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EAN : 9782253020349
220 pages
Le Livre de Poche (15/04/1986)
3.55/5   32 notes
Résumé :
Le Cheval couché: livre de rage et de tendresse pour la Bretagne d'aujourd'hui telle qu'elle se recrée elle-même, contre les idées reçues et la pesanteur des pouvoirs. II s'agit, en fait, d'une réponse, ou plutôt d'un complément véhément et poétique, à l'ouvrage de Pierre-Jakez Hélias, Le Cheval d'orgueil.
L'auteur ne se satisfit ni du folklore, ni du tourisme, ni du passéisme, qui voudraient figer son pays en terre des morts, dans une momification édifiante,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Le livre de Xavier Grall est le manifeste, d'un poète passionné et rageur en faveur d'une Bretagne fière de ses valeurs et de sa singularité, ce coup de coeur sonne aussi comme une critique du live de Pierre-Jakez Héliasle cheval d'orgueil.

Le ressenti du natif de la Bretagne que je suis, pour avoir entendu de nombreuses allusions à la nature têtue donc plouc des bretons, de ses paysans courageux mais septiques, catholiques fervents mais traditionnels, je perçois la nostalgie chronique, l'ambiance momifiante du livre d'Hélias,

Un touriste fera de ces anecdotes du passé un livre de contes, plein de tendresse, pour ces pauvres hères qui demandent l'aumône. Un écrivain à la mode puisera dans le culte des morts et dans le personnage de l'ankou, une intrigue inquiétante, illustrant le symbole d'une Bretagne sombre, très ancrée dans ses légendes magiques intemporelles.

Les druides ne sont-ils pas encore présents dans ces landes sableuses ou au sommet de tertres qui cachent des tombeaux oubliés. de magnifiques tumulus ne sont-ils pas des témoins de cette âme celte, qui réfléchit les ombres du passé!

Les deux prestations de notre agrégé de lettres françaises, chez Bernard Pivot puis chez Jacques Cancel, ont été trop ternes ou trop studieuses pour que le téléspectateur puisse apercevoir à travers la fougue de ce bon breton , le hennissement d'un cheval et encore moins son orgueil. Xavier Grall a posé un mot douloureux en parlant d'un cheval couché.

Reprenant ce mauvais présage, le texte de Xavier Grall, plaide pour une Bretagne conquérante à la pointe du développement de notre musique celte, et de notre littérature, en musique, si le biniou, n'est pas abandonné, la Harpe doit redevenir l'un des symboles de la Bretagne, comme elle est déjà celle de l'Irlande libre.
L'auteur retrace l'histoire de la harpe et rappelle qu'elle fut une des emblèmes de la Bretagne au moyen age.

Xavier Grall se fait paradoxalement l'avocat des plus faibles, lui qui ne parle pas breton et dont la famille était assez argentée, Pierre-Jakez Hélias qui parle le breton et dont la famille est des plus modestes se fait le chantre de la bonne éducation, et l'agrégé se montre fier de sa promotion. Cette dualité est passionnante et Xavier Grall en bon journaliste restitue bien les parcours.

Si aucune allusion est faite à l'exode des bretons, surtout ceux des Monts d'Arrée, de Huelgoat à Guiscriff, de Chateaulin à Carhaix, ont devine que cette terre, pour nourrir ses hommes devraient aller vers plus de créativité et d'imagination.

Après le chapitre « gémissant et pleurant » , Xavier Grall parle des Illuminés, ceux qui construisent la nouvelle Bretagne culturelle, ces personnalités singulières souvent isolées mais passionnées par ce territoire. Il convoque Méavenn, Morvan Lebesque, Michel le Bris, Le Dantec, Paol Keineg, disant de lui, "c'est un silex, un illuminé froid et pur".


J'ai un peu de regret pour Charles le Quintrec, René Guy Cadou, ou Guillevic trop botrellisés ou trop proches de Jakez le vieux, qui ne sont pas évoqués comme Max Jacob , la culture est toujours le fruit de plusieurs générations.

La dernière partie est toute plongée dans le mysticisme dont Xavier Grall a fait son pain. Croisant Glenmoor et les tempêtes , le chant du poète murmure la mémoire, l'âpreté du labeur, les rencontres perdues, les pluies de mots d'un Jack Kerrouac, qui n'a pas eu le temps de pleurer sa terre natale, Xavier Grall récite une prière lancée à d'autres générations pour faire vivre l'orgueil de ses bardes.

