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EAN : 9782914577755
64 pages
Lettres vives (22/09/2022)
4.52/5   26 notes
Résumé :
Dans la rue, des milliards de secrétaires. Leurs doigts tapent sur le crâne des lettres plus vite que le pic-vert sur l’écorce de l’arbre. L’irréel est notre passion et elle est sinistre. Il faut à l’amour des lèvres réelles avec des mots réels qui en sortent, vibrant comme le brin d’herbe aux dents du berger.
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Vendredi 16 décembre 2022/ Librairie Chantelivre

Gros...gros moment d'émotion et de peine !

Alors que tant de lecteurs fidèles,assidus des écrits de cet écrivain poète,( dont je fais partie) pleurent sa toute récente disparition...chaque mot de ce tout dernier texte...a tout d'un message, d'un testament....déplorant notre monde plongé dans sa propre fin...

Ce monde des hommes en voie d'effacement ,les machines et la technologie ,devenant ces " choses" voraces et toxiques....la prolifération de la barbarie et des tyrans...et cet hommage absolu à l'arme de la Résistance : la Poésie !

Infime texte, où plus que tous les autres
( puisque l'ultime !) rend hommage à cette terre russe qui a abrité tant de poètes et de poétesses ayant lutté, au péril de leur vie, contre la folie de leurs tyrans, dont la figure redoutable de Staline !

"Nadja Mandelstam s'approche à son tour, autre amie d'Anna.La mort a enregimenté son homme.Elle continue de vivre en lui, pour lui, par lui.Elle a appris par coeur son oeuvre entière. (...)
Les polices mandatées par le tyran ne pourront jamais chercher jusque-là les poèmes qui les anéantissent."

En cette actualité présente tragique depuis 10 mois interminables , où l' Ukraine se bat contre ce bien " curieux grand frère "...qui a une idée fort singulière idée de "la Fraternité "!...Christian Bobin nous exprime encore et encore la force des mots...et pas n'importe lesquels: ceux des poètes...ces dissidents essentiels !

Hommages plus appuyés à Anna Akhmatova ainsi qu'à Nadja Mandelstam ....

"Les poètes sont des monstres.Ils n'aiment pas vos machines.Ils ne les aimeront jamais.Une bouilloire- antique grosse pomme de fer talée- est toute la technologie qu'ils supportent. Ils aiment trop la vie pour prétendre " l'augmenter""
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- Les poètes sont des monstres : ils ont du coeur et donc une mémoire.
Les poètes sont des monstres : une bouilloire est toute la technologie qu'ils supportent.
Les poètes sont des monstres : ils sonnent leur bonne tard dans la nuit pour leur dicter un poème, une strophe ou juste un vers.
Les poètes sont des monstres : ils empêchent les dictateurs, Staline en tête, de dormir.
Les poètes sont des monstres : ils donnent leur sang à l'invisible.
« Les poètes sont des monstres d'aimer la vie qui les brise. Même leurs malédictions sont plus belles que nos sourires ».

- Oui, je comprends bien, monsieur Bobin. Mais…

- Anna Akhmatova, Gérard de Nerval, Blok, Mandelstam, Rimbaud, Catherine Pozzi, Marceline Desbordes-Valmore et tous les autres : des monstres.

- Mais vous, monsieur Bobin, quand vous écrivez, page 14, « Elle avait cette haute science des femmes qui s'enveloppent des ondes de l'univers. Quand elle mangeait un pain dur comme une brique, la voie lactée laissait des miettes sur ses genoux » , n'êtes-vous pas un peu aussi poète ? Hein, Monsieur Bobin ?

[silence]

- Et donc …
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« Les poètes sont des monstres d'aimer la vie qui les brise. Même leurs malédictions sont plus belles que nos sourires. »

A travers l'exploration de la figure du poète, Bobin trace les contours de la charge poétique et s'entoure pour l'aider dans cette périlleuse entreprise de Rimbaud, Nerval, Block, Mandelstam, et Katerine Pozzi, Emily Dickinson, et.

