Appelée à tort le questionnaire de Proust, cette série de questions plutôt banales (un jeu à la mode) figurait dans l'album-confidences d'Antoinette Faure, la fille cadette de l'ancien président de la République, Félix Faure. Un questionnaire que la jeune fille avait soumis, à son ami Marcel, alors probablement âgé de seize ans.
C'est André Maurois qui a donné à ce document un véritable écho et a rendu compte d'un second questionnaire auquel Proust aurait répondu à l'âge de 23 ans. Plus tard le même Maurois suggérera à l'éditeur, Lionel Peillard, de soumettre le questionnaire à des auteurs contemporains. Une idée qui a du succès puisqu'en 1969, Peillard publie « Cent écrivains répondent au questionnaire de Marcel Proust ». Mais c'est Bernard Pivot, qui au début des années 90, rend vraiment célèbre le questionnaire « de » Proust en le proposant, remanié, aux invités de son émission littéraire, Bouillon de culture.
Pour Évelyne Bloch-Dano évoquer ce questionnaire n'est qu'un prétexte pour tenter de retracer en creux la jeunesse du jeune Marcel Proust. Parler de la famille Faure et de ses relations d'amitié avec les Proust est un moyen de dessiner l'environnement de Marcel ; afin, bien sûr, de mieux le connaître faute d'avoir des informations tangibles, car dit-elle : « s'agissant de Marcel Proust, il semble régner sur certains épisodes de sa vie le même flou que sur l'âge du héros d'À la recherche du temps perdu. »
La biographe nous convie donc à Paris ou au Havre, lieux où les deux familles, Proust et Faure, se fréquentent et cultivent leur amitié. Ainsi on apprend beaucoup des habitudes et des moeurs de la bourgeoisie française de la fin du XIXe siècle. On découvre aussi un monde où la culture et sa transmission aux enfants est un élément essentiel. Une culture élitiste qui vise à faire des garçons — mais pas des jeunes filles — des intellectuels ou des décideurs. Un monde dans lequel le jeune Marcel est soucieux de marquer sa différence, ce que Evelyne Bloch-Dano montre bien, en collant à la réalité d'une époque.
Une belle découverte dont je remercie Babelio et les Éditions Stock.
Sous une magnifique couverture au graphisme impeccable, voici présenté le dernier ouvrage de la journaliste et biographe Evelyne Bloch.Dano, avec ce sous-titre "Enquête sur le questionnaire."
Mais qu'est-ce donc que ce fameux questionnaire dont tout le monde parle depuis que Bernard Pivot l'a mis à l'honneur dans son émission "Bouillon de Culture "? C'est avant tout un divertissement britannique datant de l'époque victorienne invitant les participants à répondre (honnêtement si possible) à diverses questions du type de celles des portraits chinois afin de dévoiler sa personnalité et ses aspirations.
Marcel Proust a répondu deux fois à ce questionnaire, et l'a rendu célèbre puisqu'il lui a laissé son nom. Evelyne Bloch-Dano a choisi de partir de ces deux documents pour se livrer à une véritable étude sociologique du milieu dans lequel l'écrivain a grandi, analysant avec une érudition d'agrégée de lettres, les réponses fournies par les jeunes gens de son entourage qui se sont livrés à cet exercice.
Et bien sûr, c'est passionnant !
On y découvre en premier lieu Antoinette Faure, la fille cadette du Président de la République resté tristement célèbre en raison des circonstances friponnes de son trépas. Elle était l'amie intime de Marcel et elle a joué un rôle important dans sa vie.
Sa soeur Lucie qui brillait par sa forte personnalité, féministe avant l'heure, érudite cultivée, attirée par la politique et les voyages.
Et puis, les jeunes filles sages chaperonnées par leur institutrice anglaise, celles qui se promenaient dans les jardins parisiens en rêvant à leur avenir , entre réceptions et spectacles .
Mais il y a aussi les garçons Daniel Halévy et Robert Dreyfus, ses amis les plus proches, sans oublier Jacques Bizet, celui pour lequel il éprouvait un véritable sentiment amoureux .
A travers ces portraits, c'est toute une époque qui ressurgit et une classe sociale, la bourgeoisie triomphante, qui s'empare du pouvoir et s'apprête à affronter victorieusement les défis du nouveau siècle qui s'annonce ...
On se promène dans la ville du Havre en 1887 pendant l'exposition maritime internationale, sur la côte fleurie de Trouville à Cabourg et on sent le vent du large balayer la jetée en soulevant une jupe de mousseline blanche...
On découvre une jeunesse corsetée dans des traditions qui laissent peu de place aux femmes même si de timides éclaircies annoncent un avenir moins sombre.
Nul n'est besoin d'avoir lu au préalable "la Recherche" pour apprécier cet ouvrage, car même si les références littéraires abondent, elles ne sont jamais pesantes et s'intègrent dans la trame du récit . En explorant la période de l'adolescence de Marcel Proust, Evelyne Bolch.Dano a cherché à retracer les pistes de son inspiration tout en rendant hommage à une oeuvre qui reste un monument de la littérature française.
