AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Jacques Darras (Éditeur scientifique)
EAN : 9782070319237
448 pages
Gallimard (22/11/2007)
4.28/5   37 notes
Résumé :
"Samuel Taylor Coleridge (1772-1834) est le plus romantique de tous les poètes romantiques. Mélange d'émotions et de réflexion, d'enthousiasme et de doutes, il est la contradiction faite homme. Il aime passionnément la Nature, dans sa version sauvage du Pays de Galles et des Lacs où il vit avec une parfaite sobriété écologique. Dans le même temps, cependant, il ne peut pas se passer de Londres, dont il aime fréquenter les cafés. Comme il a lu Rousseau et les philoso... >Voir plus
Que lire après La ballade du vieux marin et autres textesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Ce recueil débute avec « La Ballade du Vieux Marin », un étonnant récit de mer, sous forme de long poème, une parabole chrétienne, où il est question, comme c'est souvent le cas dans l'oeuvre de Coleridge, de péché, de châtiment et de remords, de rédemption. Un Marin, vieilli par l'expérience autant que par les ans, a survécu seul à un naufrage après une longue dérive en mer et, une fois revenu à terre, il interpelle le convive d'une noce et témoigne : après qu'il eut tué un albatros, oiseau pourtant de bonne augure, qui accompagnait, au milieu des brumes et des glaces, son bateau et son équipage, le mauvais sort s'abattit sur eux, les décimant de soif et le laissant, lui, au milieu des transes. Sauvé, il tient à raconter, en guise de pénitence, son crime et les dangers encourus.
Dans ce recueil on trouve d'autres poèmes célèbres de Coleridge tels que Kubla Khan et Christabel.
Kubla Khan est le fragment d'un poème apparu en rêve dont il ne put, à son réveil, fixer que quelques lignes, lequel évoque le grand empereur mongol et sa cité devenue mythique, Xanadu, dans laquelle celui-ci se fit construire un dôme extraordinaire. Ses remparts ceignaient des terres fertiles, des clairières et de très anciennes forêts, ainsi qu'un fleuve sacré, bouillonnant du fond de la terre.
Christabel est un autre poème fantomatique, aux rythmes répétés et lancinants, où le Mal et la Sensualité qui l'habitent sont plus suggérés que décrits, d'autant plus qu'il y est question d'un Amour « coupable » entre deux femmes. Christabel est aussi une sorte de poème nocturne dans un moyen-âge fantasmé : La très belle et jeune Christabel, fille d'un riche baron, est parti, au milieu de la nuit, prier pour son fiancé, dans la forêt qui entoure le château. Elle tombe sur Géraldine, Dame fascinante mais inquiétante, laissée là par des chevaliers qui l'avaient tourmentée. Christabel l'invite dans le château de son père et, pour ne pas réveiller celui-ci, à dormir dans sa chambre et à partager son lit. Christabel va-t-elle, troublée, être initiée au plaisir, et dans son innocence, s'en repentir ? Devient-elle jalouse quand son père à son tour s'éprend de la belle Dame qui répand autour d'elle une sorte de charme ? Celle-ci est- elle réellement une créature démoniaque, une femme sans pitié qui n'accorde aucun frein à ses désirs et qui use de mille subterfuges ? Le Fanu s'est inspiré de ce poème pour écrire « Carmilla » dans lequel Une femme Vampire s'éprend d'une jeune innocente dont la vie, peu à peu, s'amenuise
Commenter  J’apprécie          160
"Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers ..."

Un marin commet la faute de tuer un albatros avec son arbalète. Alors que l'albatros était aimé et que l'albatros l'aimait.
Il attire sur lui la malédiction ...

La seule manière pour le vieux marin de s'en délivrer, de cette malédiction, c'est de narrer sa terrifiante histoire, jusqu'à ce que ses terreurs reviennent. Notre conteur jette pour cette fois son dévolu sur un jeune marié que la mariée attend le jour de ses noces. Il le harponne, il le retient, l'hypnotise de son oeil de mort et se saisit de sa volonté, retenant ainsi la vie de cet homme le temps de lui raconter comment il est mort, de son vivant.

Le marin a le poids de l'albatros sur la conscience, qui pèse comme du plomb et lui-même s'ancre au port alors même que son âme est restée dans l'eau.

