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EAN : 9782246826590
180 pages
Grasset (10/03/2021)
3.6/5   15 notes
Résumé :
Comment peut-on, adolescent, faire la démonstration d'un talent inouï au point de devenir une sorte de bête de foire dans les milieux littéraires parisiens, et à vingt ans, renoncer brutalement à la poésie pour partir vendre du café et des casseroles en Afrique ?

C'est ce qu'on a l'habitude d'appeler le mystère Rimbaud. Cette répudiation lui a valu anathème (André Breton) et incompréhension (Etiemble), certains comme René Char se montrant plus compat... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Arthur Rimbaud apparaît au milieu de tous ceux qui ont croisé sa route, les grands comme Verlaine Théodore de Banville ou Charles Cros, les obscurs comme ceux de Douai, et bien sûr Izambart le jeune professeur et la mère les soeurs et le frère mais pas le père, grand absent que son fils cherchera de Charleville à Paris -six jours de marche à pied, ou bien par le train sans billet qui le mènera en prison tandis que la Commune gronde- et puis bientôt au bout du monde…Mais chez Rimbaud la poésie en alexandrins ne survivra pas à la modernité nouvelle: « Ne va-t-il pas être bientôt temps de supprimer l'alexandrin ? »
Après la rupture avec Verlaine puis dans une certaine mesure avec la famille vers laquelle il songera revenir un jour, puis avec tous les autres-les Parnassiens- auprès desquels il se montre détestable, c'est le énième départ cette fois terriblement loin.
« Je m'ennuie beaucoup, toujours, je n'ai même jamais connu personne qui s'ennuyât autant que moi »
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Le livre de Jean Rouaud tente de répondre à cette lancinante question, pourquoi Arthur Rimbaud abandonne la poésie à l'âge de 20 ans ?
La réponse de Jean Rouaud, est une fois de plus une interrogation, comment savoir, comment être sur, de comprendre, cette comète aux semelles de vent ?


A la façon d'un notaire, Jean Rouaud reconstitue la totalité des événements qui ont émaillé sa vie. Il lui faut des témoins. Tous ceux qui ont croisé son chemin seront donc appelé à la Barre de celle de l'étude, ses amis, comme ses proches ceux qui l'ont côtoyé, admiré, détesté, vilipendé...
Maitre Rouaud rédige les minutes de ses constats, étayés par des actes précis , authentiques.


Cette vie si brève laisse d'étranges mystères. Et pour ceux qui ne connaissaient pas encore toutes les fantaisies, et les provocations du poète, ce livre apparaîtra comme une suite de faits diablement profanes .

L'enfant fut d'une surprenante précocité intellectuelle, comparable à celle d'un Évariste Gallois, né à Bourg-la- Reine, en mathématiques.
Balayant toutes les règles de la prosodie française, il ne manquera aucune cible parmi les plus anciennes règles suivies par les parnassiens. Il se fera beaucoup d'ennemis et suscitera plus de polémiques que de brillants éloges.
Si Verlaine adoube le poète et travaillera à sa diffusion en pilotant la première édition chez Grasset, d'autres seront bien plus caustiques.


Ayant réinventé la poésie et mis sur les rails la poésie du XXème siècle, à travers les illuminations, il trace une route qu'il va bientôt abandonner. C'est bien Rimbaud qui élève les métaphores, au plus haut degré de la démarche poétique, telle l'idée qu'un bateau puisse être ivre, comme Baudelaire s'imaginant en albatros.
L'imagination prend le pouvoir et nul ne doit se soumettre à des normes souveraines.
Sans doute attendait-il que la vie ne soit plus une suite de désastres ou de provocations mais une découverte émerveillée du monde.

Il manque dans cet essai, une table des matières pour revenir facilement sur tel ou tel personnage cité à différents moments.
Un répertoire des oeuvres comme des dates clés de sa vie manque cruellement.

