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Critiques sur le theme : afrique (22)
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La plus secrète mémoire des hommes

Diégane Latyr Faye est un jeune auteur sénégalais, exilé à Paris et en quête de succès, de reconnaissance, d'accomplissement, aussi bien artistique que personnel. Lorsqu'il découvre l'oeuvre mythique d'un auteur africain disparu, devenu mystérieusement maudit, du nom de TC Elimane, sa quête devient alors une obsession. Un véritable voyage dans le temps et dans le monde que nous allons suivre avec une galaxie de personnages qui tour à tour deviennent narrateurs et narratrices de ce fantastique destin. Dès le préambule, emprunté à Bolaño avec le titre de l'ouvrage en prime, l'ambition du roman est visible mais ne deviendra jamais pesante. A coup d'inventions stylistiques, de recherches lexicales, de métaphores foisonnantes, l'auteur exige de son lecteur une attention sans limite, mais le récompense avec ce magnifique voyage en histoire et en littérature, jamais pédant, jamais gratuit. Une oeuvre utile, sinon salutaire, qui fait du bien au cerveau, à l'âme et au coeur.
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Les Racines du ciel

Dans les années 1950 au Tchad, un homme fait circuler une pétition pour empêcher le massacre des éléphants, décimés par milliers. Lorsqu'il prend les armes, incendie des dépôts d'ivoire et tire sur des chasseurs, c'est la stupeur dans l'administration coloniale. Que veut vraiment cet homme, très vite érigé en héros par certains ? Agit-il uniquement pour la préservation de la faune africaine, ou a-t-il d'autres ambitions politiques, à un moment où l'idée d'indépendance commence à faire son chemin en Afrique Equatoriale Française ? Alors qu'une traque s'organise, les nombreux personnages de ce roman polyphonique prennent partie pour ou contre Morel, objet de tous les fantasmes et de toutes les rumeurs. Tantôt tourné en ridicule, haï, traité d'idéaliste ou de misanthrope, tantôt porté aux nues, incarnant par son combat la liberté et l'humanisme le plus audacieux, cet ardent défenseur de la nature renvoie tous les protagonistes à leurs contractions, à leurs conflits d'intérêt et bien souvent, à leurs fragilités personnelles. Son obstination farouche les questionne et les pousse à agir. Avec ce roman foisonnant qui embrasse des thématiques écologiques et politiques sur fond de colonialisme, Romain Gary dessine un personnage inoubliable, et montre que le respect des animaux n'est pas incompatible avec les exigences du progrès. Un prix Goncourt 1956 d'une actualité confondante.
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Petit pays

Fortement inspiré de l'enfance de Gaël Faye, Petit pays raconte du point de vue d'un jeune garçon les années qui ont précédé la guerre civile au Burundi. Gabriel, le héros, atteint l'âge de raison alors que les tensions entre Hutus et Tutsis atteignent leur paroxysme. Jusqu'à l'éclatement, inéluctable.
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Frère d’âme

Lorsqu'Alfa Ndiaye voit mourir dans ses bras son ami Mademba, comme lui enrôlé sous les drapeaux français, sa raison vacille. Plus que les mois dans les tranchées, plus que les ordres donnés par des soldats blancs qui voient dans les “chocolats” des sauvages propres à intimider l'ennemi, ce dernier drame le fait basculer. Tandis qu'il se met à collectionner les mains des allemands abattus, qu'il leur arrache à coups de machette, son esprit divague de plus en plus souvent vers son Sénégal natal, symbole d'un état du monde à jamais perdu.
A la confluence des deux machines à broyer les hommes que sont le colonialisme et la guerre, David Diop explore avec une radicalité visionnaire la psyché fragmentée de son héros. Porté par une langue intensément poétique et luxuriante qui donne à ressentir la suffocation intérieure d'Alfa Ndiaye, Frère d'âme est à la fois un des romans les plus puissants de cette rentrée et une des plus effarantes descriptions de la guerre des tranchées dans la littérature récente.
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L'autre moitié du soleil

