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Jean-Paul Gratias (Traducteur)
EAN : 9782743610715
324 pages
Payot et Rivages (14/02/2003)
3.7/5   41 notes
Résumé :

Richard Watt, journaliste anglais, vit en exil en Italie avec sa compagne Magda depuis qu’il a fui une Angleterre gouvernée par un Premier ministre « socialiste », en réalité un dictateur.

En effet, Jobling - c’est son nom - se refuse à organiser de nouvelles élections à l’expiration de son mandat. Sa présence à Roccamarittima ayant été signalée aux autorités anglaises par un couple britannique, Watt se retrouve dans une position délicate. E... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Voilà bien longtemps que je n'avais pas lu quelque chose de Robin Cook, auteur attachant, à la vie tumultueuse, et aventurière, qui a connu son heure de gloire en France avec « On ne meurt que deux fois » au début des années 80.
J'ai abordé donc ce livre avec un préjugé favorable, nourri par le quatrième de couverture qui mentionne que la presse Anglaise avait jugé ce livre digne de succéder à « 1984 » de George Orwell. Je dirais qu'on est loin d'une tel niveau de perfection. La seule ressemblance avec ce chef d'oeuvre, est que l'action se passe sous un régime totalitaire, ayant clivé l'Angleterre du reste de l'Europe, et même du Pays de Galles, et de l'Écosse, avec une population tétanisée, et victime consentante.
En ce sens, il est vrai que ce livre sortit en 1970 n'est pas sans évoquer cette forme de suicide traumatique qu'a été le Brexit, 50 ans plus tard, et que la vision du risque de repli réactionnaire de la Grande Bretagne, s'est avérée assez prophétique. Robin Cook connaît son pays, et si le parallèle avec Orwell est vrai, il est lié à la personnalité des deux hommes. Tous deux issus de milieu petit bourgeois, passés par le collège d'Eton, ils n'hésitèrent pas à pourfendre les valeurs conservatrices de leur pays, tout en y étant attachés. Leur vie aventureuse et à hauts risques, se mêlant au prolétariat, les aurait ils amené à boire un coup ensemble, ou à se retrouver parmi les brigades internationales s'ils avaient vécu à la même époque ?….Je ne sais pas ce qu'Orwell aurait pensé de ce livre, lui qui était critique littéraire à ses heures. Lui aurait il dit, comme moi, que la deuxième partie du livre aurait eu bien besoin d'être retravaillée. Voir, pourquoi pas supprimée.
Deux parties, donc. La seconde commence à la page 197 à la moitié du roman. On bascule alors de l'Italie en Angleterre, et il n'y a pas que le climat qui est plus froid. Je doute que Robin avait envie de rentrer dans son pays, comme son héros, à l'époque où il écrit cette oeuvre. Un écrivain parle toujours un peu de lui, et c'est sûrement un euphémisme dans cette affaire. Il n'est pas difficile de comprendre que l'auteur s'est immergé dans son héros paysan, dans un pays qu'il connaît bien pour y avoir vécu et travaillé lui aussi.

Richard Watt, journaliste engagé, s'est exilé en Toscane, où avec sa compagne Anglaise, il est viticulteur, et très bien intégré dans la communauté. Malheureusement, son passé vient se rappeler à lui, et le voilà menacé d'être extradé. On se questionne si le passé plus ou sulfureux de Robin Cook et ses aventures de bad boy n'ont pas installé ce scénario de la perte du paradis promis.

Le livre de 400 pages est donc divisé en deux parties sensiblement égales en volume, mais certainement pas en qualité. Au point qu'on pourrait se demander s'ils ont été écrites par le même auteur. Ou pour quelle raison psychologique ou liée à l'urgence ou à la nécessité, il a du saboter ainsi son livre ? Jugement peut être un peu dur, mais lié à ma déception finale.
La première partie est liée à ce coin de Toscane devenu un refuge. Les premières pages sont d'une belle qualité d'écriture, vous faisant penser que vous êtes tombé sur quelque chose de rare.
« J'ouvre les volets. Il est très tôt ; pourtant le soleil aveuglant de Toscane, qui bombarde le sol de la cour comme une grêle de pièces d'or, se reflète avec violence sur le capot orange du tracteur. Un vent chaud, le sirocco, monte du ravin par bouffées indolentes ; je l'entends bien avant qu'il n'arrive jusqu'à nous pour agiter nos arbres. »

