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Albert Kohn (Traducteur)
EAN : 9782070388370
152 pages
Gallimard (13/01/1994)
3.72/5   45 notes
Résumé :
Dans ce cinquième volume de son autobiographie, Thomas Bernhard fait le récit de son enfance.
Né discrètement en Hollande où sa mère va cacher un accouchement hors mariage, il est bientôt recueilli par ses grands-parents qui vivent à Vienne. La crise économique des années trente force les grands-parents à s'établir dans un village aux environs de Salzbourg. L'enfant découvre avec ravissement la vie campagnarde.
Le grand-père, vieil anarchiste, doit al... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Né en 1931 à Heerlen aux Pays-Bas, Thomas Bernhard est le fils d'un cultivateur autrichien. Il fait ses études secondaires à Salzbourg et suit des cours de violon et de chant, puis de musicologie. Son premier recueil de poèmes paraît en 1957, suivi deux ans plus tard d'un livret de ballet. Il écrit des pièces dont plusieurs sont jouées dans de nombreux pays et en France à partir de 1960. Thomas Bernhard a obtenu en 1970 le prix Georg Büchner, la plus importante récompense littéraire d'Allemagne occidentale. Il est mort en 1989 à Gmunden (Autriche). Un Enfant, paru en 1982, vient d'être réédité.
Récit autobiographique, Un Enfant, retrace l'enfance de l'écrivain quand il avait une dizaine d'années et vient compléter et achever le cycle formé par L'Origine (1975), La Cave (1976), le Souffle (1978), le Froid (1981).
Thomas Bernhard nait discrètement aux Pays-Bas d'une mère célibataire qui ne reviendra à Vienne qu'en 1932 pour le confier d'abord à ses grands-parents. L'enfant passe ses premières années dans la campagne près de Salzbourg. L'influence de son grand-père, l'écrivain Johannes Freumbichler, le marquera toute sa vie. Sa mère se marie en 1936 et deux ans plus tard, ils partent vivre en Bavière, mais ce dépaysement ne lui convient pas et ses résultats scolaires deviennent catastrophiques, il vit alors l'école comme un enfer. Ses grands-parents s'installent dans la région en 1939. En 1942, il fait un séjour dans un centre d'éducation national-socialiste pour enfants en Thuringe, où il est maltraité et humilié. Il est placé dans un internat nazi à Salzbourg en 1943, avant de revenir en Bavière, en 1944, à cause des bombardements alliés.
Un bouquin assez court mais écrit sans chapitres, ni paragraphes, ni sauts de lignes, un bloc compact – une caractéristique du style de l'écrivain - qui enfile avec brio, techniquement parlant, les nombreux évènements qui marquent cette tranche de vie racontée sans que la chronologie soit toujours respectée. Quant à l'écriture, si elle est parfaitement maîtrisée, elle s'autorise de très longues phrases parfois assez tarabiscotées, « Egalement à l'écrivain qu'on appelait un écrivain célèbre, qui vivait à Henndorf, nous allâmes rendre visite. »
Le texte ne s'adresse qu'aux fans de l'écrivain, comme souvent (toujours ?) quand il s'agit d'autobiographie. Ceux-ci, ayant une connaissance de l'oeuvre de l'auteur, ne seront pas surpris de constater qu'on ne se marre pas beaucoup à le lire, ce n'est pas le genre de la maison ! C'est pourquoi je n'hésite pas à vous signaler ce mince trait d'humour, quasiment une pépite inespérée, « Au petit matin il apparut que j'avais confondu la porte de l'armoire à linge avec la porte des cabinets, les deux ayant été installées presque de façon semblable. » A la décharge de Thomas Bernhard il faut convenir qu'il n'a pas eu une vie facile non plus, entre une mère qui lui voue un amour/haine ponctué de coups de nerf de boeuf quand il fait des âneries (et il s'y entend), les vexations subies parce qu'il vient d'une famille pauvre ou parce qu'il pisse au lit, son jeune âge ne l'empêche pas de penser au suicide. Seules éclaircies, la compagnie du grand-père écrivain et anarchiste et les quelques succès en course à pied qui lui vaudront des honneurs ponctuels. On ne s'étonnera donc pas, plus tard, de trouver dans ses romans et textes, les traces de sa répugnance pour le monde, « l'abominable odeur d'un monde stupide où l'impuissance et la bassesse sont au pouvoir » et son pessimisme rampant.
Un bouquin que nous réserverons à un public très ciblé et concerné, j'en conviens.
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Cette autobiographie m'a été offerte par un ami, très cher, et je l'en remercie infiniment. Lui a le bonheur d'avoir lu ce chef d'oeuvre dans la langue d'origine. Ce qui n'est pas mon cas, mais j'ai pu entrevoir le travail remarquable du traducteur.
