Dans une langue complexe et un enchevêtrement d'idées qu'il n'est pas toujours facile de démêler, Slovoj Zizek défend l'idée d'un projet européen qui sache conserver, organiser et transmettre aux générations futures mais aussi aux autres communautés humaines les valeurs essentielles qui élèvent la pensée humaine : la démocratie, les droits de l'homme, etc. Ce but n'est pas garanti, à la fois par la complexité de l'organisation d'un nouvel ensemble politique, postnational, mais également par la menace que la globalisation américaine, brutale et sans nuance, fait peser sur tout projet politique qui lui est contraire. Cette menace est double : qu'elle submerge l'autre projet politique européen, mais aussi que celui-ci reprenne à son compte les principes brutaux des visées américaines et, de ce fait, se pervertisse lui-même. La critique est essentielle, en Europe, pour conserver le principe politique de valeurs humanistes qu'elle porte en elle.
Malgré quelques réflexions sur la Slovénie et Vaclav Havel, les sources de Slavoj Zizek sont très françaises, "malheureusement", car les effets qu'auraient pu transmettre à sa pensée l'originalité de la culture de son pays de naissance s'en trouvent atténués.
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Deux noms exemplifient au mieux cette opposition entre universalisme et globalisation : la France et les USA. L'idéologie républicaine française est l'incarnation de l'universalisme moderne : d'une démocratie, fondée sur une notion universelle de citoyenneté. En totale opposition avec elle, les USA représentent une société globale, une société dans laquelle le marché global et le système légal servent de contenant (plutôt que le proverbial "melting pot") à la prolifération infinie d'identités minoritaires particulières. Le paradoxe est pourtant que les rôles respectifs de chacun semblent s'être inversés : la France, avec son universalisme républicain, est de plus en plus perçue comme un phénomène particulier menacé par le processus de globalisation, tandis que les USA, et leur multitude de groupes demandant la reconnaissance de leur identité particulière, spécifique, apparaissent de plus en plus comme le modèle "universel".
Lorsque Bush déclara [...], "La liberté n'est pas le don de l'Amérique aux autre nations, c'est le don de Dieu à toute l'humanité", sa formule en apparence modeste n'en dissimulait pas moins pour autant, dune façon on ne peut plus totalitaire, son contraire même [...] ceux qui s'opposent à la politique américaine rejettent eo ipso le plus noble des dons que Dieu fit à l'humanité.
On ne s'étonnera [...] pas qu'en février 2003 un officiel américain ait utilisé l'expression "révolution capitaliste" pour décrire ce que les Américains sont en train de faire : exporter leur révolution de par le monde.
La culture slovène est obsédée par l'idée que, bien qu'étant une petite nation, nous constituons une superpuissance culturelle : nous avons un certain charme, un trésor intime, dissimulé, de chef-d'oeuvre culturels attendant d'être connus du reste du monde.
Aujourd'hui, le principal obstacle au Nouvel Ordre Mondial que les Etats-Unis veulent imposer réside dans une Europe unie.