Dans le Nigeria des années 1960, Olanna, une jeune femme de bonne famille, tombe sous le charme d'Odenigbo, intellectuel engagé et idéaliste. Elle part s'installer chez son amant à Enogu, où elle coule des jours tranquilles, en compagnie du boy d'Odenigbo, Ugwu, 13 ans, qui a quitté la brousse pour venir se placer en ville. Sa soeur, Kaiene, gère les affaires familiales de son père, entre Port Harcourt et Lagos, et vit avec son amant anglais Richard, passionné d'art ibo... Jusqu'au début de la guerre et du massacre qui vise les Ibos, ethnie dont les deux femmes sont issues, qui conduira à la sécession de l'Etat du Biafra entre 1976 et 1979.
La voix de Chimamanda Ngozi Adichie se fait entendre de manière singulière dans cette superbe fresque familiale, avec comme toile de fond la Guerre du Biafra. C'est d'abord le récit de survivants, dont les destinées rejoignent celles de la Grande Histoire. Mais c'est aussi une histoire d'amour, de rencontres fortuites qui changent le cours d'une vie, de fidélité à ses idéaux, d'accointances avec le hasard, qui font toute la richesse de ce livre.
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Bakhita

Bakhita a oublié son vrai nom, égaré quelque part dans son Soudan natal. Les années de violence et d'esclavage qu'elle a subies ont effacé son passé, mais pas sa volonté. Après avoir gagné sa liberté, elle devient religieuse et se met au service des plus pauvres, avec une abnégation qui lui vaudra d'être canonisée.
Comme pour signifier son humilité face à ce destin hors-normes, Véronique Olmi écrit dans un style sentencieux et scolaire, semblant s'appliquer à faire en sorte qu'aucun mot ne soit plus haut que l'autre. On aurait aimé plus d'ambition, de nerf, d'âpreté aussi : en l'état, l'écriture de Bakhita est une petite musique falote et lénifiante qui n'est guère à la hauteur de son héroïne.
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Amkoullel, l'enfant Peul

“En Afrique, quand un vieillard meurt, c'est une bibliothèque qui brûle.” Cette formule proverbiale d'Amadou Hampâté Bâ est une excellente introduction à son oeuvre et en particulier à ses mémoires, Amkoullel, l'enfant peul, merveilleux exemple de conte africain.
Amadou Hampâté Bâ a milité toute sa vie pour faire connaître les traditions de l'Afrique, d'abord sous l'égide de Théodore Monod qui a été son directeur à Dakar, puis à travers l'Institut des Sciences humaines de Bamako qu'il a fondé en 1960 et enfin au sein de l'Unesco où il a été élu au sein du conseil exécutif pour représenter son pays, le Mali. Ce premier tome de ses mémoires retrace, dans une langue imagée et fluide, avec tout son talent de conteur, l'histoire de sa famille, de son enfance et de son adolescence et, à travers elle, l'histoire du peuple Peul. Un peuple nomade, attaché à ses troupeaux, religieux, fier et courageux, qui s'est sédentarisé au cours des siècles dans plusieurs régions d'Afrique, du Soudan au Mali.
Récit épique, mais aussi plein d'humour et de tendresse, ces mémoires sont à la fois l'occasion de découvrir la mère de l'auteur, Hadidja, une femme forte et courageuse, et un pays colonisé où les représentants de l'Etat française se révèlent être parfois bienveillants, curieux et respectueux de la culture africaine, parfois bornés, violents et méprisants. Fresque historique foisonnante de détails et d'anecdotes, histoire romancée d'une grande famille peul et de son destin mouvementée, Amkoullel, l'enfant peul, est un plaisir de lecture qui donne à voir et à entendre l'Afrique dans toute sa richesse et sa diversité.
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Le commerce des Allongés

Le jeune Liwa émerge d'un profond engourdissement, et très vite, tout comme lui, nous nous rendons à l'évidence : c'est au royaume des morts qu'il reprend progressivement conscience, plus précisément dans le cimetière du Frère-Lachaise, à Pointe-Noire, capitale de la République du Congo. Il aura beaucoup affaire, entre la découverte de ce monde nouveau, peuplé de défunts hauts en couleur de la société congolaise, et les visites au monde des vivants dans lequel il a encore des choses à accomplir. Après une enfance joyeuse, au milieu des danses et des odeurs de beignets de la rue du Joli-Soir, qu'a-t-il pu arriver à Liwa pour être si brutalement séparé de Mâ Lembé, sa grand-mère ? Reparcourant le fil de sa vie et le passé de sa famille, il part en quête de vérité, et de réparation.
Grâce à l'usage d'un « tu » s'adressant à la fois au personnage et au lecteur, Alain Mabanckou nous guide à travers une culture où les morts sont aussi agissants que les vivants. C'est avec un bonheur presque enfantin, que nous acceptons que les frontières s'abolissent, dans ce récit onirique où l'humour n'affaiblit en rien l'expression d'un vrai besoin de justice sociale et d'égalité entre les sexes.
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Black Manoo