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Le fait pour un écrivain d'avoir obtenu le Prix Goncourt il y a une trentaine d'années peut-il être un certificat de rigueur littéraire, voire d'érudition, quels que soient ses écrits futurs ?
Davantage que Michel Butor en 1989, dans ses Improvisations, Jean Rouaud, faisant fi de l'immense bibliographie rimbaldienne et de tous ses devanciers, publie un essai sur Rimbaud, sans aucune référence.
Il met en pièces constituées de personnages plus ou moins importants (certains sont inutilement présentés), et de lieux censés représenter sa vie poétique et aventureuse, une existence dispersée à tous les vents.
Comme les repères chronologiques semblent insuffisants, il sera difficile au simple lecteur d'assembler des pièces de puzzles, plutôt hétéroclites et surtout très inégales, voire inutiles. Jules Buffin des Essarts, l'armurier Montigny, Louis Deghislage, le professeur Wilhelm Lübcke, Lacroix, éditeur d'ouvrages techniques, les divers ecclésiastiques et docteurs, sans parler de Heinrich Schlieman creusant la butte d'Hisarlik, peuvent-ils rivaliser avec les « évangélistes », les témoins oculaires essentiels comme Ernest Delahaye, Georges Izambard, « grands témoins de l'éclosion poétique », Paul Verlaine ou Germain Nouveau ? Encore convient-il de préciser que Delahaye et Louis Pierquin « fidèle parmi les fidèles » qui ne voudrait pas que le révérend Paul Claudel égrène son chapelet de fureur, se sont soumis à la férule d'Isabelle pour avoir droit au chapitre. Quant au professeur Izambard, s'il publie aussi tardivement, c'est parce qu'il doit se défendre des calomnies de la famille Rimbaud.
(Et nous éviterons de parler du paysan Fricotot, devenu Frénicot, p. 147 (en réalité, Fricoteau !) qui aurait marqué définitivement l'Histoire littéraire en évoquant les chevaux « fringants » de l'amputé de Roche, d'Armand Sabouré (sic) ou plutôt Savouré !). Nous n'évoquerons ni Louis Forain qui héberge Rimbaud à Paris, ni Mallarmé, ni Henri Mercier, ni le dernier ami africain Djami Wadaï, puisqu'ils sont bizarrement ignorés de l'essai.
En revanche, Jean Rouaud s'en prend dès le début au poète René Char dont il cite une phrase isolée de son contexte : « Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud ». « de quoi je me mêle » interroge Rouaud, sans se douter qu'on pourrait très légitimement lui renvoyer la question.

Des informations discutables

C'est d'autant plus fâcheux d'ignorer toutes les sources du l'auteur que certaines informations sont fausses ou appartiennent à la légende. Ce n'est pas parce que le bateau Wandering Chief, partant de Java, a affronté une tempête au large du cap de Bonne espérance que « Rimbaud a manqué de périr en mer ».
Non, il n'est pas certain que ce soit les vers de Jean Aicard que le jeune poète a ponctué plusieurs fois du mot « merde ».
Non, l'élève Rimbaud n'a pas « sauté une classe » (p. 37), cette légende a été démentie depuis longtemps.
Non, ce n'est pas Mathilde Mauté, « accompagnée de sa mère » qui « accueille à sa descente du train l'adolescent de Charleville » (que Verlaine et Charles Cros présents à la gare n'ont pas reconnu).
Pourquoi la photo (retouchée) de Carjat transformant Rimbaud « en icône », devient-elle bientôt celle de Nadar, page 67 ? (Où sont les correcteurs ?)
Non, malgré des témoignages discutables démentis par le calendrier de activités rimbaldiennes de mai 1871, Rimbaud n'a pas participé physiquement à la Commune, même s'il est un communard de coeur et d'esprit.
Non, Germain Nouveau n'accompagne pas Rimbaud à Londres le lendemain de leur rencontre à Paris mais plusieurs mois plus tard.
Non, Rimbaud ne fut pas si « bon » que ça avec Mariam, la femme abyssine, qu'il a renvoyée « sans rémission », lassé de « cette mascarade » devant lui.
Non, ce n'est pas Isabelle Rimbaud qui a rassemblé « les plus beaux textes » sur son frère mais Verlaine que Jean Rouaud traite avec mépris. Ce « poète, alcoolique, homosexuel, apostat » (page 12) qui partage avec Bretagne « le goût des garçons » et s'accrochera « à la vieille quincaillerie poétique » est très injustement présenté. Ernest Cabaner qui « logea quelque temps l'adolescent fugueur » bénéficie de propos seulement allusifs.
Non, ce n'est pas à la bigote et dogmatique Isabelle, malgré son « regard pervenche » et ses soins de soeur aimante à la limite « incestuelle », et à son Paterne Berrichon de mari, « l'anarchiste furieux » mué « en catholique ardent », qui ont faussé pour des décennies la juste perception des poésies de Rimbaud que l'on doit la survie de l'oeuvre de Rimbaud. C'est à Paul Verlaine, inlassable défenseur des poèmes rimbaldiens sauvés de la destruction et de l'oubli, qu'il faut rendre justice.
C'est bien le « beau-frère posthume », lequel se vantait d'avoir passé confortablement toute la guerre (de 14-18) en profitant des droits d'auteur d'Arthur, et son épouse, laquelle ignorait tout des écrits de son frère avant sa mort, qui ont déshérité et renié le frère, Frédéric, accusé ici d'ivrognerie.
Tenter de revivifier le mythe rimbaldien catholique en « béatifiant » l'adolescent et en appelant à la rescousse sainte Marguerite-Marie Alacoque (sic), le curé d'Ars et Bernadette Soubirous « la petite voyante » de Lourdes, est tout simplement ridicule.
En 2021, la légende perdure et la « rimbaldo-fiction » a encore de beaux jours devant elle.
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Constellation : groupe apparent d'étoiles qui présente un aspect reconnaissable.

