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Henry Bouillier (Éditeur scientifique)
EAN : 9782221058749
1032 pages
Robert Laffont (07/11/2002)
4.3/5   178 notes
Résumé :
"Ne pas se tromper aux figures hautaines et silencieuses : ce sont des timides", écrit Jules Renard parlant de lui. Comme tous les timides, il répugnait à se confier aux autres. Son Journal lui sert de confident, d'interlocuteur, de complice. C'est à la mémoire des feuillets qu'il remet ses pensées les plus secrètes et les plus contradictoires. Ardent dreyfusard, il écrit : "Je suis écœuré à plein cœur, à cœur débordant, par la condamnation d'Emile Zola..." Mais il ... >Voir plus
Que lire après Journal (1887-1910)Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (14) Voir plus Ajouter une critique
4,3

sur 178 notes
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C'est une bible, un journal littéraire unique où les phrases en pointe sèche croquent toute une époque. Jules Renard parle de lui, des autres, du temps qui passe, de ses contemporains, avec une douce ironie, une tendre férocité. L'homme a le regard du peintre. Dérision, humour sont les palettes de cet auto-portrait unique. "Il y a des moments où tout réussit, il ne faut pas s'effrayer : ça passe !"
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Ayant souvent entendu encenser le journal de Jules Renard, c'est avec une anticipation joyeuse que je l'ai ouvert à l'année 1887 (le début.)
Ouf !
1ère page :
"Vous avez vos nerfs, madame, moi je n'en ai qu'un, mais il est de boeuf."
"La vertu des femmes, au contraire des lattes de boulanger, a d'autant moins de valeur qu'on y fait d'entailles."
"Aussi navrant que le "attendez que je mouille" d'une vierge."
"Une femme a l'importance d'un nid entre deux branches. "
2ème page :
"Meublée en arrière comme une jument de 1200 francs."
"Comme des ciseaux, la femme, avec ses cuisses qui s'ouvrent, coupe les gerbes de nos désirs."
"Appelons la femme un bel animal sans fourrure dont la peau est très recherchée."
3ème page ...
Non, je vais arrêter là et croire sur parole ceux qui crient ô merveille !
Car pour compenser tant de bêtise vulgaire, il faut en effet monter très haut et je ne doute pas qu'il le fasse (pourquoi remettre en cause l'avis unanime des lecteurs ?)
Seulement il arrive que les génies aient mauvaise haleine.
Certes il était un homme du 19 ème siècle et il était libre d'écrire ce qu'il voulait dans son journal. Comme je le suis d'en caler mon armoire, en attendant que passe ma déception.
J'avais beaucoup aimé Poil de Carotte : le talent ne devrait pas s'abaisser avec complaisance à la facilité hussardière. Une pochade en passant aurait suffi.
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Jules Renard, c'est bien sûr « Poil de carotte » et les « Histoires naturelles », mais pour ceux et celles qui s'intéressent à la littérature de plus près, le « Journal » qu'il composa de 1887 à 1910 a une importance inestimable : de par ses qualités intrinsèques d'écriture d'une part, où on retrouve l'esprit piquant et acéré de ses ouvrages, ainsi que la clarté lumineuse et l'humour caustique et bon enfant à la fois qui le caractérise, mais aussi par le tableau extrêmement vivant qu'il donne de la société (en particulier de la société culturelle) de son époque.
Et son époque, précisément c'est « La Belle époque ». Une époque d'une richesse inouïe en beaux esprits, en personnalités de premier ordre, inscrite dans un progrès technique et social qui renverse des siècles d'avancées de tortues, un monde où l'écrivain fait un double témoignage : sur lui-même et sur le monde qui l'entoure.
Sur lui-même, bien sûr. Parce qu'un journal, qu'il soit intime (sans autre destinataire que soi-même) ou destiné un jour à la publication, est avant tout une oeuvre personnelle, qui vient de soi et va à soi. C'est d'abord une confidence intime, avec peut-être (ce n'est pas toujours le cas) le souci de « laisser une trace », sur soi et sur les autres, en tous cas sur la perception qu'on en a eue.
Sur les autres également, le « diariste » (anglicisme : il n'existe pas en français un terme précis pour désigner le rédacteur d'un journal intime) fait aussi office de témoin (rarement objectif puisque étant à la fois juge et partie) d'un monde qui lui apporte tour à tour joies et tristesses, amours et haines, la vie, quoi.
Jules Renard nous apprend beaucoup de choses sur lui-même. Ses oeuvres précédentes, où l'autobiographie parfois devenait évidente, nous révélaient par leur style caractéristique les qualités et peut-être les défauts de l'homme. Jules Renard est un timide qui s'exprime mieux à l'écrit qu'à l'oral (j'en connais un autre). Il a des idées bien arrêtées sur tous les sujets : en politique, il est dreyfusard. Dans l'intimité, c'est un misogyne acharné. En littérature il a ses amis et ses têtes de turc.