Black Manoo débarque à Paris avec son vrai-faux passeport ivoirien un 15 août caniculaire des années 90. Il imaginait la Porte des Lilas comme une arche fleurie plutôt qu'une deux fois 4 voies, mais peu importe, les quartiers populaires de l'est parisien seront désormais son village. Un village ou l'addiction au crack, la misère et la clandestinité sont transfigurés par l'art de la débrouille, et l'indécrottable optimisme du héros.

Tel la Zazie de Queneau, Black Manoo arpente poétiquement la ville et se l'approprie avec une gouaille jubilatoire, naviguant au milieu d'une galerie de portraits hauts en couleur. du deal de la place Stalingrad au Danger, squat multiculturel du quartier Danube, en passant par le Moukou, improbable boite afro au pied du siège du PCF, le roman dresse une cartographie du Paris encore populaire des années 90 ou se rencontraient vieux ouvriers et sans-papiers. On y lit en filigrane l'histoire des vagues de migrations qui ont fait l'est parisien, qui s'incarnent dans l'amitié inattendue entre Black Manoo et un vieil auvergnat de la rue de l'Orillon, qui lit en lui son propre déracinement. Cet ancrage social est l'aspect le plus attachant de ce court roman de Gauz, auteur lui-même ivoirien qui découvre Paris dans les mêmes années que son héros. Il émane du texte une douce nostalgie et une grande tendresse pour sa ville d'adoption et tous les damnés de la terre qui l'habitent.
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L'enfant de sable

Inspiré d'un fait réel, L'Enfant de sable est l'histoire d'un père qui décide arbitrairement que sa huitième fille, né Zahra, sera un garçon. Désormais prénommé Ahmed, il/elle est élevé dans la dureté, le simulacre et la violence. C'est une question d'honneur, de virilité aussi. Mais au fil des ans, la féminité évacuée d'Ahmed refait peu à peu surface : son corps meurtri s'exprime, ses certitudes s'effritent… La voix du conteur, ensorcelante et fragmentaire, devient celle d'un combat, celui d'assumer qui l'on est, au-delà du carcan social, patriarcal et familial.
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Rouge impératrice

Ce roman prend place dans un futur alternatif où l'Afrique est un continent unifié, Katiopa, et le refuge des Sinistrés fuyant la Vieille Europe. Ces Européens, auparavant colons, sont maintenant devenus les migrants peu appréciés du continent africain. le chef de l'Etat de Katiopa veut expulser ces migrants ; mais, il tombe amoureux de la rouge impératrice, une femme qui veut leur venir en aide. Entre amour et politique, les deux protagonistes devront choisir leur camp.
Ce roman, le dix-septième de l'autrice franco-camerounaise Leonora Miano, décrit une histoire d'amour à la fois douce et érotique entre deux personnes qui pensaient avoir une vie bien installée. Rouge impératrice donne un sang neuf à la science-fiction en plaçant son action en Afrique, lieu habituellement peu présent dans le genre. En outre, les personnages féminins ont un tempérament fort et sont, dans ce roman, au centre de l'intrigue.
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Entre fauves

Peut-on écrire un bon polar qui soit aussi un plaidoyer pour la préservation de la biodiversité ? Colin Niel se livre à l'exercice avec brio dans Entre fauves, récit sur la disparition des animaux sauvages. Au fil des 250 pages l'auteur croise les points de vue d'un garde dans un parc national pyrénéen, d'une étudiante en droit fascinée par la chasse, d'un jeune berger Himba, et d'un lion du bush africain pour évoquer le fragile équilibre de la biodiversité et explorer l'humanité des bêtes, la bestialité de l'humain. Porté par des préoccupations environnementales telles que l'extinction des espèces, l'empreinte de l'activité humaine sur la nature ou la question de la chasse, le récit de Colin Niel renverse les codes du thriller et déplace la focale au-delà de l'anthropocentrisme. Des confins des Pyrénées aux steppes namibiennes, territoires où les hommes cohabitent avec ces deux grands prédateurs que sont l'ours et le lion, Colin Niel transporte son lecteur dans une haletante course contre la montre, entre chasse au fauve et chasse à l'homme.
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Les Contemplées

