- Reçu par poste le 24 juin 2023
Une lecture- découverte des plus jubilatoires, franchement " Inclassable " !
Tous mes plus vifs remerciements aux éditions de la Baconnière ainsi qu'à la dernière Masse Critique " Non- fiction" qui m'ont offert cette très " belle pioche", avec la totale découverte de cet auteur Genevois :
Daniel de Roulet....
Un ouvrage comme je les aime : un.livre menant à d'autres livres, d'autres écrivains....et petit plaisir supplémentaire pour cette lecture , on.peut s'y promener à sa guise, dans l'ordre ou le désordre..
selon nos préférences ou la curiosité du moment.
Pour ma part, j'ai débuté par le "portrait"
d'
Agota Kristof....et d'emblée,on se rend
compte que ces portraits vont nous réserver des surprises de " perspective " !
Il nous offre, à chaque portrait d'écrivain , comme un " pas de côté ", un décalage insolite...dans sa vision .
Sur les 23 " portraits clandestins" je n'en choisirai que quelques-uns dont la présentation est plus inhabituelle...
"
Agota Kristof
J'admire cette femme de soixante ans qui se déclare asociale, accepte de perdre à la fois ses amis de là- bas et ceux d'ici au nom de cette exigence qui, dit-elle, vient du dedans.Entre son sourire espiègle et la mélancolie de ses livres, le mystère demeure.
- Ça nous tue.Si on écrit, on ne peut pas vivre vraiment. Mais sans ça, la vie n'a plus de sens. "
-Pour
Agota Kristof, il nous la présente lors d'une lecture publique qu'elle doit faire et qui ne la réjouit guère ; Agota demande à notre " reporter littéraire " de l'accompagner...ce qui nous donne les digressions et les observations d'
Agota Kristof sur ces lectures publiques ou rencontres avec ses lecteurs, qu'elle trouve inutiles. Pour elle, ses écrits se suffisent à eux-mêmes...
- Pour
James Baldwin , sa personnalité, son parcours, son oeuvre sont abordés d'une façon singulière : par le prisme d'une autre vie, d'un autre parcours éclatant d'un homme noir...se trouvant parmi ses lecteurs et admirateurs assidus : L'ancien président Barak
Obama....
- Pour
Roger Vailland, le biais sera la relecture des
" Mauvais coups", lecture qui avait très fortement marqué l'auteur lorsqu'il était adolescent. Cette perspective, en plus de ses appréciations diverses sur Vailland, va se prolonger avec des questionnements sur les périodes plus ou moins longues de " Purgaroire" que peuvent subir les artistes !
- Pour
Jean- Christophe Bailly...étonnamment il parlera peu de ses livres mais de sa présence étonnante lors des rencontres et manifestations publiques où il doit intervenir; il parle avec beaucoup de fougue du " ballet de ses mains" toujours en mouvement, comme un autre langage complémentaire ....
Daniel de Roulet ayant été l'écouter à l'une de ses interventions littéraires...
- En ce qui concerne le poète- philosophe- éditeur,
Michel Deguy, cela sera à travers son texte " le Comité " : récit des rouages et des coulisses pas toujours glorieuses d' une maison d'édition parisienne , Gallimard ( dont il a été inélégamment évincé, au bout de 30 ans, au Comité de lecture) que
Daniel de Roulet parlera de
Michel Deguy, de son parcours, de ses engagements, mais aussi, avec une plume ironique, il nous offre les observations sur ce petit monde parisien de l'édition, er ses coulisses !!
Selon les qualificatifs très justes de la préfacière ,
Nathalie Piegay, le ton et le style de notre portraitiste possède " une allure enlevée et un ton décapant "...
Recueil juilatoire, surprenant, qui, en fait réunit 23 portraits rédigés entre 1998 et 2022, ayant été publiés séparément soit dans des revues, soit dans des colloques ou autres, etc.
Il y aurait encore moult choses à dire de ce riche recueil multiforme, aussi varié et éclectique dans le choix des écrivains (***Le portrait le plus fourni est celui
De Stendhal) que dans les thématiques les prolongeant: que cela soit des analyses, remarques sur La Littérature, La Poésie, la philosophie au sein des maisons d'édition, la rare intégrité journalistique ( avec un hommage à la reporter russe assassinée, Anna Polikovskaïa--), les critères complexes, imprévisibles de la postérité ou le purgatoire littéraire de tel ou tel auteur...et j'allais omettre sa plume acide, incisive pour son
pays , La Suisse, les épisodes troubles de son histoire ainsi que pour ses compatriotes....tout en accordant une place importante dans "ces portraits"aux écrivains et artistes helvétiques !
J'achèverai ce billet par un extrait concernant la si courageuse journaliste russe...et aussi car il confirme le ton et l'état d'esprit exigeant de Daniel de Roulet (*** voir très beau texte sur
Louis Pergaud, où il remet "les pendules à l'heure", et pique un coup de gueule justifié pour rectifier des mensonges colportés, entretenus par chaque pays, au fil de l'histoire)
" Anna Polikovskaïa
J'ai repensé à ce que vous m'avez appris du journalisme d'aujourd'hui, où les uns commentent le monde du haut de leur moralisme, les autres se laissent simplement embarquer dans les fourgons du régiment, mais quelques uns, comme vous, ne lâchent pas prise et le paient.
Ce que j'aimais chez vous, c'est que vous ne mettiez pas seulement en cause les militaires tortionnaires russes, les forces spéciales Tchétchènes, vous ne disiez pas seulement la répression, la vengeance, le meurtre des civils, vous disiez aussi votre désarroi et la manière dont ce travail d'enquête peu à peu vous
faisait découvrir le gouffre moral au fond
de chacun d'entre nous, quand il est confronté à la guerre."
Il vous reste encore à découvrir :
-
Stendhal,
Victor Hugo,
Nietzsche,
Marcel Proust,
Robert Walser,
Gustave Roud,
Denis de Rougemont,
Annemarie Schwarzenbach,
Marguerite Duras,
Jean Starobinski,
Michel Vinaver,
Nicolas Bouvier,
Jacques Chessex,
Raymond Carver,
Niklaus Meienberg.