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EAN : 9782355841965
496 pages
Sonatine (24/10/2013)
4.05/5   22 notes
Résumé :
Dans cet ouvrage kaléidoscopique, à la fois rigoureux, intense et farfelu, Pacôme Thiellement nous propose soixante-quinze textes consacrés à la culture contemporaine et à l’expérience pop. On y trouvera des exégèses des grands musiciens de rock (les Beatles, les Beach Boys, Dylan, Bowie, Gainsbourg, les Pixies), mais aussi des évocations de grandes chanteuses aux larmes sucrées (Peggy Lee, Amy Winehouse), plusieurs enquêtes subjectives sur des cinéastes démonologiq... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Somme provisoire et formidable exégèse de la mythologie contemporaine issue de la pop culture.

Publié chez Sonatine à l'automne 2013, ce recueil de textes et d'articles de Pacôme Thiellement, publiés entre 2000 et 2013, incluant 7 inédits, constitue certainement l'une des plus formidables plongées et tentatives d'éclairage de bon nombre de mythes contemporains, de leurs racines parfois anciennes, occultes et gnostiques ou non, et surtout de leur ancrage décidé dans une pop culture qui continue, malgré tout, d'être encore trop largement ignorée ou méprisée en France par la littérature « noble » et par le monde académique, contrairement à ce que l'on observe massivement depuis une quinzaine d'années en Espagne, en Italie, en Russie, au Japon ou aux États-Unis…

Pacôme Thiellement parcourt ici inlassablement, avec la passion et la vaste culture d'un passeur tous azimuts, comme il nous l'avait déjà montré, notamment, dans le magnifique « Les mêmes yeux que Lost », un terrain d'une rare richesse, où sont convoqués, disséqués et enrichis tour à tour, pour ne citer que quelques exemples frappants, Freud et Jung confrontés au président Schreber, David Lynch effectuant son saut à partir de « Twin Peaks », créant une onde de choc qui ira progressivement s'amplifiant, jusqu'à provoquer le « Lost » d'Abrams et Lindelof, cherchant ce que la pop star et la rock star peuvent vouloir nous dire, avec Elvis, les Beatles, les Rolling Stones ou Nirvana, bien entendu, mais aussi avec Pink Floyd, Bob Dylan, David Bowie, les Residents, Joy Division, le Velvet Underground, Mike Patton, ou encore et peut-être surtout Frank Zappa.

L'article focalisé sur Zappa (« Oncle Jihad », inédit) est l'un de ceux qui expriment le mieux la substance de ce recueil, où le recours aux quêtes mystiques et gnostiques n'occulte jamais la nature profondément sociale et politique de ce qui est mis en jeu dans cette reformation permanente de nos mythes. L'inattendue et passionnante lecture de l'ensemble des « Philémon » de Fred, en dehors d'un hommage fervent à l'essence même de la BD, réussit aussi ce petit miracle de mise à jour englobante d'un sens extrêmement fort.

Inséparable pour Pacôme Thiellement – ce qui fait à mon sens une de ses grandes forces par rapport à d'autres approches – d'une sociologie de la réception, fût-elle implicite, la résonance de cette pop culture se nourrit d'une audience de masse (d'autant plus lorsqu'elle se crée ou se révèle « populaire », de bas en haut, et non uniquement fabriquée en « mass entertainment », de haut en bas), et les grandes rocks stars comme les séries à forte audience dans la durée (« Buffy », et la révolution souvent mésestimée qu'elle représente, singulièrement) peuvent ainsi voisiner avec les sources plus cachées, plus confidentielles certainement, mais qui irriguent en profondeur l'art et la pratique de leurs émules à succès public (et c'est ici que l'auteur fait intervenir avec beaucoup de vista des auteurs comme José Lezama Lima, James Joyce ou Malcolm Lowry, des musiciens comme Secret Chiefs 3, ou des cinéastes comme Jacques Rivette, aux côtés d'un Joseph Heller ou d'un Philip K. Dick davantage lus, d'une Amy Winehouse davantage écoutée, ou d'un Roman Polanski davantage vu ).

Un recueil foisonnant donc, indéniablement, dont on peut évidemment contester certaines des liaisons établies entre les oeuvres et les sociétés qu'elles expriment, particulièrement lorsque l'occultisme envahit par instants la scène, mais surtout passionnant de bout en bout, ouvrant des dizaines de perspectives le plus souvent insoupçonnées, ou confortant des rapprochements de prime abord surprenants. L'un de ces grands et beaux livres, donc, terribles aussi par le nombre de lectures supplémentaires vers lesquelles ils pointent d'un sourire engageant.
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Recueil d'articles parus au cours des années 2000, notamment dans Rock 'n' Folk. Erudit, bourré de références aux gnostiques et à l'ésotérisme. Parfois, une idée particulièrement brillante, ou brillamment amenée, éclaire le propos. Thiellement parle de rock, bien entendu, mais aussi de cinéma, de littérature (Dick, Joyce, etc.), de bande dessinée, et d'autres choses encore.Très stimulant pour tout connaisseur de la contre-culture des années 1960 à nos jours.
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Voici une série d'articles tous plus intéressants les uns que les autres. C'est un vrai régal à lire. Voici un auteur vraiment original avec une pensée profonde et poétique à la fois.
Une belle découverte en ce qui me concerne : certaines entrées vous feront découvrir de nouvelles oeuvres, d'autres apportent un nouvel éclairage sur des livres, séries TV, ... déjà connues.
Une très bonne introduction pour les autres livres de P. Thiellement.


