Lalie est une petite fille fascinante.
Jolie comme un coeur, dotée un quotient intellectuel plus élevé que celui de celui d'
Audrey Fleurot dans HPI, elle est d'ailleurs elle aussi une comédienne née.
Née un 05 octobre, à l'instar de
Clive Barker et du front national, elle est aussi curieuse, c'est une grande lectrice, elle s'exprime très ( non ) particulièrement bien pour une enfant de l'âge de neuf ans. Elle entrera au collège l'année d'après ( ça ne se dit pas ) l'année prochaine.
"Lalie est la chouchoute, l'élève que tout le monde aime."
"Elle a toujours été une enfant facile, agréable et sage...
comme une image."
Son institutrice l'adore, ses amies également, seul Andy le cas social de sa classe émet quelques réserves. Il faut dire qu'elle prend un malin plaisir à le rabaisser constamment et qu'il est son souffre-douleur.
Cependant, il manque quelque chose à Lalie pour être parfaitement épanouie. Sa cellule familiale a explosé à cause de Ségolène la pute ( je rectifie ) la traînée. Son père Julien a trompé sa mère et a fini par quitter la maison pour vivre avec sa pute. Et quand ( ou lorsque ) il est parti, elle s'est retrouvée grande soeur à deux reprises. Sa mère a accouché de Charles le braillard inutile et son père est aussi devenu père du petit Malo, simultanément, mis au monde par Ségolène.
De quoi bouleverser tous les repères de cette enfant épanouie.
"D'un côté se trouve Lalie l'exemplaire, bien trop sage, si parfaite, et de l'autre, l'enfant sans filtre, pleine de rancoeurs et de souffrances."
Le lecteur se rendra rapidement compte que Lalie n'est pas le petit ange auquel nous aurions pu penser de prime abord.
Mais alors pas du tout.
Gare à tous ceux pour qui elle ne serait pas prioritaire. La présence de ses frères font basculer une partie de l'intérêt de ses parents vers d'autres qu'elle et ça, c'est inacceptable. Elle doit être le centre d'attention quoi qu'il arrive, même si elle doit donner un petit coup de pouce au destin pour bien se faire comprendre.
Et quel pied ( non, trop vulgaire ! ) quel plaisir de découvrir progressivement sous ce visage angélique une froide manipulatrice, parfaitement consciente de la gravité de ses actes et capable de calculer le plus souvent tout ce qu'ils vont impliquer.
Capable de chantage affectif, dénuée de toute émotion, elle sait brouiller les cartes et parvenir à ses fins.
"En fait, le plus souvent, je ne ressens rien. Absolument rien. Je ne suis jamais heureuse, déçue ou triste. "
Du haut de ses dix ans désormais, elle sait comment parvenir à ses fins et diviser pour mieux régner.
Une graine de star ( non ) une graine de psychopathe est en train de révéler ses talents.
Mention spéciale à la fin du roman, particulièrement réussie, où on monte d'un cran dans la perversité.
J'ai toujours beaucoup aimé les romans mettant en scène des enfants perturbés, égocentriques, prêts à tout dès leur plus jeune âge pour arriver à leurs fins. Ou simplement le cheminement d'une enfance erratique qui va les amener à reproduire des schémas qu'ils ont vécu petits. Comme l'explique
Magali Collet, si on ne parle pas de sociopathie avant l'âge de dix-huit ans, son origine remonte forcément plus loin, qu'il s'agisse d'un moment charnière de l'enfance, d'un vice d'éducation, ou d'une personnalité prédestinée au pire où la moindre excuse justifiera l'impardonnable.
Les romans de
Claire Favan à explorer cette voie sont assez nombreux. Fascinée par les tueurs en série, chacun de ses romans ou presque aborde l'enfance du serial killer, et toutes les failles qui ont pu le pousser à passer à l'acte.
Le seul qui peut se rapprocher de loin de
Comme une image serait
La chair de sa chair, tant la famille et l'attachement aux parents y jouent des rôles cruciaux. Mais les romans ne se ressemblent pas du tout.
