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3.13/5 (sur 20 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1984
Biographie :

Loïc Hecht est journaliste indépendant, auteur et réalisateur.

Il a d'abord œuvré avec son blog Abstrait ≠ Concret à la fin de la décennie 2000. Par la suite, Loïc a été le rédacteur en chef de "Snatch Magazine" et a réalisé le documentaire multi-primé "Ceuta, douce prison" (2012).

En parallèle, depuis 2008, il a réalisé de nombreuses enquêtes et reportages pour Slate, ARTE, Les Inrocks, Owni, Vice, Le Mouv, ou encore Stylist.

Il collabore aujourd'hui régulièrement avec GQ et The Good Life pour lesquels il traite de technologie, de politique, de business et de culture.

En 2020, il sort son premier roman "Le Syndrome de Palo Alto" chez Léo Scheer, dans lequel il explique les bouleversements qu'entraînent les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) dans le réel, et notamment à San Francisco.

son site : https://www.loichecht.space/
Twitter : https://twitter.com/loichecht
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Bibliographie de Loïc Hecht   (1)Voir plus


Quelques questions à propos de Le Syndrome de Palo Alto  


27/02/2020

Comment aborder aujourd`hui la question des nouvelles technologies sans en faire un éloge béat, ou au contraire une critique systématique ? Loïc Hecht a peut-être trouvé la parade à travers son premier roman, une fiction "à l`américaine" très dense et intelligente à propos des GAFAM. A travers quelques personnages (Luz la cam-girl, Marc l`ex start-upper, Anton le journaliste aux dents longues), il décrit l`impact sur le réel de ces entreprises du virtuel, notamment à San Francisco. Ou comment ce "syndrome de Palo Alto", qui nous transforme en utilisateurs dépendants aux nouvelles technologies, s`impose à nous au quotidien. Voici une interview de l`auteur pour plonger dans ce maillage numérique et ses effets.

Dans ce premier roman très dense, vous vous attaquez à un sujet ultra contemporain : l’impact délétère des GAFAM, et plus généralement des nouvelles technologies, sur nos vies et les espaces que nous habitons. Quelle a été la genèse de ce livre, et votre parcours d’auteur de son écriture jusqu’à sa publication ?

Je suis devenu journaliste dans la seconde moitié des années 2000, à un moment où le numérique commençait à mordre dans tous les compartiments de nos vies. Nous étions alors à l’apogée de l’époque des blogs, au cœur d’une révolution : le Web 2.0. Piliers de cette grand-messe participative, les blogs étaient un moyen d’expression incontournable. Autofiction, politique, cuisine, musique, web marketing, humour potache… tout le monde avait tout à coup un truc à raconter. Et pour ceux qui n’avaient pas créé leur espace propre d’expression, il restait les commentaires. J’ai pris le train de l’écriture à ce moment-là, en créant un blog qui s’appelait Abstrait ? Concret. Comme pas mal de jeunes journalistes, j’étais fasciné par Hunter S. Thompson. La lecture de la compilation de ses lettres, Gonzo Highway en français, m’avait retourné la tête. J’ai donc tenté d’imaginer un dispositif qui s’inscrive dans cette veine littéraire, et j’ai écrit un certain nombre d’articles expérientiels loufoques, empreints d’interactions humaines numériques : passer vingt-quatre heures devant la télé à live-blogguer, explorer les tréfonds sociologiques de Chatroulette en jouant différents rôles…

Puis, j’ai délaissé cette approche digital gonzo pour me frotter au réel et explorer les marges de notre monde. Je suis parti faire des reportages sur des paysans en Amazonie, des jeunes Islandais qui réinventaient leur société après un krach monumental, des migrants subsahariens à la dérive au nord de l’Afrique, des SDF qui se réintégraient en jouant au foot à New York, des scientifiques qui construisaient des trous pour enterrer des déchets nucléaires en Finlande, des archéologues à la petite semaine persuadés d’avoir découvert des pyramides en Bosnie, etc. Pour autant, je n’ai jamais perdu mon attrait pour la dimension cybernétique de notre monde. En parallèle, j’ai donc bossé sur des enquêtes faisant le trait d’union entre mon attrait pour les marges et la culture numérique. Je me suis immergé dans le porno français pour raconter l’histoire derrière le site le plus en vue de cette galaxie : Jacquie et Michel, je suis allé dans la Silicon Valley à la rencontre des figures transhumanistes qui voudraient rendre l’humain immortel, etc.