Ce fut décembre qui ramena l'oiseau
aux granges du passé
l'hiver il n'est qu'un nid
un visage sans appel
cette odeur de fumée
piquée de gel.
"Le Retour de Glenmoor"
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Ce livre se veut une réponse au fameux Cheval d'orgueil de Pierre Jakez Hélias, livre jugé passéiste et larmoyant et auteur jugé pas assez revendicatif. Mais finalement, c'est plus son succès qu'il lui reproche, succès qui reposerait sur de mauvaises raisons, comme un enterrement d'une Bretagne passéiste et moribonde.
L'emploi du “nous” et le ton belliqueux sont assez désagréables, mais ce livre est à remettre dans son contexte. Publié en 1977 (soit moins de deux ans après la sortie du Cheval d'orgueil), il reflète l'état d'esprit d'une génération issue des Trente Glorieuses et de Mai 68 qui se cherche une identité culturelle et des racines, au-delà de la culture de masse et du consumérisme. En Bretagne, cette génération a été clef pour le renouveau de l'identité bretonne (mise à mal notamment par les mauvaises alliances pendant la seconde guerre mondiale) et elle a ouvert la voie au dynamisme culturel qui fleurit depuis quelques décennies, où la culture s'invente et ne se complaît pas seulement dans la sauvegarde des traditions (en raccourci, la techno bretonnante de Denez Prigent plutôt que les défilés folkloriques…).
Mais pour en arriver là, il a fallu une génération qui s'est cherchée, qui a hésité entre combat indépendantiste et combat culturel. Ce livre en est le témoignage, avec son ton de confrontation qui tente de masquer une argumentation un peu courte. L'Homme aux semelles de vent de Michel le Bris est dans la même veine, tout aussi horripilant à lire, plein de la même mauvaise foi dans la présentation des arguments…

En y regardant de plus près, on s'aperçoit que la question de la légitimité (est-ce qu'être Breton c'est être né en Bretagne, y vivre, les deux ?) n'est pas tranchée (même si rares sont ceux qui semblent pouvoir prétendre au label). L'identité semble ramenée à la seule question des artistes, ce qui me paraît bien réducteur (moi je fais mes gâteaux au beurre salé, toujours, même dans mes montagnes népalaises. Est-ce que ça aussi ce n'est pas un petit bout d'identité bretonne, même si je n'écris ni poème ni chanson ?).
En définitive, ce livre est intéressant par le témoignage qu'il représente pour ceux intéressés par la question de l'identité bretonne, mais n'est certainement pas à lire pour ses qualités d'analyse. A noter que Xavier Grall lui-même a reconnu les limites de son ouvrage. J'en retiens quand même à la fin une jolie évocation de Jack Kerouac à la fin de sa vie et du voyage en Bretagne qu'il n'a jamais fait, et surtout une belle description de Glenmor, ce grand chanteur bourru et poétique qui a si bien mis en notes et en rimes les paysages bretons et ceux qui les habitent.
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Xavier Grall répond à Per-Jakez Helias concernant la rédaction de son best-seller: le Cheval d'orgueil. Certains le décrive comme un pamphlet vis-à-vis de ce dernier...
Personnellement, je vois cet ouvrage comme une réelle réaction à des dires portant préjudice à la Bretagne et aux Bretons.
Xavier Grall exprime toute sa force littéraire, poétique et lyrique pour montrer la force et la puissance de la Bretagne, de ces terres millénaires. Il démontre que Le Breton et la Bretagne ne sont pas abattus et ne sont qu'en train de s'émanciper que jamais, qu'ils cherchent à exprimer pleinement leur culture, leur différence.
Un bel ouvrage porté par un optimisme et un espoir certainement au-delà de la réalité...
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critiques presse (1)
OuestFrance
18 décembre 2023
Dans ce pamphlet poétique et véhément, Grall s’attache au contraire à décrire un pays qu’il croit « vivant et ardent », et pour lequel il éprouve une grande tendresse.
Lire la critique sur le site : OuestFrance
Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Si nous survolions la côte finistérienne, nous la verrions comme un front qui se hérisse de mèches liquides, résiste à la puissance conjointe de deux océans. Ce n'est pas le bout du monde comme le veut un pitoyable cliché. Pen ar bed! Tête de l'Univers! Voila, nous y sommes! Pour tout ce qui concerne notre pays, convenez en, il y a toujours eu une inversion des valeurs.
C'est ici que commence l'Europe. Sa première langue, c'est ici qu'elle se parle encore. Non pas des êtres de crépuscule, mais des êtres du commencement, des hommes du matin, voila comment il faut considérer les Bretons dans leur géographie et dans leur humanité.
La contrée des veilleurs et non celle des dormants.
Oui, c'est ici que commence l'Occident. Des générations et des générations de marins l'ont ainsi ressenti, qui revenaient de leurs bourlingues sur des voiliers bariolés.
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J’aurais aimé être chanteur. Je m’en serais allé par les chemins de mer, harpant, fablant. J’aurais ému l’arbre et la taverne. J’aurais fui les cités sourdes, les faubourgs de pluie. Rural harpeur, marins de rimes, aède. Tel était le bonheur de quelques-uns. Ah, lui, la dure flamme bleue de son regard, il allait, le chanteur, l’ami !
J’aurais marché dans le soleil de l’ajonc, et, trouvant le repos dans l’abri des dolmens, j’aurais imaginé ma vie, la chantant, l’enchantant. J’ai la tête pleine d’incantations. Elles stagnent. L’exécrable culture m’a trahi. On ne devrait rien enseigner que les vents de la mer, les saisons, les oraisons. La fabrique des intelligences débite des cerveaux pour l’esclavage économique. Les fourmis piétinent. Les chenilles se tordent. Nous construirons d’autres patries pour les seuils jubilants, nous construirons des sociétés bergères, paysannes, maritimes.
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C'est dans la boue et le sang Algériens que la France idéale commença de s'effriter sur un piédestal que mes vertes années avaient édifié. Je mis longtemps à sabrer ces trop belles images. Et c'est peut être une certaine enfance que j'extirpais de mon cœur. Dans la rage et le chagrin. Je lui substituais une enfance bretonne à découvrir, à dire, à proclamer. Si lucide soit-il, l'autonomisme ne va pas sans une réelle innocence.
J'abandonnais la souveraineté de la méthode et la mesure du classicisme pour m'en venir, aux origines, aux signes, aux sens. Il faisait beau sur Paris, ce jour de juillet, quand je quittais la capitale pour toujours, avec ma femme, mes enfants, le chien, les bagages.
(...)
Au fait, j'allais à la poésie corps et âme. Métamorphose! La quarantaine, c'est l'âge. Il était temps.
J'allais à la mer...
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De Galway, je fis le voyage aux îles d'Aran, sur un steamer incroyable sorti de quelque cimetière marin pour un service aléatoire. A son bord, en effet, nous ne serons que deux ou trois passagers. Inadéquation de tout : en Irlande, c'est comme ça.
Les trois îles d'Aran ( je ne me lasse pas de tourner et retourner ces deux syllabes A-ran dans ma tête ) se trouvent à vingt milles de la côte, dans un abandonnement mythique, durement harponnées par une houle inlassable : Inishmore, Inishman Inisheer. Kilronan est le seul port praticable. Quand notre vapeur rouillé et fantomatique y accoste, après deux heures et demi d'une traversée impassible, un trentaine d'hommes nous attendent sur le quai. Nous attendent ? Mais non - ils n'attendent personne. Ils sont là, cromlechs gris, impassibles eux aussi, immobiles, avec des poitrines creuses comme usées d'attendre, de n'attendre rien, minéraux, comme soudés au roc des quais, avec des pantalons encore trop grands, tissés dans une laine de mouton flasque et grossière. Je m'attendais à voir des cousins de nos matelots sénans. Des marins, quoi ! Nullement. Les hommes d'Aran ressemblent aux hommes de Commana ou de Saint-Thégonnec. Des paysans encore. Mais des paysans sans terre, sans ferme, au chômage, et qui regardent la mer parce qu'elle est là, qu'on ne peut pas faire autrement que de la regarder, cette mer qu'ils haïssent et qui les sépare des vertes prairies de la grande île, là-bas, leur vraie patrie. Cette mer, ils l'ont en telle exécration que dans la flottille d'Aran, je ne verrai qu'un seul chalutier irlandais parmi les navires anglais et bretons. Ces hommes, on les dirait en relégation, étrangers sur leur propre archipel.