Ici, certes, il s'agit d'une autobiographie mais cela pourrait aussi bien être un court roman ou un court récit sur la brève vie d'un enfant né au début des années 30, dans une Autriche qui sera rapidement germanisée. D'ailleurs la famille et l'enfant émigrent en Allemagne juste avant la guerre.
Ce qui m'a bouleversée d'abord et enfin est l'écriture de Thomas Bernhard. Telle une pierre précieuse, lumineuse, colorée, légère, émouvante, changeante, cristalline, vivante, mouvante, solaire, lunaire, musicale bien sûr aussi, brutale si nécessaire, réaliste au besoin. Une émeraude non taillée mais déjà si fine, une aigue marine posée brute sur sa gangue et en jaillissant émerveillée.
Cette écriture est d'une jouissance inégalable.
L'histoire, de ce petit garçon, Thomas, est belle. Belle dans le tragique, belle dans l'amour maternel inexistant, belle dans la relation avec le grand-père maternel, alors magnifiée.
Triste dans les belles figures qui disparaissent au gré des maladies, de l'histoire, de la guerre.
Atroce dans ce que le jeune Thomas a dû subir comme humiliations, encore et encore. Sa mère le rejette car il est illégitime et il lui rappelle quotidiennement cet épisode, l'école le rejette car il a une culture qui n'est pas dans les "modes" (il a la culture du grand père), l'école, les camarades, le rejette car il est un pisse-au-lit...
et cetera.
Thomas Bernhard sait très bien, très précisément, rappeler toutes les discriminations, tous les cloisonnements, les rejets, les exclusions qui s'accompagnaient d'humiliations, de gestes vexatoires, de propos abjects, à l'adresse du "différent" du "pas comme les autres". Et le sublime, est qu'il a sublimé cette vie, ces épisodes, et il a fini de constater que peu de chose ne changeait. Les humiliations, les exclusions, les mises à l'index, existent toujours. Les conneries des guerres aussi.
J'aurais aimé que Thomas Bernhard vive encore un peu pour nous en dire plus. Pour nous mettre une petite lumière sur ce monde suffisant, absurde, que son grand-père lui présentait déjà. Et comme il le constate lorsqu'il retourne à cette maison horrible pour enfants à redresser, rien n'a changé.
Une sublime lecture, bouleversante, enfin d'une profonde humanité.

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Derrière le titre, Un enfant, se tient l'auteur. Il nous raconte sa petite enfance. Tout commence par un exploit, enfin ce qu'il considère comme un exploit, son parcours en vélo jusqu'à la maison de sa tante, parcourir plusieurs kilomètres dans le plus grand secret et sur un engin qu'il ne maîtrise pas. Bien qu'il n'arrive pas jusqu'à cette maison, il en est fier. Mais ce vélo n'est pas le sien, ce qui explique la colère de sa mère qui le punira en le battant avec un boyau de boeuf. Son grand-père, lui, le soutiendra, reconnaissant aussi la grandeur d'une telle expédition pour un enfant qui ne savait pas faire de vélo. Cette anecdote, comme tous les autres faits racontés, ont deux faces : celle d'un rejet de la part de sa mère et celle d'une glorification par son grand-père. Ces deux attitudes opposées et extrémistes s'illustrent dans tout le récit que Thomas Bernhard fait de son enfance. de sa naissance cachée parce qu'illégitime jusqu'à sa découverte de l'Allemagne nazie, nous suivons le petit homme dans son errance entre l'Autriche et l'Allemagne.
« Certains jours, par un certain vent d'est, avait coutume de dire mon grand-père, si l'on entend bien, on entend de son balcon les cloches de Moscou. Cette pensée me fascinait. Je n'entendis jamais les cloches de Moscou mais j'avais la certitude que de temps en temps, il les entendait. »
L'écriture de Thomas Bernhard est particulièrement sèche. Les descriptions de l'environnement tant humain que paysager écrasent l'enfant. L'école buissonnière devient alors une sorte de libération. Que ce soit la petite ville de Traunstein (Bavière), l'attitude des professeurs ou celles des autres enfants, tout semble le persécuter. Seule lumière dans ce décor, le grand père. Cet homme, ce héros, est au coeur de paragraphes bouleversants où l'auteur lui rend un hommage appuyé. Anarchiste et écrivain, il est un soutien infaillible de son petit fils. En revanche, sa mère, toujours marquée par la fuite du père de Thomas, rejette l'enfant, lui faisant porté tout le poids de la faute. Malgré la violence des gestes et des termes, l'amour filial s'insinue. L'auteur en est convenu. Sa mère l'aime mais c'est difficile. C'est peut-être cela le plus touchant, la capacité d'un enfant à s'ouvrir à des sentiments malgré les actions des autres. Ce livre de Thomas Bernhard est une sorte d'apprentissage de l'indescriptible dans une famille blessée, ce qui est renforcé par le contexte historique. le livre se termine en 1939.
