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EAN : 9782330000233
530 pages
Actes Sud (07/09/2011)
4.5/5   12 notes
Résumé :
En Russie, depuis deux cents ans, chaque écrivain, chaque courant, chaque époque peut se retrouver dans Pouchkine, car celui-ci est un miroir, le lieu de la reconnaissance de toute personne de langue maternelle russe.
André Markowicz propose dans cet ouvrage de découvrir en quoi la conversation que Pouchkine a établie par textes interposés avec les poètes de sa génération a durablement marqué la littérature et la pensée russes jusqu’à nos jours. Cet ouvrage r... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Les illusions perdues

Je vais être honnête, lorsque j'ai commandé ce livre, il y a déjà pas mal de temps, je pensais lire une biographie de l'auteur chéri de la Russie. Lorsque le livre est arrivé, j'ai vu qu'en fait il s'agissait de poèmes de Pouchkine et de ses amis et je l'ai laissé prendre la poussière sur mes étagères.

À la faveur de ma nouvelle passion pour la poésie, j'ai sorti cet ouvrage de ma PAL et lui ait, enfin,donné sa chance.

Résultat des courses ? Un immense coup de coeur

Ce livre est tout simplement magnifique.

André Markowicz, que l'on ne présente plus, traducteur génial notamment de Dostoïevski, décide de mettre en avant une génération. Celle de poètes de génie, dont le plus connu d'entre eux, Pouchkine.

L'ouvrage se découpe en neuf parties chronologiques. Au début de chacune d'entre elles, l'auteur nous donne une petite présentation de la vie des poètes, puis s'en suit une série de poèmes écrits à la période concernée.

L'on suit des jeunes hommes unis par une solide amitié. Tous, déjà, sous l'influence de la Muse. Certains écrivent sur la nature, l'amour et d'autres rêvent d'une liberté politique bien chimérique dans cette Russie du dix-neuvième siècle.

C'est ainsi que plusieurs des membres du groupe seront impliqués dans le fameux coup d'état raté des décembristes du 14 décembre 1825. Certains seront exécutés, d'autres emprisonnés ou exilés.

Pour les survivants, la surveillance du pouvoir et l'intransigeance de la censure seront accrues.

Les poètes ne sont plus réunis par une fraternité réconfortante, ils sont séparés pour affronter les vicissitudes du destin, les dettes qui empêchent de se consacrer à la vie poétique, le succès incertain. Les poèmes se font plus sombres…

Et c'est la grande force de ce livre car certes il s'agit de textes écrits dans un contexte particulier mais il est universel, il raconte les idéaux de la jeunesse qui se brisent face aux réalités du monde.

J'ai été émerveillée par ce livre, j'ai découvert une foule de poèmes et de poètes qui m'accompagneront pour longtemps.

Alors, n'hésitez pas et laissez-vous tenter !
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Une lecture des poèmes de Pouchkine dans l'émission de Guillaume Gallienne « ça peut pas faire de mal » avait titillé ma curiosité.
le titre flamboyant de ce livre le soleil d'Alexandre était fait pour m'attirer.
La poésie de Pouchkine, celle que tous les russes se récitent sans se lasser était déjà d'un intérêt certain mais sous la plume d'André Markowicz c'est beaucoup plus que cela.

En 1825 le 14 décembre, la tentative désespérée de 200 aristocrates d'imposer une constitution au Tsar pour supprimer l'ignoble servage et mettre à bas l'absolutisme va de finir dans le sang, les procès, des exécutions, le bagne en Sibérie pour tous ces hommes. « Une génération brisée » dit André Markowicz et c'est cette génération que l'on entend dans ce livre.
« Organisé autour de la voix de Pouchkine » ce poète qui est selon Tchekhov « comme l'air que l'on respire » le livre est une vaste fresque de la vie culturelle, intellectuelle, poétique ce cette Russie sous le joug.
Elle commence avec Radichtchev condamné pour ses écrits par la Grande Catherine et qui revenu du bagne finira pas se suicider, il a laissé une élégie « La Mélancolie passion des coeurs purs qu'un sort injuste oppresse »
En avançant et en déroulant la vie de Pouchkine ( 1802-1841) la liste des noms amis prend de l'ampleur, pour la plupart inconnus faute de traduction jusqu'à aujourd'hui.
Joukovski, Radichtchev, Batiouchkov, Delvig, Baratynski, Viazemsky..............
Pouchkine est le fil lumineux qui éclaire cette époque. Il est le centre des conversations qu'entretiennent tous ces hommes, dans leurs rencontres mais plus encore dans leurs oeuvres.
Ils chantent leur jeunesse, la guerre contre Napoléon, les amis morts. Ils traduisent la poésie étrangère. Ils sont surveillés, épiés, traqués parfois. Tous subiront peu ou prou le terrible poids de la répression tsariste, écoutez Pouchkine dans un magnifique A Ovide dire la souffrance de l'exil, de la condamnation inique et l'espoir du pardon :