Chapitre IV, les illuminés.
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Eh oui, il fut un temps où les harpeurs bretons émouvaient l'Europe dans un ruissellement de musique que l'aristocratie la plus raffinée ne détestait pas. Ils allaient, ils chantaient, ils enseignaient. Ils étaient les fils de ces grands rêveurs qui ne séparaient pas la marche de la vie et la vie de l'épopée. Ils étaient les bardes derniers du monde enchanté. Ils avaient débarqué au Ve siècle en Armorique, tenant la harpe au-dessus de la mer, et la faisant frémir pour le ravissement des clans qui allaient féconder ces terres et créer cette patrie qui allaient devenir la Bretagne historique. Ils purent pendant six cents ans se livrer à leur art, charmer les cours et les peuples. La poésie était leur royaume et le royaume de Bretagne s'affaissa dès lors qu'il fut contraint, en grande partie sur l'ordre du clergé, de cacher ses harpes et de mettre une sourdine à sa voix magique. Les druides avaient été tués. Ce n'étaient pas assez. Il fallait étouffer les bardes, comme si le métier de poésie poussé jusqu'à sa plénitude avait porté les tenants du pouvoir à le considérer comme factieux, voire hérétique. Les premiers poètes maudits d'Occident sont les poètes bretons. La harpe disparut des manoirs et des fêtes. Et ce fut aussi triste qu'un saule qui meurt de n'entendre plus le vent chanter dans ses feuilles.

Chapitre V, le chant du monde, p172-173.
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