Et comme nous tous, il est pétri de contradictions : anticlérical convaincu et militant, il confesse : « J'ai l'esprit clérical et un coeur de moine ». Sur les femmes, il déclare : « Je les aime toutes, je fais des folies pour elles » Sacha Guitry dira un peu comme lui (à peine un peu plus tard) : « Je suis contre les femmes. Tout contre. »
Enfin le « Journal » de Jules Renard est un objet littéraire : parce qu'il parle de littérature, bien sûr en invoquant les grands noms de l'époque (ils y passent à peu près tous, dans l'Edition Bouquins, un index judicieux vous permet de voir ce que l'ami Jules pensait d'eux, ça va du mordant au touchant) ; et sur le travail de l'écriture, où avec modestie et constance et grand effort de volonté il exprime sa façon de voir, en particulier la qualité première de son humour : l'ironie plus ou moins appuyée : « les ironistes, ces poètes scrupuleux, inquiets jusqu'à se déguiser » : tout Jules Renard est là : l'ironie, le scrupule (question d'honnêteté envers le lecteur) et cette inquiétude quasi métaphysique qui tient au ventre la plupart des (vrais) écrivains.
Il faut avoir lu le « Journal » de Jules Renard : il est très facile à lire, le style est celui qu'on connait, caustique, ironique et tout ce que vous voulez, mais familier et proche de vous, et puis c'est le ton de la confidence, vous n'êtes pas avec l'auteur Jules Renard, vous êtes avec l'ami Jules qui fait la causette avec vous, en buvant un pastis (ou une absinthe pour faire plus vrai).
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« Et ce Journal qui me distrait, m'amuse et me stérilise! », ainsi paraphrasait Jules Renard sur ses écrits quotidiens. J'aime beaucoup la forme littéraire du Journal, surtout lorsque rédigé par un écrivain renommé qui a marqué son époque. Lorsque François Busnel de la Grande Librairie a remis sur le tapis celui de Jules Renard, je me suis empressée d'aller m'en chercher un exemplaire à la bibliothèque. L'édition empruntée comportait une préface, une chronologie de la vie de l'auteur ainsi qu'un index des illustres écrivains évoqués dans l'ouvrage. Sur une dizaine de jours, je me suis imprégnée des tourments de Jules Renard : soucis d'inspiration, ennuis familiaux, crises existentielles et craintes de n'être pas reconnu à sa juste valeur par ses contemporains et par la postérité. le Journal s'étale de 1887 (Renard a 24 ans) à 1910 (l'année de sa mort à 46 ans) et fait surgir la Belle Époque, les théâtres de Paris, les salons littéraires, les assemblées politiques enflammées et aussi la campagne natale de Renard (département de la Nièvre), dont il décrit si bien les fulgurances et les habitants. Par des phrases lapidaires, Renard nous livre aussi des portraits sans fard de ses collègues et amis écrivains, lesquels profitent de judicieuses notes de bas de page pour se rappeler à nos mémoires (la mienne étant particulièrement déficiente). Ses mots d'esprit amusent autant qu'ils surprennent (un peu de misogynie, un soupçon d'intolérance, une goutte d'antisémitisme, peut-on dire que c'était un homme de son temps? ). Les travers humains y sont disséqués minutieusement, lui-même ne s'épargne pas et écorche au passage sa famille et le monde des arts. « Un écrivain dont l'oeil était aussi aigu que les mots », Jules Renard s'est efforcé dans son oeuvre de « donner la plante de la réalité avec ses racines ». Et un échange récent avec MarjorieD m'a convaincue d'entreprendre la lecture de Poil de Carotte...
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Jules Renard est très célèbre par son "Poil de Carotte". Mais il ne fait pas partie des poids lourds de la littérature française. Pourtant son "Journal" écrit entre 1887 et 1910 et paru après sa mort (après avoir été expurgé) a été classé parmi les « cent livres du XXème siècle ». Il faut dire que l'auteur était caractérisé par sa lucidité hors du commun. de plus, il connaissait bien le Tout Paris littéraire de son époque. Au fil des jours, il a écrit ainsi de très nombreuses notes, parfois courtes, parfois plus développées.
J'ai tenté de me plonger dans ce long, très long Journal. Mais j'ai été incapable d'en faire une lecture intégrale. J'ai lu quelques dizaines de pages par ci par là, pour voir si les sujets abordés à diverses périodes de la vie de Jules Renard pouvaient m'intéresser. En fait, il se réfère très souvent à des personnages dont j'ignorais tout ou presque tout - et cela m'a démotivé. J'ai abandonné assez vite. Mais je comprends que ce livre puisse être une source précieuse pour les historiens de la littérature et plus généralement pour les spécialistes des années autour de 1900.
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critiques presse (1)
OuestFrance
06 novembre 2023
Membre du jury Goncourt de 1907 à sa mort en 1910, Jules Renard en dévoile ce qui s’y joue dans son célèbre « Journal ». Et ce n’est pas toujours glorieux…
Lire la critique sur le site : OuestFrance
Citations et extraits (283) Voir plus Ajouter une citation
Le savant généralise, l'artiste individualise.
Journal, 17 janvier 1889