En revanche, même si je sais de source sûre que
Magali Collet n'a pas lu
Flots de
Patrick Senécal avant la rédaction de son livre, les deux romans présentent beaucoup de similitudes et je n'ai jamais pu me détacher totalement de la pépite rédigée par le romancier québecois tant il y avait de détails troublants.
Ils ont tous les deux choisi pour héroïne une petite fille : Florence, huit ans pour
Senécal et Lalie, presque dix ans, pour Magali.
Ces personnages ne ressentent rien, sont totalement dépourvus d'émotions. Rien d'anormal en même temps au vu de leur tempérament un tantinet ( non ) particulièrement violent, physiquement et moralement.
Devant leur ambiguïté, leurs parents ou beaux-parents se disputeront quant à l'intervention nécessaire d'un psychologue. Mais évidemment quand on aime son enfant il est inconcevable d'envisager qu'il pourrait avoir un problème.
Les deux fillettes prennent des cours de piano. C'est anecdotique dans
Comme une image, beaucoup moins dans
Flots, mais c'est une coïncidence de plus.
Mais le plus étrange, ce sont les extraits suivants :
"Et là j'ai encore plus trouvé que ça ressemblait à de l'eau, comme des vagues." (
Patrick Senécal, quand les
flots submerge Florence quand elle est contrariée ou a des moments d'absence )
"Je sens la vague monter de plus en plus. Leur tour viendra", "Il faut qu'elle noie tout." (
Magali Collet, qui utilise également la métaphore de la marée montante, mais davantage pour illustrer la colère ou la haine de Lalie ).
Les similitudes s'arrêtent cependant là.
Les deux fillettes ne se ressemblent pas.
Lalie est calculatrice, experte en manipulation, et parfaitement consciente de ses actes. Florence chez
Senécal est incapable de distinguer le bien du mal et ses gestes de folie s'expliquent par les mensonges qu'on lui a raconté et son manque de confiance en l'adulte. Et elle regarde des films d'horreur avec sa mère ce que Lalie n'aurait certainement pas pu faire.
L'une s'en prend aux personnes qui lui font du mal, l'autre à ceux qui se mettent au travers ( ça n'est pas ça ) en travers de son chemin.
Le style est très différent,
Senécal est un auteur de thrillers dont l'horreur monte crescendo, et sans délaisser la psychologie celle-ci est travaillée différemment par Magali qui nous livre un portrait plus fin. L'horreur n'y est pas absente mais elle est plus fine, et si vous avez aimé
La cave aux poupées celui-ci passera tout seul !
Les motivations des deux héroïnes sont différentes également.
Enfin, le style des deux auteurs n'a rien en commun puisque l'auteur de Malphas a choisi pour forme le journal intime en s'efforçant d'écrire avec le langage d'une petite fille tandis que tout le monde a droit au chapitre dans
Comme une image et que se confrontent les avis de toute la famille autour de cette petite fille malicieuse, qui pense ( non ) qui réfléchit avec un vocabulaire bien plus adulte reflétant toute son intelligence, toute sa perfidie sous ses airs de ne pas y toucher.
Certaines scènes sont vraiment mémorables, j'ai adoré l'insolence de Lalie, sa façon d'inverser les rôles avec la psychologue, son égocentrisme ( "Comme si Charlot était plus important que mon évaluation !" ), et surtout sa facilité à anticiper les réactions des adultes de son entourage et d'avoir toujours une longueur d'avance.
J'ai vraiment beaucoup aimé cette nouvelle offrande de
Magali Collet, après une petite déception l'année dernière.
Son seul défaut au final est de m'avoir rappelé trop souvent le roman
Flots qui a été l'un des romans m'ayant cloué sur place en 2021, et même si les points communs sont le fruit du hasard il existent bel et bien et bien que
Comme une image soit machiavélique, il ne l'était pas autant que le roman du maître du genre.