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EAN : 9782226484871
208 pages
Albin Michel (30/08/2023)
3.92/5   25 notes
Résumé :
Russe : un mot qui charrie son lot de fantômes, de mythes, de tourments.

Qu'y a-t-il à sauver ?

Dans ce récit d'émancipation, Diana Filippova dresse un portrait sans concession de la Russie contemporaine, et, comme en miroir, de la France et d'elle-même.

Naître dans l'illusion de la grandeur et porter la chute dans son corps, se révolter contre ses origines et s'y cogner sans cesse, chercher refuge en politique et le trou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Dans de l'inconvénient d'être russe, Diana Filippova raconte ses origines : son enfance à Moscou, son intégration en France, sa façon de percevoir l'actualité russe... J'aime découvrir les origines d'un auteur et de comprendre la différence de savoir et d'être qu'il mêle à sa nouvelle patrie. Ses souvenirs sont montrent qu'elle a été marquée par la gouvernance russe mais aussi par un certain racisme d'une partie de la société.
C'est la guerre en Ukraine qui a été le déclic pour ce livre. C'est une autobiographie mais elle s'apparente aussi à un essai pour décortiquer la pensée russe. Ses arguments suite à chaque souvenir ou moment présent sont le prétexte pour développer sa perception historico-politico-philosophale melée de quelques sentiments. L'ensemble rend la lecture un peu plus compliquée et moins fluide, même si le propos est pertinent.
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Diana Filippova est née en 1986, en Russie. Elle est arrivée en France, à l'âge de huit ans. le 24 décembre 1993, la famille s'installe à Vandoeuvre-lès-Nancy, en banlieue nancéienne.

Dans cet ouvrage, elle affronte l'héritage de ses origines. le déclencheur de l'écriture du livre a été la guerre en Ukraine. « Tout à coup, jusqu'à mon nom de famille, mon lieu de naissance, ma langue maternelle, la guerre me ramena à ce que je n'avais plus voulu être. » (p. 11) En effet, depuis toute petite, elle a souhaité éradiquer sa russéité, mais les autres (les enfants, les enseignants) le lui rappelaient. L'auteure précise que dans les années 1990, la Russie était perdue négativement. Elle exprime la honte qu'elle ressentait d'être russe.« C'est pour me laver de cette déconsidération de soi, que j'ai pris la décision de cesser d'être russe. » (p. 47)

De l'inconvénient d'être russe explore son histoire, l'immigration de sa famille, l'exil et la construction de son identité, sous le prisme de sa nationalité de naissance, qu'elle s'est toujours efforcée d'effacer. Une envie féroce d'assimilation a façonné sa personnalité. Régulièrement, elle conte des anecdotes de sa vie, qu'elle déplie ensuite à plus large échelle et transpose sur le vrai visage de la Russie. Elle indique que la littérature russe crée une vision imaginaire du pays. Elle s'applique à montrer la réalité de la civilisation russe, à travers la politique et le social. Son analyse permet d'approcher des raisons de la soumission et de l'endoctrinement de la population.

Diana Filippova part de l'intime pour embrasser le général et proposer sa perception de son pays natal, contre lequel elle se révolte. Les parts de son existence sont empreintes de sa vérité et d'authenticité. J'ai été amusée de reconnaître des lieux que je connais bien. Sans être nommés, leur description ne prête pas à confusion, pour les personnes qui ont vécu à Nancy. L'introspection est poussée, elle demande de l'attention, cependant, elle propose une perspective intéressante de l'attitude du peuple russe et de son refus de l'altérité. Elle montre la difficulté de l'auteure à accepter sa russéité et son combat intrinsèque. C'est un livre instructif et éclairant.

Lien : https://valmyvoyoulit.com/20..
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Une claque. Diana Filippova met une claque aux clichés et à la généralisation de tout un peuple. Être née russe n'implique pas d'envoyer des bombes sur une population. Tout comme être français n'implique pas d'avoir été collaborationniste ou colonialiste. L'autrice, dans cette nouvelle collection « Itinéraires » chez Albin Michel, sans langue de bois, revient sur son enfance et les événements marquants de sa vie en tant que femme née en Russie. Tout du long, elle a du s'excuser ou presque à chaque intervention d'un gouvernement étatique. Pourtant, sa position est claire depuis le début : elle ne cautionne rien. Comme un boomerang jeté à la face, comme une stigmatisation permanente, elle est le bouc-émissaire d'une situation qui dépasse les frontières. La déclaration de guerre récente envers l'Ukraine n'aidera en rien.

