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Nathalie Godard (Traducteur)
EAN : 9782869305724
242 pages
Payot et Rivages (02/06/1992)
3.86/5   75 notes
Résumé :

“Ma mère vénérait Wagner et voulait me donner un nom d’opéra. Elle hésitait entre Brunhilde, Sieglinde, Isolde, Ortrud et Elsa. Mais papa, qui traduisait Hamlet, Le Roi Lear et Richard III, insistait pour m’appeler Edmonde, en l’honneur de son traître préféré, Edmund, fils bâtard de Gloucester, dans Lear. On me baptisa donc Edmonde Sieglinde Kerrl…” Née le 13 janvier 1915, Edmonde devient sans le vouloir membre du NSDAP, le “parti antisémite, anticommuniste,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Vous voulez vous informer sur le nazisme, la deuxieme guerre mondiale, la Shoah? Vous pouvez bien sur essayer les historiens. Ils sont legion, qui ont pondu de sacres paves, depuis Basil Liddell-Hart, Leon Poliakov et Raul Hilberg, jusqu'a Anthony Beevor et Ian Kershaw, en passant par Joachim Fest, Christopher Browning et Annette Wieviorka. Mais si vous voulez mon avis ce petit bouquin peut suffire. A vous eclairer. Et a vous ecoeurer. Tout en vous faisant bien marrer en nombre de passages. Rire d'un rire d'hyene. Mais prenez un moment de reflexion avant de vous jeter dedans. Il n'est pas fait pour de petites natures.


C'est l'histoire d'une jeune allemande, Edmonde Sieglinde Kerrl, qui va se trouver, par hasard mais a son corps consentant, au centre de toute l'histoire de l'Allemagne, de 1930 a 1945. Elle est ainsi acteur et temoin. Acteur actif et non reticent et en meme temps temoin critique. Elle va collaborer avec les S.A puis avec les S.S. Elle va faire de l'espionnage, de la police, aider a diriger un camp d'extermination, et n'hesitera pas a tuer de ses propres mains tous ceux qui la menacent ou la genent. Elle va etre proche de tous les grands du parti, commencant par “ce porc d'Ernst” (Rohm), puis “le gros Hermann” (Goering), “le petit Joseph" (Goebbels), “le chauve Heinrich a lunettes” (Himmler), tous des “cochons d'encules", et la plupart ou pederastes ou impuissants. Proche aussi du plus grand des impotents, Hitler, incapable de coucher avec sa petite amie, Eva. Alors c'est elle qui va coucher avec Eva (Braun la blonde). Comme avec Lisa ( une amie d'enfance). Et avec Lucie (une juive). Et avec Marie-Jose (resistante francaise sado-macho) et Vera ( sa prisonniere russe) et Naima (contrebandiste et espionne suedoise) et Faustina (internee du camp de travail et de mort) et beaucoup d'autres dont je prefere vous epargner les scenes a l'erotisme torride, tape-a-l-oeil, bruyant, flirtant avec la pornographie, qui nourrissent de tres nombreuses pages de ce livre. de quoi vous degouter. Ou vous aguicher. Et y-a-t-il de l'amour dans tout ce sexe? Mais voyons! “Elle me haissait. Il y avait une autre fille, en Ukraine, Vera, elle me haissait aussi. Elle a essaye de me capturer vivante pour pouvoir m'enfouir dans le soufre, ou me noyer dans de l'urine russe. Et il y avait une troisieme fille, a Berlin, une juive, Lucie. Elle me haissait encore plus que Vera et Marie-Jose. Je l'ai amenee à Bad Tolz, lui ai offert ma maison, et elle a tout souille de sa haine. La haine, Lisa. Savais-tu que les histoires de haine existent aussi bien que les histoires d'amour ? Savais-tu qu'on pouvait chanter des chansons de haine autant que des chansons d'amour ? Savais-tu qu'il y a des liaisons haineuses, comme des liaisons amoureuses ? Qu'on peut tomber haineux aussi bien qu'amoureux ?”


