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EAN : 9782709642439
415 pages
J.-C. Lattès (03/04/2013)
3.95/5   74 notes
Résumé :
Nino a neuf ans, fils d’un garde- civil, il habite la maison-caserne d’un petit village de la Sierra sud de Jaén et ne pourra jamais oublier le printemps 1947. Pepe le Portugais, un mystérieux et fascinant étranger qui vient juste de s’installer dans un moulin isolé, devient son ami et le modèle de l’homme qu’il aimerait être un jour. Tandis qu’ils passent les après-midi ensemble au bord de la rivière, Nino se fait la promesse de ne jamais être garde civil comme son... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
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Andalousie, 1947.
La guerre d'Espagne s'est achevée dans le sang il y a déjà huit ans mais à Fuensante de Martos, petit village de la Sierra Sud de Jaén, elle n'est pas terminée. Les guérilleros républicains, réfugiés dans la montagne, continuent le combat, tandis qu'au village, leurs mères, leurs femmes, leurs enfants sont continuellement harcelés par la Garde civile. A neuf ans, Nino est le fils d'un garde civil et vit dans la maison-caserne du village. Nino et sa famille sont du bon côté de la loi mais quand, la nuit venue, il entend les cris des prisonniers torturés par les policiers, il ne peut s'empêcher de se poser des questions. Cela fait belle lurette qu'il ne croit plus les histoires de sa grande soeur Dulce qui lui raconte que le bruit des coups et des hurlements provient de la télévision de la caserne. Sa rencontre avec Pépé el Portugués va confirmer ses pires soupçons. L'homme vit seul dans un moulin abandonné, il ne se mêle de rien mais il sait tout sur tout. Avec lui, Nino découvre l'amitié, le plaisir des parties de pêche et les grandes conversations sur la course du monde. Pépé devient son modèle. C'est lui aussi qui l'introduit auprès des femmes de la ferme des Rubio, toutes mères, filles, femmes ou veuves de rouges. Il va admirer leur courage, leur rage de vivre et oublier les horreurs du monde qui l'entoure dans les romans de Jules Verne qui lui prête doña Elena. Grâce à ces héros de papier, Nino se fait ses propres idées et se forge la conviction que jamais il ne sera garde civil.

Almudena Grandes continue son cycle ‘'Episodes d'une guerre interminable'' mais cette fois du côté des vainqueurs.
Mais sont-ils réellement des vainqueurs ces gardes civils au salaire misérable, obligés d'obéir aux ordres, de procéder à des arrestations arbitraires, de torturer, de risquer leur vie dans la montagne et d'appliquer la ‘'loi des fuyards'' qui consistait à laisser partir un prisonnier pour le tuer d'une balle dans le dos en prétextant une tentative d'évasion. Pourtant, dans ce petit village andalou, les gardes civils sont de braves hommes, bons pères et bons maris quand ils s'installent le soir, à la table de la cuisine, avec sur les épaules le poids des exactions commises au nom des lois iniques promulguées par Franco.
Almudena Grandes nous prouve encore une fois que rien n'est tout noir ou tout blanc, qu'il y avait des traîtres chez les Républicains, des Rouges chez les gardes civils, que derrière la paix retrouvée se cachait une guerre larvée. Elle raconte un pays gangréné par le fascisme, la violence, la loi du plus fort, l'ambiance délétère de l'Espagne franquiste où les vainqueurs se pavanent sur les corps de leurs ennemis réduits à rien.
Roman d'apprentissage, le lecteur de Jules Verne a le souffle des romans d'aventures dont le petit Nino admire les héros. On y croise des femmes au caractère bien trempé, des hommes lâches ou courageux, des femmes loyales, des hommes fidèles, des hommes héroïques devenus légendaires, de braves gens qui font ce qu'ils peuvent pour survivre à tout ça et le petit Nino qui cherche la vérité, la justice et qui va apprendre à faire ses propres choix.
Avec cette série, Almudena Grandes a entrepris un immense travail de mémoire, ambitieux et nécessaire. Ce deuxième volet raconte les premières années de la dictature à travers le regard d'un enfant vif et attachant qui expérimente le courage, la lâcheté, les semi-vérités, les mensonges nécessaires, la fidélité à un idéal. de la belle ouvrage, comme d'habitude.
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1947: "L' Espagne est devenue un pays d'assassins et d'assassinés."
Et être garde civil du Caudillo reste un statut de combattant, corvéable et mal payé.

