenir la cohésion sociale se situe, pour Freud, au-delà du simple intérêt économique, puisqu'il s'agit de l'amour. Si l'Eros, la pulsion sexuelle, est l'ennemie de la civilisation ce n'est pas le cas de l'amour "platonique", ce qu'il nomme l'amour inhibé quant au but. le problème est qu'aimer l'autre n'est absolument pas naturel pour les êtres humains, animés de leurs pulsions libidinales et destructrices. D'où les discours religieux, du type "aimez votre prochain comme vous même". L'équilibre de la société est donc précaire, secoué en permanence par les soubresauts de la lutte entre pulsion de vie et pulsion de mort, source du malaise. Au final il n'est pas inenvisageable pour Freud, qu'à terme, la civilisation finisse par s'auto-détruire.

D'une certaine façon, le Malaise dans la Civilisation est un aveu de faiblesse de la part de Freud. Lui qui, avant la boucherie de la grande guerre, se faisait le chantre du caractère unique et personnel de l'inconscient (s'opposant sur ce point à Jung, qui voyait dans les différents textes sacrés l'expression d'un inconscient collectif), face à l'ampleur de la catastrophe se voit contraint de déplacer ses concepts de pulsion de vie et pulsion de mort sur le champ social. Autrement dit, je ne suis pas certain qu'il l'aurait fait sans l'avènement de la première guerre mondiale. D'un autre côté, on aurait également pu lui reprocher de rester sourd aux turpitudes de l'histoire s'il ne l'avait pas rédigé.

En résumé, cet essai bien construit et relativement accessible est, paradoxalement, une bonne porte d'entrée à l'oeuvre de Freud et porte la réflexion au delà des simples concepts psychanalytiques.

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"Le malaise dans la culture" ( ou "Malaise dans la civilisation", selon les traductions ), est un très grand texte, de ceux qui questionnent avec acuité, le monde qui nous entoure, l'Humanité et la condition humaine. Et, comme la majorité, des textes, qui ambitionnent de questionner de façon aussi nouvelle, l'Humanité, la société et la condition humaine, ce texte-ci ne laisse pas indifférent. Il s'en dégage une vision profonde de la condition humaine, telle qu'elle est naturellement, que Sigmund Freud décrit sans pessimisme, mais avec réalisme.
Et, surtout, son livre n'aspire pas à être un état de lieu, de l'état de la condition humaine, à l'époque de Sigmund Freud. Certaines parties tiennent du constat, certes. Mais l'on ne peut réduire l'ensemble du "Malaise", à ces constats. Ils ont toute leur place, dans le "Malaise dans la culture", bien entendu ; mais réduire tout le "Malaise dans la culture", à ces seules idées, semble excessif. Il ne me semble pas que ces idées, soient les seules idées, exprimées dans le "Malaise dans la culture", ni qu'elles soient les plus importantes ou les plus intéressantes.
Car Sigmund Freud, s'il a constaté les difficultés que rencontrait l'homme à son époque, s'il a constaté l'absence d'avancée dans l'état de la condition humaine, il n'a jamais cru que cela était une fatalité. Et son livre, vise, avant tout, à mon avis, à nous donner, si ce n'est des solutions, du moins, des pistes de solutions.
Et Sigmund Freud, le fait très bien, avec finesse et intelligence. Cet ouvrage, extrêmement riche, oeuvre d'un penseur révolutionnaire, est encore aujourd'hui une mine d'idées inspirantes, qui n'ont en rien, perdues de leur actualité.
Génial !
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Le Malaise dans la Culture pouvait-il naître ailleurs que d'un cerveau qui se savait condamné ? On explique souvent la genèse de ce célèbre essai de Freud par son cancer à la mâchoire. On a beau savoir que physiologie et psychologie s'influencent mutuellement, se serait tout de même cruellement réducteur de s'en tenir à cette seule explication. En revanche, il serait plus honnête d'avouer que les thèses de Freud peuvent aboutir à des conclusions effrayantes qu'il est plus facile de minimiser que de prendre réellement en considération.