Mais cette demoiselle Kerrl est fille d'un acteur de theatre. Bien que mort, elle l'invoque sans arret pour qu'il la conseille et la protege depuis l'au-dela. Il lui a legue une certaine culture, alors elle declame sans arret des vers de Shakespeare (Shakespeare sied tres bien aux meurtres, aux trahisons, aux atrocites de la guerre). Et elle met chaque action, chaque pas qu'elle fait, en rapport avec ses anciennes lectures, le comte de Monte Cristo, Hercule Poirot, Hedda Gabler d'Ibsen, La lettre volee d'Edgar Allan Poe, L'enfer de Dante. Elle lit et traine partout avec elle un livre, comme une amulette, Anthony Adverse, d'un certain Hervey Allen, qui avait eu un certain succes a l'epoque, et dont on avait tire un film avec Olivia de Havilland, qu'elle avait adore. Comme elle avait aime d'autres films hollywoodiens, The Mask of Fu Manchu, The Bitter Tea of General Yen, Frankenstein, Gold Diggers, sachant que “tous les talents juifs emigraient. Fritz Lang, Siodmack, Conrad Veidt, et des centaines d'autres. L'industrie cinematographique allemande devenait aussi aryenne que Parsifal”. Rien de plaisant pour elle.


C'est tellement simple: Behm retrace le parcours d'une femme cultivee, intelligente, predatrice sexuelle, bourreau nazi. Simple et deroutant. Raconte en des pages pleines de sexe, et d'atrocites, et de culture, et de sauvagerie, et d'humour, et de cruaute et d'ironie et de barbarie et de derision et d'inhumanite. Revoltant. A se sentir mal. A en rire. A en jouir. A en degueuler . Un livre comme un pied de nez, ou comme un bras d'honneur, a l'incomprehensible. Je suppose que Behm, qui a surement lu nombre de travaux d'historiens, ne comprend toujours pas. Comme moi. Alors, son livre, ecoeurant, comme je notais plus haut? Non. Acide, corrosif, mais rejouissant aussi. Tres rejouissant. Pour fortes natures et ames bien trempees? Pas seulement. Pour petits aventuriers en litterature, comme moi, aussi.


N.B. C'est, encore un fois, Pecosa qui m'a fourvoye, me chantant les charmes des chemins ecartes.


P.S. Un des petits plaisirs du livre est le Dictionnaire d'argot americain que l'heroine egrene au fil des pages:
fit to be tied – dans une colere noire
I spill the beans – je vends la meche
madder than a wet hen – dressee sur ses ergots
caught between the devil and the deep blue see – entre l'enclume et le marteau
dropped me like a hot potato – m'a plaquee comme une crepe
off the deep end – completement a cote de la plaque.
the cat was out of the bag – le grand mot etait laché
footpad, predator, freebooter, or crook – voleur, predateur, maraudeur, ou escroc
Like a log – comme une souche
gave me the jitters – me flanquaient la trouille
better to be safe than sorry – mieux vaut prevenir que guerir

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Cher lecteur extra-terrestre, découvrant probablement Babélio par une liaison extra-ternet ou alors nous faisant la joie d'une visite à l'improviste sur notre belle planète bleue,

Evidemment, vous n'avez encore jamais entendu parler du nazisme mais vous souhaitez surement connaitre cette idéologie folle marquant le vingtième siècle de notre histoire terrestre.

Plutôt que d'éplucher des livres d'histoire, vous préférez vous plonger au coeur du système de cette époque par l'intermédiaire d'un roman à la fois humoristique et fanatique, versant dans le satirique et l'érotique, en n'oubliant des passages forcément dramatiques. Bref, un ouvrage… unique.

Eureka ! « La reine de la nuit » n'attend plus que vous et l'auteur Marc Behm a pour ainsi dire fait appel à une consoeur, provenant surement d'une autre planète comme vous, pour jouer le rôle principal de ce roman, Edmonde Sieglinde Kerrl.

Pour ne pas choquer le lecteur terrestre (qui a encore beaucoup de mal à croire aux extra-terrestres, j'en conviens), Edmonde possède la nationalité allemande afin de s'intégrer parfaitement au milieu nazi. Mais j'ai évidemment compris que cette fille ne pouvait pas être « cul et chemise »à ce point avec les responsables nazi sans être une espionne aux ordres d'une planète étrangère.

Pour preuve, Edmonde dînait plus petite avec Hermann Goering, le futur commandant en chef de la Luftwaffe et ministre de l'Air sous l'Allemagne nazi, qui était alors pilote et commandant de Jaspa 27 côtoyant son père Eric Kerrl dans une autre escadrille. Coïncidence, vous me direz !

Vivant dangereusement, Mademoiselle Kerrl se lie d'amitié pour Ernst Röhm, le chef des chemises brunes (la Sturmabteilung ou SA) qui ne passera pas l'été 1934 exécuté après la nuit des longs couteaux. Et Kerrl, elle s'en sort comme par miracle !

