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Marc Petit (Traducteur)Jean-Claude Schneider (Traducteur)
EAN : 9782070281299
361 pages
Gallimard (16/03/1972)
4.33/5   12 notes
Résumé :
L'œuvre de Trakl occupe dans les pays de langue allemande la situation singulière qui est, au centre d'une redéfinition moderne de la poésie, celle de Rimbaud en France. Questionnée, parfois détournée par les philosophes ou les historiens de la littérature, comme celle de Hölderlin, elle est avant tout le lieu d'une tentative d'écriture impersonnelle.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Traduire l'oeuvre de Georg Trakl n'est pas une tâche des plus aisées, ainsi la musicalité des vers a été abandonnée de la grande majorité des poèmes en rime au profit d'une restitution du sens, on ne peut pas tout avoir…

Le poète autrichien, lecteur de Rimbaud, Baudelaire et Nietzsche, fait partie, avec le poète allemand Gottfried Benn dont les écrits de jeunesses sont même plus “trash” que ceux de Trakl, du mouvement des “expressionnistes”. Je ne sais guère ce que cela recouvre, si ce n'est une vision subjective que l'on retrouve à la fois chez Trakl et Benn, qui passe par les émotions avec un je ne sais quoi de macabre et d'obscène mais très magnétique, un peu dans la lignée du mouvement symboliste, à l'image du poète anarchiste belge Emile Verhaeren, notamment dans les visions décadentes et les couleurs post-apocalyptiques que charrient les métaphores de ces poètes.

“La neige noire qui ruisselle des toits;
Un doigt rouge plonge dans ton front,
(…)
En lourds morceaux éclate la tête et médite
Les ombres dans le miroir des névés bleus,
Le sourire froid d'une putain morte.
Dans des parfums d'oeillet pleure le vent du soir.”

La poésie de Trakl est d'une grande beauté, hypnotique et très évocatrice, en dépit de la récurrence des thèmes et des mots. Variations éternelles sur les mêmes muses, les mêmes couleurs, les mêmes nuits, la même violence. Et malgré cela, si l'on accepte la récurrence d‘un vocabulaire restreint, alors on est touché par les agencements, l'espoir toujours à portée de strophe mais qui s'échappe sans cesse, que l'on poursuit de page en page, en passant par les affres de la mélancolie, des meurtres, du sang, des jours sans soleil, et des crépuscules glacés…

Le poète salzbourgeois a écrit de trop rares et merveilleux poèmes en prose, véritables cauchemars hallucinatoires et morbides, symboles d'une âme à jamais tourmentée, dont le trépas, à seulement 27 ans, l'âge maudit, après une overdose de cocaïne, en fait pour l'éternité la première des rock stars… d'autres suivront, Hendrix, Joplin, Morrison, Cobain et Winehouse…

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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Trois Rêves
 
I
Je rêvais, il me semble, de chute de feuilles,
De lointaines forêts et de lacs sombres,
De l’écho de paroles tristes —
Mais je n’en pouvais comprendre le sens.
 
Je rêvais, il me semble, de chute d’étoiles.
Des larmes implorantes d’yeux pâles,
De l’écho d’un sourire —
Mais je n’en pouvais comprendre le sens.
 
Pareil à la chute de feuilles, à la chute d’étoiles,
Je me voyais venir et m’en aller sans cesse,
Écho impérissable d’un rêve —
Mais je n’en pouvais comprendre le sens.
 
 
II
Dans le miroir sombre de mon âme
Il y a des images de mers jamais vues,
De pays abandonnés, fantasmes tragiques,
Se dissipant dans le bleu, dans l’indécis.
 
Mon âme enfantait des ciels pourpres de sang
Embrasés de soleils géants qui crépitaient,
Et des jardins étrangement peuplés, étincelants,
Qui exhalaient des délices oppressantes, mortelles.
 
Et le puits sombre de mon âme
Engendrait des images de nuits insolites,
Agitées de chants indicibles
Et des souffles de forces éternelles.
 
Mon âme frissonne, sombre de souvenirs,
Comme se retrouvant en toute chose —
Dans des mers et des nuits insondables,
Et dans des chants profonds, sans commencement ni fin.
 