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Foutraque, lumineux, abscons, perché, terre à terre, érudit et bien d'autres choses encore. On ne s'y retrouve pas toujours, mais parfois aussi tellement.

Comme si vous l'aviez sur le bout de la langue.

Ou de la pensée.

Certains articles sont bons, d'autres vous tombent des mains (mais c'est moins fréquent). Tout ce qui est dit su David Lynch est passionnant, et sur les Beatles.

Mais il y a du bon dans ce qu'il nous révèle d'Elvis, des Résidents ou de Marilyn, de Gainsbourg ou de Nirvana.

Collection d'articles qui donnent à réfléchir, à méditer et à découvrir. Quelques artistes, quelques écrivains qui n'étaient que de vagues noms me donne envie d'y jeter un oeil ou une oreille... pour pouvoir lire ensuite en toute connaissance l'article qu'y consacre Thiellement.

Plaisir tordu, n'est-ce pas ?
Lien : https://www.tristan-pichard...
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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
Ce que les gnostiques avaient fait au judaïsme d’abord, au christianisme ensuite, les Beatles, à travers leur pop music, pleine et légère, complexe de toute la culture européenne et simple comme un enfant qui danse, l’avaient fait au rock. « Nous avons combattu la loi, écrit John Lennon en 1978 dans son livre Éclats de ciel écrits par ouï-dire, et la loi a perdu. »

Ce n’est pas en rejetant la loi qu’on s’extrait de son emprise, mais en la pervertissant, en la métissant et en l’épissant. Les gnostiques furent d’abord de grands parodistes, insistant sur le ratage de la Création et l’imbécillité congénitale du dieu à l’origine de notre monde. L’auteur du Deuxième Traité du grand Seth est formel : « Et une voix, celle du Cosmocrator, s’éleva alors vers les anges : “Je suis Dieu et il n’y en a pas d’autre que moi.” Mais je me mis à rire gaiement à la vue de sa vanité. » Ce que comprirent les gnostiques, c’est que, pour se dépêtrer d’une fiction totalisante, il faut accumuler les fictions singulières, dissipatrices, noyautées par le vide qui les fonde, le secret qu’elles révèlent (Dieu n’existe pas, moi non plus, donc je suis Dieu et tout est possible) et autour duquel elles tournent. C’est même la seule condition de la liberté et le seul athéisme qui sache rire. « Leur “simplicité” consiste à vrai dire dans le rejet total de la discipline » (Tertullien).

La gnose n’a jamais créé d’ordres du monde que pour les contraindre à se révéler ultérieurement comme des absurdités grotesques et terribles, ce qui fit de ses praticiens les cibles systématiques de tous les pouvoirs organisés. « Il me semble, écrit encore Lennon dans Éclats de ciel écrits par ouï-dire, que les seuls chrétiens dignes de ce nom étaient (sont ?) les gnostiques, qui croient en la connaissance de soi, c’est-à-dire en la nécessité de devenir des Christ, de trouver le Christ qui est en soi. »

Le mellotron, c’est l’homme conscient de son identité truquée, de sa nature de double ou d’escamoteur.
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Le phénomène extraterrestre n’a pas pris pour rien à partir de 1947. Il est entièrement tributaire de la Seconde Guerre mondiale – et de la façon dont les nazis ont interprété racialement et nationalement Nietzsche. Nous avons reculé devant la demande impérieuse de Nietzsche. La falsification opérée par les nazis sur une des propositions les plus généreuses de ce dernier : le surhomme ou l’outre-homme (qui n’est peut-être qu’un autre nom de l’homme bicaméral de Julian Jaynes), en a temporairement empêché une réappropriation naïve, innocente, pleine, qui était indispensable à notre survie dans le cosmos.

Nous avons également perdu la Terre, dont le surhomme devait être le sens. L’image de l’homme a commencé à se dissoudre, selon la phrase de Foucault, mais le surhomme n’a pas pour autant commencé à apparaître. D’un point de vue mythico-physique, les rencontres extraterrestres ont été un pôle de canalisation et finalement une mise en réserve de la réalisation zarathoustrienne, de la réalisation du surhumain.