Plus fort encore, Edmonde connait personnellement Adolf Hitler, le leader du parti nazi dans les années 30 qui va accéder au pouvoir en Allemagne. Et pourquoi donc ? Parce que mademoiselle couche avec Eva la maitresse d'Hitler. La fameuse Eva Braun ! Coit si dense, encore ?

Et je ne vous parle pas d'Himmler, l'homme au crâne chauve avec ses lunettes, le futur chef des SS qu'elle connait personnellement et qui lui fera monter les échelons dans la hiérarchie SS alors qu'elle se plait à traiter les SS de « cochons d'enculés » à longueur de journée. Et pire que tout, elle ne comprend même pas cet acharnement contre les juifs. Pour une SS ! Pfffffffff…

Ayant déjà pratiqué la littérature Behmiène à travers notamment l'excellent «Et ne cherche pas à savoir » et la divine Lucy, je n'ai pas été surpris par la galerie de personnages farfelus réels ou imaginaires rencontrés au détour des voyages d'Edmonde en Allemagne, en France ou en Ukraine...

Malgré tout, j'ai tout de même été stupéfait par la collection de conquêtes amoureuses de la belle Kerrl, souvent se terminant en « a » dont la libido dépasse assurément les limites terriennes.

Hormis Eva la maitresse d'Adolf Hitler, je peux vous citer Lisa son premier amour qu'elle protégera à tout prix, quitte à droguer avec des somnifères et enterrer vivant son tortionnaire de mari ou encore Lucie la dactylo juive qu'elle cachait dans sa maison d'enfance pour la protéger des rafles de juifs.

Dans une relation amoureuse puis haineuse, de nombreuses rencontres torrides se sont mal terminées avec les nations ennemies : Naima Josephson, vendeuse de cigares cubains et espionne suédoise pour les britanniques, Marie-José la française entrée dans la résistance, ou encore Vera, « une commissaire du peuple russe » au double-jeu.

Pour conclure, on ne peut rester indifférent devant un tel réquisitoire pratiqué au second degré qui fait froid dans le dos, surtout lorsqu'Edmonde découvre le camp de concentration près de Gotha, qui semble être Ohrdruf, une annexe de Buchenwald. Pour écrire une roman aussi dérangé que dérangeant, on peut même se demander si Marc Behm ne débarquait également d'une autre planète ?

Que vous soyez terriens ou non, sachez que la Reine de la nuit, une fois engloutie, rodera à jamais dans notre esprit…
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Edmonde est née en Allemagne en 1915, elle a commencé à fumer à 11 ans et pour avoir des cigarettes, elle montrait sa poitrine naissante à un vieux voisin pédophile. Elle a traversé tout le troisième Reich. fréquenté les personnages les plus hauts placés, décrits avec humour, et même rencontré Hitler. Elle n'a aucune conviction politique elle va ou son intérêt la pousse.
On traverse la guerre , dans les coulisses. Pas de grandes théories idéologiques mais chantage, pressions, sexe... Rien que des arrangements entre personnages puissants et qui déploient une cruauté sans limites.
Certes c'est un livre noir, à ne pas mettre entre toutes les mains. Les scènes des sexes sont décrites avec autant de précision que les actes de violence mais les mots sont choisis et partout avec un humour noir, décalé et sarcastique.
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On ne fera pas original pour parler de Marc Behm, l'homme avait son style. Pas du genre à aller parader sur les plateaux télé ou à courir les séances de dédicaces. L'écriture ? Une activité comme une autre. Si, si. Quand l'éditeur François Guérif lui signifie que son manuscrit original Tout un roman ! aurait disparu, la sentence est lapidaire : "Tant pis". Pour Behm, prendre la plume n'a de sens qu'à un instant T, ce qu'il en advient après n'est plus de son ressors. Donc quand il se lance, il y va pied au plancher. La Reine de la nuit est un concentré de son esprit : un peu d'Histoire, pas mal d'humour, beaucoup de sexe et une tonne d'irrévérence.

Si vous êtes du genre puritain, la lecture va s'apparenter à un électrochoc à chaque page. Ça fornique de tous les côtés, les personnages inspirés par la crème du commandement SS sont littéralement mis à nu, et les horreurs qu'ils ont laissé sur leur chemin ne nous sont pas épargnées. Quoiqu'il arrive, le point central du livre demeure elle, Edmonde. Difficile de parler d'une héroïne, ses actes ne sont jamais prévisibles, au moins autant que ses pensées dont les feuillets sont inondés. Authentiquement hédoniste, alternant registre lubrique et envolées lyriques, parfois au même moment, on a souvent le souffle court en suivant Edmonde.