Et voilà qui nous amène à la genèse de ce roman. Courant 2014, dans le cadre de ma veille sur ces sujets, j’ai découvert l’existence d’un groupe d’activistes anti-tech à San Francisco. Cette poignée de jeunes gens sanglés dans des vêtements sombres, le visage dissimulé par des foulards, entravaient les navettes affrétées par les Google, Facebook, Microsoft, Apple, Yahoo, etc., pour convoyer leurs employés vers les bureaux de la Silicon Valley. Ils revendiquaient leurs actions avec des communiqués empruntant sa signature à un groupe fictif de terroristes luddites issu d’un roman de Thomas Pynchon : « The Counterforce ». Pendant plusieurs mois, la Counterforce multiplia les provocations. Blocages de bus à répétition, harcèlement de start-uppers devant chez eux pour dénoncer la hausse des loyers et les expulsions de locataires, demande de rançon à Google en échange d’un « cessez-le-feu » : chaque agissement du groupuscule dénonçait le poison que la Silicon Valley – en tant qu’industrie, courant idéologique et caste économique – supposait pour la mixité sociale de San Francisco. En novembre 2014, je suis parti là-bas, pour plusieurs semaines de travail préparatoire, sur les traces encore fumantes de la Counterforce. Ce voyage fut l’occasion d’une immersion dans cette réalité qui allait devenir le cadre géographique et idéologique du roman. J’ai traîné sur les lieux de travail et de vie de la Silicon Valley, je me suis entretenu avec des employés d’Uber, de Google, de Facebook, et aussi avec les journalistes Web qui avaient couvert cette affaire. J’ai exploré Berkeley, Oakland, Stanford, Palo Alto, Mountain View. Et j’ai convaincu ces hommes et ces femmes qui avaient fait trembler la Silicon Valley de me raconter leur lutte, de me montrer leur ville sous l’angle des luttes sociales. Et plutôt que de raconter cela dans un article ou un documentaire, je sentais que c’était le point de départ pour développer une histoire plus ambitieuse, avec plus de parti-pris personnels, en ayant la possibilité de me soustraire aux contraintes du journalisme pour aller vers une forme de récit plus subjective que jamais, en mettant en scène les tiraillements de ma génération face à l’utilisation de la technologie, mais en l’inscrivant dans un cadre narratif tout ce qu’il y avait de plus physique.

Avec ce livre, vous délaissez un temps le journalisme pour vous consacrer à une fiction. Etait-ce un défi pour vous en termes de style et de construction, de passer de l’un à l’autre – même si le texte est finalement assez hybride (intégrant notamment des interviews, SMS ou posts de blog) ?

Dans la mesure où ce texte entend questionner l’impact des technologies de l’information et de la communication sur nos vies, il me semblait important d’intégrer ces formes textuelles hybrides qui ont envahi notre quotidien. Sans se prétendre avant-gardiste, on trouve ainsi pêle-mêle des emails, des tweets, des DM, des publications Instagram ou Facebook, des SMS, des posts de blogs et des articles journalistiques donc, et même des commentaires Amazon ou Yelp, ou des extraits de fiches Wikipedia. Toutefois, l’idée n’était pas non plus de virer à la performance, j’en ai donc usé avec parcimonie, en gardant en tête que ça devait toujours être au service de l’histoire ou du propos. En terme de style et de construction, et par rapport au journalisme traditionnel, disons que le défi majeur était d’avoir une structure qui se tienne tout au long des quatre-cents pages du texte. Contrairement à certains auteurs qui écrivent au fil de la plume, j’ai avancé avec une structure assez précise en tête sur laquelle j’ai beaucoup travaillé en amont. Celle-ci a bien sûr bougé ensuite au gré de l’écriture – il y a parfois une sorte de mystique qui opère et qui fait dévier vos personnages du cheminement qu’on avait imaginé pour eux –, mais dans l’absolu, je dirais que ma pratique journalistique a été un atout en terme d’organisation.