D'une grande richesse, l'ouvrage questionne, interroge, interpelle et convoque nos propres identités et nos perceptions trop faciles de « l'étranger ». Celui qui évoque le pays du mal, du moins, sur un temps donné. En cette matière, tout change rapidement, passant du démon à l'ange et vice-versa. L'Homme a souvent la mémoire courte. À travers son Histoire et ses dirigeants, la Russie a usé de tous les vices existants : censure, discrimination, racisme d'état, homophobie, antisémitisme, contrôle de la presse, vengeance, violences, guerres incessantes, occupations de territoires : le programme est vaste. À croire qu'une todolist était prévue en amont. Entre communisme historique et démocratie déguisée, Diana Filippova tente de trouver des clés à travers sa propre histoire et en cela que le livre en devient vertigineux. Depuis son arrivée en France, elle essaie de gommer ce qui la lie à son pays d'origine, pour s'en délester, pour s'en absoudre.

« J'ai cherché par tous les moyens à m'en laver, comme on frotte ces taches de sui qui malgré l'effort continuent de souiller la peau de leur mine pellicule grasse ».

Elle démythifie la Russie qui n'est plus celle de Pouchkine ou de tous ces écrivains qui ont réussi à écrire leurs chefs d'oeuvre quand ils étaient à l'étranger. On y découvre les « handicapés du groupe cinq » entre désunion et réconciliation d'une femme aux confins de son identité. « Russéité ». Comme un couperet pour celle qui avait gardé bien peu de liens avec ce pays et qui n'y retrouvera que deux fois en dix ans et qui ne souhaite plus garder le silence. Diana Filippova écrit la difficulté et les affres qui ressurgissent sur « l'étranger », sur cette volonté d'effacement identitaire qui gratte et ronge à l'os. Elle écrit la dureté d'un régime qui souhaite ne faire que des copies conformes, des petits soldats qui rejettent en bloc le mea culpa et l'humilité. Avec un talent de conteuse inestimable, elle écrit aussi le pouvoir inexistant de nuisance des poètes d'aujourd'hui, l'absence d'altérité, culte de la personnalité et l'endoctrinement des enfants.

«  Un jour, la dissuasion sera tellement ancrée dans la peau du peuple qu'il en naitra des petits êtres à la bouche déjà cousue ».

En convoquant une multitude d'écrivains comme Philip K.Dick, George Orwell, Emmanuel Carrère, Marina Tsvetaïeva et bien d'autres, Diana Filippova nous offre des moments de respiration et de lucidité sur un pays affublé de légendes. Si vous deviez lire un livre sur le sujet : il s'agira de celui-ci.
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L'un de mes derniers achats en librairie, c'est ce titre Diana Filippova paru chez Albin Michel : elle est déjà l'autrice de plusieurs essais et d'un premier roman. C'est un essai pour lequel elle revient sur la difficulté à être russe aujourd'hui en tant que femme issue d'un pays qui a déclaré une guerre à son voisin. Cet essai, tout à fait accessible, peut se mettre en parallèle avec le roman graphique lu il y a peu de temps À quoi pensent les Russes ? Diana Filippova est née en 1986 à Moscou et elle a quitté son pays d'origine depuis longtemps, elle parle comme elle écrit le français, parfaitement, il n'empêche que l'éducation soviétique et russe reste définitivement ancrée en elle. Elle est très active dans la vie politique nationale et parisienne de la gauche, aux côtés de Raphaël Glucksmann et Anne Hidalgo.