Un chant de marin - un chant d'amour et de mort - qui a la profondeur de l'Océan parcouru jusqu'au Pôle : région de brouillard et de neige dont l'albatros est l'esprit tutélaire.
Un récit qui cristallise les terreurs maritimes. Un récit à la grâce de la glace à l'état pur.
Commenter  J’apprécie          180
Coleridge est le symbole de la nouvelle génération de poètes romantiques anglais et européens, qui irriguèrent d'un sang neuf, la poésie occidentale moribonde, en cette fin de 18éme siècle. Heureusement, l'esprit des lumières, la révolution française, et le romantisme combinés, redonnèrent un souffle, à un art qui s'enlisait dans la médiocrité académique.
Avec ce recueil fabuleux contenant deux des plus beaux poèmes figurant au firmament du génie poétique, l'oeuvre de Coleridge, élève la poésie à un niveau d'exception, de par ses envolées lyriques, ses tempos changeants ou l'intime rejoint l'apparent, ses descriptions géographiques donnant une envie communicative de s'y transposer en rêve ou en réel. L'émotion est au coin de chaque vers, plongeant le lecteur, dans le merveilleux, l'angoissant, la beauté, le tragique, synthèse d'un onirisme de conte mélangé à un naturalisme le plus sombre. "Le poème principal : La ballade du vieux marin", nous emporte dans un voyage au bout de l'enfer, mais où la morale presque d'une philosophie écologique, nous fait comprendre l'utilité de la biodiversité, rendant ce poème comme un hymne à la nature, indissociable de l'homme. le second poème : Kubla Khan, lui revêt plutôt l'aspect d'une apologie d'amour controversée, d'un mégalomane de génie, empereur de Chine aux goûts fantasmagoriques et offrant à sa belle un lieu d'exception démesuré, mystérieux et baroque pour assouvir ses envies étranges et son hymen de façon exacerbé. Mais comme Coleridge s'adonnait aux drogues, définir exactement la poésie de l'auteur reste audacieux, toutes les interprétations demeurant possibles, mais n'est ce pas ça, le mystère insondable de la poésie ?
Commenter  J’apprécie          140
Le poème de Coleridge La complainte du vieux marin (The rhyme of the ancient mariner) exerce sa puissance à chaque fois. le paysage reste incroyablement infernal, tout en étant agrémenté d'effets météorologiques photographiquement réalistes, et la conduite narrative est irrésistible. L'une de ses innovations, et non la moindre, est ce dispositif cinématographique qui coupe, de temps en temps, entre la boutonnière urgente du Mariner sur l'invité du mariage, et la gaieté et le ménestrel alléchants du mariage. Comme l'invité impatient, le lecteur peut avoir envie de s'évader, mais il est retenu par l'insistance presque dérangée du ton du Marin.

Le pouvoir de l'histoire pourrait bien être fondé sur sa relation symbolique avec le propre sentiment d'inutilité et d'impuissance du poète, tel qu'exprimé dans une lettre à son ami, John Morgan :
"Quel crime y a-t-il à peine qui n'ait été inclus dans ou suivi de la seule culpabilité de prendre de l'opium? Sans parler de l'ingratitude envers mon créateur pour les talents gaspillés; de l'ingratitude envers tant d'amis qui m'ont aimé je ne sais pourquoi; de négligence barbare de ma famille… J'ai dans cette sale affaire de Laudanum cent fois trompé, trompé, non, réellement et consciemment menti."

Si la dépendance est le sous-texte du poème, cela aide à expliquer l'intrigue étrange dans laquelle la mort et la vie dans la mort lancent des dés sur le navire spectral pour décider du sort du marin et de son équipage. L'histoire que Coleridge a racontée sur les origines de sa dépendance à l'utilisation du laudanum comme analgésique pour les douleurs rhumatismales, souligne son propre sens du pouvoir cruel du hasard. L'addiction n'était pas choisie : c'était un sort qui lui était réservé.

L'albatros pourrait également symboliser le lien social. Au début du poème, l'oiseau visite régulièrement le navire et est nourri par les marins. On ne nous dit pas pourquoi le Mariner décide paresseusement de tuer l'oiseau. Encore une fois, l'indice est que l'acte aléatoire est la racine du mal. le moment où le marin commence à sortir de son bourbier de découragement est le moment où il surmonte sa répulsion face aux infects serpents de mer et, sans le savoir, involontairement, les bénit. Ces serpents peuvent être associés à l'imagerie du cauchemar induit par l'opium. Peut-être, en effet, est-ce en avouant la puissance imaginative de la vision de l'opium que le Mariner-Poète rachète son échec.