Toute cette première partie est efficacement traduite, dans cette prise de connaissance du pire, de la perte inéluctable des choses, après la révélation venant d'un officier débonnaire de gendarmerie, embarrassé par son devoir d'information. Un processus qui est celui de l'existence, et qui est quelquefois associé à la maladie, rendant encore plus beau ce qu'on abandonne, quand on glisse vers la mort, et que le regard des autres se transforme, entre compassion, et fuite.

La seconde moitié m'est tombée des mains. Elle est liée à l'expérience de l'enfermement, et d'un monde qui se resserre lentement sur la vie. Malheureusement, elle est très peu crédible, voir ridicule. On est loin des textes de Primo Levi sur l'enfermement, et la négation de l'homme, débarrassé de toute sa dimension humaine. L'attitude du héros, revendicatif, et violent, faisant sans cesse dans l'apostrophe, et le passage à l'acte envers ses geôliers, dans des attitudes défiant le shériff et ses hommes alors qu'il est à leur merci sont ridicules, et les dialogues semblent sortir d'un livre de série B, ou de superposer.
Je retiens donc les 197 premières pages de ce roman, qui se seraient suffis à elle mêmes.
Entre la note 4 que j'accorderais à la première partie et un 2 boosté à la seconde, la note 3 me parait satisfaisante, pour un livre qui reste une curiosité. Bravo au traducteur qui a réussi à traduire le titre Shakespearien " A state of Denmark" au mieux.
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Du passé faisons table rase et que l'avenir soit à jamais banni, tel semble être le mot d'ordre récurrent de ce roman d'une autre époque (1970) où un homme, journaliste non aligné, tente d'échapper au rouleau compresseur d'une société devenue totalitaire.
Un homme décidé, mordant, résistant, un homme amoureux, sincère, protecteur et fidèle, un homme instruit des choses du monde, animé par le désir de le parcourir, de regarder, écouter, comprendre. Un homme pris aussi par la nécessité de se mettre à l'abri de ses dérives et qui entreprend de s'installer pacifiquement dans un ailleurs où l'espace ne serait plus consacré qu'aux vertus de l'amour, du travail, de l'amitié et d'une révolte mesurée.
Mais sous le soleil aveuglant de l'Italie où il s'est réfugié, les jours heureux comptent pour rien, la détermination ne suffit pas et les bonnes résolutions volent en éclats quand les limiers de l'ordre nouveau viennent frapper à sa porte pour lui faire payer au prix fort ses engagements passés. L'être humain se transforme dans l'adversité mais plongé au coeur de la machine destructrice, celui-ci ne ferraillera bientôt plus qu'à tâtons, perdu dans l'obscurité d'une humanité déchue. Seule subsistera un temps la rage qu'engendre la dépossession et la volonté de survivre remplacera peu à peu l'exigence de liberté.
Au fil des pages on peut faire l'inventaire des règles qui fondent cet ordre absolu : division en classes, suppression des droits fondamentaux, médias sous tutelle, recours à la délation, milices omnipotentes, camps d'internements, élimination rationnelle des récalcitrants, déportation des étrangers...
Une anticipation qui fait froid dans le dos tant on peut en éprouver la banalisation dans le monde actuel et constater la mise en oeuvre ça et là de tout ou partie de ces conceptions. Un roman éprouvant, parfois insoutenable, mais qui entraîne forcément le lecteur à approfondir la façon dont il se débrouille avec ces affaires-là … avant de s'abandonner au sommeil.
