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Critiques (919)
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Le pingouin

Au zoo de Kiev en faillite, Victor Zolotarev a adopté un pingouin qui déambule désormais dans son appartement. Pour subvenir à ses besoins et à ceux de son compagnon, Victor, écrivain sans succès, accepte un travail pour un grand quotidien : rédiger les notices nécrologiques de personnalités encore en vie. Sauf que celles-ci se mettent bientôt à décéder à un rythme inquiétant… le roman policier se double du tableau de l'Ukraine pendant la période qui suit immédiatement l'ère soviétique. Tous les anciens repères ont disparu et le pays semble livré aux entrepreneurs, aux mafieux et aux politiciens corrompus. le héros solitaire assiste à cet effondrement, et son pingouin devient la métaphore de ce dépaysement radical, ce sentiment de n'être plus du tout à sa place.
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La Décision

Mai 2016. Alma Revel, juge d'instruction antiterroriste, exerce depuis sept ans ses fonctions au rythme des attentats, des menaces et d'une vie personnelle sous protection. Sur son bureau, elle a placé cette phrase de Marie Curie : « Dans la vie, rien n'est à craindre, tout est à comprendre ». Comprendre pour choisir. La décision est au coeur de la nouvelle affaire qui lui est confiée : doit-elle libérer Abdejalil Kacem, jeune homme de retour de Syrie, soupçonné l'allégeance à Daesh ? La décision est également au centre de sa vie privée. En pleine crise existentielle, doit-elle quitter son mari ? Doit-elle suivre son amant, avocat pénaliste, en charge de la défense du prévenu ? Face à ces choix de juge, face à ces choix de femme, dans le cheminement de cette instruction complexe, Alma conserve-t-elle la possibilité d'exercer son libre-arbitre ?
Karine Tuil nous place face aux dilemmes et aux questionnements fondamentaux : coercition ou confiance, sécurité ou liberté ? Dans une construction romanesque implacable, le lecteur suit les étapes de cette instruction aux allures de tragédie. Il s'identifie à Alma, héroïne d'un monde violent dans lequel les parcours individuels impactent les grandes évolutions idéologiques et politiques. La Décision est un roman intense qui mêle le politique et l'intime, le documentaire et le roman, et nous entraîne, par le récit subtil de nos complexités, à appréhender le monde contemporain avec humanité, humilité et optimisme.
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L'Ukrainienne

En 1981, pour finir un de ses romans, Josef Winkler cherche le calme d'un coin isolé des montagnes de Carinthie, en Autriche. Il loue une chambre dans une ferme et se lie d'amitié avec sa logeuse, Nietotchka Vassilievna Iliachenko, une Ukrainienne qui lui raconte son histoire. Elle a été amenée de force en Carinthie pendant la Seconde Guerre mondiale et a été séparée de sa “Maty” qu'elle n'a jamais revue. Mais son récit remonte plus loin et nous fait entrevoir toutes les épreuves qu'ont subies les Ukrainiens en cette moitié de XXe siècle. La description de l'Holodomor, la grande famine de 1932-1933, est absolument bouleversante, surtout que l'on découvre que Nietotchka s'en est sortie d'extrême justesse.
Dans ce livre paru en Allemagne en 1983, Josef Winkler place l'écrivain à sa plus modeste position. Il se fait le simple scripteur d'une histoire qui ne lui appartient pas mais que cette présentation rend d'autant plus bouleversante. le lecteur est ainsi placé directement, par le biais du témoignage brut, dans la société paysanne de l'Ukraine des années 30 et de la Carinthie à la fin de la guerre. Un monde rude et sans pitié nous est ainsi révélé aujourd'hui.
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Le voyage dans l'Est

À treize ans, Christine Angot rencontre son père pour la première fois, lorsque celui-ci accepte de la reconnaître légalement comme sa fille. Dans le Voyage dans l'Est, roman autobiographique, l'autrice explique comment l'enfant qu'elle était, d'abord heureuse de connaître un père, fut poussée dans la réalité de l'inceste. Comment cet esclavage et cette déconsidération se sont invités dans son quotidien, ont fait dévier le cours de ses rapports aux hommes et bouleversé ses relations avec sa famille et avec elle-même.
L'honnêteté du récit de Christine Angot, sur un des sujets les plus tabous en France, ne peut laisser de marbre. Loin de s'embarrasser de formes, d'euphémismes et d'exagérations, elle présente les faits avec une exactitude maximale. Il faut lire ses paroles, explications crues et horrifiantes d'un quotidien banal, afin de saisir l'inceste pour ce qu'il est vraiment. le résultat est dur à lire, mais nécessaire à admettre.
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Mélancolia