.. l'isolement, l'abandon et l'oubli,
Tu n'entends plus les sons de ta langue natale,
Vers tes lointains amis ta complainte s'exhale
(...) Adoucissez la main qui châtie même juste....


Ils ont une même vision du destin de la Russie, de la littérature, un même amour de la poésie et malgré les dangers, les deuils, les séparations

« Tous ces hommes, tout au long de leur vie, se fréquentent, échanges, s'écrivent, écrivent en fonction les uns des autres, entretiennent une conversation destinée à devenir la base même de la culture russe »

L'admiration d'André Markowicz pour Pouchkine transparaît tout au long des pages, cet exceptionnel traducteur réalise ici un pari impossible, rassembler et traduire tous ces poètes inconnus en France, nous donner à comprendre cette période bouillonnante.
Les pages de poèmes, d'apports biographiques alternent, Pouchkine au Caucase par exemple :

« Si Pouchkine n'avait écrit, de toute sa vie, que ce qu'il a écrit au cours de ces trois mois d'isolement fiévreux, il serait déjà l'écrivain le plus important de son siècle en Russie » dit André Markowicz !
Ce « Soleil d'Alexandre » titre que Markowicz emprunte à un autre poète : Ossip Mandelstam, brille de mille feux. La parole au poète pour terminer :


....N'avoir pour maître que soi seul ; être en repos, devoir
Ne contenter que soi ; pour quelque honneur infâme
Ne rien devoir courber, le cou, les rêves, l'âme ;
Selon sa fantaisie, vagabonder, errer,
Admirer la nature en sa splendeur sacrée,
Et frissonner de joie, plein de larmes sereines,
Devant la création de la pensée humaine........
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Cet Alexandre du titre, c'est POUCHKINE (1799-1837), considéré comme le plus grand poète russe ayant jamais existé. Mais ne nous y trompons pas, ce livre n'est pas une biographie de POUCHKINE, il est plutôt une anthologie de la poésie russe entre 1802 et 1841, et même un peu avant et un peu après. Ce volume est assez fascinant par son contenu : outre les plus grands poètes russes de la première partie du XIXe siècle et la présentation de certains de leurs poèmes jusqu'alors inédits, c'est aussi l'occasion pour André MARKOWICZ de balayer la période politique en Russie et revenir sur le sort destiné à des poètes jugés gênants par le pouvoir.

Par ordre d'apparition : Alexandre RADICHTCHEV, Nikolaï KARMAZINE, Andreï TOURGUENIEV, Vassili JOUKOVSKI, Nikolaï GNEDITCH, Konstantin BATIOUCHKOV, Piotr VIAZEMSKI, Anton DELVIG, Alexandre POUCHKINE, Wilhelm KÜCHELBECKER, Mikhaïl MILONOV, Evguéni BARATYNSKI, Kondraty RYLEÏEV, Alexandre GRIBOÏEDOV, Fiodor TIOUTTCHEV, Alexandre ODOÏEVSKI, Gavriil BATENKOV, Dmitri VENEVITINOV, Mikhaïl LERMONTOV. Environ un demi-siècle de poèmes, d'engagements, de rivalités, d'interdictions, de censure, il serait fort peu judicieux de vouloir résumer l'énormité de ce travail titanesque de près de 600 pages.

Pour le titre « le soleil d'Alexandre », l'expression fut en fait utilisée au XXe siècle par Ossip MANDELSTAM pour désigner POUCHKINE. Il paraît évident que MARKOWICZ a voulu établir une passerelle entre le XIXe et le XXe siècle concernant le destin des poètes (voir à ce propos la fin de vie de MANDELSTAM). Au XIXe, le chemin tortueux est balisé par les plus grands noms de la poésie russe, par des exils, enfermements, suicides, folies, abus, interdictions de publier. On n'en est qu'aux prémices, mais déjà se profile l'extrême acharnement déclenché plus tard, notamment lors des purges de 1937.