Une belle découverte à savourer autour d'un thé, accompagné bien sûr d'une madeleine !
Des jeunes garçons, des jeunes filles du temps passé.
Une fin de XIXème siècle bourgeoise.
Une adolescente : Antoinette Faure, fille du Président de la République.
Des après-midi de jeux aux Champs-Élysées.
Des journées de vacances oisives.
Des jeux à la mode du temps.
Apprendre à découvrir l'autre et apparaît sous forme de passe-temps un questionnaire-confessions.
La jeune fille le soumet à tous ceux qui l'entourent.
Parmi eux, Marcel Proust.
Il y répondra deux fois et le mythe se créera petit à petit jusqu'à devenir pour tous : le questionnaire de Proust.
Évelyne Boch-Dano nous en raconte la genèse, le développement au fur et à mesure des années, l'impact dû à l'émission Bouillon de Culture de Bernard Pivot.
Elle propose une analyse de tout ce qui entoure cette époque, ces jeux et la personnalité de ceux qui y participèrent.
Elle nous permet ainsi de situer le jeune Marcel Proust, sa personnalité naissante et originale au milieu de la jeunesse qui l'entoure.
Un essai qui, dans un style aisé, situe gens, lieux, époque et livre , loin de tous mythes, ce que fut et entoura celui qui devint un de nos plus grands écrivains.
Le célèbre questionnaire de Proust sert de clé d'entrée, voire de prétexte, à l'auteur pour ses recherches sur la jeunesse de Proust, et au-delà sur les prémisses de ce qui n'est pas encore, à la fin du XIXè siècle, désigné sous le vocable d'adolescence.
Partant d'un malentendu (le questionnaire de Proust n'a pas été conçu par Proust lui-même, il s'est contenté d'y répondre), l'auteur analyse ce jeu à la fois mondain et d'esprit pratiqué dans une certaine bourgeoisie qui consiste à répondre, à la demande d'un ami, à une série de questions type dans un album qui rassemble les réponses de son entourage.
Retrouvé miraculeusement chez un de ses descendants, celui d'Antoinette Faure (la fille du futur Président Félix Faure) renferme tous ceux que compte la bourgeoisie d'affaire havraise et politique de l'époque. Parmi les signataires figure le jeune Marcel. Ainsi débute l'enquête historique qui donne à voir et à comprendre ce groupe social qui à la fin du XIXe investit les lieux de pouvoirs, tant dans l'économie, la politique ou la culture. Pareillement, l'auteur tente d'analyser dans quelque mesure ce groupe de jeunes amies n'a pas pu servir de modèle au futur Proust pour les jeunes filles en fleurs de sa célèbre « Recherche ».
A la croisée d'une étude littéraire et d'un essai historique, « Une jeunesse de Marcel Proust » est également un plaidoyer admiratif envers l'une de plus grands figures de la littérature. Elle réussit par ailleurs à traduit le charme troublant de toute période passée.
Passionnant ouvrage dont le titre peut cependant prêter à confusion. Il ne s'agit pas seulement de la jeunesse de Marcel Proust dont il est question mais de sa génération, celle née aux alentours de 1870, après la défaite et de sa classe sociale, la haute bourgeoisie.
L'auteur compare les réponses au questionnaire dit à tort "de Proust". Ces questionnaires ont été retrouvés dans l'album ( à la mode chez les jeunesse filles de cette génération) d'Antoinette Faure, fille du président Félix Faure, famille liée aux Proust.
A partir des réponses, l'auteur retrace les mentalités, goûts et valeurs de cette génération et plus particulièrement, des jeunes filles plus nombreuses à y répondre, les fameuses " jeunes filles en fleurs" de la classe aisée de la Belle Epoque que l'on retrouvera dans "la Recherche".
Marcel se démarque de ses camarades par sa hauteur de vue et sa maturité dans ses réponses.
Dans ses pages magnifiques qui dépeignent les jeunes filles « en fleurs » - pas seulement florissantes, mais évoquées sous la forme de fleurs -, il [Marcel Proust] nous fait saisir ce qu’il a mis longtemps à percevoir lui-même, et dont la Recherche se fait l’écho et la quête : le passage du temps, ces instants suspendus, il les savoure car il devine leur impermanence.
La perception que nous avons de Marcel Proust est celle d’un être unique qui, après des années mondaines et en apparences futiles, a vécu le reste de sa vie à l’ecart, protégé par le liège de sa chambre des bruits et des odeurs, loin de la foule, isolé de ses admirateurs et même de ses amis, tout entier consacré à son livre, dans une course contre le temps et la mort.
Votre idée du malheur : Être séparé de maman, ainsi le jeune Proust répondait-il dans le questionnaire qui a fini par porter son nom.
L'adolescence précède la « solidification complète ». Elle est mobilité, instabilité, une vie en devenir qui n'a pas encore trouvé sa forme définitive. Toutes les promesses peuvent être tenues.
L'adolescence précède la "solidification complète". Elle est mobilité, instabilité, une vie en devenir qui n'a pas encore trouvé sa forme définitive. Toutes les promesses peuvent être tenues.
Françoise Sagan : "Le miroir ***"