Après, il convient de préciser que je viens d’une « paroisse » un peu particulière dans le journalisme en France. Pendant cinq ans, j’ai été le rédacteur en chef de Snatch, un magazine d’investigation culturelle et sociétale, au sein duquel on consacrait parfois plusieurs mois à des enquêtes, ce qui se traduisait ensuite par des articles particulièrement longs. Ça donne un bon cadre en termes de construction, de structure. Quant au style, là, on touche à quelque chose de l’ordre de l’intime, de la petite voix intérieure, qui transcende à mon sens complètement le format auquel on s’attaque. Que ce soit des posts de blogs à l’époque, des articles, ou ici un roman, j’ai toujours été habité par une envie de raconter des histoires, d’emmener les lecteurs dans des récits et des mondes dont ils ignoraient tout ou presque, avec une subjectivité et une excitation qui m’étaient propres, et que j’essaie de communiquer. La véritable différence, et elle est fondamentale, tient ici à la liberté que confère la fiction par rapport à tous les autres genres. On n’a plus à s’embarrasser de la véracité des faits, on est tout à coup le bâtisseur de la réalité dans son degré le plus personnel et poussé. C’est un sentiment extraordinaire. Toute la difficulté est de réussir à poser sur le papier un monde et des sentiments qui soient à la hauteur de ce que l’on ressent en son for intérieur.



Quelle est la part de documentation et la part d’invention/fiction dans ce livre ?

La part de documentation est assez monumentale. J’ai travaillé presque quatre ans à plein temps sur ce livre. Je voulais d’abord être aussi irréprochable et crédible que possible sur le cadre. J’ai donc fait deux séjours assez longs à San Francisco en amont et en aval de l’écriture du livre, pour passer du temps avec les populations décrites dans les livres, mais aussi pour peindre la Silicon Valley de la manière la plus réaliste qui soit. De manière à ce que mes personnages – qu’ils soient start-uppers ou activistes – soient crédibles, il a fallu là aussi beaucoup étudier. Et entre les essais sur comment « disrupter » un secteur économique et triompher avec sa start-up, et la critique philosophique de la technique, c’est un peu le grand-écart. Les périodes d’écriture ont souvent été entrecoupées de longs mois à ingérer de la matière et la digérer. Et puis, il y avait une veille quotidienne sur les évolutions dans l’univers de la tech et de la Silicon Valley. Armé de tout ça, j’ai donc pu composer un monde qui mordait beaucoup sur le nôtre, mais en le distordant parfois pour les besoins du livre, ou simplement mon propre plaisir. Certains des protagonistes du roman sont directement tirés du réel. D’autres en sont des émanations extrapolées. Cela instille un doute permanent. Est-ce bien réel ou pas se demande-t-on souvent en tant que lecteur. Nicolas Lefort, le passionnant libraire des Guetteurs de Vent à Paris, me confiait que cette confusion permanente entre le réel et fiction lui avait rappelé l’œuvre de James Ellroy qui raffole de ce procédé. Je n’y ai jamais pensé en écrivant, et forcément, c’est une comparaison appréciable. Toutefois, dans les grandes lignes, aussi hallucinant que cela puisse être, je dépeins un univers très fidèle à notre monde.

Et pourquoi avoir opté pour un roman plutôt qu’un essai sur ce sujet ?

