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EAN : 9782869598867
175 pages
Arléa (11/02/2010)
4.06/5   24 notes
Résumé :

Le succès de son reportage sur le bagne de Cayenne (Au bagne) décide Albert Londres à s'intéresser à d'autres geôles de la République. Il s'agit cette fois d'enquêter sur les bagnes militaires, situés pour la plupart en Afrique du Nord et dépendant du ministère de la Guerre. Malgré l'hostilité de la hiérarchie militaire, le grand reporter sillonne le Rif, recueillant les doléances ... >Voir plus
Que lire après Dante n'avait rien vu : BiribiVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Après le roman autobiographique Biribi de Georges Darien, le reportage de Jacques Dhur et les articles de la Revue blanche (disponibles sur Wikisource), c'est la quatrième oeuvre relative aux pénitenciers militaires français que je lis.
Si les anecdotes peuvent être différentes (surtout que ce reportage date de 1924, soit 25 ans après la Revue Blanche, 20 ans après Jacques Dhur, 30 ans après Darien), ce témoignage raconte cependant globalement la même chose que ses prédécesseurs, et l'on reste ébaubi devant le niveau de corruption et de sadisme développé par les garde-chiourmes militaires, qui dépasse bien souvent (triste record) celui des gardiens du bagne de Guyane, notamment en ce qui concerne la violence physique et les châtiments corporels.
La grosse différence entre le témoignage de Londres et les précédents, c'est que celui-ci a eu un réel effet, en raison de la notoriété du journaliste, et devait bientôt sonner le glas de ce système ahurissant (il n'en fut pas de même du bagne de Guyane qui, malgré les articles accablants de Londres, devait survivre bien plus longtemps.)
Le style de Londres est à peine daté, toujours très incisif, parvenant à frapper l'esprit et à aller à l'essentiel en peu de mots.
(Livre du domaine public disponible en accès libre sur Wikisource.)
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Lu en édition numérique du domaine public.
Biribi!
Cette honte de la justice militaire, que dissèque et dénonce Albert Londres.
Biribi;
Georges Darien y était allé comme comdamné du Conseil de guerre, en était revenu et avait témoigné dans un livre terrifiant.... Qui n'avait rencontré ni succès ni écho à l'époque de sa parution!
Biribi!
Chanté par Aristide Bruant, en couplets funèbres.
Biribi!
Sensé relever les soldats égarés, mais qui précipite des hommes dans la haine, à la merci de sous-officiers sadiques et tout-puissants.
Où ces réprouvés, sous la chiourme de leurs gardiens dégénérés, en reprennent pour cinq ans, dix ans... dans un cauchemar de malheur sans fin.
Biribi!
Que ce reportage d' Albert Londres, journaliste moderne et pragmatique autant que précis, va aider à réformer.

Albert Londres rencontre ces hommes brisés, dont certains se mutilent pour échapper à leurs tortionnaires... Dont quelques-uns rêvent du bagne de Cayenne comme d'un eldorado comparé à Biribi (!).

Le récit est nerveux, parfois insoutenable. Certains passage en sont d'un tragique burlesque, tel celui où un homme s'enfuit déguisé en curé.

Il fallait que quelqu'un de tenace et de courageux, d'impartial s' y colle et aille dans ces fins du monde de désert et d'épines, dans ces détachements de Biribi, pour mettre fin à cette abomination.
Ce fut Albert Londres, et grâce lui en soit rendu.
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Albert Londres ne cherchait pas le scoop. Les terrains de ses reportages n'étaient pas ceux qui faisaient habituellement les choux gras de la presse. Bien au contraire, il traînait dans les zones d'ombre, dans les lieux perdus de l'histoire. Dans "Dante n'avait rien vu, Biribi", c'est aux pénitenciers militaires des colonies nord-africaines qu'il s'attaque. Des territoires suffisamment éloignés de la métropole et des centres de décisions pour vivre à l'abri de tout regard. On pouvait y pratiquer la torture et le crime en toute impunité. Ils étaient l'oeuvre surtout des petits grades, les sergents, les pires de tous, parce qu'ils étaient occupés par des abrutis de première classe. Pour eux, s'acharner sur un prisonnier à coup de fouet et de bottes, ce n'était pas une indignité, mais un moyen de justifier leur rôle.
Les exactions énumérées par Londres pourraient créer le vertige, mais le reporter, à la manière de Voltaire, avait le don de la formule ironique. Comme l'indique le titre de l'ouvrage, Londres prenait continuellement de la distance avec les faits pour mieux les dénoncer et dévoiler leur atrocité. Je me suis même surpris parfois à sourire à certains passages. C'était peut-être cynique de ma part, mais le rire n'est-il pas un moyen d'accepter une réalité souvent cruelle et douloureuse ?
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Connaissant vaguement la plume et le style inimitable d'Albert Londres (volontiers cynique, un peu gouailleur, ne cherchant pas le sensationnalisme mais plutôt à alerter sur ce que l'on côtoie sans le voir), je me suis lancée dans cette exploration des bas-fonds de l'âme humaine. Car il y a la prison. Il y a l'armée. Et il y a l'horreur : les pénitenciers militaires d'Afrique du Nord. Dans les années 20, on y reléguait tous les repris de justice dont on ne savait que faire et qui devaient encore faire leur service militaire. Casser des cailloux, certes, mais aussi et surtout supporter les humiliations et violences commises par les sergents. Et endurer des peines prononcées à la louche, souvent pour rien.