Puisque le monde n'est qu'un grand brouhaha difficile à décrypter, la grille de lecture que nous propose Freud à travers son Malaise dans la Culture n'est pas plus inappropriée qu'une autre pour nous permettre de comprendre certains phénomènes des civilisations. Pour résumer, et afin de montrer que Freud n'était pas aussi pessimiste qu'on voudrait bien le faire croire : la culture apporte des bienfaits qui lui sont propres et qui ne seraient accessibles d'aucune autre façon, en contrepartie de quoi elle freine les hommes dans la réalisation de leur but ultime –l'accès au bonheur. Mais l'homme est un joueur espiègle qui essaie de contrer cet obstacle en se comportant de diverses manières, que Freud a répertoriées en trois catégories : la distraction, la substitution, la stupéfaction.


Outre la présentation de thèses qu'il serait dommage de réduire au désespoir d'un homme, Freud introduit dans cet essai des notions importantes en psychanalyses : surmoi, sentiment de culpabilité, sublimation font leur apparition grandiose dans des exemples appliqués qui trouvent leur source dans le quotidien de tout homme. Parler de la culture, c'est en effet évoquer des sujets aussi vastes que la famille, la religion, l'art ou encore les sentiments.


Freud avait deviné que son essai ne laisserait pas indifférent et s'attirerait certaines foudres. Loin de s'en excuser, et maniant avec agilité les esprits, il prévient ces réactions et les intègre à sa théorie comme naturelles et découlant logiquement de ses propos :


« Aussi le courage me manque-t-il pour m'élever en prophète devant mes semblables, et je m'incline devant le reproche qu'ils me feront de ne savoir pas leur apporter du réconfort, car au fond, c'est ce qu'ils réclament tous, les révolutionnaires les plus sauvages avec non moins de passion que les croyants les plus pieux et les plus paisibles. »


