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EAN : 9782809711660
192 pages
Editions Picquier (03/03/2016)
3.57/5   55 notes
Résumé :
Gros-Yeux a quatorze ans lorsqu’il arrive avec sa mère dans l’immense décharge à ciel ouvert de Séoul. Là vivent pas moins de deux mille foyers, dans des cahutes accrochées au flanc de la montagne d’ordures, en une société fortement hiérarchisée dont le moindre aspect – travail, vêtements, nourriture, logement – provient des rebuts du monde extérieur.
Gros-Yeux se lie d’amitié avec un garçon disgracié, un peu simple d’esprit, qui lui fait découvrir les ancien... >Voir plus
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Deuxième lecture de Hwang Sok-Yong, qui est décidément un auteur « sérieux », bien différent des coréens plus jeunes que les éditions Picquier nous aident aussi à découvrir. Il a vécu en Corée du Nord et a connu dans sa chair les soubresauts de la guerre et de la dictature. Son Princesse Bari m'avait remué, décrivant les souffrances de l'émigration et de ses trafics, mais avec quelque chose de magique.
Toutes les choses de notre vie, pour les personnages de ce roman, ce sont des objets glanés sur une gigantesque décharge publique, qui fournit le gîte et le couvert à une communauté en marge, victime d'une forme d'apartheid (par l'odeur, entre autres). Aujourd'hui encore dans d'autres parties du monde, et dans un passé proche en Corée, le traitement des ordures se réduit à un entassement, à petite distance des villes, et la survie de familles délaissées passe par l'utilisation de ces déchets, dans des conditions que ce roman nous aide à imaginer.
Ce n'est pourtant pas un ouvrage désespérant. Maître Hwang nous invite à suivre quelques adolescents et leur entourage, leur adaptation à ces conditions de vie démentes, le fonctionnement de cette communauté très organisée. Mais il le fait par le regard de ces jeunes qui malgré la violence, l'alcoolisme, la misère qui les entourent arrivent à rester optimistes, solidaires. Un élément fantastique apporte une vision à la fois nostalgique et qui donne espoir, il n'apparaît pas comme une facilité de l'auteur mais comme un supplément de complexité. L'auteur ne me semble pas donner de leçons, juste porter un regard et laisser chacun réagir. J'ai été plus sensible aux émotions positives et à l'entraide entre ces jeunes qu'à l'horreur objective de leur situation.

La postface des traducteurs est très utile : elle permet au non-coréen de décoder quelques scènes et expressions liées à la période de la dictature (je parle bien de Corée du Sud) qui a suivi la guerre. Mais lisez ce livre plus naïvement, sans tout savoir, laissez-vous remuer par cette communauté et par ces mystères, sans avoir besoin de tout comprendre tout de suite.


PS : quelques notes plus personnelles, en vrac.
Cette lecture m'a incité à réviser ce que signifie Lumpen prolétariat, et les visions différentes de Marx et Bakounine. le mot Lumpen n'est pas dans le roman, Hwang aborde la politique par l'exemple, pas par la théorie, et ce terme n'est d'ailleurs pas forcément approprié. C'est mon amie Nam-Ju qui a qualifié l'auteur de « sérieux », en me confirmant que ses livres ont des gros tirages en Corée. Et je me souviens de cette colline au bord du fleuve Han en aval de Seoul, aujourd'hui lieu de promenade arboré, autrefois empilement des ordures de la ville. Je ne sais plus si je souriais ou si je frémissais à cette évocation ; ce livre m'y fera repenser intensément et avec compassion. Il me rappelle aussi qu'au début des années 2000, même le centre ville était parcouru par des personnes très âgées, le dos cassé, promenant des ballots de papier ou de métal à recycler, probablement pour des sommes ridicules, probablement faute de retraite permettant de vivre. Je pense à elles et à celles qui leur ont sans doute succédé.
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Ce roman décrit le quotidien vraiment peu enviable de deux mille foyers qui travaillaient au tri des ordures dans l'immense décharge à ciel ouvert à l'ouest de Séoul pendant quinze ans de 1978 à 1993, date de sa fermeture.