Dans les nuits immobiles d'une ville tentaculaire, une poignée de personnages veillent. Un enfant de cinq ans, qui se croit abandonné par sa mère ; un frère et une soeur à la relation fusionnelle qui vont devoir affronter leurs pires peurs ; un jeune garçon, enfin, qui va découvrir en tombant amoureux les formes surprenantes que peut prendre la mue de l'adolescence. Ces personnages à l'éveil de leur vie ont en commun une expérience du monde surréelle, qui fait des friches industrielles de Bucarest l'espace de rêves infinis, où prennent chair tous les fantasmes et toutes les angoisses associées à l'enfance et à son crépuscule. Ce monde obscur sera le théâtre de leur initiation aux secrets de la vie d'adulte.

Comme dans Solénoïde, roman-monstre également traduit par Laure Hinckel en 2019, Mircea Cărtărescu déploie au fil des nouvelles de Melancolia une vision désespérée et claustrophobe de la vie humaine, que semble pourtant racheter une expérience de la transcendance qui prend la forme de rituels fantastiques et de cauchemars peuplés de formes organiques. Nouvelle pièce de choix dans l'impressionnant édifice gothique qu'est l'oeuvre de Cărtărescu, Melancolia confirme la singularité et la radicalité de son imaginaire, servi par une langue ciselée qui dit aussi bien le tourment et la déréliction que l'espoir insensé et la soif d'amour de ses personnages.
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Et par endroits ça fait des noeuds

Camille, depuis l'enfance, a toujours été amoureuse des mots. Elle écrit, lit avidement, consacre ses études à la littérature. Mais un jour, l'année de ses 23 ans, les mots viennent à manquer. Confusion, douleurs, difficultés à voir et à s'exprimer... le diagnostic tombe : Camille est victime d'une rupture d'anévrisme.

Confrontée à un corps soudain devenu étranger, Camille Reynaud convoque autour d'elle une foule de références littéraires, cinématographiques, musicales, artistiques, qui agissent comme un talisman. Ces signes persistants d'un rapport empathique au monde et à l'art deviennent une preuve que tout ce qu'elle a conçu, pensé, parcouru ou aimé reste actif, présent, en dépit des séquelles bien connues de l'AVC - à commencer par la perte, terrifiante, des mots. Sa famille d'élection, d'Hervé Guibert à Yayoi Kusama en passant par Denis Roche l'autorise à transfigurer littérairement son parcours médical, notamment en manipulant à sa guise le vocabulaire médical qui, passé au tamis de la poésie, finit par acquérir une familiarité presque attachante. Camille Reynaud parvient ainsi à tirer de son expérience traumatique un premier roman saisissant de maturité qui, bien plus qu'un journal de maladie, devient une impressionnante entreprise de réappropriation intime et une émouvante déclaration d'amour à toutes les formes d'expression de la sensibilité humaine.
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Un jour ce sera vide

Cet été, comme tous les autres étés, le narrateur d'Un jour ce sera vide passe ses journées à la plage avec sa grand-mère. Anxieux, réticent à se baigner, il préfère observer le petit monde des adultes, notamment sa tante, sombre et solitaire. Mais cet été, il va faire la rencontre de Baptiste et de sa famille, en tous points opposée à la sienne : simple et rayonnante de bonheur. Entre eux va naître une amitié intense, brûlante, exclusive.

Résonnant d'échos de Romain Gary ou de Patrick Modiano, l'écriture d'Un jour ce sera vide est imprégnée de la timide lucidité de ce jeune héros, terriblement conscient de la détresse existentielle de ceux qui l'entourent sans comprendre son origine profonde. Au fil du récit teinté de la mélancolie des étés trop vite passés, Hugo Lindenberg compose un touchant portrait de ce narrateur, éclairé par la grâce solaire de Baptiste comme sur une photo de vacances à contre-jour et pourtant chargée de souvenirs.
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Un livre de martyrs américains