À vrai dire, la question ne s’est jamais posée. Je voulais raconter le rapport de ma génération au numérique, cette relation d’otage consentant à la technologie, les tiraillements intimes et moraux que tout ce barda nous occasionne en permanence, les incertitudes dans lesquelles cela nous plonge. Un essai m’aurait certes permis de soulever ces points, d’émettre une critique en règle de la technique, de questionner la volonté politique des géants de la Silicon Valley, mais un tel bouquin aurait été dénué de toute ambition artistique, de toute nature romantique. Le roman me permettait aussi de me mettre un peu à distance, en investissant tout mon affect, mes doutes et même un certain nihilisme dans mes différents personnages. Par sa nature, par les interstices dans le réel et les instants suspendus que seule la littérature est capable d’offrir, c’était un moyen d’exposer une vision, et de raconter notre époque, en rompant avec la tyrannie de ce monde qui va à cent à l’heure.

Pour mettre en scène ce « syndrome de Palo Alto », soit notre dépendance volontaire à des technologies qui nous asservissent, vous optez pour une tragi-comédie « à l’américaine » avec les destins croisés de quelques personnages et un ton souvent cynique. Pourquoi cet attrait pour ce type de littérature ? Quelle est la force de la littérature américaine par rapport au roman français contemporain, selon vous ?

En partie par influence familiale, j’ai découvert la littérature en lisant des auteurs américains. Mes premiers grands souvenirs de lecture vers quinze ou seize ans, ce sont Le Postier de Charles Bukowski, Mon chien stupide  de John Fante, Sur la route de Jack Kerouac, et forcément, une chose en amenant une autre je me suis retrouvé à lire James Ellroy, Chuck Palahniuk, Philip K. Dick, Bret Easton Ellis, David Foster Wallace, Douglas Coupland ou Tom Wolfe. La grande force de ces auteurs, et en voyant tous ces noms côte-à-côte, ça saute aux yeux : ils ont en commun des obsessions ultra contemporaines, une vision politique du monde, dans sa globalité, et une volonté de la partager avec leurs lecteurs. Le Syndrome de Palo Alto s’inscrit dans cette dynamique-là.

La littérature française, pendant très longtemps ne m’a pas attiré. J’avais l’impression que c’était soit une sempiternelle réécriture de l’Histoire, si je caricature un peu, avec des histoires de guerre d’Algérie et de tirailleurs sénégalais, soit des bouquins avec des questionnements franco-français ou métaphysiques qui me passaient totalement au-dessus de la tête. À travers la littérature, j’avais envie d’évasion. Ce qui me faisait kiffer, c’était les aventures de George Orwell, d’Hunter S. Thompson, d’Edward Limonov, d’Henry Miller, de Curzio Malaparte, de Joseph Conrad… Des types qui écrivaient des textes interrogeant la condition humaine, mais en faisant voir du pays. Après, je dois tout de même noter une exception majeure. La découverte des premiers romans de Michel Houellebecq, vers mes vingt ans, a constitué un moment très important. Alors bien sûr, il y avait déjà des postures et des convictions contestables, mais en tant que romancier français, il avait cette particularité d’avoir une vision du monde, une lecture acérée de l’univers de l’entreprise, et des intuitions sociologiques qui viraient souvent à la prophétie historique. Et ça, vraiment, pour moi, du haut de mes maigres connaissance littéraires – je n’ai pas étudié ni la littérature, ni la philosophie – je trouvais ça révolutionnaire pour un auteur français. Ces dernières années, j’ai essayé de revenir sur mes a priori, j’ai pris la peine de me plonger un peu dans la littérature française contemporaine, et j’ai découvert des auteurs dont je trouve le travail formidable, en terme d’exploration de l’époque, de questionnement de la modernité, comme Tristan Garcia, Titiou Lecoq, Aurélien Bellanger, Alain Damasio, et dans une mesure différente, Emmanuel Carrère, ou David Dufresne par exemple.