Diana Filippova est arrivée en France en 1993, soit à l'âge de six ans, trois ans après que l'union soviétique a disparu, les souvenirs ont commencé à prendre un peu de poussière avec le temps, mais ils sont bien là, la langue est bien enracinée, l'éducation aussi. L'auteure nous explique sa relation avec son pays d'origine, et explique son pays d'origine, surtout la façon dont elle vit cette double nationalité officieuse, officiellement française, devenue un poids avec l'envahissement de la Russie dans son pays voisin. Qui de mieux placée qu'elle pour démonter les mensonges dont sont assommés chaque jour qui passe les Russes par le gouvernement. D'entrée de jeu, elle appuie fort en s'attaquant à Pouchkine, la figure tutélaire de la littérature russe, dont elle rappelle ironiquement le métissage n'en déplaise aux idées du Président et de sa cohorte de sous-fifres. Plus loin, on pourra apprécier le tacle bien senti à Zakhar Prilépine, le littérateur pro poutine, dont on ne voit plus guère les titres sur les étals des librairies.

De tous ces réajustements qu'elle effectue entre réalité et tous les présupposés de ce qu'est la Russie et le citoyen russe, ce premier réajustement, où en tant qu'exilée, elle explique le métissage helléno-russe qui est le sien, le métissage des habitants de la fédération de Russie et de ses républiques, marque le début de son retour sur son passé. de sa russéité, elle l'évoque comme son héritage, et la mémoire familiale, son profil inné face à la vie qu'elle s'est construite en France, tout son acquis. Une identité bicéphale qu'elle a gérée jusqu'ici en laissant de côté tout ce qui constitue son identité russe, mais qui lui est revenu en pleine figure lors de la déclaration de guerre de la Russie à l'Ukraine. C'est l'occasion pour elle de rappeler ce qu'elle partage d'autres, hormis le dépit de partager la même nationalité que leur dictateur de président.

C'est une mine d'information que l'on lit ici, ce qui tourne autour plus ou moins lointain de la discrimination, l'un des arcs de la politique autoritaire de Poutine, ukrainiens et homosexuels, est une tradition ancienne, qui déjà en URSS se nommaient les handicapés du groupe 5, soient les personnes d'origine étrangères. L'un des buts de l'autrice consiste aussi à tenter de faire comprendre le pays qui fut le sien, la façon dont le peuple russe a été malmené et continue d'être manipulé par un Vladimir Poutine démagogue, belliqueux, nationaliste et impérialiste. Son récit est d'une clarté et d'une richesse incroyables et a le mérite de déblayer la vision française que l'on peut avoir aujourd'hui du pays, de ses habitants. Ce récit d'anamnèse et de synthèse fait énormément appel aux références littéraires russes connues : Pouchkine, j'en ai parlé plus haut, mais aussi Dostoïevski, auquel Poutine a emprunté le titre de l'un de ses romans pour manipuler les foules Humiliés et Offensés, quoi en effet de plus fédérateur que l'un des auteurs les plus lus ? Elle explique en effet, qu'en Russie la littérature est politique, elle rappelle que Pouchkine était décembriste, et Ossip Mandelstam, Marina Tsvataieva, son admiration pour la faculté de Vladimir Nabokov à s'être réinventé en anglais, la vision de la capitale russe issue de le maître et Marguerite de Boulgakov.

Incidemment, je viens d'apprendre l'existence du groupe de rock russe DDT avec le roman graphique de Nicolas Wild, Diana Filippova évoque de son côté l'une des chansons du groupe sortie en 1991 et qui parle de la Russie en des termes pas vraiment glorieux pour le pays, mais franc de collier. Trente ans après le groupe et son chanteur ont encore moins changé leur discours, lequel s'est radicalisé parallèlement avec la politique menée par les gouvernants. Avec toutes les analyses auxquelles on a eu droit sur la Russie, son histoire, son dirigeant et ses décisions, sa politique, avec des experts en tout genre, le mieux c'est encore de lire l'analyse de Diana Filippova. Une exégèse qui se fonde sur son histoire personnelle, de son enfance là-bas à son exil en France, sa longue et difficile intégration, et la double culture qui est la sienne, qui lui permet d'appréhender la Russie à la fois de son point de vue de Russe exilée, et de Française aux origines russes : ce recul et cette proximité, un double éclairage, qui lui permet d'avoir une vision plus concrète et personnelle que les experts en géopolitique des plateaux de bfm et consorts. Pour poursuivre cette lecture, il faut lire le roman graphique de Nicolas Wild, À quoi pensent les Russes, qui complète parfaitement cette lecture. Mais aussi la toute nouvelle revue trimestrielle Kometa, qui évoque l'Ukraine, et la Russie à travers la littérature, la photographie.