Je suis un libre penseur qui voudrait bien avoir pour ami un bon curé.
Journal, 5 novembre 1898

Chardon
C'et peut-être parce que le chardon pique qu'il ne criant pas la sécheresse.
Il ne faut pas être trop indulgent, un peu de haine protège.
5 juillet 1905

Chien
Pendant la guerre un homme se résigne à manger son chien, regarde les os qu'il laisse et dit :
- Pauvre Médor comme il se serait régalé !
12 février 1908

Clarté
La clarté est la politesse de l'homme de lettres.
7 octobre 1892

Coccinelle
Un petite tortue qui tout à coup s'envole.
12 juillet 1903

Cochon
Tout est beau, il faut parler d'un cochon comme d'une fleur.
Journal, 9 mai 1891

Fantastique
Il faudrait (...) distinguer le fantastique précis, analytique, géométrique, justifié, de Poe, du fantastique de ceux qui imitent ce qu'il y a en lui de moins bon, de cette terreur qui consiste (...) à voir des pieds nus sous les portes, des rideaux écartés par une main, et des mains de femme fraîchement coupées sur le marchepied d'un wagon (...). Le fantastique qui n'est que le rêve d'une imagination déréglée, pas dégraissée, n'a rien de commun avec le fantastique de Poe. La vie peut se passer de logique, la littérature, pas.
25 janvier 1894


Fantec
Hier, en lui expliquant de l'Ovide, je me suis emporté jusqu'à le traiter de petit imbécile et à me donner mal à la tête et à la gorge. J'ai passé une nuit absurde. Fantec a eu la colique et s'est levé plusieurs fois. Déjà j'ai des remords.
— Il ne fallait pas l'envoyer au lycée ce matin, dis-je à Marinette.
Je sens qu'elle a quelque chose à me dire. Elle le dit enfin, les larmes aux yeux.
— Écoute, je trouve que tu cries trop. A sa place, je serais abrutie, et, sans doute, il perd la tête. Quand il rentre, je lui dis :
— Ta mère trouve que je crie trop. Si cela te paralyse, dis-le-moi franchement. Je te parle en ami. Je veux faire de toi un homme, et je suis décidé à être toujours loyal, juste, et non à user contre toi d'une autorité que je ne me reconnais pas. Trouves-tu que je crie trop ?
— Oh ! non, répond-il.
— Quelquefois, emporté par le désir que tu comprennes, je te dis : "Tu as l'air d'un petit serin, d'un idiot !" Est-ce que je te froisse ?
— Oh ! non.
— Tu as eu une phrase, un "Est-ce que je sais, moi !" qui m'a paru presque de la révolte. Est-ce de la révolte ?
— Oh ! non. (...)
— Tu vois ! dis-je à Marinette qui nous écoute étonnée et attendrie.
— Alors, je ne comprends plus, dit-elle à Fantec. Pourquoi ne réponds-tu pas à des questions auxquelles je pourrais répondre, moi qui ne sais ni le latin ni le grec ?
— Je "chais" pas, dit Fantec. (...)
Vraiment, la communication est difficile entre un père et un fils quand le père ne veut pas être le maître jusqu'à l'injustice. Il ne paraît même pas touché par cette scène.
— Alors, les coliques, dis-je, ce n'est pas moi qui te les ai données ?
— Oh ! non, papa. (...)
C'est peut-être la leçon suprême de Poil de Carotte, sa dernière épreuve. Il essaiera, pour élever ses enfants, de faire le contraire des Lepic, et ça ne lui servira de rien : ses enfants seront aussi malheureux qu'il l'a été.
6 novembre 1901