Un reportage de terrain ahurissant, qui dépeint bien une époque je pense et montre ce qu'était grand reporter signifiait alors. Mais aussi une réflexion plus large sur la société et ses façons de punir, sur la culpabilité et la rédemption.
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L'horreur sans nom des bagnes militaires d'Afrique du Nord, ces règnes de l'absurde, sous la plume d'Albert Londres. Cette plume est celle d'un reporter, homme de lettres engagé dans la lutte contre les ignominies que les hommes font subir à d'autres hommes, protégés par la loi mais se moquant éperdument d'elle. Un travail de fond qui fait prendre toute la mesure de la barbarie humaine.
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Citations et extraits (39) Voir plus Ajouter une citation
Ils présentent immédiatement la main à plat. Cela veut dire : « Ne tirez pas, je ne tirerai pas. » En vitesse, je leur présente les deux mains, je regrette même à ce moment qu'elles ne soient pas plus larges. Je leur crie : « Trick, Tasfilazet, meziane ? » Je savais la phrase depuis peu de temps : vous pensez si je m'en servais. Cela signifie, paraît-il : « Est-ce le bon chemin pour Tasfilazet ? » Mais ce beau langage était de l'arabe, et les fantômes étaient Berbères. C'est à vous dégoûter de savoir les langues ! Il était une heure et quart. Cette fois, il n'y avait plus de doute, nous roulions en pleine dissidence. Ce crétin de dernier manteau bleu aurait tout de même pu nous prévenir.
Nous retournons la voiture. Et si vous n'avez pas vu courir un sloughi, le plus rapide des lévriers, vous n'avez aucune idée de la façon dont filait votre pèlerin. Évidemment, ce que nous n'avions pu découvrir de l'autre côté, nous l'apercevions maintenant. Et voici le bordj D'ailleurs, on nous fait des signes comme avec un grand drapeau. La vie est belle et mes oreilles me sont chères !
Page 76
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Savez-vous ce qu'il faudrait dans les pénitenciers ?
Il rit comme pour marquer d'avance qu'il allait dire une chose énorme.
-Des curés.
Par curé, il n'entendait pas un prêtre qui viendrait leur faire le catéchisme. Curé ! Rabbin ! Pasteur ! Ils ne sont pas fixés sur la confession. En soutane ou en pantalon, ils n'y regarderaient pas de si près. Ce qui n'est pas leu foi qui a soif. S'ils disent curé c'est pour tout résumer d'un mot. Ils voudraient un homme qui fût parmi eux, non par métier, mais par bienveillance. Lorsqu'une bonne pensée naît dans l''esprit ou le cœur d'un détenu, ce détenu ne trouve personne à qui la confier. Tout élan vers le bien est étouffé par de gros rires. De mauvais meneurs, tant que vous en voudrez ; de bons meneurs, aucun ! Me désignant un travailleur, un sergent me dit : « C'est le moraliste ! » et à ce mot une bonne rigolade jaillit de son nombril et inonda tout son corps.
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— Monsieur, me dit un fonctionnaire, à Tunis, je ne sais pas ce qui se passe dans les pénitenciers militaires, mais je vais vous dire une histoire vraie. Vous avez vu le garçon qui vous a servi. Je l'ai depuis trois ans chez moi. C'est un brave garçon. Voilà quatre mois, j'invite un officier à dîner.
— Tu peux nous servir, dis-je à Etienne.
Mais Etienne disparaît. Nous attendons. Je sonne. Etienne ne vient pas. Je vais à la cuisine:
— Eh bien! qu'est-ce que tu fais?
— Monsieur, dit-il, tout hors de lui, je ne puis pas vous servir, je m'en vais!
— Qu'est-ce que tu as?
— Y m'en ont trop fait! Y m'en ont trop fait!
— Qui?
— Vous savez bien que j'ai été au pénitencier.
— Oui.
— J'peux plus les voir, plus les voir!
— Tu connais le capitaine?
— Non, pas lui, tous!
Il se mit à pleurer. Puis, avec une cuiller, il frappait la table, à grands coups, comme pour l’assassiner, et dans ses larmes, il répétait:
— Y m'en ont trop fait, m'sieur! trop fait!
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Les seules troupes blanches qui, au Maroc, vont au baroud (à la bataille), sont les joyeux et la légion étrangère. Quand l'hiver met un terme aux combats, il ne s'agit pas de remonter le sac, de tourner le dos et de descendre dans la plaine faire le lézard au soleil. Il faut garder le terrain conquis, d'où, le printemps revenu, on partira pour un nouveau saut chez les Berbères.
Tout ce que j'essaye de vous expliquer là tient d'ailleurs beaucoup mieux en une phrase connue : « on réduit la tache de Taza. » Une tache est toujours une mauvaise affaire. On croit l'avoir effacée, elle reparaît ! Il convient de ne pas la quitter de l’œil. C'est pourquoi, en plein massif de l'Atlas, de distance en distance, veillent par petits groupes les chasseurs des bataillons d'infanterie légère d'Afrique : les joyeux.
Page 72
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La vie des sous-officiers de la justice militaire n'est pas folâtre, c'est entendu ; les psychologistes pourraient peut-être pousser là une étude de l'homme pris dans ce qui lui reste de profondément animal. Les actes cruels qui marquent la carrière de beaucoup de sergents surveillants sont moins le résultat d'une décision de l'esprit que la conséquence naturelle d'une brutalité qui se croit des droits et se donne des devoirs.
Page 47
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Animatrices : - Sarah-Lou Lepers, journaliste et réalisatrice de podcasts - Yasmine Benhachoum, ambassadrice du pass Culture
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>Sciences sociales>Problèmes et services sociaux. Associations>Etablissements pénitentiaires (54)
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