L'extrait suivant provient de la partie IV. Il comprend les gloses que Coleridge a ajoutées à l'édition de 1817 du poème, généralement imprimées en marge. Ce commentaire n'est parfois qu'explicatif mais il peut aussi apporter un éclairage psychologique supplémentaire.

"Dans sa solitude et sa fixité, il aspire à la Lune voyageuse, et aux étoiles qui séjournent encore, mais qui avancent encore ; et partout où le ciel bleu leur appartient, et est leur repos désigné, et leur pays natal et leurs propres demeures naturelles , où ils entrent à l'improviste, comme des seigneurs certainement attendus et pourtant il y a une joie silencieuse à leur arrivée."

La Lune en mouvement monta dans le ciel,
Et nulle part ne s'est fixée:
Doucement elle montait,
une étoile ou deux à ses côtés -

Ses rayons se moquaient de la sensuelle principale,
Comme la propagation de la gelée blanche d'avril ;
Mais là où gisait l'immense ombre du navire,
L'eau charmée brûlait toujours
Un rouge immobile et terrible.

"Par la lumière de la Lune, il contemple les créatures de Dieu du grand calme."

Au-delà de l'ombre du navire,
J'ai regardé les serpents d'eau:
Ils se déplaçaient sur des voies d'un blanc brillant,
Et quand ils s'élevaient, la lumière elfique
Tombait en flocons chenus.

A l'ombre du bateau
J'ai regardé leur riches atours:
Bleu, vert brillant et noir velours,
Ils se sont enroulés et ont nagé; et chaque voie
Était éclair de feu d'or.

« Leur beauté et leur bonheur.
Il les bénit dans son coeur."

Ô heureuses choses vivantes! Aucun mot
ne saurait dire leur beauté :
Une source d'amour a jailli de mon coeur,
Et je les ai bénis sans le savoir :

Bien sûr, mon gentil saint a eu pitié de moi,
Et je les ai bénis sans le savoir.

"Le charme commence à s'évanouir."

Au même moment, je pouvais prier;
Et de mon cou si libre
L'Albatros est tombé et a coulé
Comme du plomb dans la mer.

Coleridge était un formidable causeur, il parlait surtout de litérature et beaucoup de Shakespeare, on peut, dans les cas d'incompréhension se référer à lui,
mais, tout comme la totalité des lecteurs de Shakespeare, il est resté muet devant cette phrase d'Hamlet
(Acte 2, scène 2) 'Then are our beggars, bodies; and our monarchs, and outstretched heroes, the beggars' shadows.'
Lien : http://holophernes.over-blog..
Commenter  J’apprécie          30
En anglais de la fin du XVIIIe s. Coleridge était apparemment un bon poète qui a fait évoluer le genre mais pour apprécier de la poésie, goûter la musique de la sonorité des mots, alliée à leur sens, il faut la pleine connaissance de ces mots. Dire cela est une évidence, même une banalité et ne devrait être qu'un rappel, or je ne maîtrise pas l'anglais de la fin du XVIIIe s. et la traduction de Jacques Darras ne restitue pas, à mon avis, la "musique" de Coleridge et n'a donc pour seul intérêt, pour moi, que de donner une idée de ce qu'a écrit ce poète - et qui n'est pas sans intérêt - et non de sa manière, ce qui ici, selon moi, ôte toute la puissance pressentie de sa poésie.
J'ai donc tôt fini par survoler les poèmes traduits en français, jetant de temps en temps un oeil sur le texte original. "survoler" est bien le mot à choisir puisque le poème principal de ce recueil est le Dit du Vieux Marin où il est question des conséquences d'avoir tué un albatros. Si vous êtes pressé ou avez la même compétence que la mienne en vieil anglais, vous pouvez lire le poème the Raven (le corbeau) qui dit, en plus bref, à peu près la même chose. Bref ces deux oiseaux là me sont passés au-dessus. Dommage car la préface et les différentes interventions de Jacques Darras dans cette édition sont intéressantes, claires voire lumineuses. J'essayerai peut-être un jour de chercher une autre traduction..
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
LA PERCE-NEIGE
   
I
Ne crains plus rien, ma Fleur timide
Ne crains plus la force de l'hiver,
la glace qui fond, l'averse gravide,
La nuit sans bruit où gèle la Terre
Depuis que Laure a mû tes feuilles
Par les sorcelleries de son chant,
Fleurette, les plus suaves vents
Et les cieux purs t'accueillent.
   
