Ha, détestable, il l'est…!
Combien a-t-il pu l'abhorrer, ce livre, vaudeville comme façade, trop pourrie pour tenir debout, faux roman de genre, vrai pique à l'âme, authentique pièce de bord, apparement accessoire, sûrement centrale, difficilement tenable, la morale transpirant par les hauts de fenêtres, un affrontement n'en dépassant pas vraiment le cadre.
Dosto s'est fait mal.
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Ce qui devrait importer le plus, forcément, c'est encore de parler de ses traductions.
Celle-ci par l'Age d'Homme, comme une évidence, pardonnant par là-même le réflexe corporatiste du bandeau « blurb », nous annonçant une redécouverte de la langue du maitre, que l'on aurait auparavant « flaubertisé », nous promettant une version sans artifices et pleine de répétitions, redondances signifiantes de ses obsessions, de lui-même.
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Matériaux préparatoires en annexe, tortueux chemins narratifs accouchant de la bonne version, cent fois explorée jusqu'à paraitre la bonne, pleine d'erreurs à mesure qu'elles s'écrivent, jusqu'à presque sonner juste.
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Une évidence, de la détestation, voire d'une certaine moquerie.
Longueur toute relative, délice d'exégète, vilain coup de canif ou méchante passe de rasoir, selon les goûts.
La spécialiste M.F. Kempf, lors de sa postface dont la longueur justifie le titre d'étude, se permet une lecture toute sémiotique de ce roman, tout en laissant de côté l'aspect peut-être le plus frappant de l'oeuvre du maitre, entièrement torturée d'interrogations morales, la pomme de la connaissance comme délice de salaud.
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Veltchaninov — personnage principal, soit le « flamboyant » en français — est de ceux qui tranchent des deux côtés, laissant le soin au lecteur de détester sa vivacité, de supporter ses faiblesses, ou bien d'abonder en son bon sens.
L'éternel mari en question, dont le redondant patronyme en rappelle d'autres en apparence aussi stupides — l'Akaki Akakiévitch de
Gogol en tête — ne cesse de surprendre, vivante interrogation dont on ne sait s'il faut l'inviter à un certain diner, ou bien si c'est nous-même qui mériterait d'en être l'attraction… cons que nous sommes à le tenir pour… bien qu'il en soit un fieffé spécimen…
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Cet affrontement entre deux personnages dostoïevskiens jusqu'à la moelle tient toutes ses promesses, jusqu'au bout…