C'est là que la Mégapole déversait la quasi totalité de ce qu'elle rejetait chaque jour :—- ferraille, ordures ménagères, plastiques, vêtements , cartons de toute taille, bouteilles, déchets industriels érigeant sur près de quatre kilomètres , une Montagne d'Ordures de cent mètres de hauteur.

Gros - Yeux a quatorze ans lorsqu'il y arrive avec sa mère : cet endroit appelé « l'Ile aux fleurs » autrefois connu pour sa beauté , prisé des peintres , des poètes et des oiseaux migrateurs.
L'auteur y allait jouer dans son enfance ....avant de devenir un Dépotoir ...

Gros - Yeux et sa mère vont travailler douze heures par jour...

Chaussés de bottes, ils portent ——des casques de chantier avec une lampe frontale —-semblables à ceux des mineurs, ainsi que d'énormes gants de caoutchouc et un large masque devant la bouche.
Gros - Yeux se lie d'amitié avec un garçon disgracié , qui lui fait découvrir les anciens habitants du site , ou plutôt leurs esprits bienveillants lorsque l'Ile était encore vouée aux cultures agricoles(dont les habitants ont été chassés par le « développement ») et aux cultes chamaniques : les fameuses lueurs bleues ....que ne voient que les êtres au coeur pur , ( cultes chamaniques déjà évoqués dans « Princesse Barri » ), autre roman de l'auteur ...

L'écrivain dresse une peinture incroyablement réaliste, angoissante, effrayante , de la dure vie de ceux qui ont usé leur santé sur le chantier, l'organisation du travail, la « hiérarchie »qui s'instaure au sein des équipes et entre les équipes , leur existence dans des «  cahutes » , ces cabanes accrochées au flanc de la montagne d'ordures, en Plexiglas carton, linoléum ,contreplaqué , assemblage d'anciennes enseignes de magasins : tous matériaux extraits des rebuts du monde extérieur....la nourriture aussi, sauce de soja mijotée ou brûlée, nourriture avariée recyclée, bouillie , ou en soupe ....

Puanteur infecte, remugles nauséabonds , essaims de mouches , conflits, salaires de misère, hiérarchisation, pestilence, violence et entraide, bagarres , couples formés dans l'urgence sous les yeux des enfants, ivresse , peur, marginaux, l'auteur ne juge pas.

Il donne à voir la pauvreté et la misère de ces laissés-pour-compte du développement industriel et économique , conduit à marche forcée le long des routes du capitalisme —- une violence d'Etat exercée à l'encontre de toute une frange de la société ——
Roman de la mémoire—-l'histoire d'une époque —-
Roman Politique, en ce sens qu'il fait revivre un chapitre douloureux de son pays .
Roman Écologique car l'écrivain y affiche le lourd tribut imposé à nos sociétés par « Le développement » .
Un livre fort doté d'une très belle écriture imagée et visuelle, puissante dont «  les odeurs » les couleurs, les lueurs ....nous enveloppent, nous interpellent , nous font réfléchir à la manière de consommer .....nous poursuivent à la manière d'un long travelling cinématographique ....
Des images difficiles à oublier ....
Mais ce n'est que mon avis bien sûr , tout relatif ...
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Déjà frappés par la misère, Gros-Yeux et sa mère connaissent un déclassement social encore plus grand quand ils déménagent sur L'Ile aux Fleurs pour y travailler, en périphérie de Séoul. Ce joli nom masque une réalité moins reluisante, puisque c'est celui de la décharge à ciel ouvert qui recueille tous les déchets de la mégalopole coréenne. Gros-Yeux et sa mère intègrent ainsi l'armée de travailleurs qui viennent trier sans relâche les montagnes d'ordures afin d'y trouver des objets encore valables et des métaux à revendre, ou encore de la nourriture périmée à consommer pour survivre…
Gros-Yeux, dont le surnom lui a été donné par un policier lors d'une arrestation pour vandalisme, y fait la connaissance du Pelé, un jeune garçon de onze ans un peu simplet, à cause d'un accident à la tête lui ayant fait perdre une partie de ses cheveux. Au bord de la délinquance au début du roman, Gros-Yeux se laisse adoucir par la gentillesse et la simplicité du Pelé, qui sait voir l'ancien charme de L'Ile aux fleurs, quand elle était dédiée uniquement à l'agriculture… Une jolie relation se noue entre eux, qui permettra à ces deux enfants de connaître une vie moins rude dans la décharge.