Femme
Comme avec des ciseaux, la femme, avec ses cuisses qui s'ouvrent, coupe les gerbes de nos désirs.
Nous sommes las d'avoir fauché tant de désirs dans le beau champ de notre amour.
1887

Victor Hugo
Victor Hugo seul a parlé : le reste des hommes balbutie. Quelques-uns peuvent lui ressembler par la barbe, la largeur du front, les cheveux indéracinables et casseurs de ciseaux, effroi des barbiers, et la préoccupation de jouer un rôle comme grand-père ou comme homme politique. Mais, si j'ouvre un livre de Victor Hugo, au hasard, car on ne saurait choisir, je ne sais plus. Il est alors une montagne, une mer, ce qu'on voudra, excepté quelque chose à quoi se puissent comparer les autres hommes.
13 juillet 1893

Individu
Il s'agit non d'être le premier , mais unique.
2 juin 1899

Intellect
La vie intellectuelle est à la réalité ce que la géométrie est à l'architecture. In est d'une stupide folie (…) de vouloir appliquer à sa vie sa méthode penser, comme il serait antiscientifique de croire qu'il existe des lignes droites.
11 novembre 1888

Lire
J'aime lire comme un poule boit, en relevant fréquemment la tête, pour faire couler.
20 février 1894

Mystère
Parfois, tout, autour de moi, me semble si diffus, si tremblotant, si peu solide, que je m'imagine que ce monde-ci n'est que le mirage d'un monde à venir, sa projection. Il me semble que nous sommes encore loin de la forêt et que, bien que l'ombre des grands arbres déjà nous enveloppe, nous avons encore beaucoup de chemin à faire avant de marcher sous leur feuillage.
14 novembre 1887

Nostalgie
La nostalgie que nous avons des pays que nous ne connaissons pas n'est peut-être que le souvenir de régions parcourues en des voyages antérieurs à cette vie.
1887, s. d.

Pensée
Le mot est l'excuse de la pensée.
17 avril 1896
Une pensée écrite est morte. Elle vivait. Elle ne vit plus. Elle était fleur. L'écriture l'a rendue artificielle, c'est-à-dire immuable.
15 novembre 1888
Penser c'est chercher des clairières dans un forêt.
28 mars 1894

Singe
Le singe : un homme qui n'a pas réussi.
18 aout 1905

Statue
Faites à ma statue un petit trou sur la tête afin que les oiseaux y viennent boire.
10 décembre 1899

Travail
La peur de l'ennui est la seule excuse du travail
10 septembre 1892
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"Le savant généralise, l'artiste individualise.
Journal, 17 janvier 1889

Je suis un libre penseur qui voudrait bien avoir pour ami un bon curé.
Journal, 5 novembre 1898

Chardon : C'est peut-être parce que le chardon pique qu'il ne craint pas la sécheresse.Il ne faut pas être trop indulgent, un peu de haine protège.
5 juillet 1905

Chien : Pendant la guerre un homme se résigne à manger son chien, regarde les os qu'il laisse et dit :- Pauvre Médor comme il se serait régalé !
12 février 1908

Clarté : La clarté est la politesse de l'homme de lettres.
7 octobre 1892

Coccinelle : Un petite tortue qui tout à coup s'envole.
12 juillet 1903

Cochon : Tout est beau, il faut parler d'un cochon comme d'une fleur.
Journal, 9 mai 1891

Fantastique : Il faudrait (...) distinguer le fantastique précis, analytique, géométrique, justifié, de Poe, du fantastique de ceux qui imitent ce qu'il y a en lui de moins bon, de cette terreur qui consiste (...) à voir des pieds nus sous les portes, des rideaux écartés par une main, et des mains de femme fraîchement coupées sur le marchepied d'un wagon (...). Le fantastique qui n'est que le rêve d'une imagination déréglée, pas dégraissée, n'a rien de commun avec le fantastique de Poe. La vie peut se passer de logique, la littérature, pas.
25 janvier 1894