En ayant simplement fait partie de leur vie à un moment ou à un autre, Arthur Rimbaud aura donné à nombre de ses contemporains une postérité littéraire.
C'est sur ces personnes plus ou moins anonymes, sur ces lieux traversés par "la comète Rimbaud", que Jean Rouaud jette un éclairage dans son essai La constellation Rimbaud.

Arthur Rimbaud, l'éternel adolescent poète, irrémédiablement associé à Verlaine, élevé au rang d'icone, qui aura pour toujours 17 ans.
Et pourtant, le poète n'a plus écrit de poésie après l'âge de vingt ans.
Et pourtant, sa liaison avec Paul Verlaine n'aura duré que quatre ans, mais quatre années de passion destructrice et une fin explosive, qui marquera les esprits, le fameux coup de feu qui envoya Verlaine en prison.

Jean Rouaud offre une vision élargie de la constellation Rimbaud, ses camarades d'enfance, son maître d'école, les artistes qu'il aura croisés à Paris, à Bruxelles, les négociants rencontrés en Afrique. Et bien sûr, sa famille, Vitalie, la mère vers qui il retournera à chaque problème de santé, Isabelle, la soeur qui prendra soin de lui durant les derniers mois de sa vie, mais aussi son père absent et Frédéric, le frère renié.
Il nous abreuve d'anecdotes diverses : le chanteur Hubert-Felix Thiefaine dénonçant une erreur sur la tombe de la mère de Rimbaud, les spéculations sur l'identité de Jef Rosman, un peintre ayant laissé une oeuvre unique derrière lui...