Le récit de Diana Filippova est un vrai roman russe : elle précise à mi-récit que les plus grands des romans de son pays de naissance ont été écrit à l'étranger, son livre est un petit bijou. J'aurais aimé en lire bien plus, notamment sur la vie de ses parents, mais j'imagine que cela peut être délicat pour elle d'aller fouiller dans un passé qu'ils ont laissé derrière eux et qu'ils n'ont pas forcément envie d'évoquer. C'est un livre essentiel pour comprendre la Russie et la difficulté de porter ses origines, encore plus en ces années où son président l'a engagée dans une voix sans de réelles perspectives et issues positive pour lui, et ses citoyens.


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Diana Filippova, née en Russie, émigre en France avec sa famille dans les années 90. Elle est fille d'intellectuels, elle n'a pas dix ans.
Elle connaîtra les difficultés inhérentes à l'exil : "l'exil mate", écrit-elle. A commencer par l'apprentissage de la langue française, qu'elle finira par maîtriser à la perfection, on s'en rend compte à la lecture.
Mais que faire du russe, sa langue maternelle ? Elle décidera un jour de "ne plus être russe". Mais peut-on vraiment se débarrasser de ses racines?
Au delà de son processus d'intégration, l'auteure nous livre un saisissant tableau de la Russie post URSS, un pays en plein effondrement et en proie à la violence, une chute perçue comme une humiliation.
Un essai remarquable, qu'il faut lire tant il éclaire souvent de façon saisissante le comportement actuel de la classe politique et du peuple russe.
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critiques presse (1)
OuestFrance
04 septembre 2023
Diana Filippova raconte l’histoire de sa famille et de la Russie, de conflits intimes en tensions extérieures.
Lire la critique sur le site : OuestFrance
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Le malheur des autres se mesure toujours à l'unité de souffrance du peuple russe; s'il est inférieur, c'est comme s'il n'avait jamais existé. Il ne faudrait pas que l'autre vous divertisse des tourments de votre propre cuisine, vous détourne du frigo encore plein.
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Pour que les Russes se soulèvent, il faut que le feu se mette à manger leur cuisine.
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On dit que Paris est rude, intense, brutale. C'est aussi ce que les Russes disent de Moscou lorsqu'ils ne s'y trouvent pas. Elle m'a semblé, dans l'anonymat, dans l'indifférence à l'autre, infiniment plus douce que la surveillance de tous par tous de ces villes qu'on dit à taille humaine. Ici, je pouvais faire ce qui me chantait, tout le monde s'en fichait. Prendre le métro, marcher pendant des heures, admirer la succession d'architectures bigarrées, flâner dans les librairies, me faire une toile. La vie qui pulse, l'euphorie de l'instant comme figé pour l'éternité, rien n'est plus, tout est possible.
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C'est l'histoire d'une femme française, métisse dans le pays où elle est née, formée avant toute chose par la littérature du monde entier, écrivant en français. C'est l'histoire d'une femme russe qui depuis sa plus tendre enfance a décidé de ne plus l'être. C'est l'histoire d'une lente désunion et du commencement de la réconciliation.
Cette histoire en dit autant de la Russie que de la France.
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Je n'ai pas pris la mesure de tout ce qu'emporte un tel façonnement autoritaire de mon identité. Au fond, je me rebiffe contre l'idée qu'une grande partie de nous est déterminée à notre insu. Ce que je voudrais, c'est être le pur et absolu artisan de moi-même.
Quel échec.
Quel soulagement, à l'inverse, de se laisser envahir par les vagues des choses qui font que nous sommes tels que nous sommes sans qu'on y puisse quoi que ce soit.
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Videos de Diana Filippova (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Diana Filippova
Dans son nouveau livre, "De l'inconvénient d'être russe", Diana Filippova dresse un portrait sans concession de la Russie contemporaine. Pour en savoir plus: https://www.albin-michel.fr/de-linconvenient-detre-russe-9782226484871
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