Mais n'allons pas trop vite ni trop loin. L'auteur rappelle l'épisode décembriste de 1825 avec les condamnations à mort et les déportations qui ont beaucoup joué sur la poésie russe. Déjà la fin du XVIIIe a connu son lot de surprises, avec par exemple l'interdiction pour RADICHTCHEV de publier à partir de 1790 (il sera déporté pendant 10 ans et se suicidera en 1802).

Les poèmes représentent tout de même l'essentiel de ce recueil, avec des pages de tous les poètes cités ci-dessus et surtout avec des poèmes traduits par MARKOWICZ lui-même, ce MARKOWICZ déjà coupable de flamboyantes traductions de l'intégrale de DOSTOÏEVSKI (rien que ça) mais aussi de l'intégrale du théâtre de TCHEKHOV (avec son amie Françoise MORVAN) et de tant d'autres russes, dont POUCHKINE bien sûr (mon petit doigt me dit qu'il est actuellement, et entre autres, sur une nouvelle traduction du « Maître et Marguerite » de BOULGAKOV, mais c'est une autre histoire). Recentrons-nous sur le présent livre. Poèmes inédits donc, certains d'une grande beauté, poèmes d'amour, mais aussi politiques. Mais MARKOWICZ ne les propose pas sans un ordre très strict : chronologiquement, d'environ 1800 à 1850. Quelques poètes étant présentés sur plusieurs décennies, s'ils ont eu la chance de tenir la distance (ils ne sont pas très nombreux).

Dans ce volume, outre les poèmes et l'Histoire russe, notamment politique, vous découvrirez des croquis de dessins réalisés par les poètes eux-mêmes - parfois des autoportraits. MARKOWICZ nous offre même en fin de volume un petit résumé par le biais de brèves biographies des auteurs cités, mais aussi une courte mais très jolie chronologie de l'Histoire russe dans la période qui nous concerne présentement. Ce bouquin est une vraie leçon de recherche historique, de travail extraordinairement scrupuleux et minutieux, d'une organisation parfaite, et d'humilité. MARKOWICZ est l'un de ces personnages qui atterrissent de nulle part et font le boulot comme dix, qui s'épuisent mais ne veulent surtout pas avoir le temps de se poser. Grand respect.

Visiblement, c'est l'engouement pour le roman, avec par ailleurs l'arrivée de poids lourds de la littérature dans la toute fin de la première moitié du XIXe siècle (GOGOL et DOSTOÏEVSKI notamment) qui a en partie enterré la poésie et les poètes avec. En attendant ce déclin, MARKOWICZ, en fin historien d'une précision saisissante, auteur d'un travail véritablement énorme, nous colle une fois de plus un uppercut avec son érudition, sa passion, sa précision, ses détails et son envie de partager dans ce que l'on pourrait voir comme une immense fresque. Elle parut en 2011 chez Actes sud. Cela fonctionne merveilleusement bien. Merci André, vous être décidément un sacré grand bonhomme !

https://deslivresrances.blogspot.fr/

Lien : https://deslivresrances.blog..
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A écouter, que l'on soit ou non intéressé par ce beau livre, sur France Culture émission de Alain Veinstein du jour au lendemain. Passionnant
www.franceculture.fr/emission-du-jour-au-lendemain-andre-markowicz-2011-10-21.html
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Compilation savamment ordonnée qui rétablit autour du nom phare de Pouchkine le cercle de jeunes gens ayant fait la bringue ensemble et rivalisé par le jeu de la versification. Mêlant les grands événements aux états d'âme les plus personnels, cet assemblage forme l'antithèse des ouvrages historiques qui considérent du haut des cabinets ministériels la masse anonyme des peuples et croient discerner un sens à leur destin. Au-delà des conventions de style qui, en poésie comme en musique, structurent la création en rythme et harmonie, des ondes mystérieuses redonnent chair et sentiments à des voix depuis longtemps éteintes. La vie consiste à voir disparaître ce qui en fait le prix. Personnellement, je ne le ressens jamais plus profondément que lorsque les mots s'alignent avec parcimonie, sans rimes ni fleurs, à la manière de Vassili Joukovski, seul devant la tombe de Macha Protassova, la femme qu'il aima sans retour et qui mourut en couches.
"Tu étais douce
Et silencieuse ;
Ton regard triste
Disait ton âme.
Ressouvenance
Des jours qui furent !
Ce fut l'ultime
Sur notre terre.
Tu t'es soustraite
Comme un archange.
Ta tombe est douce.
Là, s'illumine
Toute mémoire
De notre monde,
Là, s'illumine
Toute espérance.
Astres des cieux...
O, douce nuit !..."
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critiques presse (2)
Lhumanite
27 février 2012
Grâce à la qualité de son travail d’édition, le Soleil d’Alexandre qu’on peut lire à son gré comme une anthologie poétique, un livre d’histoire, une galerie de portraits, est un véritable voyage, qu’on fera avec émotion, dans la galaxie russe du premier XIXe siècle.
Lire la critique sur le site : Lhumanite
LeMonde
03 octobre 2011
C'est ce prodige que réussit Markowicz : rendre justice à cette galaxie dont Pouch-kine est l'astre majeur, ce continent perdu jusque-là pour le lecteur français, qui y retrouve la matrice des Akhmatova, Mandelstam, Maïakovski, Pasternak et autres Brodsky.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (34) Voir plus Ajouter une citation
lourds nuages, noirs nuages,
Une lune errante luit
Eclairant la neige en rage,
Trouble ciel et trouble nuit.
Le traineau cahote et glisse,
Les grelots - "drelin-drelin",
L'épouvante, quel supplice
dans ces plaines sans chemin.