Dans Un livre de martyrs américains, Joyce Carol Oates s'attaque à un sujet qui fait encore débat dans l'Amérique d'aujourd'hui, le droit à l'avortement, remis en question dans plusieurs états. le roman s'ouvre en 1999 par l'assassinat d'un médecin et de son garde du corps devant un Centre pour femmes de l'Ohio, par un homme qui se considère comme un "soldat de Dieu". A travers l'histoire croisée du médecin et du tueur, l'autrice dresse le portrait passionnant d'un pays déchiré par une véritable guerre idéologique, renforcée par les inégalités sociales et le fanatisme religieux. Sans manichéisme, les portraits nuancés des personnages éclairent la complexité de deux mondes que tout oppose. Documenté et engagé, le roman n'hésite pas à rappeler le recul des droits des femmes, les menaces de mort incessantes et l'assassinat de nombreux médecins pro-choix. La domination masculine est toujours bien ancrée dans les mentalités, y compris dans le milieu de la boxe féminine auquel Oates consacre des pages parmi les plus puissantes et émouvantes du roman. La romancière s'intéresse en effet avant tout aux personnages féminins, à la façon dont le drame affecte les épouses et les filles. On retrouve son talent et sa grande finesse psychologique à décrire des adolescents exposés à la cruauté et à l'ignorance, l'une des filles payant pour le crime de son père, l'autre pour les convictions du sien, toutes deux condamnées par le poids de l'héritage familial. Oates dénonce aussi le prosélytisme de certains médias et prédicateurs qui encouragent le fondamentalisme et la haine, et montre comment s'opère la manipulation d'un homme vulnérable et misogyne. Enfin, parmi les qualités de ce roman dense et ambitieux, il y a ce réquisitoire terrible contre la peine capitale lors de passages éprouvants sur le couloir de la mort, et une fin particulièrement poignante.
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Miss Islande

Quand on s'appelle Hekla, du nom d'un volcan, on est voué à un grand destin. Et ce que souhaite avant tout la jeune héroïne de Miss Islande, c'est écrire. Mais nous sommes en 1963, et Hekla se heurte au regard des hommes. Ils ne voient que sa beauté et préféreraient la voir concourir pour Miss Islande plutôt que de lui reconnaître un talent traditionnellement masculin sur cette île où les poètes sont sacrés. Quittant la ferme familiale pour Reykjavik, Hekla reste fidèle à son amie d'enfance, Ísey, qui tente vainement de maintenir sa flamme créatrice malgré sa vie de mère et d'épouse, et fidèle surtout à son ami Jón John, que son homosexualité condamne à choisir entre une vie de campagnes de pêches viriles et violentes ou l'exil. de son côté, se contentant de petits métiers, se liant avec un bibliothécaire poète, aimant mais conventionnel, Hekla ne cède rien à son désir d'écrire malgré l'époque qui l'entrave. On retrouve avec plaisir l'écriture délicate d'Auður Ava Ólafsdóttir dans ce roman plus militant que ses précédents, qui traite avec une évidence marquante de la force de la littérature et avec une précision clinique, des obstacles qu'elle doit surmonter. Son écriture limpide, très bien traduite, nous replonge dans cette Islande rude et belle, où la tendresse et la beauté sont toujours présentes aux côtés de la violence ou de l'enfermement.
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Si le grain ne meurt

“Les Mémoires ne sont jamais qu'à demi sincères, si grand que soit le souci de vérité: tout est toujours plus compliqué qu'on ne le dit.” Sa vie et sa pensée sont certes compliquées - mais quand il décide d'écrire ses Mémoires, Gide ne s'embarrasse pas de faux-semblants. Construit en deux parties bien distinctes, Si le grain ne meurt révèle deux aspects de sa personnalité qui ne le montrent pas sous un très bon jour : d'abord en enfant ingrat à l'éveil intellectuel tardif, puis en compagnon de débauche d'Oscar Wilde, découvrant lors d'un voyage son attirance pour les jeunes garçons. Si cet aspect scandalise les contemporains de Gide - et continue de ternir, légitimement, son image, ses amants étant tout juste adolescents -, cette mise à nu complète est cependant passionnante pour qui veut cerner l'influence de la vie de Gide sur son oeuvre. de l'Immoraliste à la Porte étroite, de Paludes aux Faux-Monnayeurs, c'est toute la production romanesque de Gide que l'on retrouve par fragments, diffractée, dans ces mémoires de jeunesse qui restent un modèle du genre.
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Ma reine