Fantec : Hier, en lui expliquant de l'Ovide, je me suis emporté jusqu'à le traiter de petit imbécile et à me donner mal à la tête et à la gorge. J'ai passé une nuit absurde. Fantec a eu la colique et s'est levé plusieurs fois. Déjà j'ai des remords.— Il ne fallait pas l'envoyer au lycée ce matin, dis-je à Marinette.Je sens qu'elle a quelque chose à me dire. Elle le dit enfin, les larmes aux yeux.— Écoute, je trouve que tu cries trop. A sa place, je serais abrutie, et, sans doute, il perd la tête. Quand il rentre, je lui dis :— Ta mère trouve que je crie trop. Si cela te paralyse, dis-le-moi franchement. Je te parle en ami. Je veux faire de toi un homme, et je suis décidé à être toujours loyal, juste, et non à user contre toi d'une autorité que je ne me reconnais pas. Trouves-tu que je crie trop ?— Oh ! non, répond-il.— Quelquefois, emporté par le désir que tu comprennes, je te dis : ""Tu as l'air d'un petit serin, d'un idiot !"" Est-ce que je te froisse ?— Oh ! non.— Tu as eu une phrase, un ""Est-ce que je sais, moi !"" qui m'a paru presque de la révolte. Est-ce de la révolte ?— Oh ! non. (...)— Tu vois ! dis-je à Marinette qui nous écoute étonnée et attendrie.— Alors, je ne comprends plus, dit-elle à Fantec. Pourquoi ne réponds-tu pas à des questions auxquelles je pourrais répondre, moi qui ne sais ni le latin ni le grec ?— Je ""chais"" pas, dit Fantec. (...)Vraiment, la communication est difficile entre un père et un fils quand le père ne veut pas être le maître jusqu'à l'injustice. Il ne paraît même pas touché par cette scène.— Alors, les coliques, dis-je, ce n'est pas moi qui te les ai données ?— Oh ! non, papa. (...)C'est peut-être la leçon suprême de Poil de Carotte, sa dernière épreuve. Il essaiera, pour élever ses enfants, de faire le contraire des Lepic, et ça ne lui servira de rien : ses enfants seront aussi malheureux qu'il l'a été.
6 novembre 1901

Femme : Comme avec des ciseaux, la femme, avec ses cuisses qui s'ouvrent, coupe les gerbes de nos désirs.Nous sommes las d'avoir fauché tant de désirs dans le beau champ de notre amour.
1887

Victor Hugo
Victor Hugo seul a parlé : le reste des hommes balbutie. Quelques-uns peuvent lui ressembler par la barbe, la largeur du front, les cheveux indéracinables et casseurs de ciseaux, effroi des barbiers, et la préoccupation de jouer un rôle comme grand-père ou comme homme politique. Mais, si j'ouvre un livre de Victor Hugo, au hasard, car on ne saurait choisir, je ne sais plus. Il est alors une montagne, une mer, ce qu'on voudra, excepté quelque chose à quoi se puissent comparer les autres hommes.
13 juillet 1893

Individu : Il s'agit non d'être le premier , mais unique.
2 juin 1899

Intellect : La vie intellectuelle est à la réalité ce que la géométrie est à l'architecture. Il est d'une stupide folie (…) de vouloir appliquer à sa vie sa méthode penser, comme il serait antiscientifique de croire qu'il existe des lignes droites.
11 novembre 1888

Lire : J'aime lire comme un poule boit, en relevant fréquemment la tête, pour faire couler.
20 février 1894

Mystère : Parfois, tout, autour de moi, me semble si diffus, si tremblotant, si peu solide, que je m'imagine que ce monde-ci n'est que le mirage d'un monde à venir, sa projection. Il me semble que nous sommes encore loin de la forêt et que, bien que l'ombre des grands arbres déjà nous enveloppe, nous avons encore beaucoup de chemin à faire avant de marcher sous leur feuillage.
14 novembre 1887

Nostalgie : La nostalgie que nous avons des pays que nous ne connaissons pas n'est peut-être que le souvenir de régions parcourues en des voyages antérieurs à cette vie.
1887, s. d.

Pensée : Le mot est l'excuse de la pensée.
17 avril 1896

Une pensée écrite est morte. Elle vivait. Elle ne vit plus. Elle était fleur. L'écriture l'a rendue artificielle, c'est-à-dire immuable.
15 novembre 1888

Penser c'est chercher des clairières dans une forêt.
28 mars 1894

Singe : Le singe : un homme qui n'a pas réussi.
18 aout 1905

Statue: Faites à ma statue un petit trou sur la tête afin que les oiseaux y viennent boire.
10 décembre 1899

Travail : La peur de l'ennui est la seule excuse du travail
10 septembre 1892
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La modestie va bien aux grands hommes. C'est de n'être rien et d'être quand même modeste qui est difficile.

