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EAN : 9782070720651
350 pages
Gallimard (17/10/1990)
3.61/5   179 notes
Résumé :
Pierre gâche tout, l'amitié, l'amour, la paternité, par sa hâte fébrile à précipiter le temps. A cette allure vertigineuse, il ne goûte plus ce qui fait le prix de la vie, ni les moments d'intimité que sa femme Hedwige lui ménage, ni la poésie des choses. Il se consume et consume les siens en fonçant vers un but qu'il renouvelle, chaque fois qu'il l'atteint. " A quoi reconnaître qu'on est arrivé si l'on ne s'arrête jamais ? " demande la sage Hedwige. Pierre saura tr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (27) Voir plus Ajouter une critique
3,61

sur 179 notes
Ce livre, je l'ai acheté il y a vingt ans.
Bien trop pressé par la vie, je n'ai jamais pris le temps de le lire.
Je le savais présent dans ma bibliothèque et je pensais en connaitre le dénouement tragique par le film du même nom incarnés par Alain Delon dans le rôle de Pierre et de Mireille Darc dans celui d'Hedwige en 1977.

Superstitieux autant qu'imbécile, je le gardais précieusement comme une amulette de papier qui m'éviterait peut-être la déchéance fatale du héros me conduisant fréquemment comme un dératé dans ma vie professionnelle tout en restant, au contraire de Pierre, beaucoup plus civilisé dans ma vie personnelle.

La course effrénée de ma vie ayant atteint son apogée sans encombre et puisque la retraite a sonné au clocher du déclin j'ai donc pu rencontrer ce roman que la peur m'empêchait de braver, trop anxieux d'en percevoir l'issue que je redoutais.

Paul Morand, Académicien français, diplomate a un parcours analogue à Pierre Benoit que j'affectionne particulièrement. Ecrit dans les années 40, les phrases sont alertes autant que solennelles et pompeuses parfois, allant de la punch-line aux diatribes antisémite et misogyne.

« Il est encore plus doux de caresser des projets que de caresser une femme. »

Pierre, antiquaire spécialiste de la haute époque est un homme épuisant que la passion dévore. Exaspérant pour son entourage, il ne reste pas en place, achète, vend, court plus qu'il ne marche, séduit sans aimer, jusqu'au jour où il tombe éperdument amoureux d'Hedwige.

Mais Pierre massacre inutilement tout, les choses, les gens, l'amour…
Cet homme n'accepte pas l'idée qu'une grossesse puisse durer 9 mois ! Que dire de plus édifiant.

« Je n'existe pas, je préexiste ; je suis un homme antidaté ; non, je ne suis pas un homme, je suis un moment ! »

Ce roman m'a plu comme un exorcisme. Bien sûr, je n'ai jamais vécu cette folle épopée, mais je m'étais bêtement identifié à Delon (pas physiquement, restons simple !) dans le film.
C'est fini Pierre est mort, je l'ai tué. J'ai été plus rapide que lui.

« On ne va vite qu'au ras du sol. Dès que je prends du recul pour regarder ma vieille planète, elle me parait morte. La vitesse c'est un mot inventé par le ver de terre. »

Alors je rampe !
Et maintenant que vais-je faire de tout ce temps que sera ma vie ? Hihihi.

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Pierre est un homme pressé, il veut être arrivé avant même d'être parti. Il ne marche pas, il court, lancé à telle allure sur les routes qu'il frôle en permanence l'accident mortel. Antiquaire, il vole à travers le monde pour acheter un objet qui l'intéresse. Jusqu'au jour où il rencontre Hedwidge qui lambine, paressant des jours entiers entre sa mère alitée et ses deux soeurs...