II
Son oeil rempli de tendres larmes
Fixant tout ton corps, l'émouvant,
De l'Esprit se fit l'Interprète —
L'Esprit en sympathie ardente
Trembla avec tige la tremblante
Comme tu t'inclinais sur ta couche,
Elle, par sympathie inconsciente,
Tête tombante s'inclina.
   
III
Sa tête fléchit, ses bras s'ouvrirent,
Elle chuchota son envoûtement,
Ouïssant le charme le Bruit du monde
Sans peine aux Piérides* t'emporta !
Ne crains plus le Gel Matinal
Qui sur ton lit de neige brillait ;
Puisque immortelle près des lauriers
Toujours verte fleuriras.
   
IV
Tes pétales offrent un blanc plus doux,
Tellement le charme t'a embaumée
Qu'Amour l'aveugle t'a souvent prise
Pour fleur de son Myrte tombée.
Puis il a ri de son erreur,
Et courant avec l'Étésien*
Aura gagné les arbres voûtés
Où Laura reposait.
   
V
Tous ceux qu'Amour et Folie aiment,
Quand sont fermés les yeux grossiers
Les génies du lieu les entraînent
Sur la paroi infranchissable
Jusqu'au sommet large et uni
Où le Phénix cache son nid
Et où des cyprès abrités
Coule, secret, le Léthé.
   
VI
Les branches y font un bruit de mer,
Mues par la Brise qui s'y attarde ;
Tous ceux qui au-dessous s'étendent,
Oublient l'enveloppe mortelle la chair.
D'étranges brouillards volent sur les plages,
Ils viennent guérir ceux qui sont là
Et endurcir l'âme à souffrir
Son martyre ici-bas.
   
VII
Ce sont des plages aimées des elfes
Où les Lys soumis au Zéphir
Se penchent pour s'embrasser eux-mêmes,
Images floues tremblant dans l'eau : —
C'est là, la nuit, que dort Laura,
Sommeil magique levant son sein :
Vagabond blanc des Harpes, son bras
Sous sa joue, plié, tient.
   
VIII
Sa Harpe tenue par les chaînes d'or
Du vent sifflant autour, voix basse
En de timides reproches se plaint,
Sons s'échappant, malgré soi, d'elle :
Guère perceptible sa musique plane,
Informant les rêves des dormeurs ;
AMOURS remémorés rallument
La Jeunesse de son teint.
   
*
THE SNOW-DROP
   
I
Fear no more, thou timid Flower!
Fear thou no more the winter's might.
The whelming thaw, the ponderous shower,
The silence of the freezing night!
Since Laura murmur'd o'er thy leaves
The potent sorceries of song,
To thee, meek Flowret! gentler gales
And cloudless skies belong.
   
II
Her eye with tearful meanings fraught,
She gaz'd till all the body mov'd
Interpreting the Spirit's thought--
The Spirit's eager sympathy
Now trembled with thy trembling stem,
And while thou droopedst o'er thy bed,
With sweet unconscious sympathy
Inclin'd the drooping head.
   
III
She droop'd her head, she stretch'd her arm,
She whisper'd low her witching rhymes,
Fame unreluctant heard the charm,
And bore thee to Pierian climes!
Fear thou no more the Matin Frost
That sparkled on thy bed of snow:
For there, mid laurels ever green,
Immortal thou shalt blow.
   
IV
Thy petals boast a white more soft,
The spell hath so perfumed thee,
That careless Love shall deem thee oft
A blossom from his Myrtle tree.
Then, laughing at the fair deceit,
Shall race with some Etesian wind
To seek the woven arboret
Where Laura lies reclin'd.
   
V
All them whom Love and Fancy grace,
When grosser eyes are clos'd in sleep,
The gentle spirits of the place
Waft up the insuperable steep,
On whose vast summit broad and smooth
Her nest the Phoenix Bird conceals,
And where by cypresses o'erhung
The heavenly Lethe steals.
   
VI
A sea-like sound the branches breathe,
Stirr'd by the Breeze that loiters there;
And all that stretch their limbs beneath,
Forget the coil of mortal care.
Strange mists along the margins rise,
To heal the guests who thither come,
And fit the soul to re-endure
Its earthly martyrdom.
   