La période et les souvenirs rattachés – la première fois qu'il entend le nom d'Hitler – pèsent sur le trouble intérieur de l'enfant. Alors que ces souvenirs ne sont pas racontés chronologiquement mais par le biais de transitions émotionnelles, un des fils conducteurs est sa découverte du suicide. Son grand-père lui en parle, l'explique. L'enfant témoigne de ses tentatives. L'auteur, en écrivant 50 ans après les faits, semble se replonger dans les origines de son malêtre. Cette confession est puissante et bouleversante par sa franchise.
Que je ne me sois pas jeté de la fenêtre du grenier ou pendu ou empoissonné avec les somnifères de ma mère cela tenait simplement au fait que je ne voulais pas causer à mon grand-père le chagrin d'avoir perdu son petit-fils par négligence. Ce n'est que par amour pour mon grand-père que je ne me suis pas tué dans mon enfance, c'eût été autrement pour moi une chose facile, tout compte fait le monde fut pour moi de nombreuses années un fardeau inhumain qui sans répit menaçait de m'écraser. Au dernier moment cependant je reculais effrayé et je me résignais à mon sort. »
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UN ENFANT de THOMAS BERNHARD
Autobiographique, c'est l'enfance de l'auteur de l'Autriche très jeune à l'Allemagne un peu plus âgé. On est dans les années 30, le national socialisme est en pleine ascension. Bernhard est élevé par sa mère, à coups de nerf de boeuf et son seul réconfort est son grand père. Un livre superbe malgré le désespoir perceptible à chaque page, un grand auteur qui est une découverte pour moi.
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Un livre accessible. qui donne l'occasion de toucher un peu du doigt, et sans complaisances, la réalité de l'atmosphère en Autriche et dans le sud de l'Allemagne à l'orée de la seconde guerre mondiale. le personne central a neuf ans au début de la guerre.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Mon grand-père avait passé en revue devant moi toutes les possibilités de faire s’effondrer le pont. Avec un explosif on peut tout anéantir, à condition qu’on le veuille. En théorie, chaque jour j’anéantis tout, comprends-tu ? disait-il. En théorie il était possible tous les jours et à tout instant désiré d’anéantir tout, de faire s’effondrer, d’effacer de la terre. Cette pensée, il la trouvait grandiose entre toutes. Moi-même je m’appropriai cette pensée et ma vie durant, je joue avec elle. Je tue quand je veux, je fais s’effondrer quand je veux, j’anéantis quand je veux. Mais la théorie est seulement de la théorie, disait mon grand-père, après quoi il allumait sa pipe.
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En été je me vois avec ma mère poussant à travers la ville un petit chariot à ridelles. Je ressentais cela comme une honte énorme. Nous étions en route pour les forêts avoisinantes et nous allions chercher les écorces d’arbres laissées par les bûcherons. Avec ces écorces nous nous chauffions en hiver. La moitié du grenier était pleine d’écorces qui là-haut étaient sèches en peu de temps. Le plus souvent je devais aller seul dans la forêt avec le chariot à ridelles. Je bourrais la charrette d’autant d’écorces que possible, il me fallait peiner pour la tirer. A partir de la hauteur de la caserne, je m’y étais assis et j’étais allé en ville en dirigeant le timon avec les jambes.
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Malheureusement, nous n’entendons toujours que les bavards bavarder, les autres se taisent parce qu’ils savent très bien qu’il n’y a pas beaucoup de choses à dire.
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Elle me corrigea mais elle ne m'éduqua pas.
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Videos de Thomas Bernhard (11) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Thomas Bernhard
Le 17 mars 2021 a disparu le comédien Jacques Frantz.
Sa voix de basse, puissante, vibrante et expressive, était particulièrement appréciée dans l'art du doublage. C'est tout naturellement que, en 2007, il a rejoint les grandes voix de « La Bibliothèque des voix » pour immortaliser dans un livre audio l'ancien acteur shakespearien désabusé dans la pièce de Thomas Bernhard « Simplement compliqué ».
Nous partageons cet extrait pour lui rendre un dernier hommage et adressons nos pensées émues à sa famille.
- - - Le texte imprimé de « Simplement compliqué » de Thomas Bernhard a paru chez L'Arche Éditeur, en 1988. Direction artistique : Michelle Muller.
+ Lire la suite
>Histoire, géographie, sciences auxiliaires de l'histoire>Biographie générale et généalogie>Biographie des écrivains (238)
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