"H. P. LOVECRAFT" (1890-1937), ce natif de l'Antique Providence (Etat américain de Rhode Island), a su créer dans l'ombre un monde mythologique qui soit à sa mesure : ce fut son "monde à lui" et il lui survécut... Disparu à l'âge de 46 ans, quasiment "mort de pauvreté" (des suites d'un cancer de l'intestin grêle, après s'être nourri durant des années de sucreries et autres aliments gras ou sucrés suffisamment "bon marché"), son passage terrestre ressemblerait presque à un calvaire... Son biographe Sunand Tryambak JOSHI (dit "S. T. Joshi") a montré en son monumental ouvrage "I am Providence" — fruit de dix années de travail — tout ce qui faisait l'envergure de sa stature d'homme de lettres : un érudit passionné animant un cercle d'édition amateure, fournisseur compulsif de la (très "pulp" mais aujourd'hui devenue mythique) revue "Weird Tales" qui le paya fort mal, survivant grâce à d'âpres et ingrats travaux de réécriture ("rewriter"), réussissant bon an mal an à structurer un incroyable réseau épistolaire d' amis et correspondants d'une vitalité étonnante sur le sol américain (Robert Ervin HOWARD, Donald WANDREI, Robert BLOCH, Clark Ashton SMITH, Frank Belknap LONG August DERLETH et quelques autres, dont certains — en tout premier lieu, l'un de ses deux "exécuteurs testamentaires" : August Derleth qui créera la maison d'édition "Arkham House" en y publiant un recueil de nouvelles de son ami épistolier ("The Outsider and Others Stories") mais surtout nombre d'histoires dont le canevas a été imaginé par "HPL" qui seront "terminées" par ses soins tout en adultérant, simplifiant et gauchissant le Mythe de Cthulhu qu'il admirait — deviendront autant d'écrivains "continuateurs"/"prolongateurs" de son Monde, étendant — parfois au prix de la copie et la simplification ("Le Bien contre Le Mal") — les tentacules du riche et complexe univers mythologique du Maître défunt... Cette vie relationnelle épistolaire exigeante fut l'un des "carburants motivationnels" qui permit la lente Genèse d'un monde imaginaire profondément original, oscillant entre la féérie et les plus noirs cauchemars de l'humanité... Roger CORMAN ("The Haunted Place" / "La Malédiction d'Arkham" en 1963) et John CARPENTER ("The Thing"/ "La Chose" en 1982, "Prince of Darkness"/"Prince des Ténèbres" en 1987, "In the Mouth of Madness"/ L'Antre de la Folie" en 1995... ) se sont tôt emparés et inspirés des riches noirceurs et autres "monstruosités" de son univers sans aucun espoir pour les civilisations humaines... On se souviendra autant des magnifiques gravures de l'artiste Virgil FINLEY pour les pages de la revue "Weird Tales" dans les années trente que de la fabuleuse merveilleuse ambiguïté d'une illustration (entre humain et animal, démon et merveille...) due à Tibor CSERNUS (peintre et illustrateur particulièrement inspiré des ouvrages de Philip K. Dick ou Lovecraft pour les éditions françaises "J'ai Lu" dans les années soixante-dix) pour son recueil de nouvelles "Dagon"... "Ambiguïté", oui... Toujours à cheval entre deux mondes... Mais qui fut cet homme ? Non pas un être "contre le monde, contre la vie" comme l'affirmera péremptoirement en un titre lapidaire tel littérateur à la mode dans un ouvrage de 1991 paru dans une très stupide collection ["trashy", branchouille, "tendance" ?] subtilement dénommée... "Les Infréquentables" [!!!]. "HPL" restera à nos yeux un mystère (y compris sans doute pour lui-même)... La part la plus sombre de son existence ? Le racisme et l'antisémitisme maladifs (pléonasmes), la si brève expérience conjugale avec Sonia Haft Greene Davis (née en Ukraine, d'ascendance ashkénaze) et leur emménagement à Brooklyn, la fuite de la sexualité, la crainte de la souillure et du mélange, de la "dégénérescence de la race", la double "Abomination de Dunwich" (Ah, ce précoce géant de Wilbur Whateley et son frère caché, invisible et innommable...), les sympathies pour les idées du fameux "best seller" de "Herr Hitler" et l'admiration pour son auteur, Cthulhu-des-Profondeurs, Shubb-Niggurath, Yog-Sothoth, Azathoth, Nyarlathotep, Abdul Alhazred ("l'Arabe dément") et son célèbre "Necronomicon" lui auront, certes, survécu... On se souviendra avec ferveur, pour notre part, de l'emblématique personnage de Randolph Carter, principal protagoniste de la suite de 4 récits traduits en français sous le titre "Démons et Merveilles" : la Cité fabuleuse de Kaddath retrouvée avidement en ses propres rêves, telle la fantasmatique "Lost City of Z" / "Nameless City" chère au colonel Fawcett, forme sans doute l'autre partie (la plus lumineuse et émouvante) de la réponse...
[en illustration : H.P. LOVECRAFT en 1930]
NOTE IMPORTANTE : la plupart des textes "Arguments" des nouvelles que vous lirez ici sont repris intégralement ou remodelés à partir des fiches/oeuvres de l'encyclopédie en ligne "WIKIPEDIA".