VII
The margin dear to moonlight elves
Where Zephyr-trembling Lilies grow,
And bend to kiss their softer selves
That tremble in the stream below:--
There nightly borne does Laura lie
A magic Slumber heaves her breast:
Her arm, white wanderer of the Harp,
Beneath her cheek is prest.
   
VIII
The Harp uphung by golden chains
Of that low wind which whispers round,
With coy reproachfulness complains,
In snatches of reluctant sound:
The music hovers half-perceiv'd,
And only moulds the slumberer's dreams;
Remember'd LOVES relume her cheek
With Youth's returning gleams.
   
'Poèmes variés (1793-1802)' – pp. 192-199
* Les Piérides, c’est-à-dire les Muses / Le vent Etésien ou vent du nord.
Commenter  J’apprécie          140
LE ROSSIGNOL DANS LA NUIT
Poème conversation (extrait)

Moi je connais un bois,
Bosquet d'étendue large, près d'un haut château fort
Où les seigneurs n'habitent plus ; en conséquence
De quoi a envahi une broussaille sauvage,
Les allées, les pelouses ont perdu leurs contours,
Ivraies et boutons d'or colonisent les sentiers.
Nulle part ailleurs, pourtant, je n'ai en un seul lieu
Vu tant de Rossignols ensemble ; aux lisières ou au for
Du bois, dans les fourrés, sur l'étendue des cimes,
Ils se répondent l'un l'autre, se provoquent par leurs chants,
Engagent une escarmouche, un combat capricieux,
Murmurent harmonieusement leurs fugues de « jug jug ».
Une Note plus grave dans ce concert dépasse les autres
Par sa douceur — ébranle l'air si suavement
Que gardât-on les yeux clos, l'on pourrait quasiment
Oublier qu'il fit nuit ! Sur les arbres aux petites
Feuilles à peines écloses que la lune mouille de rosée,
Par chance, vous les apercevrez, sur un rameau,
Le brillant, l'intense lumière brillante de leurs yeux
Luit cependant que nombre de vers luisants allument
Leur torche d'amour dans l'ombre.
   
-
   
And I know a grove
Of large extent, hard by a castle huge,
Which the great lord inhabits not ; and so
This grove is wild with tangling underwood,
And the trim walks are broken up, and grass,
Thin grass and king-cups grow within the paths.
But never elsewhere in one place I knew
So many Nightingales; and far and near,
In wood and thicket, over the wide grove,
They answer and provoke each other's songs —
With skirmish and capricious passagings,
And murmurs musical and swift jug jug,
And one low piping Sound more sweet than all —
Stirring the air with such a harmony,
That should you close your eyes, you might almost
Forget it was not day! On moonlight bushes,
Whose dewy leaflets are but half-disclosed,
You may perchance behold them on the twigs,
Their bright, bright eyes, their eyes both bright and full,
Glistening, while many a glow-worm in the shade
Lights up her love-torch.
   
The Nightingale – A Conversation Poem (extract), April 1798.
   
pp. 104-105
Commenter  J’apprécie          131
Koubla Khan
Xanadu

En Xanadu donc Koubla Khan
Se fit édifier un fastueux palais:
Là où le fleuve Alphée, aux eaux sacrées, allait,
Par de sombres abîmes à l’homme insondables,
Se précipiter dans une mer sans soleil.
Plus de vingt mille hectares de fertiles terres
Furent ainsi de tours et de hauts murs enclos:
Et c’étaient, irisés de sinueux ruisseaux,
Des jardins où croissait l’arbre porteur d’encens;
Et c’étaient des forêts de l’âge des collines,
De verdure encerclant les taches du soleil.

Voyez ! ce romantique et profond gouffre, ouvert
Au flanc du vert coteau, sous l’ombrage des cèdres!
Lieu sauvage ! le plus riche en enchantements
Qui jamais sous la lune en déclin fut hanté
Par femme lamentant pour le démon qu’elle aime!
Et de ce gouffre, avec un bouillonnant tumulte,
Comme si, lourdement, la terre haletait,
Par instants jaillissait, puissante, une fontaine :
Et, dans l’explosion du flot intermittent,
D’énormes rocs sautaient, rebondissante grêle,
Tel le grain sous les coups du fléau du batteur;
Et, parmi l’incessant fracas des rocs dansants,
Par instants jaillissait la rivière sacrée.
Sur cinq miles traçant de fantasques méandres
À travers bois et val se lançait l’eau sacrée
Qui, gagnant les abîmes à l’homme insondables,
En tumulte sombrait vers un océan mort;
Et Koubla entendit, au loin, dans ce tumulte,
De ses aïeux les voix prophétisant la guerre!
Du palais de plaisance l’ombre
Au milieu du courant sur les vagues flottait;
Là où l’on entendait les rumeurs confondues
De la fontaine et des abîmes.
Oui, c’était un miracle d’un rare dessein,
Ce palais au soleil sur l’abîme glacé!