A la suite d'une manifestation à Tunis, une jeune Française est emmenée à la Manouba, la prison pour femmes de la capitale. A partir de ce moment les repères se diluent. Dépossédée de son identité, et assaillie par de violentes sensations - la couleur verdâtre des couloirs délabrés, les odeurs d'urine, de sueur et de cigarette - elle découvre hébétée la cellule où elle vivra avec vingt-huit autres codétenues. Après la peur, le rejet, le refus de partager quoique ce soit avec ces dangereuses prisonnières parfois condamnées pour meurtre, la narratrice finit par se rapprocher de ses compagnes d'infortune, par partager leur quotidien, et apprendre leur histoire.
A travers ce témoignage, Pauline Hillier donne corps et voix à ces femmes mises au ban de la société tunisienne, pour n'avoir pu supporter la condition dans laquelle les enfermaient des lois entièrement édictées par les hommes. le respect et la grande finesse avec lesquels l'autrice restitue leurs portraits, sensible à leur humanité, à leurs espiègleries, attentive à leurs gestes et à leurs regards au sein de ce huis clos insalubre, produisent des lignes d'une justesse souvent bouleversante et qui ne manquent pas d'humour. L'épilogue réserve une surprise particulièrement forte en émotions.
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Trois femmes puissantes

Trois femmes se succèdent au fil du récit : Norah, Fanta et Khady Demba, toutes originaires du Sénégal. Norah vit en France et se rend au Sénégal suite à l'appel inattendu de son père. Avocate, elle devra défendre son frère accusé du meurtre de leur belle-mère, avec qui il avait entamé une liaison amoureuse. C'est ensuite le point de vue d'un homme, Rudy, qui prime. A travers son regard, nous faisons la rencontre de sa femme, Fanta. Il l'a persuadée de le suivre en France en lui promettant qu'elle garderait son travail d'enseignante. La réalité est tout autre : Fanta se retrouve sans emploi, sans famille, et finalement, très seule. Elle subit les frustrations de son mari, enseignant agrégé, qui devient vendeur de cuisines après un licenciement. Enfin, le troisième et dernier chapitre retrace la vie de Khady Demba, veuve, sans enfants, contrainte de se prostituer afin d'avoir les ressources financières pour rejoindre l'Europe. Quitter son pays d'origine, le Sénégal, où elle n'a plus sa place, la conduit à endurer un calvaire qu'elle n'aurait pu imaginer.
Bien que ce roman date d'il y a plus de dix ans, il est d'une poignante actualité. Les femmes décrites sont définies par leur puissance car elles révèlent leur désir ardent et obstiné de vivre. A travers une écriture étonnante et fragmentée, Marie Ndiaye dévoile l'itinéraire fracturé de personnages déterminés à se faire une place dans ce monde.
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Djinns

Comment ça pense un schizophrène ? C'est la question que se pose la jeune Penda depuis que Madame la psy a affirmé que son voisin Jimmy était atteint de cette maladie. Cela fait des années qu'elle veille sur lui avec Mami Pirate, sa grand-mère guérisseuse d'origine sénégalaise. Après une crise qui a effrayé les plus redoutables caïds du quartier, Jimmy vient de passer sans détour du commissariat, où il était en garde à vue, à l'hôpital psychiatrique. Mais Mami Pirate se méfie de la médecine occidentale et elle a son propre diagnostique : si Jimmy va mal, c'est qu'il est possédé par un djinn maléfique. Les deux femmes, aidées par un dealer ami et des patients complices feront tout pour qu'il s'évade.
On a aimé ce premier roman de Seynabou Sonko qui prend pour cadre un quartier populaire, et met en scène une galerie de personnages de cultures différentes au parcours accidenté, sans pour autant les figer dans les thématiques du déterminisme social. Héros d'une aventure humaine à la fois sensible et rocambolesque, ils tracent leur route, et apprennent à composer avec leurs propres djinns, ces petits démons intérieurs qui les confrontent à leur propre complexité et font toute leur richesse. On ne s'ennuie pas dans ce récit porté par la langue savoureuse de Penda, mélange d'oralité, d'argot et de trouvailles poétiques inattendues.
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