 
III
Je vis beaucoup de villes en proie aux flammes
Et les temps entasser horreur sur horreur,
Et je vis beaucoup de peuples tomber en poussière
Et le vent disparaître dans l’oubli.
 
Je vis les dieux s’abîmer dans la nuit,
Les harpes les plus sacrées, impuissantes, se fracasser,
Et, de nouveau attisée dans la pourriture,
Une nouvelle vie se gonfler vers le jour.
 
Se gonfler vers le jour pour à nouveau périr,
La sempiternelle tragédie
Que nous jouons sans la comprendre,
 
Et dont le tourment ténébreux de folie
Se couronne des douces gloires de la beauté
Comme d’un souriant univers d’épines.
 
 
Deuxième partie – Recueil de 1909 (non publié)
Traduit de l’allemand (Autriche) par Marc Petit et Jean-Claude Schneider.
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CHANT DES PROFONDEURS
  
  
  
  
Du fond de la nuit je fus libéré.
Mon âme s’étonne dans l’immortalité,
Mon âme écoute par-delà espace et temps
La mélodie de l’éternité !
Elle n’est pas le jour et la joie, ni la nuit et la douleur,
La mélodie de l’éternité,
Et depuis que j’ai écouté l’éternité
Je ne sens plus jamais ni la joie ni la douleur !


/ Traduction de l’allemand par Marc Petit et Jean-Claude Schneider
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BALLADE La nuit pleure derrière une porte !
  
  
  
  
Un cœur se lamente : tu ne la trouveras pas,
Son pays est bien loin d’ici,
Et étrange est son visage !
La nuit pleure derrière une porte !

Dans la salle de marbre brûlent les lumières,
Ô sourdes, ô sourdes! Quelqu’un meurt ici !
Quelque part un murmure : ô ne viens-tu pas ?
La nuit pleure derrière une porte !

Un sanglot encore : ô s’il pouvait voir la lumière !
Alors partout l’obscurité se fit —
Un sanglot : frère, ô ne pries-tu pas ?
La nuit pleure derrière une porte.


/ Traduction de l’allemand par Marc Petit et Jean-Claude Schneider
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BALLADE À voix haute chantait, chantait la mer.
  
  
  
  
Un bouffon écrivit trois signes dans le sable,
Une fille pâle se tenait devant lui.
À voix haute chantait, chantait la mer.
Elle tenait une coupe dans sa main,
Qui brillait jusqu’au bord,
Comme le sang rouge et lourde.
Aucun mot ne fut dit — le soleil disparut,
Alors le bouffon lui prit des mains
La coupe et la vida.
Alors s’évanouit la lumière dans sa main,
Le vent effaça trois signes dans le sable —
À voix haute chantait, chantait la mer.


/ Traduction de l’allemand par Marc Petit et Jean-Claude Schneider
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Promenade hivernale en la mineur


Des sphères rouges émergent souvent des branches,

sous la neige doucement et noires par une longue chute de neige.

Le prêtre escorte le mort.

Les nuits sont remplies par des célébrations de masques.

Puis des corbeaux ébouriffés planent sur le village;

Dans les livres, les contes de fées sont écrits miraculeusement.

À la fenêtre, les cheveux d'un vieil homme flottent.

Les démons traversent l'âme malade.

Le puits gèle dans la cour. Des escaliers pourris tombent

dans l'obscurité et un vent souffle à

travers de vieux puits qui sont enterrés.

La bouche goûte les épices fortes du gel.
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Videos de Georg Trakl (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Georg Trakl
[RARE] Georg TRAKL – Une Vie, une Œuvre : De rêves et de ténèbres étreints (France Culture, 1986) Émission "Une Vie, une Œuvre", par Hubert Juin, diffusée le 29 mai 1986 sur France Culture. Invités : Lionel Richard, François Vezin, Eugène Guillevic et Antoine Berman.
Dans la catégorie : Poésie allemandeVoir plus
>Littérature (Belles-lettres)>Littérature des langues germaniques. Allemand>Poésie allemande (73)
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