La Demoiselle au Tympanon,
En songe, une fois, m’apparut:
C’était une vierge abyssine
Qui de son tympanon jouait
En chantant le Mont Abora.
Si, en moi, je pouvais revivre
Sa symphonie et sa chanson,
Je serais ravi en délices si profonds
Qu’avec musique grave et longue,
Certes, je bâtirais, dans les airs de ce palais:
Ce palais au soleil! ces abîmes de glace!
Alors tous ceux qui entendraient là les verraient,
Et tous de s’écrier: Arrière! arrière! arrière!
Ses yeux étincelants, ses longs cheveux flottants!
Trois fois, tissez un cercle autour de celui-ci,
Fermez les yeux, frappés d’une terreur sacrée:
Car il s’est nourri de miellée,
Et il a bu le lait, le lait de Paradis.
Commenter  J’apprécie          30
Dans une solitude extrême,
Sur l'Océan seul je restai,
Sans que Jésus prît en pitié
Le fond de mon âme déchirée.
Commenter  J’apprécie          320
Tombé le vent, tombées les voiles,
Une infinie tristesse s'étend,
Nos bouches seules brisent en parlant
Le grand silence de l'Océan.
Commenter  J’apprécie          210

Videos de Samuel Taylor Coleridge (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Samuel Taylor Coleridge
Le mensonge est à la base du contrat de lecture, c'est la « suspension consentie de lecture » théorisée par Coleridge. On croit donc momentanément que ce qu'on lit est vrai. Il y a donc dès le début une relation très ambiguë entre littérature, réalité et vérité.
Dans l'introduction de son recueil de nouvelles "A beau mentir qui vient de loin", François Garde écrit : "Oui, il existe une relation de proportionnalité inverse entre la Vérité et la Distance". le mensonge, pour l'écrivain, serait donc l'équivalent d'un voyage. Voyage physique, voyage intérieur, tout est possible grâce à l'imagination. François Garde invente même une formule mathématique pour théoriser le rapport entre voyage et mensonge : "La constante de la mappemonde". Il explique qu'elle sert "à mesurer le rapport entre distance et vérité".
De l'invention, à l'affabulation, il n'y a qu'un pas. Pourtant, pas de jugement moral dans le projet de Laurent Gaudé. Mentir permet aussi de dire le vrai, de percer la carapace de la réalité pour en révéler toute la vérité. C'est le rôle du "Grand Menteur" de l'écrivain.
Bien ou mal intentionné, raisonnable ou fou, manipulateur ou sincère, le menteur façonne le mensonge à l'aide de mots. Il construit un monde. Tout comme l'écrivain.
Olivia Gesbert invite à sa table ces deux écrivains, François Garde et Laurent Gaudé pour parler du mensonge à travers leurs derniers livres.
#mensonge #litterature #franceculture _____________
Prenez place à La Grande Table pour rencontrer d'autres personnalités qui font l'actualité de la culture, ici https://www.youtube.com/playlist?list=PLKpTasoeXDrpsBVAaqJ_sANguhpPukaiT ou sur le site https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-1ere-partie
Suivez France Culture sur : Facebook : https://fr-fr.facebook.com/franceculture Twitter : https://twitter.com/franceculture Instagram : https://www.instagram.com/franceculture
+ Lire la suite
Dans la catégorie : Poésie anglaiseVoir plus
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature anglaise et anglo-saxonne>Poésie anglaise (101)
autres livres classés : poésieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (132) Voir plus



Quiz Voir plus

Testez vos connaissances en poésie ! (niveau difficile)

Dans quelle ville Verlaine tira-t-il sur Rimbaud, le blessant légèrement au poignet ?

Paris
Marseille
Bruxelles
Londres

10 questions
1223 lecteurs ont répondu
Thèmes : poésie , poèmes , poètesCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..