La guerre civile a beau être finie, dans les villages de la Sierra Sud en Andalousie, la lutte larvée entre les républicains résistants et le pouvoir franquiste fait encore des morts, des disparitions, des emprisonnements, et des haines tenaces dans la population.
Dans les deux camps, la vie quotidienne est ingrate, dangereuse, voire misérable.
Dans les deux camps, il existe des salauds et des justes.

Nino est fils de garde civil. A neuf ans, il sait au moins une chose: jamais il ne fera ce métier!
Un métier qui lui rend la vie difficile hors des familles de la caserne.
Il s'attache d'autant plus à Pepe el Portugués que celui ci lui ouvre le monde de la lecture et de l'aventure avec les romans de Jules Verne. Des portes vers la connaissance et la maturité pour décoder le monde violent qui l'entoure, en comprendre les enjeux et les pièges, y perdre aussi la vision enfantine et confiante de l'enfance sur les êtres et les choses.

Almudena Grandes offre un troisième roman émouvant sur la Guerre Civile espagnole, comme un nouveau devoir de mémoire et de compréhension. Après le Coeur Glacé et Inès et la joie concernant le destin des "Rouges" républicains, donner la parole à l'autre "camp" est une justice légitime.
Ce livre d'apprentissage est porté par un souffle romanesque et historique moins attachant que les précédents mais il porte la douceur et l'innocence fracassée de la vision d'un enfant.
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Voilà un ouvrage dans lequel j'ai eu du mal à rentrer, comme on dit. Non pas parce qu'il est ennuyeux ou déplaisant à lire. C'est l'atmosphère générale qui met mal à l'aise. Dans le contexte du régime de Franco, en Espagne au cours des années 40, le climat instauré par la chape de plomb de cette dictature a quelque chose de perturbant.
Mais à la progression au fil de pages, je me suis convaincu que cette entrée en matière ingrate, faite de suspicion, d'inquiétude, de peur, sur une intrigue qui ne démarre pas, était nécessaire à la compréhension de l'intention de son auteure. Et si l'intrigue ne démarre pas, c'est qu'il n'y en a pas. L'intérêt de l'ouvrage est ailleurs. Il s'agit de restituer l'état d'esprit du jeune héros, Nino, dans sa prime jeunesse, à une époque tragique de l'histoire de l'Espagne.
Nino est né avec la guerre. Il n'a connu que cela. Il soupçonne bien que quelque chose cloche dans sa vie. Une forme d'anormalité dont il ne perçoit pas encore les raisons, ni les tenants et les aboutissants. Il habite la maison-caserne avec père et mère qui lui vouent pourtant un amour sincère. Seulement voilà, ce père est garde civil. Un peu malgré lui, parce qu'il faut bien vivre. Son quotidien est de traquer le « rouge », parfois de l'abattre, en forme d'exécution sommaire. Non par conviction, mais parce qu'il est garde civil justement et qu'on ne lui laisse pas le choix.
Nino est un jeune garçon qui s'ouvre au monde. Il subit les tiraillements des grandes personnes. Il a compris que les cris qu'il perçoit au travers des murs de sa chambre témoignent de drames, dans lesquels il aimerait bien ne pas savoir son père impliqué. Il protège sa petite soeur dont il partage l'inquiétude et l'incompréhension. En qualité d'aîné il cherche à la rassurer, à la préserver de la perversité qu'il commence à entrevoir dans cette vie.
Nino va trouver des échappatoires à la vie de caserne, d'abord auprès de son confident, Pepe el Portuguès, mais surtout auprès de Doña Elena qui l'ouvrira à la lecture, des romans de Jules Verne en particulier.
Ce qui m'a rebuté au début de cet ouvrage est aussi ce qui m'y a retenu par la suite. La vocation de cet ouvrage est de faire appréhender par le lecteur la perception du monde de ces temps maudits, au travers des yeux et du coeur d'un jeune garçon, devenu mature un peu trop vite. L'objectif est atteint.
Se replacer dans l'état d'esprit et le coeur d'un enfant dans la prime adolescence est un exercice difficile. Il faut gommer les acquits de l'expérience de sa vie d'adulte, sa connaissance de l'histoire. Il ne faut donc pas s'étonner si l'on trouve dans le récit quelques traces de maturité qui trahissent l'innocence affichée d'un coeur encore vierge des défauts de l'humanité.
Dans un contexte que l'histoire de l'Espagne se plairait à faire oublier, Almuneda Grandes n'en restitue pas moins de manière émouvante la soif de compréhension et d'apaisement de son jeune héros. C'est restitué avec d'autant plus de succès que c'est fait sans angélisme ni misérabilisme, avec la pudeur qui caractérise la mentalité espagnole.
Le lecteur de Jules Verne m'a fait faire connaissance avec son auteure, espagnole et contemporaine, Almudena Grandès. Il donne le goût d'explorer le reste de son oeuvre.