Je sais pourquoi je déteste le dimanche : c'est parce que des gens, occupés à rien, se permettent d'être oisifs comme moi.

Il faut avoir le courage de préférer l'homme intelligent à l'homme très gentil.
Il nous vient souvent l'envie de changer notre famille naturelle contre une famille littéraire de notre choix, afin de pouvoir dire à tel auteur d'une page touchante : "frère".
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Je veux loyalement me réfléchir et savoir l'état de cet être qui est en moi, qui me pousse depuis 30 ans. Je ne me regarde pas sans surprise. Ce qui me frappe d'abord, c'est mon inutilité, et pourtant, je n'arrive pas à me persuader que je n'arriverai jamais à rien. [9 Octobre 1894]
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C'est désespérant : tout lire, et rien ne retenir ! Car on ne retient rien. On a beau faire effort : tout échappe. Çà et là, quelques lambeaux demeurent, encore fragiles, comme ces flocons de fumée indiquant qu'un train a passé.
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Vidéo de Jules Renard
*INTRODUCTION* : _« 11 mai 1894. — Il faut que notre Journal ne soit pas seulement un bavardage comme l'est trop souvent celui des Goncourt. Il faut qu'il nous serve à former notre caractère, à le rectifier sans cesse, à le remettre droit. »_

_« 14 novembre 1900. — Je lis des pages de ce Journal : c'est tout de même ce que j'aurai fait de mieux et de plus utile dans ma vie. »_ *Jules Renard* [1864-1910].
*CHAPITRES* : _1887_ : 0:02 — *22.07* 0:10 — _Introduction_ 0:35 — *28.09*
_1888_ : 0:53 — *15.11*
_1889_ : 1:07 — *14.06* 1:21 — *28.08* 1:45 — *10.11*
_1890_ : 1:54 — *17.02* 2:03 — *21.02* 2:36 — *14.03* 2:49 — *31.03* 3:02 — *03.05* 3:14 — *02.06* 3:25 — *24.09*
_1891_ : 3:44 — *20.03* 4:04 — *26.05* 4:16 — *18.10*
_1892_ : 4:25 — *06.01* 4:33 — *04.02* 4:48 — *09.03* 4:59 — *02.04* 5:07 — *11.06* 5:16 — *03.08* 5:27 — *26.10*
_1893_ : 5:37 — *24.01* 5:47 — *27.03* 5:56 — *24.04* 6:04 — *12.05* 6:21 — *24.05* 6:31 — *15.06* 6:40 — *06.09* 6:55 — *06.09* 7:06 — *19.09* 7:18 — *07.11* 7:28 — *15.12*
_1894_ : 7:38 — *17.01* 7:57 — *22.02* 8:09 — *31.03* 8:20 — *10.04* 8:32 — *27.04* 8:45 — *01.05* 8:59 — *11.05* 9:13 — *16.05* 9:23 — *21.09* 9:33 — _Générique_
*RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES* : « Journal Inédit : 1887-1895 », _in Les Oeuvres complètes de Jules Renard,_ Paris, François Bernouard, 1925, 368 p.
« Journal Inédit : 1896-1899 », _in Les Oeuvres complètes de Jules Renard,_ Paris, François Bernouard, 1926, 328 p.
« Journal Inédit : 1900-1902 », _in Les Oeuvres complètes de Jules Renard,_ Paris, François Bernouard, 1926, 306 p.
« Journal Inédit : 1903-1905 », _in Les Oeuvres complètes de Jules Renard,_ Paris, François Bernouard, 1927, 296 p.
« Journal Inédit : 1906-1910 », _in Les Oeuvres complètes de Jules Renard,_ Paris, François Bernouard, 1927, 370 p.
*IMAGE D'ILLUSTRATION* : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/a5/Jules_Renard_-_photo_Henri_Manuel.jpg
*BANDE SONORE ORIGINALE* : Scott Buckley — Midvinter Midvinter by Scott Buckley is licensed under an Attribution 4.0 (CC BY 4.0) license. https://soundcloud.com/scottbuckley https://www.free-stock-music.com/scott-buckley-midvinter.html
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Thème : Jules RenardCréer un quiz sur ce livre

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