Quel bonheur m'a apporté ce vieux maître à barbe blanche à la lecture de ses livres ! Que d'ouvertures , de poètes à découvrir, Que de songes et de quelle air nouveau et frais il a inondé mon esprit.
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J'ai été moins emporté par ces essais sur l'imagination du mouvement - moins de structure générale que pour les trois autres essais sur le feu, l'eau et la terre - peut-être aussi plus de métier de l'auteur, ce qui retire la spontanéité des premiers (feu et eau) et donc l'abord immédiatement onirique en faveur d'une étude plus austère - peut-être aussi moins de surprise du lecteur qui se lasse de Hofmannsthal, Blake et Hugo... une sensation de moins de fraîcheur, d'une écriture sirocco plutôt que bise...
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Cette puissance formelle de l'amorphe que l'on sent en action dans la "rêverie des nuages", cette continuité de la déformation doivent être comprises dans une véritable participation dynamique. "Il n'y a pas loin, par l'oiseau, du nuage à l'homme", dit Paul Eluard. C'est à la condition d'adjoindre, au vol linéaire de l'oiseau, le vol qui roule, le vol globuleux, la rondeur des bulles légères. La continuité dans le dynamisme supplante les discontinuités des êtres immobiles. Les choses sont plus distinctes entre elles, plus étrangères au sujet quand elles sont immobiles. Lorsqu'elles commencent à se mouvoir, elles émeuvent en nous des désirs et des besoins endormis. "Matière, mouvement, besoin, désir sont inséparables. L'honneur de vivre vaut bien qu'on s'efforce de vivifier", conclut Paul Eluard. Soudain, pour parler comme Supervielle, devant ce lent mouvement des nuages on sait "ce qui se passe derrière l'immobilité". Le mouvement a plus d'homogénéité onirique que l'être. Il associe les êtres les plus divers. L'imagination dynamique met "dans le même mouvement", et non pas "dans le même sac", des objets hétéroclites et voilà un monde qui se forme et s'unit sous nos yeux. Quand Éluard écrit (op. cit., p. 102): "Nous voyons souvent des nuages sur la table. Souvent aussi nous voyons des verres, des mains, des pipes, des cartes, des fruits, des couteaux, des oiseaux et des poissons", il encadre, en son inspiration onirique, les objets immobiles par les êtres de la mobilité. Au début du rêve les nuages, à la fin les poissons et les oiseaux, sont des inducteurs de mouvement. Les nuages sur la table finiront par voler et nager, avec les oiseaux et les poissons, après avoir mis, doucement, les objets inertes en mouvement. La première tâche du poète est de désancrer en nous une matière qui veut rêver.
Même des motifs comme ceux qu’éveille le travail du bois n’arrivent pas à effacer l’image de l’arbre vivant. Dans ses fibres, le bois garde toujours le souvenir de sa vigueur verticale, et l’on ne lutte pas sans habileté contre le sens du bois, contre ses fibres. Aussi, pour certains psychismes, le bois est une sorte de cinquième élément – de cinquième matière –, et il n’est pas rare, par exemple, de rencontrer, dans les philosophies orientales, le bois au rang des éléments fondamentaux. Mais alors une telle désignation implique le travail du bois ; elle est, à notre avis, une rêverie de l’homo faber (…) nous devons reconnaître que le bois est peu important pour l’onirisme profond. Alors que les arbres et les forêts jouent un si grand rôle dans notre vie nocturne, le bois lui-même ni figure guère.
Le rêve n’est pas instrumental, il ne se sert pas de moyens, il vit directement dans le règne des fins ; il imagine directement les éléments et vit directement leur vie élémentaire. Dans nos rêves, nous flottons sans bateau, sans radeau, sans nous donner la peine de creuser le canot dans le tronc des arbres ; dans le rêve, le tronc des arbres est toujours creux ; le tronc des arbres est toujours prêt à nous recevoir pour dormir allongé, dans un long sommeil sûr d’un vigoureux et jeune réveil.
L’arbre est donc un être que le rêve profond ne mutile pas.
Chapitre X – L’arbre aérien (pp. 234-235, Édition José Corti, 1985).
« Dis-moi quel est ton infini, je saurai le sens de ton univers, est-ce l'infini de la mer ou du ciel, est-ce l'infini de la terre profonde ou celui du bûcher ? » Dans le règne de l'imagination, l'infini est la région où l'imagination s'affirme comme imagination pure, où elle est libre et seule, vaincue et victorieuse, orgueilleuse et tremblante. Alors les images s'élancent et se perdent, elles s'élèvent et elles s'écrasent dans leur hauteur même. Alors s'impose le réalisme de l'irréalité. "
en quel sens doit-on dire qu'un son devient aérien? C'est quand il est à l'extrémitédu silence, planant dans un ciel lointain-doux et grand.
Il y a tant de rêves au ciel que la poésie, gênée par les mots, n'a pu nommer.
"Avec Bourdieu. Un parcours sociologique" de Gérard Mauger
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"Histoire philosophique des arts" de Carole Talon-Hugon
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"Le Jésus des historiens" de Pierluigi Piovanelli
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"24 heures de la vie de Jésus" de Régis Burnet
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"La poétique de l'espace" de Gaston Bachelard
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"Traité théologico-politique" de Spinoza
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" À poings fermés" de Jean-Manuel Roubineau
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"Le droit au sexe" d'Amia Srinivasan
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