- Fouette, enfin, cocher ! " Les bêtes
Souffrent trop, mon bon monsieur ;
Plus de route, la tempête
qui nous souffle dans les yeux.
On aura perdu la trace,
Je parie - c'est un démon
Qui s'amuse et nous pourchasse,
Et nous fait tourner en rond.

Là, il se démène, il flaire,
Joue à nous cracher dessus ;
Là, il pousse dans l'ornière
Le cheval qui n'en peut plus.
Tiens c'est lui qui nous emmêle,
cette borne, on croit la voir ;
C'était lui, cette étincelle
dans le vide sourd et noir.

Lourds nuages, noirs nuages,
une lune errante luit,
Eclairant la neige en rage,
Trouble ciel et trouble nuit.
Et on tourne et on s'épuise ;
Les grelots, muets d'un coup.
On se fige. " L'ombre grise,
Là, c'est quoi ? ... un tronc ? un loup ?

La bourrasque hurle, pleure,
Soufflent les chevaux tremblants ;
Le démon reprend ses leurres,
Ses yeux rouges sont brûlants.
On repart, le traîneau glisse,
Les grelots - "drelin-drelin" ;
Les démons se réunissent
Sur l'espace blanc sans fin.

Sans visage, sans image,
Sous la lune trouble et floue,
Feuilles quand novembre rage,
Les démons voltigent, fous.
Qui les pousse ? pour quoi faire ?
Comme ils chantent, quels sanglots ;
Ils marient une sorcière,
Pleurent un génie des eaux ?

Lourds nuages, noirs nuages,
une lune errante luit,
Eclairant la neige en rage,
Trouble ciel et trouble nuit.
Foule folle, à perdre haleine,
Aspirés par la hauteur,
Les démons à voix humaine
Crient, me déchirant le coeur.

1830 Alexandre Pouchkine
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              La mort du poète (*)
Extrait 1

                    Vengeance, souverain,
                             vengeance !
         Que ma supplique monte jusqu’à
                                     toi :
                 Soutiens le droit et punis
                              l’assassin,
         Fais que son châtiment de siècle
                               en siècle
             Proclame ta justice à l’avenir

          Et fasse la frayeur des criminels.

Le poète est tombé ! – prisonnier de l’honneur,
     Tué par des ragots infâmes ;
Le plomb au cœur, la soif de vengeance dans l’âme,
     Il a baissé son front vainqueur.
    L’indignation fut trop profonde.
     Devant les lâches, les retors, ‒
  Il s’est dressé contre les lois du monde.
  Seul comme à chaque fois... et il est mort !
    Mort !... à quoi bon les larmes vaines,
Des louangeurs tardifs le cœur inopportun
    Le babil des excuses, de la gêne ?
    L’heure a sonné de son destin !
    N’avez-vous pas dès l’origine
    Persécuté son libre don,
    Soufflant sur des flammes mutines,
    Pour vous distraire, sans raison ?
    Réjouissez-vous... l’offense ultime
    L’aura jeté dans le tombeau :
    C’en est fini du cœur sublime,
    De l’âme fière, du flambeau.
    Le meurtrier reste impavide,
    Il vise et tire... affreux combat :
    Son souffle est froid, son cœur est vide,
    Son pistolet ne tremble pas.
    Pareil à des centaines d’autres,
    Chassé chez nous de son pays,
    Quêtant la chance et les profits,
    Il méprisait ce qui est nôtre,
    Et notre langue, et nos chemins ;
    Que savait-il de notre gloire ?
    Inscrit au sang dans nos mémoires,
    A-t-il compris pour notre histoire
    Sur quoi il a levé la main ?

