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Critiques sur le theme : guerre (9)
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Les abeilles grises

Au coeur du Donbass, Sergueïtch et Pachka sont les derniers habitants d'un village situé dans la "zone grise", sur la ligne de front où s'opposent, depuis 2014, l'armée ukrainienne et des séparatistes prorusses. Bien qu'"ennemis d'enfance", les deux cinquantenaires s'entraident pour survivre face au manque d'électricité et de nourriture, mais aussi pour surmonter leur solitude. le printemps arrivant, Sergueïtch installe ses six ruches à l'arrière de sa vieille voiture et part à la recherche d'un endroit éloigné des bombardements. Il s'arrête d'abord dans un village paisible du sud de l'Ukraine, puis va en Crimée rejoindre un ami tatar, lui aussi apiculteur. La joie de vivre de Sergueïtch ne faiblit pas, bien que la guerre le rattrape toujours, quand des checkpoints barrent sa route ou que des agents du FSB surveillent ses allées et venues.
À travers le portrait de cet homme solitaire et rêveur, Andreï Kourkov évoque une population ukrainienne prise dans une guerre civile qu'elle a du mal à comprendre. le conflit est vu, non pas du point de vue des soldats, mais de celui des civils qui continuent leur vie, malgré tout. Ce voyage, au fil des prairies où le héros pose ses ruches, devient par ailleurs un hymne à la nature et aux plaisirs simples, malgré une guerre latente.
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Le Chemin des âmes

Canada, 1919. Alors qu'il revient brisé de la guerre 14, le jeune Indien Xavier Bird retrouve sa tante Niska, une Indienne Cree qui continue de vivre dans la forêt selon les traditions et croyances de son peuple. A mesure que le canoé descend la rivière qui les ramène en Ontario, le roman nous plonge dans les souvenirs des deux personnages, alternant le récit que fait Niska à son neveu blessé pour le maintenir en vie et les cauchemars de Xavier qui le renvoient dans l'horreur des combats. Il repense à son enfance dans un pensionnat, contraint d'oublier sa culture et sa langue puis, sauvé par sa tante, à son apprentissage de la forêt et à son don pour la chasse. Il se remémore surtout son meilleur ami Elijah, excellent tireur, parti au front avec lui. Où est Elijah, que lui est-il arrivé ? On le découvre progressivement dans des passages terrifiants sur la vie des tranchées et la folie meurtrière qui s'empare des hommes. En tant qu'Indiens, les deux amis subissent les préjugés puis en tant qu'excellents snipers, l'admiration et la peur. Pourtant, Xavier, vite écoeuré par tant d'atrocités, comprend qu'il perd son ami qui lui est fasciné par les tueries. Formidable roman de guerre, réflexion sur la violence infligée aux tribus indiennes, l'histoire personnelle contée par Niska renvoie à la tragédie de tout un peuple, à l'assimilation forcée et à la disparition d'un mode de vie. Ses souvenirs évoquent une vie en harmonie avec la nature, des pouvoirs magiques et des esprits et soulignent l'importance des histoires qu'on raconte et qu'on transmet. A la fois très documenté sur la guerre et sur les conditions de vie des Indiens Cree, Joseph Boyden livre un roman magnifique qui rappelle le pouvoir qu'ont les histoires à apaiser les souffrances et à maintenir vivant le passé.
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Quand tu écouteras cette chanson

En juillet 2021, Lola Lafon passe une nuit dans l'Annexe du Musée Anne Frank, où la jeune-fille vécut dans la clandestinité de juillet 1942 à août 1944, enfermée avec sept autres personnes, dans l'appartement où elle écrira son « Journal ». Confrontée aux fantômes de sa propre famille victime de la Shoah, Lola Lafon livre dans « Quand tu écouteras cette chanson » le récit subtil et profond de cette expérience d'heures solitaires passées dans le silence et le vide de l'Annexe. Elle y questionne non seulement sa propre histoire et son rapport à la judéité, mais elle y retrace surtout le destin du Journal et la façon dont l'oeuvre de la jeune Anne Frank a été détournée, spoliée, censurée - réduite à tort à un simple témoignage ou édulcorée dans des comédies musicales.
Dans la continuité d'autres textes de l'autrice, « La petite communiste qui ne souriait jamais » en 2014, ou « Chavirer » en 2020, elle décortique avec justesse les mécanismes d'usurpation de voix d'adolescentes qui ont été confisquées, niées dans leur singularité et leur talent.
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Être sans destin

En 2005, dans son discours pour la réception de son prix Nobel, Imre Kertesz raconte que le directeur du mémorial de Buchenwald lui a récemment envoyé un document attestant de sa mort dans ce camp le 18 février 1945. Son principal roman, Etre sans destin, raconte l'enchaînement des événements qui conduit un jeune adolescent juif jusqu'au quasi anéantissement dans un camp nazi. le récit se déploie de manière linéaire avant et après la vie au camp, en passant par le jour où il est arrêté et le jour où, devenu totalement invalide, il croit être conduit vers l'extermination. C'est ce jour-là que les autorités du camp le déclareront mort. Il prendra progressivement conscience qu'une organisation secrète du camp l'a pris en charge et tente de le guérir.
Roman de l'absurde dont le style rappelle celui de l'Etranger de Camus, Etre sans destin nous plonge dans les mécanismes du totalitarisme qui changent un homme à peine constitué en un objet, un simple numéro qui n'a d'autre choix que de suivre les événements d'un point de vue extérieur, même quand ceux-ci, décidant de ses jours, le concernent au plus haut point. Beaucoup moins explicatif que Si c'est un homme de Primo Levi, ce roman pourra dérouter ceux qui cherchent à comprendre comment fonctionnaient les camps de la mort. Mais c'est leur absurdité, leur implacable inhumanité que l'on perçoit avec plus de force.
Lien : https://balises.bpi.fr/litte..
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L'Ukrainienne