« Les vrais poètes sont les êtres les plus sensibles aux mouvements des plaques tectoniques de l'invisible. »

Comme une ode à la lenteur, à tout ce qui oppose l'homme à la machine, qui, par définition, ne tolère aucune imperfection pour que le mécanisme fonctionne. le poète, lui, s'illustre par ses imperfections mises à nues, par son coeur ouvert et saignant pour mieux nous régaler. L'albatros de Baudelaire, le crapaud de Corbière, le pélican De Musset... pour Bobin se sera le monstre. Aussi grotesque, tout autant à la marge par nécessité, le verbe comme fer de lance.

« En pleine guerre mondiale, pendant des heures, deux femmes discutent passionnément de la place d'une virgule, de l'éclosion d'un silence. »

Il s'agit d' Anna Akhmatova de Lydia Tchoukovskaïa, celle qui transcrit les poèmes brûlés dans le cendrier à peine écrits, et nous livre des centaines de pages d'entretiens ( de 1938 à 1966 ) avec la poétesse russe. Figures centrales du texte.

« Jour après jour, mois après mois, mes notes décousues [...] se transformaient en épisodes de la vie d'Anna Akhmatova. Au milieu du monde trouble, fantastique et peuplé d'ombres qui m'entourait, elle seule semblait n'être pas un rêve, elle seule semblait de chair et d'os, elle dont les vers pourtant, à cette époque, ne parlaient que d'ombres. Elle était indubitable, incontestable ».* (*citation du journal de Lydia Tchoukovskaïa)

Dans cette opposition que cristallise Anna Akhmatova, se forge la figure poète, comme un «  artisan du verbe » – conception valéryenne – qui nécessite du temps, de l'expérience brûlante du monde, du regard de celui qui est enthousiasmé autant que meurtri par l'étrange nouveauté du monde :

« un coeur en acier trempé. Ce sont des penseurs primaires [...] les hommes revenus parmi nous du premier matin du monde  ».
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On le sentait venir ce texte.
Au rythme fou qui est devenu le nôtre, les quelques âmes paisibles qui tentent de vivre vraiment ne peuvent que livrer un tel constat: c'est la vie qui renonce désormais à nous livrer ses secrets tant la modernité va à son encontre.
Ainsi, les hommes ( et les femmes) disparaissent peu à peu, mais de plus en plus rapidement, et c'est la technologie humaine qui s'apprête à accoucher d'un premier enfant qui sera étranger à son géniteur: nous sommes morts, et c'est une bonne nouvelle, comme le dit Christian Bobin, pour son dernier livre-prophétie.
Sûrement pas le plus lumineux de ses livres, mais assurément l'un des plus honnêtes, le plus lucide.
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Ce court recueil de 2022 est bien caractéristique de ce Bobin dernière manière : plus pessimiste , presque désespéré devant l'évolution technophile de notre époque , l'envahissement des écrans ,le décervelage de l'homme par la machine . Contre cette marée noire il convoque la force de la poésie et la mémoire de ces poètes , telle Anna Akhmatova, qui affrontait le totalitarisme stalinien avec des mots . Je pense qu'il se vivait comme un résistant de notre époque qui , comme eux, luttait contre l'oppression sournoise du numérique . Mais ces textes ,si beaux soient-ils , ne sont -ils pas le chant du cygne d'une espérance révolue. Je le crains …Les prochains poèmes seront écrits par ChatGPT…
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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
Nadja Mandelstam s'approche à son tour, autre amie d'Anna.La mort a enregimenté son homme.Elle continue de vivre en lui, pour lui, par lui.Elle a appris par coeur son œuvre entière. (...)
Les polices mandatées par le tyran ne pourront jamais chercher jusque-là les poèmes qui les anéantissent.
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L'Ours Staline n'aime pas la poésie. (...) La patte de l'ours pousse loin dans les chambres, les placards. Elle racle.Staline a toujours craint Anna Akhmatova.Il met son fils aux fers, un parmi des millions dans la fournaise. Elle, il ne la touche pas.(...)
Elle continuera d'écrire sur les noces de la douleur et de l'amour.Les poètes sont des monstres d'aimer la vie qui les brise.
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Un pays est sauvé par ses Poètes. Beaucoup sera pardonné à l'Amérique pour avoir abrité l'étrange Emily Dickinson.Supprimez tous ces gens qui passent leur vie à chercher le mot le plus proche du ciel ou de l'enfer, et vous vivrez dans les ténèbres.
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        Tomber sur un mauvais livre de poésie
  