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Nino est un gamin d'une dizaine d'année de la fin des années 40 en Espagne. Si nous le rencontrions aujourd'hui en Espagne, il serait l'un de ces vieux de presque 80 ans....
Il grandit entre l'école, les montagnes andalouses de Jaén et la caserne où son père est garde-civil. Un père qui s'absente la nuit pour des missions de maintien de l'ordre, pour rechercher Cencerro, chef des rebelles, pour des arrestations de républicains...Des garde-civils qui, aussi, sur ordre tuent d'une balle dans le dos ceux qui ont été interrogés, en prétextant leur tentative d'évasion...
Nino est souvent réveillé, la nuit, par les cris des personnes torturées de l'autre coté des fines cloisons de la caserne.
Niino ne nous parle pas de ses copains et peu de son école. Il a cependant un ami, Pepe le Portuguais, personnage mystérieux et attachant, avec lequel il parcours la montagne, va à la pêche aux écrevisses...Un ami qui va lui permettre petit à petit de comprendre la situation de l'Espagne, de réfléchir, de choisir sa vie.
Trop petit pour devenir garde civil, Nino se prépare à devenir employé de bureau, il apprend la dactylographie auprès de femmes seules qui lui feront, également, découvrir Jules Verne et la littérature ..Des romans qui le font rêver, lui ouvrent les yeux sur le monde qui l'entoure, sur la situation de son pays, forgent son caractère, sa personnalité d'adolescent et de futur adulte.
Almudena Grandes nous fait découvrir la vie dans cette Espagne franquiste, la vie d'un village, le quotidien de ces espagnols qui en tuent d'autres parce que leur idéal est différent du leur, froidement, lâchement, pour un salaire de misère. Mais aussi ces Espagnols qui résistent, s'infiltrent parmi les tueurs pour mieux les combattre. Certes dès le début du livre, nous percevrons son attachement à la cause républicaine, mais elle s'emploiera à nous décrire sans manichéisme cette Espagne et ses habitants, les gardes civils tueurs mais aussi ceux qui seront embrigadés dans cette police politique, parce qu'il fallait bien manger, ceux qui sont fiers de ce qu'ils font et aussi ceux qui sont forcés d'exécuter des ordres contre leur gré..
Un regard sans complaisance sur cette Espagne et cette période, un regard vrai et dérangeant sur la lâcheté, la vérité, la justice, le courage individuel, les idéaux en politique....
C'était il y a quelques années. ceux qui ont vécu cette époque sont encore parmi nous, en paix. Heureusement.
La découverte d'un auteur, et aussi semble-t-il d'une suite littéraire...Mais on peut sans aucune difficulté prendre plaisir à cette lecture, en ignorant totalement les autres ouvrages de la série...
Un beau et dérangeant voyage dans le temps, que je poursuivrai sans doute prochainement

Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Antonino, neuf ans, est le fils d'un garde civil (gendarme). Il vit dans la Sierra andalouse, plus particulièrement dans la caserne où travaille son père. Nous sommes à la fin des années 40 et les montagnes de cet arrière-pays reculé abritent des maquisards républicains qui ont refusé de se rendre à la police militaire de Franco.
On peut d'ailleurs les comprendre : ceux qui l'ont fait ont été d'abord torturés puis fusillés contre le mur d'un cimetière, histoire d'être efficace... Quant à leurs proches, ils sont devenus des parias, privés de tout emploi public ou bien rémunéré. Ils vivent dans un dénuement tel qu'il ne leur reste souvent plus que la peau sur les os. Et ils savent qu'ils demeureront des intouchables durant des décennies, car les Alliés ont définitivement renoncé à libérer l'Espagne du joug franquiste. Comme disaient les Américains, no return on investment.
En tant que fils d'un représentant de l'ordre, Nino (diminutif d'Antonino) n'est pas riche pour autant, tant s'en faut. Mais, en plus, il doit supporter les hurlements des paysans torturés dans les cellules situées sont le logement de fonction accordé à son père. Des cris qui frôlent la folie et qui rendraient dépressif le gosse le plus équilibré du monde : « On ne pouvait pas continuer à vivre de cette façon, mais c'est ainsi que nous vivions. Et les parenthèses de calme, les mois sans coup de filet, sans arrestation, sans enterrement, n'avaient d'autre sens que l'attente... Qu'on entende à nouveau toquer à la porte d'à côté ou à sa propre porte.
- « On emmène votre mari faire sa déposition, Madame. Ne vous en faites pas, nous le ramenons tout de suite ». Et puis...
- (Au prisonnier) « Tu peux t'en aller, mais reste devant nous, qu'on puisse te voir partir ».
Et les coups de feu au petit matin, « car votre mari a tenté de s'enfuir, Madame, et nous n'avons pas eu d'autre solution que de lui tirer dessus... » Toujours les mêmes mots, toujours la même syntaxe bureaucratique de la terreur. le vocabulaire mesuré des fausses condoléances, la courtoisie tiède des assassins. »

Mais, rassurez-vous, tout le roman (basé sur des faits réels) n'est pas aussi noir. On assiste notamment à la rencontre entre Nino et un solide gaillard habitant en dessus du village nommé Pepe el Portugués. Cet ex-aventurier solitaire va lui servir de modèle de vie et lui permettre de sortir de l'atmosphère étouffante d'un village plombé par la terreur franquiste.
Et, le gosse ira de découverte en découverte que ce soit sur le plan intellectuel, politique ou amoureux. Une très jolie histoire qui amène avec elle des émotions si belles qu'on les dirait réelles. Impossible de lâcher le bouquin avant le dénouement !
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Voilà comment était le monde, mon monde, celui où j'avais grandi où j'avais vécu pendant neuf ans, un marécage où les individus courageux loyaux et intelligents devaient cesser de l'être s' ils ne voulaient pas mourir jeunes et où les autorités s' appuyaient sur les trahisons, où les traitres l'étaient pour de l'argent, où les héros vivaient comme des animaux, tandis que les peureux, les mouchards, les analphabètes mangeaient chaud et dormaient dans leur lit, protégés par le respect des honnêtes gens.
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Le coup d'Etat de 1936 ne triompha que dans les provinces où la garde civile se rangea du côté de la rébellion franquiste. Dans les endroits où ses chefs demeurèrent loyaux (à la République), une répression féroce se déchaîna après la fin de la guerre (civile), qui bénéficierait ensuite d'une couverture légale... Inspirée par la volonté expresse de Francisco Franco, la loi du 12 1940 organisa l'épuration de tous les membres des forces armées qui avaient montré le moindre signe de sympathie, ou même de neutralité, envers les institutions ou les partis républicains avant le soulèvement de 1936, même s'ils avaient ensuite lutté dans le camp des rebelles franquistes. Cette loi dite "des responsabilités politiques" n'eut pas seulement des conséquences pénales, qui allèrent des expulsions pures et simples au mur des exécutions, en passant par la prison et les sanctions économiques. Ainsi, au nom de cette loi, on refusa aux veuves et aux orphelins des gardes civils, fusillés ou emprisonnés, la pension qui leur revenait après le départ forcé du chef de famille quand bien même celui-ci avait cotisé pendant des années à la mutuelle de l'institution.
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Chez les gens courageux, la peur n'est que la prise de conscience du danger, ajouta-t-elle, mais chez les lâches, c'est bien plus qu'une absence de courage. La peur exclut également la dignité, la générosité, le sentiment de justice, et parvient même à entraver l'intelligence, car elle altère la perception de la réalité et allonge les ombres de toute chose. Les gens lâches ont peur y compris d'eux-mêmes...
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...mon père qui était un assassin, un assassin et un brave homme, un assassin et un malheureux, un assassin et sa propre victime, un assassin sans la moindre trace de l'homme heureux qui souriait sur la vieille photographie en noir et blanc du bon temps qui ne reviendrait jamais.
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C'était une époque de sourires hypocrites et de silences de pierre, une époque de sauve-qui-peut général, pendant laquelle se lever le matin était un triomphe et se recoucher le soir sain et sauf un exploi du même genre.
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Bande annonce VO de la serie "Les patients du Docteur Garcia", adaptation du roman d'Almudena Grandes
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