A travers le personnage de Marc Klein, vous posez la question complexe des motivations menant au militantisme politique, voire à la lutte armée. Or vous semblez assez pessimiste quant à une éventuelle issue, un antidote (même violent) à ce « syndrome de Palo Alto ». Au-delà des utilisateurs ne pouvant s’en passer, les GAFAM ont-elles créé un monstre qu’elles ne contrôlent déjà plus ?

C’est une question à laquelle il n’est pas facile de répondre. Mais disons qu’un scandale comme Cambridge Analytica a démontré que Facebook avait engendré un système et une masse de données personnelles suffisamment critique et redoutable pour qu’elle soit retournée contre les utilisateurs, et serve carrément à les manipuler psychologiquement. Or, à aucun moment, les fondateurs de la plateforme n’avaient entrevu les failles, ni imaginé qu’un tel scénario puisse se produire. De la même façon, je note aussi qu’on assiste ces dernières années à des sorties médiatiques d’anciens employés de Facebook, Twitter, Google & co qui s’excusent d’avoir créé les outils qui ont piraté nos consciences et nos attentions, avec une inconséquence absolue. On entend l’un être désolé d’avoir inventé le bouton like ou la notification qui poppe en rouge, l’autre d’avoir créé le principe du refresh… Mais le mal est fait, et les conséquences bien réelles.



On imagine que vous avez pris pas mal de plaisir à écrire le personnage du journaliste Anton Faithful, étant vous-même « de la profession ». On pense notamment au portrait très sombre, mais tout à fait réaliste, du journalisme en ligne… Avez-vous traversé les mêmes expériences que lui en France ?

Comme je l’évoquais en filigrane, j’ai fait très tôt le choix d’une pratique de journalisme lente, en me consacrant à des sujets au long cours, généralement décorrélés de l’actu brûlante, ce qui a pu me préserver de certains travers. Toutefois, ça ne m’a pas empêché d’avoir eu une présence soutenue en ligne depuis la fin des années 2000. J’ai donc assisté et participé à l’émergence du webjournalisme, à l’apparition d’outils incontournables comme les réseaux sociaux et particulièrement Twitter, à la glorification des signatures, à la course au clic des médias, aux informations diffusées avant d’être vérifiées, etc. En ce sens, forcément, je dresse un tableau de spécialiste, nécessairement sombre. Toutefois pour le roman, j’ai aussi exploré les particularités du journalisme en ligne aux États-Unis. Ainsi, à travers The Order, qui est le média pour lequel le journaliste Anton Faithful travaille dans le livre, je me fais écho de la réalité Outre-Atlantique. Une fois leur fortune faite, un certain nombre de magnats de la tech ont reproduit un schéma classique de capitaine d’industrie, en se payant des médias pour asseoir une forme de soft power. Je pense à Jeff Bezos – le patron d’Amazon – qui a racheté le Washington Post, Pierre Omidyar – le fondateur d’eBay – qui a recruté la fine fleur du journalisme américain pour créer The Intercept, ou Chris Hughes – un des co-fondateurs de Facebook – qui avait racheté le magazine The New Republic. Bref, Anton Faithful et le journal pour lequel il bosse sont un parfait négatif de la réalité, pas totalement celle des journalistes Web en France. Mais on en est pas non plus très loin.


Quelques questions à propos de vos lectures

 

Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?

Il y en a beaucoup, évidemment. Mais s’il fallait n’en garder que trois qui ont à chaque fois provoqué une sorte d’urgence, je dirais Le bûcher des vanités de Tom Wolfe, Les particules élémentaires de Michel Houellebecq, et Gonzo Highway d’Hunter S. Thompson.

Quel est le livre que vous auriez rêvé d’écrire ?

Tous les livres de George Orwell, d’Hunter S. Thompson, et de Philip K. Dick.

Quelle est votre première grande découverte littéraire ?