La tension vers le surhumain et la disparition du concept « homme » ne pouvaient s’exprimer de la même façon après Auschwitz – elles ont donc dû être stockées ailleurs. Mais le stockage de cette tension devait rencontrer son point de rabattement – sa « reterritorialisation », diraient Deleuze et Guattari – dans le visage de l’extraterrestre. Le visage de l’extraterrestre est une réhumanisation par l’absurde. C’est nous – c’est nous tous, avant l’apparition tonitruante du moi, qui soutenons le fantasme de notre existence par le chantage identitaire.
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La conscience ne sert que de réceptacle aux ordres extérieurs au corps : elle les informe ensuite de ce qu’on attend de lui et tente de le convaincre de s’y soumettre. Elle est un agent de conservation liée aux nécessités impérieuses d’une conduite civilisée et tente de prévenir le corps dans sa démarche d’intensification (pouvant basculer, par la parfaite conformation aux décisions des voix, jusqu’à la schizophrénie ou l’action violente). Mais son défaut, nous le connaissons, c’est qu’elle entrave immanquablement l’action et nous paralyse dans notre détermination. La conscience devenue obstacle à la résolution du sujet, et entraînant finalement une catastrophe collective, est la base de la tragédie d’Hamlet – dont Carl Schmitt a pu dire qu’il était le mythe politique moderne par excellence –, prince du Danemark contacté par le Spectre mais qui hésite trop longtemps à se conformer aux demandes de celui-ci, et qui finit par assassiner accidentellement Polonius et peut être considéré comme responsable du suicide d’Ophélie : « Que ce soit bestial oubli, ou quelque lâche scrupule qui me fait penser trop en détail aux conséquences – pensée qui, mise en quatre, n’a qu’une part de sagesse et trois de couardise –, je ne sais pas pourquoi je passe ma vie à dire “cette chose est à faire” alors que j’ai motif, vouloir et moyens de la faire » (Shakespeare).
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Le diabolisme de Rosemary tient au principe de suggestion qui a une longue histoire au cinéma, mais provient de la littérature (Huysmans, Strindberg), voire de la poésie absolue (Mallarmé, Jarry) et des questions d’hypnose et de magie qu’elles ont croisées lorsqu’il s’est agi de faire naître l’image de façon indirecte – comme si l’écrivain s’introduisait à l’intérieur du lecteur et actionnait des pans trop souvent en sommeil de son imaginaire en lui faisant lire à travers les lignes, en lui faisant apparaître des réalités sans pour autant les nommer. Chez Polanski également, il s’agit de diriger le film à l’intérieur du cerveau du spectateur ; de lui faire rêver le film autant que de le lui faire voir.

Remarquons également que la relation de Polanski au texte de son film – le roman d’Ira Levin – n’est pas exempte d’une part importante de suggestion. On a affaire à un cinéaste hanté, dont le rationalisme officiel est toujours contrebalancé par des fétiches scénaristiques et des signes de mauvais sort. Certains détails onomastiques présents dans le roman sont déjà bien glaçants. Le voisin de Rosemary s’appelle Roman Castevet. Et l’auteur comme l’acteur principal du film – Roman (Polanski) et (John) Cassavetes – fonctionneront comme un rappel homophonique de ce nom. Le Dakota Hotel dans lequel Polanski place l’action est lui aussi mentionné dans le roman : c’est l’hôtel que conseille Hutch, contre le Brandford dans lequel échouent Rosemary et Guy. Polanski hante et habite le roman jusqu’à transformer la caractérisation implicite du couple Castevet. Dans le roman, ce sont des Américains du Middle West (la femme est une grande et grosse dame débonnaire) mais, dans le film, ce sont clairement des juifs de l’Est, probablement des juifs polonais – et Minnie a un accent à couper au couteau. Roman et Minnie Castevet pourraient être les parents de Polanski lui-même ; tandis que Rosemary (son spectateur) est une catholique qui a passé sa jeunesse chez les sœurs. Le film devient donc l’enfant que ce diable juif de Polanski fait dans le dos de son spectateur catholique et même bonne sœur !

Enfin, le meurtre de Sharon Tate, la femme de Roman Polanski, par la Family de Charles Manson, est devenu indissociable de notre perception du film. Non créditée au générique, Sharon Tate apparaît rapidement dans Rosemary’s Baby, de façon presque hallucinatoire, au sein de la scène de la fête : elle y a la présence diaphane d’un spectre. Et puis il y aura l’assassinat de John Lennon en 1980, alors locataire du Dakota Hotel, lieu même du tournage du film. Le meurtre de Sharon Tate fait que ce n’est déjà pas le même film que nous voyons. Le meurtre de John Lennon fait que ce ne sera jamais plus le même.
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Le jihad est la guerre que l’homme fait contre lui-même et contre ses instincts pour répondre à l’appel de Dieu. Le jihad esthétique est le combat de l’artiste contre ses propres déterminations pour accomplir son œuvre, dans toute sa grandeur et son inactualité, à travers toutes les impossibilités qu’il rencontre, qu’elles viennent du dehors, comme du plus profond de lui-même.
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Vidéo de Pacôme Thiellement
Pacôme Thiellement vous présente son ouvrage "Infernet. Internet et moi : une confession" aux éditions Massot. Entretien avec Arthur Louis Cingualte.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2810424/pacome-thiellement-infernet-internet-et-moi-une-confession
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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