Cette suite de noms, de lieux, peut parfois paraître indigeste à qui veut tout savoir, tout retenir, mais il n'en est pas moins fascinant de suivre "la comète" dans ses expéditions.
J'ai beaucoup apprécié cet essai complet et instructif, ainsi que le ton très personnel de l'auteur, dans lequel on peut parfois percevoir une certaine malice ou ironie.
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Il y a des auteurs qu'il est fort plaisant de suivre sur le long terme, à qui il faut faire confiance, être fidèle. C'est le cas de Jean Rouaud. Cette fidélité m'a permis de lire sous sa plume, c'est-à-dire son style, son bon esprit, son érudition et surtout, à l'instar de Flaubert qui disait (assez justement pour son époque) que "l'auteur doit être présent partout mais visible nulle part", Jean Rouaud est très présent mais aussi visible, donc audible, à la façon d'Eric Vuillard par exemple, cette fidélité m'a permis de lire - disais-je donc - un récit sur les peintures préhistoriques (La splendeur escamotée du frère Cheval), la fin du papier et de la vie de quartier (Kiosque), un superbe texte sur la guerre de 14 (Éclats de 14) ou encore son avis sur les crises actuelles, de la viande à l'économie (avec L'avenir des simples). Jean Rouaud m'amène là où je ne me serais guère déplacé de moi-même et c'est bien ce que j'attends, entre autre, de la littérature.
Certes, cette fois, Rouaud m'emmène à la (re)découverte de Rimbaud - ça peut paraitre assez classique, voir planplan. Mais non. Cette Constellation Rimbaud permet de suivre la biographie du poète au semelles de vent avec un angle différent puisqu'on suit avant tout les personnes qui l'ont côtoyé de près ou de loin mais aussi les lieux qu'il a fréquenté. Ce livre est aussi une réflexion sur la poésie, sur l'écriture, c'est un ouvrage qui a l'avantage rare d'honorer Rimbaud tout en le replaçant en tant qu'homme devant l'échec. Il n'est pas question de le démystifier, mais simplement de le réévaluer peut-être, d'en éprouver plus l'humanité que la légende. Rimbaud chercha les réponses dans la poésie, ensuite dans la vie aventureuse même. Rimbaud c'est un roman et ce roman c'est cette Constellation, amusante, érudite, étonnante, généreuse, riche en anecdotes incroyables sur la famille de Rimbaud, à propos de ses rares photographes, sur Thiefaine qui a trouvé une erreur sur la tombe familiale, sur Verlaine bien sûr et aussi quelques autres poètes qui ont rejetés l'enfant prodige mais trop anarchiste pour eux - qui ne laisseront d'ailleurs que peu de traces dans l'histoire en général et la littérature en particulier.
Bref. Un excellent livre printanier, certainement plus intéressant et enrichissant qu'un millier de séries sur Netflix - qu'on se le dise. Bravo Jean Rouaud, merci Rimbaud (ou le contraire).
P.S. : je l'ai vendu à une amie de passage en librairie qui l'a dévoré en gloussant le temps d'un après-midi ensoleillé au lieu de corriger les textes de ses élèves - c'est dire.
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critiques presse (2)
LeFigaro
27 mai 2021
Portrait érudit du poète à travers les personnes qui l’ont connu et les lieux qu’il a traversés.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LaCroix
15 mars 2021
Jean Rouaud s’attache aux pas de « l’homme aux semelles de vent », éternel fuyard, qui délaissa la poésie pour le trafic d’armes.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
On connaît l'apostrophe solennelle de René
Char : « Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud », proférée en roulant les « r » et tombant de la haute stature du colosse du Vaucluse. Ce qui, en dépit de la considération pour sa poésie, peut conduire à se demander de quoi je me mêle, au nom de quoi aurait-il son mot à dire, qui plus est rétrospectivement quand les dés ont été depuis longtemps jetés, et d'abord qu'est-ce qu'il en sait, lui qui, en quatre-vingts ans, n'a quasiment jamais quitté L'Isle-sur-la-Sorgue alors que l'autre, encore gamin, avait déjà parcouru l'Europe à pied de l'Italie jusqu'à la Suède, échoué à Java après s'être engagé dans l'armée coloniale hollandaise pour toucher la prime, manqué de périr en mer en passant le cap de Bonne-Espérance et d'insolation sur une route italienne, travaillé dans un cirque, fabriqué des boîtes, été précepteur, traducteur, interprète, marin, dirigé un chantier à Chypre. Et on n’est pas encore à Aden, et de là à Harar en Abyssinie…
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"Manifestant un désir de publication, il le confia à un éditeur local, qui n'en fit rien mais eut la bonne idée de ne pas le brûler contrairement à la demande future du poète dans une de ses lettres. Le cahier passa de main en main jusqu'à être acheté par Stefan Zweig qui l'emporta au Brésil où il devait se suicider en 1942."
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Vidéo de Jean Rouaud
À l'occasion du Forum des libraires 2023, Olivier Nora, Président-Directeur général, présente la rentrée littéraire des Éditions Grasset - @editionsgrasset7893
Au programme de la rentrée d'automne 2023 : 0:00 Introduction 1:01 *_perspective(s)_ de Laurent Binet* 1:15 *_À ma soeur et unique_ de Guy Boley* 1:29 *_l'enragé_ de Sorj Chalandon* 1:55 *_Rose nuit_ d'Oscar Coop-Phane* 2:30 *_strange_ de Geneviève Damas* 2:50 *_Le Jour des caméléons_ d'Ananda Devi* 3:06 *_Adieu Tanger_ de Salma El Moumni* 3:17 *_Le Grand Feu_ de Léonor de Récondo* 3:47 *_Comédie d'automne_ de Jean Rouaud* 3:58 *_Croix de cendre_ d'Antoine Sénanque* 4:11 *_Impossibles adieux_ de Han Kang* 4:39 Conclusion
Un événement @livreshebdo_ en partenariat avec @babelio
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