Comment pourrait-on s'imaginer l'horreur de la guerre sans jamais y avoir été ?
Mais pouvoir enfermer l'indicible dans les mots serait-il en prévenir le retour ?
Pas sûr !
De
Jonathan Swift à
Farid Abdelouahab, innombrables sont les tenants de Littérature à l'avoir tenté.
Jean Rostand,
Benjamin Vallotton,
Romain Rolland,
Stefan Zweig, jean Souvenance,
Jean Giono,
Bernard Clavel ...
Maurice Genevoix et
Henri Barbusse, tous deux combattants de la première guerre mondiale, furent de ceux-là.
Ils donnèrent de la voix et enchevêtrèrent les plus puissants de leurs mots à la lutte pacifiste.
"La gloire et l'oubli" est un portrait croisé, celui de deux hommes touchés dans leurs chairs, de deux grands écrivains engagés.
J'ai longuement parcouru l'oeuvre de Barbusse que la magnifique biographie d'
Annette Vidal m'avait fait découvrir.
Je ne connaissais pas l'oeuvre de Genevoix de laquelle "
la boîte à pêche" et "l'aventure est en nous" m'avait éloigné.
"La gloire et l'oubli" m'y a renvoyé.
Car le livre de Jean-Yves le Naour est une de ces biographies, très explicative et éclairante, qui provoque l'envie.
On y découvre, on y apprend.
La lecture en est agréable, fluide et passionnante.
Alors, bien sûr, à l'heure de l'entrée au Panthéon de
Maurice Genevoix, un petit soupçon d'opportunisme littéraire peut flotter sur l'oeuvre de Jean-Yves le Naour.
Mais cela importe peu et ne préjuge pas de l'intérêt du livre.
On n'a pas si souvent l'occasion de traverser une aussi fine analyse littéraire.
Même si certains passages, certaines de ses lignes m'ont un peu bigorné.
Je ne pense pas, par exemple, que comme l'affirme
Jean-Yves le Naour en page 14, ce soit l'ombre du trop grand succès du Feu qui ait écrasé les oeuvres postérieures de Barbusse.
Il me semble à moi que son engagement politique par trop appuyé y ait jeté le trouble de l'oubli.
L'oubli ?
Quand à la postérité littéraire de
Maurice Genevoix présentée comme glorieuse, on pouvait lire, il y a quelques jours, dans "
la Croix" les lignes suivantes :
"À partir de quel moment, à quel tournant du siècle, la belle figure de
Maurice Genevoix (1890-1980) s'est-elle effacée dans l'esprit de ses contemporains qui n'en offrirent pas même le souvenir aux générations suivantes ?"
La gloire ?
Mais il semblerait aussi qu'en son temps
La Croix n'ait pas épargné Barbusse.
Il n'en demeure pas moins que le livre de Jean-Yves le Naour se révèle comme un ouvrage à lire impérativement, car il éclaire un pan de Littérature édifié par deux géants dans l'espoir d'enserrer l'indicible au creux de leurs mots ...