  La mort l’a pris, la terre va le prendre,
  Comme l’autre poète obscur et tendre,
    Proie d’une aveugle jalousie –
Lui que si puissamment il avait fait entendre –
Abattu comme lui par un coup sans merci (**).
                        Janvier-février 1837


(*) Il s’agit de Pouchkine.
(**) Allusion au sort de Vladimir Lenski, dans Eugène Onéguine


//Mikhaïl Iourievitch Lermontov (1814 – 1841)
/ Traduit du russe par André Markowicz,
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Matin d’hiver
  
  
  
  
Soleil et neige : pure grâce !
Mon adorée, tu te prélasses, -
Ma belle, allons – tu dors encor :
Ouvre tes yeux lourds de caresses ;
Astre du Nord, enchanteresse,
Viens saluer l’aube du Nord !

Hier, la bourrasque faisait rage,
Au ciel erraient de noirs nuages ;
La lune, un disque blême et froid,
Teintait les nues d’un jaune sombre ;
Toi, tu tremblais dans la pénombre –
Et désormais... regarde, vois !

Sous un ciel bleu qui vibre et brille,
La neige, à l’infini, scintille ;
Le noir massif de la forêt
S’ouvre ; sous l’or du givre luisent
Les sapins verts ; la glace irise
L’eau du ruisseau qui transparaît.

Regarde comme notre chambre,
Toute moirée de reflets d’ambre,
Est accueillante ; on est au chaud ;
On resterait en tête à tête.
Mais sortons la jument brunette,
Faisons préparer le traîneau.

Sur cette neige étincelante
Qu’elle s’élance, impatiente,
Pour éveiller, nous emportant,

Ces plaines nues et sans frontières,
Ces forêts si touffues naguère,
Ces bords déserts que j’aime tant.
                           1829


// Alexandre Sergueïevitch Pouchkine (06/06/1799 – 10/02/1837)

/ Traduit du russe par André Markowicz
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La lune


Lune, toi qui blanchis le fer
Des froids barreaux de ma cellule,
Astre de neige, calme et clair
Qui, loin, là-haut, sans flamme brûles,

Je te salue de ma douleur,
Reine nocturne, œuvre divine –
La paix me vient de ta blancheur,
C’est l’âme que tu m’illumines.

Comment ! serais-je seul ici,
Comptant sans fin les pas des gardes ?
J’ai des amis qui, eux aussi,
Veillent et songent, te regardent.

Peut-être, ils penseront à moi
En s’endormant, prieront peut-être ;
Volant vers leur séjour de joie,
Mon ombre, se sentant renaître,

Les bénira... Et quand, soudain,
L’aube luira sur les nuages,
L’étoile du premier matin
Aura dissipé mon image.

1828-1829


//Wilhelm Karlovitch Küchelbecker (1797 – 1846)
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Je me rappelle — instant de grâce …


Je me rappelle — instant de grâce :
Quand tu parus à mes côtés,
Je fus saisis, — vision fugace
Du pur génie de la beauté.

Dans la langueur désespérante,
Dans le fracas des vanités,
Longtemps vibra ta voix pressante,
Longtemps, tes traits m’ont habité.

Les ans passèrent. Dans l’orage
Mes rêves furent emportés,
Et j’ai perdu ta douce image,
Ta voix pressante m’a quitté.

Claustrés au fond d’un lourd silence,
Paisiblement passaient mes jours,
Sans poésie, sans transcendance,
Sans vie, sans larmes, sans amour.

Mais l’âme a retrouvé la grâce,
Tu reparais à mes côtés,
Divinité, vision fugace
Du pur génie de la beauté.

Et, de nouveau, la renaissance,
Et la lumière est de retour —
La poésie, la transcendance,
La vie, les larmes et l’amour.

//Alexandre Pouchkine
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Vidéo de André Markowicz
Rencontre des étudiants comédiens du Conservatoire municipal du XVIe arrondissement et du public de la Maison de Victor Hugo avec André Markowicz.
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