« Toutes les choses de notre vie » est en premier un roman engagé, à multiples messages. On verra immédiatement celui sur le capitalisme forcené de la société coréenne qui met au rebut les objets dont elle n'a plus besoin, ainsi que les humains qui n'ont d'autre choix que de farfouiller dedans pour survivre ; nouvelle classe d'intouchables, ils sont regardés de haut par les franges plus riches de la société qui se pincent le nez (littéralement) à leur approche. Une société qui oublie aussi ses anciens et leurs pratiques chamaniques, qui sont largement évoquées dans le roman grâce au Pelé, qui y est sensible.
Reviennent également de nombreuses occurrences aux camps de rééducation, où d'ailleurs le père de Gros-Yeux est envoyé sans en revenir, et dont l'objectif était de « faire des hommes nouveaux ». Ces périphrases sont ainsi utilisées pour décrire des goulags, et rappeler ainsi l'épisode de dictature que connut la Corée du Sud dans les années 1970.

Malgré ces éléments culturels et politiques intéressants et que j'ai eu l'occasion de découvrir, « Toutes les choses de notre vie » ne fut pas pour autant une lecture facile ni passionnante. Je n'ai pas réussi à m'immerger dans ce roman dont la lecture fut souvent laborieuse, m'obligeant à relire des passages dont la compréhension m'a échappé. A l'exception du Pelé, aucun personnage ne m'a vraiment été sympathique, cela m'a gênée en même temps que cela m'a permis de me rendre compte que j'y accorde de plus en plus d'importance (cette lecture n'aura au moins pas été inutile à cet égard !). Autre circonstance aggravante, je n'ai pas réellement su où l'auteur voulait en venir, l'intrigue manquant singulièrement de consistance, pour privilégier une ambiance à laquelle je n'ai pas du tout été sensible.
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Toutes les choses de notre vie… Qu'en dire, si ce n'est que cette lecture fût, pour moi, une perte de temps. L'idée de départ de Sok-Yong Hwang est assez originale et je trouve preque regrettable de ne pas en avoir apprécié le roman. On se crorait en pleine science-fiction, anticipation, alors qu'on se retrouve au milieu d'une histoire réaliste et actuelle, bien qu'elle soit le reflet d'une Corée des années 70, soit presque cinquante ans en arrière. Un jeune garçon (Gros-Yeux) vit avec sa mère dans un dépotoir à ciel ouvert. Ces pauvres hères, et plusieurs autres que l'on rencontre à mesure qu'on avance dans cette lecture pénible, tirent leur subsistance des déchets, des rejets des millions de citadins de Séoul et des environs. Ces individus, laissés pour compte, sont eux-mêmes des rejets de la société. Toutefois, le jeune Gros-Yeux, sa mère, son presque-beau-père, et tous les autres (plutôt unidimensionnels), ils me laissaient indifférents. Les quelques moments de tendresses n'ont pas pu racheter les longueurs et l'ennui que j'ai ressenti tout au long de ma lecture. L'auteur a su décrire correctement leur mode de vie, leurs conditions (de travail, d'hygiène, etc) pénibles, même inhumaines, mais n'a pas réussi à m'intéresser à leur sort et encore moins à me captiver. Surtout que sa plume est plutôt ordinaire. J'ai terminé le roman parce que je déteste ne pas aller jusque'au bout, point à la ligne. Sous couvert d'une histoire simple, Sok-Yong Hwang critique «notre» société de consommation. Son message est assez : « Vive l'écologie ! » ou bien « Profitez plutôt des petits moments du quotidien ! » Malheureusement, ce n'est pas avec ce roman qu'il gagnera des adeptes. Si j'y crois, ce n'est pas grâce à lui ni à son roman.
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Vivre et travailler dans les ordures en Corée.