  
  
  
              Tomber sur un mauvais livre de
poésie, dit Anna, c’est être à jamais dégoûté des
poèmes. Le vrai poète se reconnaît à la puissance
du trait. Ce qui sort du cœur et parfois n’est même
pas écrit. Traquée avec son mari, Nadedja est
accueillie par une famille. Quand la porte s’ouvre,
au milieu de tous les dangers qu’elle prend,
leur hôtesse les accueille comme du bon pain,
bras ouverts, riante. « C’est alors que je compris
que la seule chose vraie en ce monde, c’étaient
les yeux bleus de cette femme ». Peu de poèmes
atteignent aussi vite cette hauteur-là.
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  La Russie est mère de tous les poèmes
  
  
  
  
  La Russie est mère de tous les poèmes, bordés
par elle chaque nuit d’un drap de neige. Nous
avons, en France, Marceline Desbordes-Valmore.
Elle est, avec les chants aztèques de Catherine
Pozzi, leur construction pyramidale, ce que notre
pays a offert de plus pur sur l’amour. Une plainte,
mais délivrée de son bourreau. Un chant devenu
lumière, montant au soleil. Anna Akhmatova, à
la fois mâle et femelle, incarne la figure de la
colère du ciel, une colère sèche, non sentimentale,
l’arrivée en pleine nuit d’hiver de l’amour implac-
able, ses coups à la porte. Un pays est sauvé par
ses poètes. Beaucoup sera pardonné à l’Amérique
pour avoir abrité l’étrange Emily Dickinson.
Supprimez tous ces gens qui passent leur vie à
chercher le mot le plus proche du ciel ou de l’enfer,
et vous vivrez dans les ténèbres.
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Vidéo de Christian Bobin
Avec Catherine Cusset, Lydie Salvayre, Grégory le Floch & Jakuta Alikavazovic Animé par Olivia Gesbert, rédactrice en chef de la NRF
Quatre critiques de la Nouvelle Revue Française, la prestigieuse revue littéraire de Gallimard, discutent ensemble de livres récemment parus. Libres de les avoir aimés ou pas aimés, ces écrivains, que vous connaissez à travers leurs livres, se retrouvent sur la scène de la Maison de la Poésie pour partager avec vous une expérience de lecteurs, leurs enthousiasmes ou leurs réserves, mais aussi un point de vue sur la littérature d'aujourd'hui. Comment un livre rencontre-t-il son époque ? Dans quelle histoire littéraire s'inscrit-il ? Cette lecture les a-t-elle transformés ? Ont-ils été touchés, convaincus par le style et les partis pris esthétiques de l'auteur ? Et vous ?
Au cours de cette soirée il devrait être question de Triste tigre de Neige Sinno (P.O.L.) ; American Mother de Colum McCann (Belfond), le murmure de Christian Bobin (Gallimard) ; le banquet des Empouses de Olga Tokarczuk (Noir sur Blanc).
À lire – Catherine Cusset, La définition du bonheur, Gallimard, 2021. Lydie Salvayre, Depuis toujours nous aimons les dimanches, le Seuil, 2024. Grégory le Floch, Éloge de la plage, Payot et Rivages, 2023. Jakuta Alikavazovic, Comme un ciel en nous, Coll. « Ma nuit au musée », Stock 2021.
Lumière par Valérie Allouche Son par Adrien Vicherat Direction technique par Guillaume Parra Captation par Claire Jarlan
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