De
Christiane Singer, j'avais déjà lu -
N'oublie pas les chevaux écumants du passé -... sur les conseils avisés d'une amie... nonne bouddhiste.
Moi-même confronté à la maladie, cette amie m'avait vivement recommandé la lecture du dernier ouvrage de cette auteure -
Derniers fragments d'un long voyage -.
Nous sommes à la fin du mois d'août 2006,
Christiane Singer apprend d'un médecin spécialiste qu'elle est atteinte d'une tumeur maligne et qu'il ne lui reste tout au plus que six mois à vivre.
Sa première réaction... finir pendant les deux heures qui précèdent la venue de son époux et celle de son fils... le livre -
La Légende du mont Ararat - de
Yachar Kemal.
"Aujourd'hui je réponds simplement à mon interlocuteur "cela me laisse du moins le temps de finir ce livre. Mon mari vient dans deux heures. Expliquez-nous alors ce qu'il en est, ça vous évitera de répéter deux fois la même chose."
Car elle est "singulière" cette Docteur en lettres modernes, enseignante, conférencière, écrivaine et "mystique".
Hospitalisée pendant la quasi-totalité de ces six mois, elle va écrire sur des petits carnets son journal de bord.
Aucun pathos.
Entre les affres que subit son corps, entre la mort qui rôde, s'approche, s'éloigne, revient à pas de loup, ruse, tergiverse, hésite... Entre les hauts, pas très hauts et les bas "célestes", elle va réussir à composer un hymne à l'Amour...
L'Amour de la vie... vivre chaque moment comme... vivre ici et maintenant.
L'Amour du vivant.
L'Amour des êtres.
L'Amour du grand Tout.
L'Amour inconditionnel.
Une puissance d'amour qui va bien au-delà de ma compréhension d'homme prisonnier des puissances chtoniennes.
Christiane Singer est un être qui a atteint "l'éveil", le "satori".
Tout ce qui est du domaine de la maladie est suggéré, esquissé... avec force, pudeur, élégance et dignité.
Pas De place pour l'exhibitionisme et le voyeurisme.
Dans une langue au-delà des mots,
Christiane Singer livre un témoignage unique sur cette vie étape, sur cette vie transition, sur cette vie relais, sur cette vie passage...Il faut que l'Amour ait le plus grand espace pour qu'elle puisse le célébrer.
Je n'ai ni la foi, ni la spiritualité, ni la hauteur de vie de ces grands mystiques.
Alors, pour terminer cette présentation, j'ai eu envie d'offrir à
Christiane Singer des mots plus à ma portée.
J'espère qu'elle saura me comprendre.
Dylan Thomas – Et la mort n'aura pas d'empire (And Death Shall Have No Dominion, 1933)
Et la mort n'aura pas d'empire.
Les morts nus ne feront plus qu'un
Avec l'homme dans le vent et la lune d'ouest.
Quand leurs os becquetés seront propres, à leur place
Ils auront des étoiles au coude et au pied.
Même s'ils deviennent fous, ils seront guéris,
Même s'ils coulent à pic, ils reprendront pied,
Même si les amants se perdent, l'amour ne se perdra pas,
Et la mort n'aura pas d'empire.
Et la mort n'aura pas d'empire.
Depuis longtemps couchés dans les dédales de la mer,
Ils ne mourront pas dans les vents,
Se tordant sur des chevalets quand céderont les tendons,
Attachés à une roue, ils ne se briseront pas.
La foi dans les mains cassera net
Les démons unicornes les transperceront,
Fendus de toutes parts, ils ne craqueront pas
Et la mort n'aura pas d'empire.
Et la mort n'aura pas d'empire.
Les mouettes ne pousseront plus de cris dans leurs oreilles
Et les vagues ne se fracasseront plus sur les rives.
Où s'ouvrait une fleur peut-être qu'aucune fleur
Ne lèvera la tête sous les rafales de pluie,
Même s'ils sont fous et raides comme des rats morts
Leurs têtes martèleront les marguerites,
S'ouvriront au soleil jusqu'au dernier jour du soleil
Et la mort n'aura pas d'empire.