De l'excès de vitesse ou de la lenteur, qui aura le dernier mot ? Resistera t-il à l'attente nécessaire au murissement de l'amour, à la gestation de l'enfant ? Prendra t-il le temps de ralentir pour préserver sa santé ? S'occuper des siens ?
Leçon de vie, leçon de sagesse : la hâte tue, elle empêche de profiter de la vie, elle use l'organisme, elle détraque la nature.
Ce roman écrit en 1941 est très actuel. La vitesse, maladie de notre temps, sème la mort sur son passage : agitation permanente, accidents, crises cardiaques, destruction des rythmes naturels...Comme Pierre ne courrons-nous pas vers notre propre destruction à force de vouloir produire toujours plus, toujours plus vite, pour consommer toujours plus (et toujours plus mal), jetant des tonnes de déchets pour retourner nous précipiter dans nos fast-food et nos supermarchés ?
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L'homme pressé, un symbole de notre époque ? Il n'y faut pas penser. Écrit pendant la guerre, entre 1940 et 1941, ce roman évoque le Blitzkrieg, fait le portrait d'un juif aux manières enveloppantes et au nez reconnaissable, et imagine un gynécée créole forcément languide. Pour autant, Paul Morand lorgne du côté du grand siècle. Il se veut moraliste et prétend concurrencer La Bruyère ou Molière. Son personnage est un type immuable, confronté à toutes les situations susceptibles de faire ressortir son vice. Il achète une maison en 2 heures, fait le plein de sa voiture tout en roulant (!), et propose à sa femme enceinte d'écourter sa grossesse. Pourquoi est-il ainsi? On ne sait. Quelques siècles plus tôt, il aurait fait crever ses chevaux sous lui: l'époque importe peu. Et c'est sans doute ce qui fait le charme de cette oeuvre anodine: d'avoir voulu graver dans le marbre un homme qui jamais ne s'arrête, et de pasticher les auteurs classiques pour imaginer ce qui deviendra la plus contemporaine des addictions: la passion de l'urgence.
Et bien sûr, c'est plus ou moins là que le héros finira (aux urgences).
Tandis que Morand évitera la dépression en devenant immortel.
L'Académie, bonne fille, reconnaît ses classiques, quoique antisémites.
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Pierre Niox est un homme pressé. On pourrait même dire qu'il cristallise en lui cette urgence et mérite amplement de remplacer l'article indéfini par son alter-ego défini. Antiquaire parisien, il parcourt le monde à la recherche de minuscules objets datant de l'antiquité ou au plus du haut Moyen-Age. Mais il ne lambine pas, il court, court et ne sait pas s'arrêter … En visite, il est bien souvent au milieu de la pièce alors que la sonnette d'entrée vient tout juste de retentir. Pour s'habiller, il se chronomètre pour améliorer son temps dans des gesticulations et une célérité qui n'auraient rien à envier au célèbre artiste Arturo Brachetti… En tout, il faut donc gagner du temps : il faut donc conduire vite, manger tous les plats en même temps au restaurant et ne pas perdre de temps dans des tâches aussi dispendieuses que la lessive, le rangement. Comme vous pouvez l'imaginer, cet empressement déborde sur sa vie sociale et amoureuse. Comme par hasard, son entourage se révèle être lent ou au mieux posé, ce qui suscite un ouragan d'impatience et d'exaspération de la part de Pierre Niox. La plupart n'y résiste pas : Niox agit comme une force centrifuge qui rejette loin tout ceux qui pourrait ou souhaiteraient interagir avec lui …. Et sa vie sentimentale ne fait pas exception, bien au contraire ! Ainsi il demande la main de sa future femme dès le premier soir et ne reprend contact avant des semaines. Une fois mariée, sa femme en attente des joies promises de l'alcôve se réveille quelque peu désenchantée par le trop grand empressement de son mari. Une fois enceinte, Pierre souhaite à tout prix connaître le sexe de l'enfant et même déclencher l'accouchement car il trouve que cet enfant ne vient pas assez vite.