Tout Charles Bukowski à quinze ou seize ans. Je me souviens aussi d’avoir été bouleversé, à onze ou douze ans par Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes. Je ne l’ai jamais relu, mais je me souviens d’une grande émotion, d’un vrai trouble. Et puis, Être sans destin d’Imre Kertész, lu assez jeune également, qui résonnait avec mon histoire familiale, et laissait entrevoir l’horreur et, en même temps, brillait par sa résilience.

Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Je relis rarement les livres. Mais j’avais un immense souvenir de Cantique de la racaille, de Vincent Ravalec, que j’avais lu assez jeune, là encore vers quinze ans, et qui m’avait beaucoup marqué. Alors, par curiosité, je l’ai relu il y a quelques semaines. Le souvenir n’a pas été entaché. Au contraire. C’est un ouvrage avec une langue exceptionnelle, une immersion dans les viscères du Paris du début des années 1990, à une époque où personne n`avait de smartphone et où on pouvait se faire beaucoup de fric en revendant des magnétoscopes high-tech tombés du camion. C’est aussi une sacrée descente aux enfers. Un grand roman français.

Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

Sans aller jusqu’à avoir honte, il y en a beaucoup pour lesquels je n’ai pas encore trouvé la force jusque-là : 2666 de Roberto Bolaño, L`infinie comédie de David Foster Wallace, Neuromancien de William Gibson, L`arc-en-ciel de la gravité de Thomas Pynchon…

Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?

Ce ne sont pas des perles méconnues, mais en ces temps où notre rapport au monde est plus chahuté que jamais, où l’on ne semble plus avoir prise sur le temps, où la réalité semble continuellement dépasser la fiction, il est fondamental de lire ou relire Philip K. Dick qui a passé sa vie à écrire sur ces questions. Et comme on ne peut pas tout lire, c’est pas mal de commencer avec Substance mort, Le maître du haut château et Ubik.

Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?

Joker ! En vrai, là comme ça, il n’y a pas un livre qui me vienne.

Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

« La réalité c’est ce qui continue d’exister quand on cesse d’y croire. » Philip K. Dick

Et en ce moment que lisez-vous ?

J’ai fini il y a quelques temps La meilleure part des hommes de Tristan Garcia. Le premier roman absolument extraordinaire de cet auteur qui l’est tout autant. Comme Cantique de la racaille, c’est une plongée dans la France des années 1990, dans le monde pré-11 septembre, mais ici, la focale est placée sur ce sida qui ravageait les corps et hantait les esprits, au point de déchirer la société. Et quitte à dresser une trilogie des 90’s, j’ai aussi beaucoup aimé Le Rugissant de Raphaël Malkin, journaliste et ami, avec qui j’assurais la rédaction en chef de Snatch. Le Rugissant est un récit, une non-fiction, qui raconte la vie mouvementée et la mort violente de Rud Lion, un type à la fois musicien sensible et voyou sans vergogne qui a hanté les studios d’enregistrement et le bitume parisiens, une plongée très noire, mais paradoxalement empreinte d’un profond romantisme dans les sphères de Paris et de la banlieue, au moment où émergeait le hip-hop.

Découvrez Le Syndrome de Palo Alto de Loïc Hecht aux éditions Léo Scheer



Entretien réalisé par Nicolas Hecht


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Depuis l’histoire de cette vente de parts qu’il avait plus vécue
comme un viol que comme une cession consentante, toute son énergie n’était tendue que vers une chose : prendre sa revanche,rétablir l’ordre des choses. Tout accaparé qu’il était à chercher le meilleur moyen, il lui arrivait quand même de se changer les idées. L’un de ses passe-temps favoris consistait à passer une à deux heures quotidiennes sur CAM4. Klein possédait un compte « Gold ». Ça lui procurait tout un tas d’avantages par rapport à l’utilisateur lambda. En plus des vingt dollars mensuels d’abonnement, il dépensait chaque semaine entre cinq cents et mille dollars en tips et private.
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