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La première moitié de « Quelque chose de pourri au royaume d'Angleterre » (Robin Cook) est consacrée aux années italiennes de Richard Watt. Cela peut sembler étrange de s'attarder ainsi sur Roccamarittima, ses habitants, la nouvelle vie de fermier du protagoniste. Cet enragé dont la tête a été mise à prix par le nouveau régime est désormais un paysan qui fait des journées de 16 heures et boit son litre de rouge sans ciller. On l'imagine grand et sec, à l'image des ceps de vigne qu'il cultive. Puis, doucement, avec les saisons, il va nous livrer par flash ses souvenirs d'opposant intellectuel et son regard sur l'Angleterre qui sombre dans un fascisme néo-prolétarien. Il compare avec la démocratie italienne. C'est comme s'il avait renforcé sa vigueur intellectuelle par une activité physique et gagné en humanité grâce au contact avec les habitants de ce village qu'il adore et qui l'adorent. Et pourtant, on en vient vite à sentir l'angoisse de l'exilé, sa fragilité. Avec le récit à la première personne, nous sommes en prise directe. Et si tout s'évaporait, si le passé le rattrapait ?
Il y a un énorme travail sur la psychologie de cet intellectuel engagé dans un double contexte d'exil et de répression. le trait d'union entre les deux est un chapitre formidable consacré à l'accueil de deux amis pour les vacances. On y voit tout le « gap » qui sépare Richard et sa femme Magda de ces deux êtres superficiels, sans force intérieure gagnés par les théories du Nouvel Elan.
Car c'est ce qui frappe quand Richard est confronté aux agents du régime. Lui, paysan, la quarantaine, les traits tannés par le soleil, n'est confronté qu'à des êtres médiocres, peu développés, bedonnant et adipeux dans leurs costumes bon marchés. Leur peau est malsaine, leurs cheveux gris sales, gras et clairsemés. Watt résiste, les humilie, leur parle sur un ton qu'ils n'ont jamais entendu, garde même sa capacité d'analyse pour comprendre ce qu'ils faisaient, avant, et pourquoi, ils en son arrivés là. Et pourtant, à chaque fois, il cède. Jusqu'à l'internement, où il vit la répression à l'état brut. Pas la violence physique, mais celle qui met face au néant, à l'absence de perspectives et d'espoir. le temps est aboli, il faut attendre, on est rongé par l'ennui et progressivement, on perd en épaisseur, sur les plans physique et intellectuel. Pas d'exercice, nourriture infecte, lectures mièvres, interdiction d'écrire, pas de procès, personne à qui s'opposer, attente de rien. Les analyses sont moins percutantes. Dépérissement.
Un vrai beau livre, avec un regard très sensible sur ce village italien et ses habitants puis sur l'Angleterre qu'il retrouve, Douvres, les trains, la campagne de son enfance autour de Londres.
Richard Watt n'a pas fait l'unique chose qui lui aurait sauvé la mise, prendre la nationalité italienne.
Les analogies avec Robin Cook sont évidentes. Ils sont issus d'une grande famille bourgeoise avec laquelle ils ont rompu, ils ont quitté l'Angleterre pour le continent et la ville pour la campagne. Une façon de rentrer dans l'intimité et l'univers de cet écrivain si attentif à ces personnages, auquel François Guerif a consacré de belles pages dans « du polar ».