Le père de celui qu'on appelle Gros Yeux a été envoyé en « rééducation », le type de rééducation où on tente de lui changer les idées… subversives. À l'invitation d'un ami, la mère de l'adolescent ira vivre sur l'île aux Fleurs, où elle travaillera au tri des déchets. C'est loin d'être un paradis : les cabanes rudimentaires, les odeurs nauséabondes, les moustiques qu'on chasse à coup de pulvérisations toxiques et la nourriture périmée qu'on ramasse dans les ordures. Gros-Yeux et son ami le Pelé vivent dans ce monde et se demandent pourquoi on jette tant de choses qui peuvent encore servir…

Le dépotoir de l'île aux Fleurs a vraiment existé à Séoul jusqu'en 1992, le lieu a été transformé en parc. Par contre, le problème du recyclage et du traitement des déchets est loin d'être réglé. Et pour éviter d'y faire face directement, les pays riches envoient une partie de leurs ordures dans les pays du Sud, où d'autres jeunes Gros-Yeux travaillent dans des conditions insalubres…

Un livre qui est surtout un témoignage d'une réalité qu'on préférerait ignorer, mais un roman qui intègre aussi le surnaturel, avec une part de rêves et de fantômes.
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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Ce qu'ils foulaient aux pieds leur paraissait sale, bien sûr, dégoûtant. C'était blanc, noir, jaune, vert, bariolé, scintillant, poli, carré, anguleux, rond, allongé, ramolli, raide, c'était coincé ou à peine émergé, ça roulait, c'était âcre, nauséabond, suffocant, pestilentiel, répugnant et toujours étrange. Bien qu'il s’agit de choses tout à fait communes, quand ils en découvraient des éléments tronqués, comme par exemple une fois une jambe de poupée, cela faisait peur. Une fois, Gros-Yeux enfonça bêtement son râteau dans quelque chose qui avait fait reculer sa mère horrifiée : ce qu'il souleva éclata en laissant s'écouler un liquide. Cela ressemblait à un chat. A l'endroit des yeux, il y avait deux cavités vides. Les deux oreilles pointues de chaque côté de la tête ne laissaient aucun doute, il s'agissait bien d'un chat. Il avait des canines, mais point de ventre. A la place, un tas d'asticots grouillants. Il en pleuvait sur les bottes du jeune garçon.
Page 38
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Cela faisait déjà plus d'un mois que Gros-Yeux et sa mère étaient arrivés à l'Île aux Fleurs. Le premier jour, la mère avait dit que c'était un endroit comme les autres, un lieu où vivaient des gens comme tout le monde. Pourtant, c'était bel et bien un dépotoir, un emplacement où venaient échouer les objets que les gens n'utilisaient plus, les choses qu'ils délaissaient, bref, tout ce dont ils ne voulaient plus; et ceux qui vivaient ici, c'était aussi des gens que la ville avait abandonnés et chassés.
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Mentionnons aussi cette scène pittoresque et finement ironique où l'on voit les évangélistes à l’œuvre. Ce prosélytisme-là, fortement encouragé par l’État, avait pour mission, en répandant la parole de l’Évangile, de soustraire les pauvres à la tentation socialiste – et Dieu sait s'ils avaient des raisons d'être tentés ! -, les églises protestantes étant devenues les hautes lieux de la propagande anticommuniste.
Postface des traducteurs
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Jusque-là, personne n'avait été incommodé outre mesure par l'odeur des ordures, mais au fur et à mesure que le camion gravissait la pente, une puanteur infecte et inexplicable les adressait de plus en plus. Elle devint carrément suffocante quand le véhicule fit halte dans un espace ouvert; c'était un remugle nauséabond, mixture de vidange de fossés septiques, d'égouts, de restes de nourriture avariée, de sauce soja mijotée ou brûlée, bref, une odeur insoutenable. Ce qui sans cesse venait se coller à leur visage dans l'obscurité, à leurs bras, à leurs vêtements,  ce qui venait plaquer des ventouses froides et gluantes à leurs lèvres et leurs paupières, c'étaient des mouches.
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Nanjido, cette Île aux Fleurs où l'écrivain, bien avant l'arrivée des camions et des bulldozers, allait jouer dans son enfance (il habitait sur l'autre rive du fleuve), était connue pour sa beauté, prisée des peintres, des poètes et des oiseaux migrateurs. Elle n'est plus aujourd'hui, une île, mais une immense colline en forme de tombe, reconvertie en parc arboré où les familles aiment à déambuler les dimanches ensoleillés.
Extrait de la Postface écrite par les traducteurs.
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