Proche de la caricature, ce portrait de l'homme pressé se révèle au final assez amusant avec un style riche comme toute oeuvre littéraire se le devait à l'époque. J'ai tout de même ressenti un léger fléchissement an milieu de ma lecture : le cycle des situations où l'homme pressé passait comme un ouragan déjà bien établi, j'ai apprécié lorsque le récit s'est infléchi sur sa vie maritale et surtout ses réactions de futur père.
La fin en soi est assez prévisible et se donne au final des allures de conte philosophique
Morand a été l'un de ceux qui a exercé une certaine influence sur le groupe des Hussards. Ayant lu dernièrement Les enfants tristes de Roger Nimier, figure de proue du mouvement et émule de Morand, on ne peut s'empêcher de comparer les deux ouvrages. Chacun porte des thèmes comme la vitesse, la vie bourgeoise, l'attractivité de l'Amérique, le cynisme … Morand a écrit son roman en 41 et Nimier en 51. Si Morand donne à son roman des allures quasi comiques et ironiques, Nimier, comme le titre de roman le laisse imaginer, ne joue pas du tout dans ce registre et a produit une oeuvre bien plus cynique. Au final, les deux auteurs arrivent au même constat, démontrant qu'une vie où obtenir plus, aller plus vite, plus loin, plus haut ne mène qu'à l'échec, à la déception : … Si le héros de Morand s'éteint comme une chandelle qu'on aurait oublié d'éteindre, d'avoir trop consommé, celui de Nimier finit sa trajectoire en pleine vitesse dans un accident de voiture… Nimier pousse le propos plus loin : cette vie trépidante vous consume de l'intérieur comme chez Morand mais elle n'est aussi et surtout qu'une illusion dévastatrice. Chez Morand, la vitesse semble intimement reliée à Niox qui ne peut ni ne veut y échapper alors que chez Nimier, on cherche à s'y perdre et à repousser ses limites …
Pour compléter la filiation, il me faudra lire Chardonne … Et comme Sagan (du moins Françoise, pour Carl, c'est déjà dans la PAL) explore des thèmes proches à ces deux auteurs, il serait intéressant d'y voir cette expression sous la plume d'une femme.
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Quelle drôle d'histoire!!
J'ai été tentée d'abandonner au début puis ,petit à petit ,je suis entrée dans l'écriture stylée , bondissante ,et aussi rapide que le héros de ce roman.
Drôle de type que ce Pierre Nioxe qui ne vit pas sa vie il la court! Ne tient pas en place ,n'a plus d'amis,ne dort pratiquement jamais car c'est une perte de temps!
Il va toujours plus vite plus vite jusqu'au jour où il va rencontrer une femme:Hedwige de Boisrosė ,créole ,qui elle ,est toute indolente ,et toute sagesse.
Pierre va consentir à ralentir quelque peu son rythme de vie.Apprenant qu'il va être papa,il " ronge son frein " 9 mois c'est long à attendre! Il ira jusqu'à demander à Hedwige de se faire accoucher deux mois avant terme par un médecin de sa connaissance qui est d' accord!! Horrifiée Hedwidge s'enfuit rejoindre sa " tribu" ( sa mère et ses deux soeurs qui vivent ensemble) ,Pierre quant à lui ,part pour les Etats-Unis
Il va se surpasser dans la vitesse et c'est à un rythme effréné qu'il visite de nombreux sites,tout en vendant ses antiquités car j'ai oublié de vous dire que Pierre est antiquaire et qu'il en vit même très bien et puis , de retour à Paris mais chut ,je ne vous dévoile pas la fin......
C'est un conte , une fable ou plutôt une satire de l'époque où le dieu s'appelait vitesse: que dirait Paul Morand à l'ère d'aujourd'hui ??
J'ai aimé car cette histoire sur fond de morale est originale et si le début manque un peu de saveur j'ai été prise à vitesse grand V par la vie vécue au grand galop de ce Pierre Nioxe. A conseiller.⭐⭐⭐⭐
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Citations et extraits (79) Voir plus Ajouter une citation
Pierre attend toujours et le temps s'écoule. On parle du temps qui s'écoule, comme s'il descendait d'une source et comme si cette source était située quelque part en amont. Quand Pierre lève la tête, on dirait qu'il cherche la fontaine qui marque le commencement de ce grand fleuve.