Été 1965, en Provence. On ressent la chaleur de la garrigue et l'ennui de Shell, enfant unique d'un couple de garagistes. Mais Shell n'est pas un garçon comme les autres. Quand ses parents, démunis face à sa différence, décident de le mettre en pension, il n'a qu'une idée en tête, partir faire la guerre, car il a vu à la télévision que la guerre c'était loin. Il veut quitter ce lieu de son enfance où personne ne le comprend. C'est ainsi qu'une nuit, son baluchon sur le dos, Shell part découvrir le vaste monde, par delà les collines. Quand il rencontre une jeune fille qui va tout de suite le fasciner, il n'aspire plus qu'à une chose, rester pour toujours auprès de “sa reine”. Ce livre est l'histoire de la découverte du premier émoi amoureux, d'une rencontre entre deux enfants qui s'inventent leur propre monde. Grâce à son écriture poétique et à ses personnages très touchants, ce récit est un trésor à partager absolument !
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L'autre moitié du soleil

Dans le Nigeria des années 1960, Olanna, une jeune femme de bonne famille, tombe sous le charme d'Odenigbo, intellectuel engagé et idéaliste. Elle part s'installer chez son amant à Enogu, où elle coule des jours tranquilles, en compagnie du boy d'Odenigbo, Ugwu, 13 ans, qui a quitté la brousse pour venir se placer en ville. Sa soeur, Kaiene, gère les affaires familiales de son père, entre Port Harcourt et Lagos, et vit avec son amant anglais Richard, passionné d'art ibo... Jusqu'au début de la guerre et du massacre qui vise les Ibos, ethnie dont les deux femmes sont issues, qui conduira à la sécession de l'Etat du Biafra entre 1976 et 1979.
La voix de Chimamanda Ngozi Adichie se fait entendre de manière singulière dans cette superbe fresque familiale, avec comme toile de fond la Guerre du Biafra. C'est d'abord le récit de survivants, dont les destinées rejoignent celles de la Grande Histoire. Mais c'est aussi une histoire d'amour, de rencontres fortuites qui changent le cours d'une vie, de fidélité à ses idéaux, d'accointances avec le hasard, qui font toute la richesse de ce livre.
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Le mari de mon frère, Tome 1

Yaichi et sa petite fille Kana mènent une existence paisible jusqu'au jour où ils reçoivent une visite inattendue. Tout juste débarqué du Canada, le robuste Mike Flanagan n'est autre que le mari du frère jumeau de Yaichi, aujourd'hui décédé. Si Kana accepte avec enthousiasme cet oncle surprise venu d'Amérique, Yaichi se montre beaucoup plus réservé face à ce beau-frère homosexuel. le trio va pourtant vite s'apprivoiser, grâce à la pétillante Kana (qui ose toutes les questions) et à la tendre bienveillance des adultes. Chronique d'une famille presque comme les autres, le Mari de mon frère met la différence - culturelle, sociale, sexuelle - au coeur de son propos, et nous invite à l'accepter avec bonheur. On en ressort meilleurs, plus tolérants, plus attentifs et plus humains !
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Carmilla

Dans un château isolé de Styrie, la jeune Laura s'ennuie d'une existence morne et solitaire en compagnie de son père. Un jour, ils croisent par hasard le chemin de Carmilla, une mystérieuse jeune fille victime d'un accident, qu'ils décident d'héberger le temps de sa convalescence. Bientôt, Laura se sent irrésistiblement attirée par le charme vénéneux de Carmilla, qui l'abreuve de déclarations ardentes. Alors que d'inquiétants phénomènes commencent à apparaître dans la campagne environnante, Laura est progressivement rongée par une étrange mélancolie, comme consumée par l'amour que lui voue Carmilla… Oscillant entre sensualité, érotisme et domination, Carmilla ose suggérer le désir intense entre deux femmes, contre la morale puritaine de l'époque. Métaphore envoûtante de l'amour interdit, ce récit gothique offre à la littérature son premier personnage de femme vampire, figure puissante et éternelle de l'entre-deux.


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Sa majesté des mouches

Où se situe la frontière entre la civilisation et le retour à une brutalité animale ? Cette question, centrale dans la plupart des récits inspirés par Robinson Crusoé, a rarement été aussi puissamment illustrée que dans Sa Majesté des mouches, du prix Nobel anglais William Golding. Ses héros, un groupe d'enfants rescapés d'un accident d'avion sur une île déserte, se trouvent vite scindés en deux, divisés entre les partisans du maintien de règles de vie et les adeptes de la loi du plus fort et de l'oisiveté.
Ce conflit, qui se cristallise autour de la question du feu et de la chasse, culmine dans des scènes où la terrible cruauté des enfants donne lieu à de nouveaux rituels, fondateurs d'une inquiétante société barbare. Scandant le récit de ce redoutable glissement par des images d'une force visuelle presque hallucinatoire, William Golding signe une robinsonnade particulièrement pessimiste, qui révèle ce que la nature humaine a de plus sombre.
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