En 1981, pour finir un de ses romans, Josef Winkler cherche le calme d'un coin isolé des montagnes de Carinthie, en Autriche. Il loue une chambre dans une ferme et se lie d'amitié avec sa logeuse, Nietotchka Vassilievna Iliachenko, une Ukrainienne qui lui raconte son histoire. Elle a été amenée de force en Carinthie pendant la Seconde Guerre mondiale et a été séparée de sa “Maty” qu'elle n'a jamais revue. Mais son récit remonte plus loin et nous fait entrevoir toutes les épreuves qu'ont subies les Ukrainiens en cette moitié de XXe siècle. La description de l'Holodomor, la grande famine de 1932-1933, est absolument bouleversante, surtout que l'on découvre que Nietotchka s'en est sortie d'extrême justesse.
Dans ce livre paru en Allemagne en 1983, Josef Winkler place l'écrivain à sa plus modeste position. Il se fait le simple scripteur d'une histoire qui ne lui appartient pas mais que cette présentation rend d'autant plus bouleversante. le lecteur est ainsi placé directement, par le biais du témoignage brut, dans la société paysanne de l'Ukraine des années 30 et de la Carinthie à la fin de la guerre. Un monde rude et sans pitié nous est ainsi révélé aujourd'hui.
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Maus : Intégrale

Sur quelle étagère de la bibliothèque du 20e siècle faut-il ranger Maus, l'immense livre d'Art Spiegelman, qui retrace l'histoire de la Shoah à travers celle de Vladek Spiegelman, le père de l'auteur rescapé de l'Europe de Hitler ? Maus a toute sa place aux côtés des principaux récits de l'holocauste, entre L'Espèce humaine de Robert Antelme ou Si c'est un homme de Primo Levi. Mais Maus est aussi un livre qui révolutionne la bande dessinée, qui pose les bases du "roman graphique" ; l'expression d'ailleurs commence à être utilisée à la fin des années 1970, à l'époque où Spiegelman dessine ses planches.
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La bombe (BD)

Pavé de 472 pages, La Bombe raconte la saga d'un des plus grands bouleversements de notre ère. de Hiroshima ravagé aux coulisses de l'invention de l'arme nucléaire en passant des mines d'uranium du Congo Belge au projet Manhattan, ce roman graphique s'impose comme un ouvrage de référence sur la course mondiale à la bombe atomique, une odyssée scientifique aussi haletante que terrifiante.

Extrêmement bien documenté, le scénario d'Alcante et Bollée personnifie l'énergie atomique qui irradie la fresque historique. Au dessin, le québécois Rodier réussit dans un style comics en noir et blanc une représentation singulière, d'une grande force graphique, dans laquelle l'énergie nucléaire semble submerger le récit et ses personnages, auxquels la Bombre rend toute leur humanité.
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Madeleine, résistante, tome 1 : La Rose dégoupi..

Parmi les temps forts du festival d'Angoulême 2023, nous avons été particulièrement sensibles à l'exposition "elle résiste, elles résistent " sur les femmes résistantes d'hier et d'aujourd'hui à travers le monde. Elle a été conçue autour de la bande dessinée "Madeleine, résistante" qui raconte la vie hors du commun de Madeleine Riffaud, résistante pendant la seconde guerre mondiale et tout au long de sa vie. Cette première partie d'une trilogie porte sur les années d'enfance, marquée par un accident avec un obus datant de la Première guerre mondiale, la maladie et les débuts de l'engagement dans un réseau de résistance dès 1942 .
Ce début de série est une réussite en tout point. le dessin, bien que classique, rend parfaitement l'atmosphère crépusculaire de l'époque grâce à l'utilisation du bleu nuit. Et surtout le scénario transmet avec force le témoignage d'une femme au courage exemplaire grâce à la place qu'elle occupe dans les commentaires en off et les dialogues. Alors tendez l'oreille et jetez un oeil à cette bande dessinée !
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Le train des enfants

Naples, en 1946. Amerigo a 8 ans ; il ne va plus à l'école, traîne dans les ruelles de sa ville natale et aide sa mère Antonietta, qui l'élève seule, en lui rapportant des tissus qu'elle pourra revendre. C'est alors qu'est lancée une campagne permettant aux enfants défavorisés du Sud de l'Italie de partir vers le Nord, afin de passer quelques mois dans un environnement plus agréable où ils seraient mieux nourris. Comme plusieurs de ses amis, Amerigo se retrouve donc dans un train, le conduisant vers Modène où il est accueilli par Derna, une militante communiste. Celle-ci, avec l'aide de la famille de sa cousine Rosa, va offrir au jeune garçon la chance d'aller à l'école et, plus encore, de faire de la musique. Mais au bout de quelques mois, fin du rêve : il doit retourner à Naples, auprès de sa mère biologique et retrouver la misère sociale et culturelle.

A travers les mots enfantins d'Amerigo, nous sommes plongés dans une histoire bouleversante sur le déracinement de jeunes enfants, déchirés entre l'amour pour leurs parents et l'affection pour leur famille d'adoption. Mais c'est également un roman émouvant d'un amour manqué entre un fils et sa mère. Ce livre permet aussi de découvrir une histoire méconnue, mais qui a marqué l'Italie de l'après-guerre : ces trains qui ont emmené dans le Nord de la péninsule des milliers d'enfants du Sud, à l'initiative du parti communiste.
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