C'est peu de le dire, La Reine de la nuit ressemble à un flux de conscience, une biographie en accéléré. Des mémoires livrées sans filtres, pleine d'aventures, de moments burlesques et de fluides corporels. Quand bien même on la retrouve mêlée à la lie de l'humanité, elle se révèle bien plus fine et humaine que les monstres dont elle tire un portrait pour le moins moqueur. Sauf qu'à force de frayer dans les bois, on se condamne à finir dévoré par les loups. On peut apprécier tout en condamnant, le personnage en est la preuve. Il faut être honnête, une narratrice de ce type est un régal, entre ses innombrables "pouah!", ses multiples références littéraires (Shakespeare à l'honneur), ou son effronterie naturelle.

Pour les amateurs d'intrigues claires, avec un fil conducteur bien visible d'un bout à l'autre, La Reine de la nuit n'est pas un choix évident. Il y a tellement d'évènements à se succéder qu'à part les expériences sexuelles d'une jeune femme (très) turbulente, il faut accepter de se laisser emporter sans chercher. Behm avait une règle d'or : ne jamais ennuyer son lecteur. Mission réussie, le roman file tout en cumulant les scènes chocs, farfelues et impudiques. Et à le bon goût de se finir avec une énième bravade à la bienséance. Pas près de l'oublier, cette femme-là.
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"La Reine de la nuit" de Marc Behm est un roman hallucinant car il plonge le lecteur dans le mal absolu. Il dépasse l'entendement mais avec une touche d'humour noir, cruel, cynique. Certaines scènes très violentes choquent véritablement.

Edmonde, le personnage principal de ce roman, est entraînée dans des aventures plus rocambolesques les unes que les autres au milieu des plus grands dignitaires nazis (je laisse le futur lecteur découvrir la description "pittoresque" de certains...). Edmonde gravit les échelons du parti nazi dans une atmosphère toujours déjantée avec en toile de fond: sexe, drogue et atrocités nazies.

A travers ce livre, le lecteur revisite les moeurs et les coutumes du IIIème Reich sous un angle totalement délirant et inattendu mais qui ne tombe jamais dans le mauvais goût.

Un livre qui accroche dès les premières pages mais à ne pas mettre entre toutes les mains...
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Je ne comprendrais jamais pourquoi les nazis s’obnubilaient tellement avec les juifs.

Un cochon d'enculé était un cochon d'enculé, sans distinction de race ou de nationalité.[...]

Hitler et Himmler ne parvenaient pas à saisir cette réalité toute simple.

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Je hais les meubles et les clowns.
Mon père m'a emmené au cirque, une seule fois, en mai 1922, et nous sommes ressortis presque immédiatement. Tout était si consternant. Et les clowns tellement macabres!
Et après la disparition de ma mère, en mars 1925, on a à peu à peu jeté toutes les chaises, armoires, tables, tabourets et chiffonniers jusqu'à ce que la maison soit pratiquement vide.

J'ai commencé à fumer à onze ans. des Wings, une marque américaine. Herr Dorpmuller nous en donnait chacune un paquet, à Lisa et à moi, chaque fois qu'on le laissait nous emmener dans son arrière-boutique de la Ludwigstrasse. On déboutonnait notre corsage pour lui montrer notre gorge et il se tenait là, devant nous, ses mains en mouvement dans ses poches, grognant et reniflant.
On s'y rendait le lundi et le vendredi.
Puis Lisa est partie à Dresde. Comme je redoutais de l'affronter seule, j'ai arrêté de fumer.
Lisa s'est pendue à Berlin, en 1945.
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Ma virginité, comme une comédie à succès, tenait l'affiche saison après saison.
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Que disait, un écrivain anglais, l'un des meilleurs, Thomas Hardy, Conrad, ou Henry James...il disait...que disait-il exactement?...Que la vie était comme un tapis persan, confus et délicat, avec son enchevêtrement pour seule raison d'être.
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Le "chef " était le plus grand homme d'Etat depuis Bismarck ! Le "chef" était la Jeanne d'Arc de l'Allemagne ! Il était le sauveur, le rédempteur ! Il était Siegfried, le tueur de dragon, et Parsifal en quête du saint Reichstag. Il était... p28
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Vidéo de Marc Behm
Chasing, Marc Behm
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