" Ce doit être une source d'eau salée, soupire-t-il, gonflée de toutes les larmes de ceux qui ont attendu."
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- Que de minutes ont bien pu débiter ces cadrans depuis cent cinquante ans ! s’exclame Pierre. Pensez-y… quel ressort humain pourrait lutter contre les leurs ? Quelles diastoles, quelles systoles égaleront jamais leurs palettes et leurs cliquets !
- A votre manière vous êtes un philosophe, répondit Fromentine avec une niaiserie fûtée ; le philosophe du quart de seconde.
- Je ne suis pas un personnage philosophique, répliqua Pierre, sèchement ; je suis un personnage dramatique. Vous n’y comprenez rien.
- Parlez-moi encore de vous, soupira Fromentine en se remettant du rouge, c’est passionnant.
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Le plan d'un appartement révèle souvent les plans du cœur. Pierre et Hedwige avaient des chambres contiguës mais séparées. Cette cloison, Pierre l'avait voulue ; entre lui et sa femme, il y avait cette architecture énorme, cette montagne de plâtre qui depuis deux semaines divisait ce que la loi avait uni. Les deux parties du tout se parlaient le soir de lit à lit à travers elle, se réveillaient gaiement le matin par des coups frappés sur le mur, et de chaque côté de cet équateur, ils se partageaient pour la nuit, comme des antipodes.
Ainsi l'avait voulu Pierre (et Hedwige, sérieuse et prude, n'en avait pas paru surprise, au contraire), non qu'il ne la désirât pas immédiatement car il était amoureux, jeune et très empoigné par sa passion. Mais il éprouvait un plaisir vif et amer à se donner la discipline et à commencer la vie comme s'il était marié depuis trente ans. Il lui déplaisait de se jeter sur Hedwige et de la prendre par surprise ou par convention légale. D'abord l'accomplissement immédiat du devoir conjugal a quelque chose de ridicule et de bestial, de juridique et de louis-philippard. Dévêtir une femme, lui arracher sa robe, montrer par la fenêtre aux voisins réunis dans la rue la chemise de la mariée, comme dans certains rites juifs, n'est vraiment pas le plus grand hommage qu'on puisse lui rendre. Pierre s'était juré de ne pas lancer d'un coup Hedwige dans un univers nouveau, celui des sens. De sorte qu'ils vivaient si purement qu'on les eût pris pour des camarades de camping, pour un de ces couples innocemment réunis grâce aux petites annonces du Touring Club. Toute sa force d'homme, Pierre l'avait exercée sur lui-même pour s'empêcher de violer Hedwige comme il violait tout. C'était le plus beau cadeau qu'il pût lui faire, la plus grande preuve d'amour et de respect à lui donner. Il lui avait fallu un immense effort ; aller lentement n'est pas facile quand on n'en a pas l'habitude. Et, bien entendu il s'interdisait aussi cette chimie sexuelle, ces recettes de cuisine voluptueuse inventées par les siècles oisifs. Pas d'amour sur l'arçon de la selle, pas de rapides contacts de poulailler, mais pas non plus de ces fignolages d'alcôve de nos pères, pas de ces figures de patinage sous les glaces du baldaquin, pas de ces séries au billard qui n'amusent plus que les vieux messieurs quand ils en ont encore les moyens.
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(Les femmes) obéissent à une horloge invisible ; la preuve, c'est qu'elles sont en retard avec régularité.
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Les souliers ne sont pas plus cirés que les habits ne sont brossés, le déjeuner prêt, le bois scié ou le vin mis en bouteille. Plutôt que de le voir procéder à ces opérations en traînassant, Pierre fait son service lui-même ; Chantepie suit mollement, commente de loin, regarde passer l’éclair. Pierre tonne mais Chantepie ne l’entend pas, car il est sourd. Il vit enfermé dans sa surdité comme Pierre enfermé dans son rythme trépidant : toutes les infirmités sont des prisons.
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