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Jusque-là, j'avais lu, de Freud : « L'Avenir d'une illusion », « Psychopathologie de la vie quotidienne », « L'Inquiétante étrangeté », et j'en passe. Pourtant, en refermant « Le Malaise dans la culture », je fais ce constat : cet ouvrage ne ressemble à aucun autre.
Le « père de la psychanalyse » revêt ici son habit de philosophe. Ainsi reprend-il les grands questionnements qui ont traversé les âges de la philosophie : qu'est-ce que la beauté ? Qu'est-ce que le bonheur ? Quid de l'amour ? Quel est le but de l'art ? L'Homme est-il vraiment bon par nature, ou porte-t-il le vice en lui ?
Le fil conducteur de Freud pour mener à bien sa réflexion est la culture. Cette culture, c'est précisément ce qui permet aux humains de vivre ensemble. Tandis que les individus primitifs donnaient libre cours à leurs pulsions, l'individu d'aujourd'hui doit les canaliser, sans quoi toute cohabitation serait inconcevable. La culture est donc « construite sur le renoncement pulsionnel ». Mais ce renoncement n'est pas sans conséquence : il frustre notre nature profonde en l'empêchant d'assouvir ses désirs sexuels et sadiques.
« Le Malaise dans la culture » présente l'Homme tel qu'il est, sans édulcorer ce portrait :
« […] l'homme n'est pas un être doux, avide d'amour, qui tout au plus serait capable de se défendre s'il est attaqué ; mais que parmi les pulsions qui lui ont été données, il peut compter aussi une part puissante de penchant à l'agression. »
Dans ce cas, les préceptes bien connus tels que : « Aime ton prochain comme toi-même » ne seraient que de vaines tentatives de nier la part sombre de l'Homme.
Néanmoins, peu d'entre nous acceptent de l'admettre, car :
« Car les petits enfants, ils n'aiment pas entendre cela, cette évocation de la tendance innée de l'homme au “mal”, à l'agression, à la destruction, et par là même à la cruauté. »
Or, ne sommes-nous pas tous de « petits enfants » repus d'illusions ?
On a qualifié « Le Malaise dans la culture » de pessimiste ; je le qualifie de réaliste. Une oeuvre magistrale : voilà mon point de vue !
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Dans cet essai assez court mais très riche, Freud aborde le thème de la culture. Placé dans le cadre de sa deuxième théorie des pulsion et de l'appareil psychique, ce texte aborde la culture comme le résultat d'un renoncement pulsionnel. Décrivant de manière approfondie l'instance surmoïque comme garant des valeurs morales humaines, il explique comme celle-ci se manifeste dans la morale et la religion.
Autour de ce thème, Freud aborde ici des sujets divers comme l'origine du besoin religieux ou les solutions à la portée de l'homme pour supporter les souffrance engendrées par la vie.
Même si ce texte date de 1929, je trouve saisissant de constater comme il reste d'actualité en ce début de XXIème siècle. Il est en ce sens très intéressant à lire et à penser car c'est sans doute en comprenant l'homme et la société qu'il se fabrique qu'on est le plus à même de l'accepter et de vivre au mieux avec.
"Le malaise dans la culture" est l'un des textes fondamentaux de Freud, à lire absolument si l'on s'intéresse à sa psychanalyse!
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Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
La vie telle qu’elle nous est imposée est trop lourde pour nous, elle nous apporte trop de douleurs, de déceptions, de tâches insurmontables. Pour la supporter, nous ne pouvons nous passer de moyens palliatifs […]. De tels moyens, il en est peut-être de trois sortes : de puissances diversions qui nous font mépriser notre misère, des satisfactions de substitution qui la réduisent, des stupéfiants qui nous y rendent insensibles.
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Cette déclaration de la part d'un ami que j'honore, et qui a lui-même décrit en
termes poétiques le charme de l'illusion, m'a fort embarrassé. En moi-même, impossible de découvrir pareil sentiment « océanique ». Et puis, il est malaisé de traiter
scientifiquement des sentiments. On peut tenter d'en décrire les manifestations
physiologiques. Mais, quand celles-ci vous échappent - et je crains fort que le sentiment océanique lui aussi ne se dérobe à une telle description -, il ne reste qu'à s'en
tenir au contenu des représentations les plus aptes à s'associer au sentiment en
question. Si j'ai bien compris mon ami, sa pensée aurait quelque analogie avec celle
de ce poète original qui, en guise de consolation, en face d'une mort librement choisie, fait dire à son héros: « Nous ne pouvons choir de ce monde » 1. Il s'agirait donc
d'un sentiment d'union indissoluble avec le grand Tout, et d'appartenance à l'universel. Mais, à mon sens, il s'agirait plutôt d'une vue intellectuelle, associée à un élément
affectif certain, lequel, comme on sait, ne fait jamais défaut dans des pensées de si
vaste envergure. Si je m'analyse, je ne puis me convaincre par moi-même de la nature
primaire d'un tel sentiment, mais ceci ne m'autorise pourtant pas à en nier la réalité
chez autrui. La seule question est de savoir si son interprétation est exacte et si l'on
doit reconnaître en lui le fons et origo de tout besoin religieux.
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Jamais nous ne sommes davantage privés de protection contre la souffrance que lorsque nous aimons, jamais nous ne sommes davantage dans le malheur et le désaide que lorsque nous avons perdu l'objet aimé ou son amour.
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L’agression est introjectée, intériorisée, mais renvoyée à vrai dire là d’où elle est venue, c’est-à-dire retournée contre notre propre moi. Elle y est prise en charge par une partie du moi, le surmoi, qui s’oppose au reste et exerce en tant que « conscience morale » la même sévère agressivité contre le moi que celle que le moi aurait volontiers satisfaite sur d’autres individus étrangers. La tension entre le sévère surmoi et le moi qui lui est soumis, nous la nommons conscience de culpabilité ; elle se manifeste comme besoin de punition.
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On ne peut se défendre de l'impression que les hommes se trompent généralement dans leurs évaluations. Tandis qu'ils s'efforcent d'acquérir à leur profit la jouissance, le succès ou la richesse, ou qu'ils les admirent chez autrui, ils sous-estiment en revanche les vraies valeurs de la vie. Mais sitôt qu'on porte un jugement d'un ordre aussi général, on s'expose au danger d'oublier la grande diversité que présentent les êtres et les âmes. Une époque peut ne pas se refuser à honorer de grands hommes, bien que leur célébrité soit due à des qualités et des œuvres totalement étrangères aux objectifs et aux idéals de la masse. On admettra volontiers, toutefois, que seule une minorité sait les reconnaître, alors que la grande majorité les ignore. Mais, étant donné que les pensées des hommes ne s'accordent pas avec leurs actes, en raison au surplus de la multiplicité de leurs désirs instinctifs, les choses ne sauraient être aussi simples.
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Vidéo de Sigmund Freud
Elle se revendiquait comme "la dernière Bonaparte" mais fut surtout l'une des premières à s'intéresser scientifiquement au plaisir féminin au début du XXe siècle. Disciple de Freud, celle qui fut l'arrière-petite-nièce de Napoléon aida aussi au développement de la psychanalyse en France.
#bonaparte #psychanalyse #cultureprime _____________
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