Les
carnets d'un traducteur éclectique en diable : une ode à l'art étrange du changement de langue, et à la littérature tous azimuts, tout simplement.
Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/10/04/note-de-lecture-
par-instants-le-sol-penche-bizarrement-nicolas-richard/
La double proposition formulée en introduction par Nicolas Richard, traducteur de plus d'une centaine de textes littéraires de l'anglais (de tous horizons) vers le français ces vingt dernières années, et romancier (« Les soniques » en 2009 avec Kid Loco et «
La dissipation », à propos d'un certain
Thomas P., en 2018), est plus que largement réussie dans ce «
Par instants, le sol penche bizarrement » (au sous-titre bien plus explicite : «
Carnets d'un traducteur ») publié chez Robert Laffont en septembre 2021.
D'abord, il ne s'agit pas bien entendu de gloser doctement sur la signification même du « traduire », mais bien, humblement (en n'hésitant pas, le cas échéant, à revenir sur certaines erreurs de jeunesse, voire sur des choix discutables mais plus récents, qui ne seraient sans doute plus les mêmes à présent –
car, comme dans la lecture et dans l'écriture, il y a bien toujours dans la traduction un échouer mieux qui rôde), à raconter ce qui se passe en de multiples occurrences, face à des textes différents, lorsque se posent sur la table de travail les arbitrages obligatoires, instinctifs ou mûrement pensés, entre le sens et le rythme, entre la langue « personnelle » d'une autrice et l'intelligibilité pour la lectrice française imaginée, entre la fidélité d'une référence et la pertinence d'un contexte culturel distinct. Discrètement, et dans un sourire souvent fort perceptible, Nicolas Richard raconte les échecs et les succès provisoires, les trouvailles et les impasses, les faute de mieux et les percées quasiment conceptuelles qui peuvent jalonner un tel chemin au long cours. On retrouvera aussi ici certaines des préoccupations, certains des doutes, certains des choix à assumer aussi, qui hantaient le
Claro des
carnets de traduction de « Jérusalem« , ou de ses parcours faussement vagabonds de «
Plonger les mains dans l'acide« et de «
Cannibale lecteur« .
Ensuite, c'est la part de rencontre, physique, émotionnelle et littéraire que l'on trouve au coeur d'une bonne part de l'entreprise de traduction, que le commerce y soit avec des morts ou avec des vivants, avec des autrices, des auteurs, ou les membres d'un formidable réseau informel d'expertes et d'experts en lexiques et en idiomes, qui nous est brillamment offerte en partage. Ainsi, la lectrice et le lecteur se régalera au fil des 450 pages de l'ouvrage en compagnie de
Richard Brautigan, de
Keith Abbott, de
Harry Crews, de
Jim Dodge, de
William Kotzwinkle, d'
Adam Thirlwell, de
Valeria Luiselli, de
Paul Beatty, de Richard Powers ou de
Nick Cave, autrices et auteurs présents par ailleurs sur ce blog, pour n'en citer que 12 parmi les 73 de l'ouvrage, en incluant les mentions spéciales aux monumentaux
Russell Hoban (avec l'invention du parlénigm pour «
Enig Marcheur ») et
Thomas Pynchon (avec «
Vice caché » et «
Fonds perdus »).
Nous savions au moins depuis son passage amical en « libraire d'un soir » à la librairie Charybde en mai 2013 (à propos de livres qu'il n'avait PAS traduits, et à écouter ici) à quel point Nicolas Richard donne envie de lire les autrices et les auteurs dont il parle : «
Par instants, le sol penche bizarrement » en offre aussi une magistrale démonstration. Et nous aurons le grand plaisir de l'accueillir pour une discussion et dédicace dans notre repaire de Ground Control (81 rue du Charolais 75012 Paris) ce mercredi 6 octobre à partir de 19 h 30. Venez nombreuses et nombreux, ça en vaut vraiment la peine !
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