Lien : http://polaroides.blog.lemon..
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Un livre d'anticipation politique où le narrateur, journaliste anglais exilé en Italie, est ramené de force dans une Angleterre devenue fasciste, pour y être
Je concède à ce bouquin une certaine force, notamment dans l'évocation de l'engrenage inexorable qui va progressivement pousser le narrateur dans les rets des fascistes. Il y a une puissance sombre, pessimiste qui se dégage de ce livre, car on sent dès le début l'épée de Damoclès au-dessus de sa tête.
Malheureusement, la puissance du propos est parasitée par un style péniblement verbeux. Les dialogues sonnent complètement faux, les descriptions de l'Italie sur cinq pages sont exaspérantes, les personnages sont à gros traits. Et puis je trouve (mais peut-être suis-je cruelle !) que Cook ne va pas assez loin dans la description de l'horreur que peut vraiment atteindre un régime totalitaire et son système concentrationnaire. C'est effrayant mais ça reste assez policé, Comparé, par exemple, à la République Dominicaine de Vargas Llosa (qui, il est vrai, était réelle!), son Angleterre facho est assez peu crédible. Même si je lui concède de décrire efficacement la façon dont l'esprit et l'humanité s'éteignent dans les geôles de ce genre de système.
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Le choix de Jérôme pour Collectif Polar
Un grand roman et un grand auteur !
Publié en 1970 et salué par la presse anglaise comme un digne successeur du 1984 de George Orwell, Quelque chose de pourri est un roman impressionnant, superbement écrit et étonnamment prémonitoire. Robin Cook y dénonce, comme l'a souligné Jean-Pierre Deloux, le «totalitarisme des démocraties en décadence et dégénérescence, se voulant des modèles de libre entreprise et de libéralisme, qui font fi rapidement de leurs propres lois et de leurs codes judiciaires qu'elles n'hésitent pas à transgresser ou à bafouer au nom de l'intérêt général, d'impératifs économiques, d'états d'urgence ou de sécurité publique».
Mais que nous raconte "Quelque chose de pourri au royaume d'Angleterre"
Dans un futur proche. Richard Watt, journaliste anglais, est obligé de s'exiler en Italie. L'Angleterre, en effet, est gouvernée par un Premier ministre qui refuse d'organiser de nouvelles élections à la fin de son mandat. Mais, Richard Watt est poursuivi, chassé d'Italie et interné dans un camp de concentration
J'aurai pu en choisir d'autres titre de Robin Cook , "J'étais Dora Suarez", bien sûr, "Il est mort les yeux ouverts", l'autre grand roman de sa série The Factory, mais j'aime aussi celui-ci, "Quelque chose de pourri… " Un grand roman dystopique. Un homme vit en Toscane, il a fui l'Angleterre après l'élection de celui qu'il avait dénoncé avec acharnement. Il a dû fuir parce qu'une dictature se mettait en place. Mais peut-on fuir son pays ? Peut-on fuir la violence faite à ses semblables ?
Lien : https://collectifpolar.blog/..
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Et en dépit de tout, de ma peur constante, de mes désillusions passées, de mes combats, je n'ai pas envie de mourir. Je veux voir encore un été et beaucoup d'autres automnes, ma saison préférée ici, quand les grandes tempêtes se préparent et s'ébrouent comme des géants derrière les montagnes avant de fondre sur nos terres, courbant les arbres vers la maison, jetant des masses de pluie et de feuilles mortes contre la fenêtre de la cuisine où brûle le premier feu de hêtre et de chêne tandis que Magda nourrit les chiens et les deux chats et pose sur la table la théière et le pot de miel offert par un voisin. Je veux comprendre bien mieux encore toutes ces choses simples, apprendre à aimer davantage, et au bout du compte me dresser contre des monstres tels que Jobling, qui écrivent le nom de la mort dans les marges de toutes ces pages, et les renverser.
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Les jeunes font des révolutions, ou pensent les faire ; en réalité, ils sont, à chaque fois, exploités par des vieux renards qui les manipulent. Les jeunes Britanniques ont cru mener une révolution : ce qu’ils sont effectivement parvenus à faire, c’est déstabiliser l’ordre établi, donnant ainsi à Jobling l’occasion de prendre le pouvoir et de gouverner par ordonnances.
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Vivre à la ferme n’est pas une détente. La situation a évolué de telle manière que nous sommes tous les deux contraints de l’exploiter pour gagner notre vie, et c’est un rude travail. Notre terre doit non seulement nous fournir une quantité de vin et d’huile suffisante pour subsister toute l’année, mais aussi pour nous assurer des revenus, car nous vendons une partie de notre production.
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À mon âge, changer de mode de vie est déjà pénible ; quand il change pour empirer, comme l’impose le Nouvel Élan, c’est intolérable. Par nature, je suis porté au pessimisme. Je n’ai jamais cru au progrès, qui est impossible dans le cadre de n’importe quel système politique, de droite ou de gauche, de répartition des pouvoirs. Ces systèmes exercent toujours leur pression sur la société pour qu’elle demeure ce qu’elle est ou, si cela est impossible, pour qu’elle soit encore plus immuable, c’est-à-dire répressive.
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Boire, ce n’est pas une bonne chose, car alors je deviens trop lucide, et je me vois tel que je suis : un être qui se ratatine sur lui-même, et dont le véritable cadre de vie est constamment hors de portée.
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Video de Robin Cook (II) (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Robin Cook (II)
Bande-annonce de "On ne meurt que deux fois" de Jacques Deray avec Michel Serrault, Charlotte Rampling.
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